Dossier: Les Psaumes
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150 poèmes en un livre

Le Livre des Psaumes est le livre des superlatifs : c’est le livre le plus long du canon inspiré, avec le plus grand nombre de chapitres, avec le chapitre le plus long (le Psaume 119) et le plus court (le Psaume 117) de la Bible ; c’est le livre qui contient le verset central de la Bible (118.7) ; c’est le livre auquel le plus d’auteurs ont contribué ; c’est le livre le plus varié, etc. Alors comment aborder un tel monument ? Modestement, en donnant quelques éléments synthétiques sur l’ensemble du livre puis en essayant de tracer quelques lignes directrices.

150 POEMES

Le titre du livre

En hébreu, les Psaumes s’appellent sepher tehillim, qu’on peut traduire par « livre de louanges » ou, tout simplement « louanges ». La Septante grecque, puis la Vulgate latine, ont choisi le mot qui a donné notre titre actuel, psalmos, c’est-à-dire « livre de poèmes faits pour être chantés avec un accompagnement d’instruments à cordes » ; significativement, ce livre qui est au « cœur » de la Bible va nous parler au cœur, en en faisant vibrer la corde sensible.
Ces deux titres nous indiquent déjà deux des thèmes essentiels des Psaumes :
– c’est un livre de louange,
– c’est un livre de sentiments.
Le premier et le dernier verset reprennent ces deux thèmes majeur : « Heureux l’homme qui… » (1.1) ; « Que tout ce qui respire loue l’Éternel ! Louez l’Éternel ! » (150.6)

La structure

Les 150 Psaumes sont divisés en 5 « livres », tous terminés par une louange et une bénédiction finale, en forme de refrain (41.13 ; 72.18,19 ; 89.52 ; 106.48 ; 150).
Cette division en 5 livres figure dans le texte hébraïque original. Le premier — ou les premiers — Psaume(s) d’un livre ont une importance particulière, car ils donnent le thème général du livre.
Les Psaumes sont le plus long livre de la Bible — et de beaucoup1. Cette diversité est en soit une richesse et une difficulté. Tous les Psaumes ne me parleront pas de la même manière ou au même moment, mais il y en aura toujours un pour m’interpeler. Par ailleurs, il peut paraître ardu d’étudier à la suite tous les 150 Psaumes ; aussi est-ce un livre auquel on gagne à revenir fréquemment.

Le style

Dieu a permis que les Psaumes soient écrits en un style poétique plus facilement traduisible que la poésie française, par exemple, car il repose davantage sur les mots eux-mêmes et leur sens que sur les sons2.
Ce style poétique a une force particulière. Le langage figuratif permet de transmettre de façon condensée des images, des symboles, des figures, des émotions, dans une large variété de sens. Laissons « chanter » ce langage, laissons-nous emporter par ces images. Si nous comprenons si peu les Psaumes, c’est peut-être que nous sommes trop intellectuels ! La contrepartie est que nous trouverons davantage l’expression des sentiments de l’âme du fidèle que des exposés doctrinaux3.
Enfin n’oublions jamais que les Psaumes étaient chantés. Ils ont d’ailleurs été une source majeure de l’hymnologie chrétienne au cours des siècles. Alors nous aussi chantons les Psaumes !

L’ordre des Psaumes

Comme pour d’autres livres (cf. les Proverbes, Ecc 12.9), l’ordre des Psaumes est souvent difficile à saisir. Pour autant, cet ordre est scripturaire : en effet, quand Paul cite le Ps 2 en Actes 13.33, il dit explicitement : « selon ce qui est écrit dans le Psaume deuxième ».
L’ordre est rendu visible par plusieurs indices :
– Parfois, plusieurs Psaumes consécutifs ont le même auteur (ex. : 42 à 49).
– Une suite de Psaumes a le même titre, comme les Cantiques des Degrés (120 à 134).
– Un même thème peut se discerner pour relier plusieurs Psaumes (ex. : le Messie souffrant et glorieux dans les Ps 15 à 24, la louange universelle dans les Ps 146 à 150, etc.).

La structure d’un Psaume

– Le (ou les) premier(s) verset(s) d’un Psaume est important. Il donne souvent soit le thème général du Psaume (ex. : 73.1), soit la conclusion du développement (ex. : 40.1-3).
– La division en alinéas dans les traductions courantes n’est pas inspirée, mais elle éclaire généralement sur la succession des sujets ou des interlocuteurs.
– Saisir la succession des interlocuteurs est primordiale pour une bonne compréhension (ex. : 21). Ils peuvent être variés : Dieu lui-même (ex. : 50.7-13), le Messie (ex. : 22), le Saint Esprit (ex. : 95.7-11, voir Héb 3.7), le fidèle individuellement, les fidèles collectivement, etc. Mais il est à noter que les méchants, s’ils sont cités, ne parlent jamais directement.

Les auteurs

7 auteurs différents sont mentionnés pour 102 Psaumes. Tous (sauf Moïse) appartiennent à la même période de l’établissement de la royauté davidique. David lui-même est l’auteur de 75 Psaumes4.
Mais l’auteur réel du Psautier reste l’Esprit de Dieu (2 Sam 23.2 ; Marc 12.36) : ces paroles d’hommes sont aussi paroles de Dieu et ces descriptions inspirées d’expériences subjectives d’un individu prennent valeur universelle.

Les 4 portées des Psaumes

En simplifiant, on peut distinguer quatre portées différentes dans les Psaumes.

– 1. La portée historique

Les Psaumes éclairent les livres historiques de Samuel et des Chroniques, en montrant quels étaient les sentiments et les exercices de cœur de David dans les situations qu’il traversait et que ces livres historiques racontent5. Mais, au-delà de David et de ses circonstances propres, la vie de cet homme de foi nous est en instruction (1 Cor 10.11,13).
Ainsi la première lecture consiste à lire les Psaumes dans leur sens et leur portée historique, avec leur auteur et avec le peuple d’Israël.

– 2. La portée prophétique

Les Psaumes éclairent les prophètes : les prophètes s’adressent à l’homme de la part de Dieu (2 Pi 1.19-21), tandis que dans les Psaumes c’est l’homme qui s’adresse à Dieu. Tous les versets des Psaumes ne se sont pas encore accomplis : le règne final et complet de Dieu est encore à venir.
Aussi la deuxième lecture consiste-t-elle à lire les Psaumes avec le reste fidèle futur qui attendra le Messie glorieux.

– 3. La portée typologique

Les Psaumes éclairent les Évangiles : ceux-ci ne développent pas les sentiments du Seigneur Jésus pendant sa vie sur la terre ; Dieu a réservé ce trésor aux croyants qui, par la foi, les discernent dans ces expressions anticipatrices des Psaumes (1 Pi 1.10-12).
Ainsi la troisième lecture consiste-t-elle à lire les Psaumes avec Jésus, en cherchant à l’y trouver. N’oublions pas également que notre Seigneur, en Juif pieux, a maintes fois prié les Psaumes. Certaines paroles (en particulier celles où le psalmiste expose son intégrité morale — ex. : 26.1 ; 17.3) ne prennent leur sens complet que dans la bouche de l’Homme parfait.

– 4. La portée morale

Les Psaumes éclairent enfin notre vie quotidienne : « Tout ce qui a été écrit d’avance l’a été pour notre instruction, afin que, par la patience et par la consolation que donnent les Écritures, nous possédions l’espérance. » (Rom. 15. 4). Le Psautier a été, est et restera une source d’édification majeure pour chaque chrétien (Col 3.16)
Et c’est avant tout cette quatrième lecture des Psaumes, avec mes frères et sœurs et pour moi-même aujourd’hui, que nous souhaitons encourager !
Naturellement, selon le thème du Psaume, les quatre « notes » indiquées ci-dessus joueront plus ou moins fort — mais il est rare qu’elles n’y soient pas présentes, sous une forme ou une autre.

UN LIVRE DE LOUANGE

Qui loue ?

– En premier lieu, Christ, auquel plusieurs expressions de louange sont appliquées très directement par les auteurs du N.T. (ex. : 22.22, cité en Héb 2.12)
– Le fidèle personnellement et les fidèles collectivement : voilà deux aspects de notre louange à garder en équilibre. Nous louons en église, lors du culte communautaire, mais encourageons-nous à louer également dans notre culte personnel.
– Les anges (103.20 ; 148.2), la création, la nature (65.13 ; 96.11), toutes les œuvres de Dieu (103.22 ; 145.10) — tout concourt à la louange divine.

Pourquoi louer ?

Tout d’abord parce que Dieu attend notre louange. Une des caractéristiques des Psaumes est que le psalmiste motive sa louange : il trouve des sujets concrets pour alimenter son adoration, et en premier lieu la bonté de son Dieu (136 ; 107).
Voici quelques sujets de louange dans les Psaumes : la nature de Dieu, ses œuvres, son salut, sa gloire, sa parole, ses délivrances au quotidien, etc.
Peut-être parfois nous sentons-nous un peu « secs », nous manquons de thèmes de louange ; alors ouvrons les Psaumes ! Et, à la suite de David, disons-nous : « Mon âme, bénis l’Éternel, et n’oublie aucun de ses bienfaits. » (103.2)

Comment louer ?

Le plus important est la condition morale de l’adorateur (ex. : 51). Les formes, quant à elles, peuvent être diverses, avec ou sans instruments de musique. Aussi n’y attachons pas plus d’importance qu’elles n’en méritent.
Les Psaumes encouragent aussi à un « cantique nouveau » (33.3 ; 40.3 ; 96.1 ; 98.1 ; 144.9 ; 149.1). Sachons renouveler notre louange en trouvant des thèmes ou des manières de nous adresser à Dieu qui ne se contentent pas de ressasser indéfiniment les mêmes expressions…
La spontanéité a sa part, tout autant qu’une préparation soigneuse (45.1). La fréquence ne saurait jamais être trop grande (« chaque jour », 145.2). Aussi sachons nous encourager personnellement (« Mon âme, bénis l’Éternel ! », 104.1,35) et mutuellement (« Venez, chantons à haute voix à l’Éternel ! », 95.1).

Les Psaumes et la louange de l’Église

Loin d’être une forme surannée réservée aux fidèles de l’ancienne alliance, les Psaumes ont immédiatement fait partie intégrante du culte et de l’édification de l’Église apostolique (1 Cor 14.26 ; Éph 5.19 ; Col 3.16).
Plus tard, au cours de l’histoire de l’Église, ils ont été la source renouvelée de la louange des fidèles. La Réforme (avec entre autres Clément Marot) leur a accordé une place de choix. On observe une certaine régression de leur usage dans l’hymnologie protestante du xixe siècle, avant un « retour en grâce » récent. Mais, pour plusieurs, les Psaumes restent un livre à redécouvrir. Peut-être le confort de notre Occident non persécuté nous empêche-t-il en partie d’en savourer la pertinence et l’utilité ?

UN LIVRE DE SENTIMENTS

Sentiments et christianisme

Sentiment et foi n’ont pas toujours fait bon ménage. Au cours de son histoire, l’Église a oscillé entre deux tendances opposées : le mysticisme (qui prône le primat des sentiments) et l’intellectualisme (qui ravale les sentiments à une manifestation charnelle inutile voire nuisible). Face à ces deux extrêmes, nous admirons l’équilibre des Psaumes : le psalmiste laisse parler son cœur, mais objective son expérience à la lumière de la révélation de Dieu.
Prenons un exemple : le mot « bonheur » revient environ 25 fois dans le psautier, dont il est un thème clef. Pour les psalmistes, il revêt deux aspects :
– l’un est objectif : « Bienheureux l’homme qui… » décrit un état de faveur dans lequel se trouve le fidèle, indépendamment de ses états d’âme du moment ;
– l’autre est subjectif : « Tu es heureux » (128.2) ; la considération de son état et ses décisions volontaires (par exemple de garder les préceptes de Dieu) produisent dans le cœur du fidèle un sentiment de joie, de bonheur.

Quelques sentiments des psalmistes

Les psalmistes n’hésitent pas à exposer devant Dieu leurs sentiments, à la première personne du singulier, sans se contenter de généralités, mais sous la pression du besoin ressenti au moment même.
Cela se traduit par des plaintes ou des expressions de joie accompagnées d’actes physiques sans honte (comme les pleurs, 56.8 ; 119.136).
Amour, colère, joie, paix, tristesse, confiance, peur, etc. : quel que soit le sentiment du moment, nous pouvons trouver un Psaume qui s’en fasse l’écho. C’est particulièrement vrai pour les sentiments qui nous semblent « chrétiennement » les moins avouables, comme la colère. Or Dieu sait d’avance et parfaitement ce que nous ressentons et ne nous reproche jamais de le lui exprimer (ce qui ne veut pas dire qu’il approuve toujours de tels sentiments !). Le fait que ces expressions soient consignées dans des écrits publics (avant d’être sacrés) montre également la vérité du psalmiste devant les autres — même s’il évite de faire un étalage public de ses fautes6. Le repentir devant Dieu purifie mon cœur. Le repentir devant mon frère édifie ce frère, mais ma pudeur protège le cœur de ce frère.

Au cours de leur épanchement devant Dieu, les fidèles reçoivent la correction nécessaire de sentiments trop excessifs. Cette catharsis, cette libération, ce défoulement en prière, permet au psalmiste de recevoir l’instruction au milieu même de l’expression de ses sentiments (32.8) et de basculer brusquement de la supplication à la louange. Le changement d’état d’esprit est parfois soudain (28.2,6). Le « travail sur soi » n’a pas besoin d’être très long : devant Dieu, la « remontée » peut être rapide. Dieu intervient, soit dans les circonstances, soit directement dans le tréfonds de l’âme du fidèle, sans que le détail nous soit généralement donné pour nous permettre de nous l’approprier (ex. : 34.4-6).

Ainsi l’expression même de nos sentiments est une forme de louange, car elle glorifie Dieu dans son acte de création de l’humain et dans la reconnaissance de sa dépendance de lui. Apprenons donc à calmer nos craintes, à apaiser notre colère, à consoler notre tristesse, à dire notre joie, à exprimer notre amour, à affermir notre confiance aux pieds du Seigneur dans une méditation interactive de notre âme avec lui.

UN LIVRE QUI PARLE DE JESUS

Comme nous l’avons déjà dit rapidement, Jésus est présent dans les Psaumes (Luc 24.44-47).
Les Psaumes sont le livre de l’A.T. le plus cité dans le N.T. et deux tiers des citations concernent directement Jésus :
– Jésus est le fils de David, le roi par excellence (ex. : 2) ;
– Jésus est aussi le « nouvel Israël », qui récapitule l’expérience de son peuple et concentre l’opposition contre le peuple de Dieu et ses fidèles ;
– Jésus est aussi l’Éternel de l’A.T. en qui Dieu se révèle pleinement (ex. : 102.26-28 ; cf. Héb 1).

Les rabbins juifs appliquaient déjà beaucoup de Psaumes que nous qualifions de « messianiques » au Messie. Aussi, sans gommer le caractère historique (en particulier dans les expériences de David), sommes-nous frappés par la similitude des circonstances, voire par leur côté visionnaire (comme les mains et les pieds percés du Ps 22 dans une civilisation israélite qui ignorait la crucifixion).

Un livre qui nous invite à louer, un livre qui touche nos sentiments, un livre qui nous présente Jésus, un livre qui est au cœur de la Bible : que les Psaumes soient aussi un livre dans notre cœur !

1150 « chapitres », 2 461 versets, soit 60 % de plus que la Genèse (deuxième livre en nombre de versets).
2Voir l’article de Roger Liebi dans Promesses, n° 150, « Les Proverbes, un livre poétique », pour une introduction rapide à la poésie hébraïque. L’introduction du commentaire de Gerald Wilson, Psalms, vol. 1, The NIV Application Commentary, Zondervan, p. 31 à 57, donne des éléments très utiles — et le commentaire des Psaumes qui suit est également excellent.
3Ce point est à garder en mémoire lorsque nous cherchons à interpréter les Psaumes. Il est souvent vain de vouloir tirer d’expressions avant tout poétiques, des points de doctrines qui ne seraient pas solidement étayés par des textes plus didactiques tirés d’autres livres bibliques.
4Soit 50 % du livre, exactement : 73 où il est explicitement indiqué comme auteur + le Ps 2 d’après Act 13 + le Ps 10 par nature (car il est indissociable du Ps 9 comme l’indique la structure alphabétique consécutive de ces deux Psaumes — or le Ps 9 est attribué à David).
5C’est bien sûr vrai, au premier chef, pour les Psaumes dont le titre rappelle une circonstance historique de David. Toutefois d’autres Psaumes peuvent éclairer la façon dont il a ressenti certaines périodes de sa vie, bien qu’ils ne soient pas explicitement reliés à un épisode précis.
6Par exemple, le Ps 51 se contente de rappeler la faute de David dans la suscription. Le reste du Psaume montre un cœur saisi par la gravité de son péché, sans que David ne le mentionne explicitement. De ce fait, ce Psaume devient d’une application très générale.

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Prohin Joël
Joël Prohin est marié et père de deux filles. Il travaille dans la finance en région parisienne, tout en s'impliquant activement dans l’enseignement biblique, dans son église locale, par internet, dans des conférences ou à travers des revues chrétiennes.