Dossier: OEcuménisme
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OEcuménisme d’hier et d’aujourd’hui

Constatation

Notre vingtième siècle est aussi le siècle de l’ocuménisme: les « chrétiens » récitent ensemble le Notre Père ocuménique, utilisent la Traduction Ocuménique de la Bible, la T.O.B., participent à des rencontres ocuméniques, assistent à des mariages ocuméniques, célèbrent des « baptêmes » ocuméniques… Une vraie hantise!

Une question

Il m’arrive fréquemment de commencer mes cours ou mes conférences sur l’ocuménisme par la question: « Ce mot se trouve-t-il dans la Bible? » Après quelques moments de silence, on entend un timide « oui » auquel répond un véhément « non ». A l’auditoire impatient, je réponds simplement par l’affirmative. En effet, le mot grec « oikoumenê » se trouve effectivement plusieurs fois dans le texte sacré des Ecritures: Mat 24.14, Luc 2.1 et Apoc 3.10. Il est traduit dans nos versions par le monde entier ou toute la terre. C’est dans ce sens que les premiers conciles de l’Eglise sont ocuméniques.

Que de divisions !

Sans entrer dans les détails de l’Histoire de l’Eglise, nous devons avouer que souvent ceux qui se réclament du Christ sont à l’origine de nombreuses divisions. Dans les premiers siècles, on assiste aux querelles trinitaires (Dieu est-il unique en trois personnes?), puis christologiques (Jésus est-il Dieu, est-il de nature divine ou humaine, possède-t-il les deux natures?). Plus tard vont naître des divergences quant à la succession apostolique, au baptême, à l’autorité dans l’Eglise (Bible ou tradition?).

Deux dates sont à retenir: 1054 voit la chrétienté se diviser en deux blocs, l’Occident reconnaissant l’Eglise catholique Romaine, l’Orient l’Eglise Orthodoxe; 1517 marque le début de la Réformation, berceau des Eglises Protestantes.

Tableau actuel

Avec tristesse, nous devons constater que les « chrétiens » sont divisés et appartiennent à des organisations fort variées.

Un bref aperçu.
Ils sont:
-catholique romains sous la houlette du pape qui se veut successeur de l’apôtre Pierre; leur Eglise est hiérarchisée et convaincue d’être la seule véritable en dehors de laquelle on ne saurait être vraiment sauvé, elle se croit investie de la mission d’établir le Royaume de Dieu sur la terre;
-catholiques indépendants refusant l’autorité papale, tout en célébrant la messe et les sacrements selon le rite romain;
-vieux-catholiques en communion avec l’archevêque d’Utrecht. Ils n’acceptent pas le dogme de l’infaillibilité du pape promulgué en 1870;
-orthodoxes répartis en plusieurs Eglises autocéphales, en communion avec le patriarche de Constantinople; connus pour la vénération des icônes;
-orthodoxes indépendants: coptes, arméniens, syriens, nestoriens, maronites, ruthènes, melkites…
-uniates gardant jalousement leurs particularités liturgiques tout en acceptant l’autorité du pape;
-anglicans dont la foi est résumée dans le « quadrilatère de Lambeth » (autorité des Ecritures, autorité des symboles des Apôtres et de Nicée, pratique des deux sacrements du baptême et de la sainte cène, Soumission à un épiscopat historique). Ils sont en communion avec l’archevêque de Cantorbéry , mais leur chef est la Reine d’Angleterre!
-luthériens qui veulent suivre la Confession d’Augsburg de 1530. Ils gardent deux sacrements et un certain faste dans le culte;
-réformés ou presbytériens ou calvinistes, pratiquant un culte plus dépouillé. Ils ont une organisation démocratique ou presbytérienne synodale;
-baptistes, revenus à la pratique biblique du baptême par immersion des seuls convertis. Leurs églises sont congrégationalistes;
-méthodistes issus du puissant réveil dont l’instrument fut John Wesley, en Angleterre au 18e siècle;
-autres, car la liste pourrait bien s’allonger avec les mennonites, les darbystes, les frères larges, les salutistes, les quakers, les moraves, les pentecôtistes Le tableau se complique encore lorsque l’on sait que, dans chacune de ces dénominations, vous avez des charismatiques et des non-charismatiques!

Efforts ocuméniques du passé en France et ailleurs

Le Colloque de Poissy (1561) en France n’arrive pas à une entente entre catholiques et réformés. Le Synode de Tonneins (1614) accepte le principe d’une réconciliation entre les différentes branches de la chrétienté.

Dès 1804, la Société Biblique Britannique et Etrangère collabore avec différentes Eglises de la Réforme.

Le « Mercure de France » publie un article percutant, invitant Napoléon 1er (!) à réunir tous les cultes… dans l’Eglise Catholique, et ceci en 1806.

En 1822, des chrétiens d’origines ecclésiastiques diverses, créent la Société des Missions Evangéliques de Paris.
Vingt-deux ans plus tard, George Williams veut mobiliser des jeunes appartenant à différentes Eglises: ce seront les Unions Chrétiennes de Jeunes Gens.

Par la suite, nous sommes témoins de deux phénomènes interprétés comme des signes d’unité: le regroupement d’églises de la même dénomination, d’une part; une collaboration plus étroite entre églises différentes, d’autre part.

Quelques dates marquantes:
1855: Alliance Universelle des Unions Chrétiennes de jeunes Gens
1867: Synode pan-anglican et première Conférence de Lambeth
1868: Fédération Luthérienne Mondiale
1875: Alliance Réformée Mondiale
1881: Conseil Méthodiste International
1889: Conférence des évêques vieux-catholiques
1891: Conseil Congrégationaliste International
1892: Conférence de Grindelwald (Suisse) pour les anglicans et non anglicans
1905: Alliance Baptiste Mondiale

Naissance de l’Alliance Evangélique

Dans la liste précédente, une date a été (volontairement) omise, car elle mérite une mention spéciale.

A Londres, en 1846, venant de 52 églises différentes et de 12 nations, 921 chrétiens se retrouvent pour fonder l’Alliance Evangélique. Ces délégués veulent manifester l’unité en Jésus-Christ. Il ne faut plus que les chrétiens se disputent alors que le monde court à sa perdition. A cette rencontre de Londres, l’adjectif « ocuménique » (dans le sens actuel) est utilisé pour la première fois.

Fusions et Fédérations

Désormais de plus en plus, une forme d’ocuménisme vise une fusion pure et simple de dénominations proches. En Allemagne, des églises Luthériennes et Réformées fusionnent en Eglises unies. En France, c’est en 1938, le remembrement de l’Eglise Réformée .regroupant des réformés libéraux, des réformés évangéliques, quelques libristes et quelques méthodistes. Au Canada, les méthodistes, congrégationalistes et presbytériens formeront l’Eglise Unie du Canada. En Inde, on verra en 1947, la fusion d’églises de type épiscopal et d’églises de type presbytérien synodal: ce sera la célèbre « Eglise de l’Inde du Sud ».

Dans de nombreux pays, les Eglises issues de la Réforme se fédéreront et nous voyons naître les Fédérations Protestantes, en France, en Suisse, en Belgique et ailleurs.

Démarrage officiel

Les historiens de l’Eglise sont unanimes: l’ocuménisme officiel à l’échelle mondiale est mis sur rail en 1910 par la grande Conférence missionnaire d’Edimbourg. Cent soixante sociétés missionnaires décident de coordonner leurs efforts en vue de l’évangélisation du monde, sans esprit de concurrence. Le Conseil International des Missions est né.

Deux autres mouvements parallèles voient le jour:
1. Vie et Action: il faut agir ensemble même si doctrinalement l’accord n’est pas réalisable; c’est un christianisme pratique sans doctrine claire. Conférences à Stockholm en 1925 et à Oxford en 1937.
2. Foi et Constitution: il faut confronter les doctrines, en insistant surtout sur tout ce qui unit. Conférences à Lausanne en 1927 et à Edimbourg en 1937.

Un Comité de 14 membres, durant une rencontre à Utrecht en 1938, propose la fusion de Vie et Action et de Foi et Constitution pour former le Conseil Ocuménique des Eglises. La Seconde Guerre mondiale retardera la réalisation de ce désir.

Le Conseil Ocuménique des Eglises

Il voit le jour le 22 août 1947, avec son siège à Genève, 150 Rte de Femey. Voyons rapidement ses grandes assemblées:
1. Amsterdam (1948): des délégués de 147 Eglises de 44 pays se rencontrent pendant 15 jours. Ils élaborent une (sommaire) Confession de foi.
2. Evanston (1954): les quelques 1000 délégués acceptent 16 nouvelles églises et proposent une espérance chrétienne dans le monde d’aujou d’hui.
3. New-Delhi (1961): les églises membres se montent à 198; pour la première fois l’Eglise Catholique a mandaté cinq observateurs. Le Conseil International des Missions est intégré au Conseil Ocuménique, plusieurs Eglises orthodoxes (dont celle de Russie) et pentecôtistes (du Chili) sont reçues comme membres, la nouvelle Confession de foi est acceptée par 383 oui, 36 non et 7 abstentions.
4. Uppsala (1968): cette Assemblée dont le thème est pourtant: Voici, je fais toutes choses nouvelles, s’est penchée plutôt sur le social; la spiritualité est en baisse. Les 235 Eglises membres affichent de profonds désaccords, ce qui a fait dire à un journaliste, et non sans humour: « A Uppsala, ce fut une vraie uppsalade! »
5. Nairobi (1975): pas de faits marquants à signaler.
6. Vancouver (1983): le Conseil Ocuménique prétend représenter 400 millions de chrétiens, il souhaite organiser des rencontres avec des juifs, des bouddhistes, des hindous, des musulmans, des marxistes… et qui encore?
7. Canberra (1991): ce fut une rencontre plutôt mouvementée, avec plusieurs accents nettement syncrétistes.

Et l’Eglise Catholique?

L’encyclique « Mortalium Animos » du pape Pie XI, en 1928, condamne toute participation des catholiques au mouvement ocuménique.

Quatre ans plus tard, l’abbé Couturier de Lyon propose une semaine de prière pour l’unité des chrétiens pour chaque année, du 18 au 25 janvier. Afin de permettre la participation de non catholiques à cette semaine de prière, l’abbé Couturier précise qu’il s’agit de l’unité « telle que Dieu la veut et par les moyens qu’il voudra ».

En 1962, le pape Jean XXIII convoque le Concile Vatican II: 17 églises non romaines (des orthodoxes russes aux unitariens universalistes) sont invitées comme observatrices.

Trois ans après, un cardinal proche du pape visite le siège du Cnseil Ocuménique. Un groupe de travail se forme avec 6 membres de l’Eglise Catholique et 8 du Conseil Ocuménique.

En 1969, le pape Paul VI en personne rend visite au Conseil Ocuménique à Genève.

Les changements depuis Vatican II

Beaucoup pensent que l’Eglise Catholique s’est profondément transformée à la suite de ce concile. Il n’en est rien en ce qui concerne le fond, la doctrine. Comment une institution millénaire qui se veut infaillible peut-elle changer? Il est vrai, beaucoup de changements mineurs, de forme, sont à noter. On a quand même travaillé à Vatican II: 521 votes, 6000 interventions, 16 textes publiés.
Depuis Vatican II, les protestants ne sont plus des hérétiques, mais des frères séparés; la messe n’est plus célébrée en latin, mais en français; le prêtre ne vous tourne plus le dos pendant les célébrations, mais vous regarde en face; les suicidés et les divorcés peuvent à nouveau être enterrés par l’Eglise…

Mais si les protestants sont à présent des frères séparés, ils doivent quand même revenir dans le giron de la Sainte Mère l’Eglise pour jouir pleinement du salut.

Une messe célébrée en latin ou en français est toujours une messe où s’effectue la transsubstantiation. Une erreur dite en latin ou une erreur dite en français est toujours une erreur.

Que le prêtre vous tourne le dos ou qu’il vous regarde en face, il est toujours, pour l’Eglise romaine, l’intermédiaire indispensable entre Dieu et l’homme, aussi important que Jésus-Christ.

Critiques des Evangéliques

L’ocuménisme est séduisant et toute âme sentimentale est touchée par cette unité factice. Mais ne voyons-nous pas dans l’ocuménisme de nombreux compromis, une théologie flottante, plutôt sociale, humanitaire, politique, humaniste, pro-romaine et même jusqu’à ces dernières années, communisante?

Les ocuménisants officiels ont-ils vraiment défini, Bible en main, l’unité, l’Eglise, le chrétien ? Parle-t-on de conversion, de nouvelle naissance indispensable? La collaboration entre multitudinistes (qui croient que tous sont chrétiens par le baptême des nourrissons) et professants (ne sont chrétiens que ceux qui professent une foi personnelle au Christ ressuscité) est-elle vraiment possible? Ne voyons-nous pas des « théologiens » de ce mouvement critiquer des textes bibliques, leur refusant la pleine inspiration et l’autorité souveraine? Peut-on encore parler d’évangélisation si tout le monde « est chrétien »? Et que dire des aides financières à des mouvements révolutionnaires? Et de la théologie de la libération de l’oppresseur, et non du péché? Peut-on unir croyants et incroyants? L’unité est-elle à fabriquer, ou à recevoir comme un don de Dieu? Attention, mes amis, danger! Dans l’Eglise, on n’agit pas comme dans le monde; l’Eglise du Seigneur n’est pas un bric-à-brac, un capharnaüm religieux.

Plaire à Dieu ou plaire aux hommes?

Cette alternative, si chère à l’apôtre Paul (Gal 1.10), reste toujours d’actualité, plus que jamais aujourd’hui. L’ocuménisme est à la mode et il est bien difficile de ne pas être à la mode. L’ocuménisme est le chemin facile et beaucoup le préfèrent. Si vous n’êtes pas pour cet ocuménisme, vous êtes taxés de sectaire (ceci est également à la mode), de borné, de rétrograde, d’intégriste. Plaire à Dieu, c’est faire des choix. Le message d’Elie (1 Rois 18.21) reste bien actuel. Plaire à Dieu, c’est examiner les Ecritures pour voir si ce qu’on nous dit est exact; plaire à Dieu c’est s’éloigner de toute organisation qui n’a pas de base solide, fondée sur la Bible. Oui, la majorité des « chrétiens » prône l’ocuménisme, la minorité le récuse. Il est toujours difficile d’être dans le camp minoritaire.

N’y a-t-il pas un bon ocuménisme?

Se basant sur la prière de Jésus, placée dans le contexte de Jean 17, un peu partout dans le monde, des chrétiens évangéliques veulent manifester l’unité du corps de Christ.

Face au Conseil Ocuménique est né, également à Amsterdam, et quelques jours avant celui-ci, le Conseil International d’Eglises Chrétiennes. Nous pouvons souscrire à sa doctrine, à ses précautions, à sa rigueur, mais pas toujours à ses agissements extrémistes.

Et l’Association des Eglises de Professants, et la Fédération Evangélique de France, et bien d’autres, voient des chrétiens différents vivre en authentique unité chrétienne.

Si nous avons en vue la gloire de Dieu et si le Seigneur nous inonde de sa vérité et de son amour, alors allons-y, soyons ocuméniques (de la bonne manière). Il y a plusieurs demeures dans la maison du Père…

Une proposition pratique

A mon (humble) avis, toute collaboration ocuménique est possible si nous professons les 6 points de la théologie du B.I.C.E.P.S. Il faut se mettre d’accord sur:
1. la même Bibliologie: la doctrine de la Bible, reconnaissant son inspiration plénière et son autorité souveraine;
2. une parfaite Intégrité, avant, pendant et après chaque effort commun;
3. la même Christologie: la doctrine du Christ qui affirme sa pleine divinité et sa pleine humanité;
4. la même Ecclésiologie: la doctrine de l’Eglise dont sont membres les seuls convertis;
5. la même Pneumatologie: la doctrine du Saint-Esprit donné à tous les chrétiens, à leur nouvelle naissance;
6. la même Sotériologie: la doctrine du salut, nous sommes sauvés par grâce, par le moyen de la foi personnelle, seule, et non par les ouvres;

Nous vivons dans une fin de siècle passionnante, mais difficile. Heureusement Dieu veille sur son Eglise, et rien ne peut la détruire. Que nous soyons toujours davantage unis au vrai Cep pour porter les fruits de l’Esprit, dont l’amour…

G. D.
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