Dossier: L'occultisme démasqué
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La délivrance de l’occultisme

Les dangers des pratiques occultes

Les pratiques occultes font courir deux risques : la « démonisation » et l’influence démoniaque.

La « démonisation »

Le terme « démonisation » me semble préférable au terme usuel de « possession », car selon la Bible, Dieu seul possède tout (Deut 13.14 ; 1 Chr 29.11-12, 1 Cor 10.26). Le diable ne possède rien d’autre que ce qu’il a voulu usurper. De plus, les deux expressions grecques les plus fréquentes signifient être démonisé (daimonizomai) et avoir un démon (echon daimonion).

Une personne « démonisée » (Luc 11.24-26) semble avoir trois caractéristiques :

– le démon la contrôle (de manière occasionnelle ou constante) : il peut la saisir (Mat 8.28), la pousser (Marc 9.18), etc. ; – le démon a accès à l’intérieur de la personne (cf. les verbes « sortir » en Luc 8.2 ; Act 16.18) ;

– la personne alterne des périodes de lucidité et d’autres où elle est sous contrôle (cf. Mat 17.15).

Essai d’identification des causes

Il n’est pas évident de se prononcer très clairement à ce sujet :

– Dans les Évangiles, la plupart des démoniaques viennent de régions où l’idolâtrie est importante. Une culture imprégnée d’occultisme formerait un environnement particulièrement propice. Serait-ce la raison des mises en garde si sérieuses de l’A.T. (Deut 18.9-14 ; Lév 19.26) ?

– D’un côté, Jésus n’a jamais reproché à quelqu’un d’être démonisé (contrairement à certains malades, à qui il a dit : « Va, et ne pèche plus »). Ce qui montre que la personne est plutôt victime que participante volontaire. Cela pourrait expliquer pourquoi dans une famille marquée par l’occultisme un enfant peut naître avec la présence d’un démon (cf. Marc 9.21).

– D’un autre côté, il semble exister des situations où la personne est pleinement responsable de son état (Act 5.1-4), puisqu’elle est appelée à ne pas faire de la place au diable (Éph 4.27), à se repentir pour être libre (2 Tim 2.25-26), et à ne pas « fréquenter » les puissances démoniaques (1 Cor 10.20). Par le péché, par des pratiques interdites, un individu peut contracter un lien avec une puissance céleste néfaste.

L’influence démoniaque

Il existe une autre forme d’influence par les démons. Selon Éphésiens 2.1-3, par nature, nous sommes tous plus ou moins sous l’influence du diable.

Aux Corinthiens, Paul écrit : « Mais ce qu’on sacrifie, on le sacrifie à des démons et non à Dieu ; or je ne veux pas que vous soyez en communion avec les démons. » (1 Cor 10.20) Paul parle à des chrétiens : il y a donc une forme d’influence possible.

À Colosses, les spiritualités dévoyées de type initiatique exerçaient aussi une influence dommageable sur les chrétiens, en séduisant leurs pensées par des philosophies ou des théologies trompeuses.

À Thyatire, des déviances morales ou un manque de profondeur spirituelle semblent être liés à l’œuvre de démons (Apoc 2.20-22).

Il existe donc une forme d’influence, plus ou moins forte, plus ou moins manifeste, dont il faut avoir conscience.

La notion de victoire

L’Évangile déclare la victoire sur les démons :

– par la victoire complète et absolue du Christ qui « a dépouillé les dominations et les autorités, et les a livrées publiquement en spectacle, en triomphant d’elles par la croix. » (Col 2.15)

– par la promesse que Christ bâtirait son Église sans que les portes du séjour des morts, lieu d’autorité démoniaque (cf. Héb 2.14) ne puissent s’opposer (Mat 16.18) ;

– par la délivrance qui résulte de la conversion : « Il nous a délivrés de la puissance des ténèbres et nous a transportés dans le royaume de son Fils bien-aimé » (Col 1.13) ;

– par la position des chrétiens assis avec Christ au-dessus de toute autorité (Éph 1 ; 2) ;

– par l’intercession du Fils de Dieu et de l’Esprit de Dieu ;

– par la promesse qu’il est capable de nous préserver (Jude 24-25).

Je dois m’appuyer sur la vérité objective et théologique que Christ est vainqueur et que le chrétien est vainqueur par son association à Christ. Néanmoins cette victoire doit être enseignée et appliquée. En cela, sa réalisation pratique connaît des degrés de réussite divers.

L’exemple d’Éphèse (Actes 19)

Le contexte religieux1

L’histoire antique nous rapporte deux aspects particuliers du climat spirituel d’Éphèse :

– La vénération d’Artémis : Elle est adorée comme protothronia, c’est-à-dire suprême en rang et puissance. Ceux qui l’invoquaient la considéraient comme Sauveuse (Soteira), Seigneur (Kuria), et Reine du Cosmos (Basileia kosmou). Elle était la déesse céleste. Il y a un lien marquant entre Artémis et Cybèle, la Déesse Mère de Phrygie.

– L’utilisation de formules magiques : Les Ephesia grammata étaient six formules magiques censées apporter la guérison, protéger des démons, renouveler ses capacités sexuelles, etc. Ces formules étaient invoquées, ou inscrites sur des amulettes. Le lien est très fort entre la magie et Arte´mis. On est proche du mana des sociétés animistes. À ceci s’ajoute l’astrologie dont les signes ornementaient les images de la déesse. La littérature antique recense la sensation explicite à Éphèse d’une ville infestée de démons, où des endroits particuliers servent à leur rassemblement. Voilà le contexte dans lequel les gens vivaient quand Paul arrive avec l’Évangile.

Les débuts de l’Église à Éphèse

Paul rencontre des disciples de Jean-Baptiste (19.1-7), puis exerce un ministère dans la synagogue pendant trois mois et dans l’école de Tyrannus pendant deux ans (19.8-12). Pendant cette période, Paul effectue des miracles « extraordinaires » qui ne sont pas sans rappeler les Ephesia grammata. C’est comme si le Seigneur en prenait le contrepied par des moyens dérisoires, comme les mouchoirs de Paul.

Suit un évènement étrange (19.13-16) avec ces « quelques exorcistes juifs ambulants » qui essayent d’imiter Paul et échouent lamentablement. Soudain la réputation de Christ se répand et l’Évangile est planté. Les Éphésiens qui se convertissent confessent ce qu’ils ont fait et se débarrassent de leurs livres occultes (19.17-20). La délivrance de l’Évangile est spectaculaire !

On fait grand cas de ce que les Éphésiens aient brûlé leurs affaires occultes. Faut-il les imiter ? Les objets sont-ils dangereux ? Les chrétiens comme les non-chrétiens peuvent-ils être contaminés ? Que faire si sa maison a été le théâtre d’actes de sorcellerie ? Jérémie 10.5 donne la réponse : « Ces dieux sont comme une colonne massive, et ils ne parlent point ; on les porte, parce qu’ils ne peuvent marcher. Ne les craignez pas, car ils ne sauraient faire aucun mal, et ils sont incapables de faire du bien. » La Bible dit clairement que les objets sont incapables de faire du bien ou de faire du mal. Le problème vient de la conscience de celui qui vient de se convertir et qui est en danger de revenir à ses anciennes pratiques. Il faut brûler ces objets — non parce qu’ils seraient contaminés, mais parce que la conscience faible a besoin d’être fortifiée. La coupure avec l’ancienne vie a parfois besoin d’être matérialisée par un tel acte. Quand je me suis converti, j’ai brûlé tous mes livres sur la réincarnation. Mais quand les éditions Clé m’ont demandé d’écrire un livre sur la réincarnation, je les ai tous rachetés et aucun démon n’est sorti des pages !

L’Épître de Paul aux Éphésiens

Plusieurs passages montrent combien Paul voulait par sa lettre rassurer et donner un cadre au combat spirituel des chrétiens d’Éphèse :

– Christ assujettira tout (Éph 1.9-10).

– Christ a le pouvoir sur les puissances (Éph 1.15-23) car il a déjà remporté la victoire (Éph 4.8-10).

– L’environnement est mauvais : le diable agit réellement et substantiellement pour la désobéissance et la rébellion de l’homme naturel (Éph 2.2) ; mais une transformation a eu lieu (Éph 2.4-10).

– L’Église a un rôle dans l’application de la victoire de Christ : « Les dominations et les autorités dans les lieux célestes connaissent aujourd’hui par l’Église la sagesse infiniment variée de Dieu. » (Éph 3.10)

– Le développement sur la lutte spirituelle (Éph 6.10-20) est capital à comprendre et à mettre en œuvre pour les personnes qui viennent d’un milieu occulte.

Deux approches de la délivrance

Première approche : le ministère apostolique « ekbalistique »2

Le texte de Marc 16.17 (« Voici les miracles qui accompagneront ceux qui auront cru : en mon nom, ils chasseront les démons ») sur lequel certains s’appuient pour chasser les démons s’applique aux apôtres, qui ont cru après avoir eu des doutes. Tous les signes mentionnés en Marc 16 ne sont réalisés que par deux catégories d’individus seulement :

– les apôtres (ex : Act 5.11-13),

– ceux auxquels ils imposent les mains (ex : Étienne).

Vers l’an 64, l’Épître aux Hébreux indique que ces signes, ces prodiges, ces miracles variés par lesquels Dieu appuyait le témoignage apostolique ont eu leur temps (Héb 2.4).

Ma conviction est que cette manifestation des signes et prodiges appartient a` l’autorité apostolique. Paul indique que c’est la « signature » de son statut d’apôtre : « Les preuves de mon apostolat ont éclaté au milieu de vous par […] des signes, des prodiges et des miracles. » (2 Cor 12.12)

Avant de changer d’approche sur ce sujet, j’ai chassé des centaines de démons… mais je crois que je n’en ai chassé réellement aucun ! Ce que je faisais n’avait pas la caractéristique de ce que je lis dans le N.T.

Seconde approche : ministère pastoral centré sur l’individu

Il faut s’attendre à rencontrer des gens « démonisés ». Que doit-on faire ?

Le texte le plus emblématique est, selon moi, 2 Timothée 2.24-26 : « Un serviteur du Seigneur […] doit redresser avec douceur les adversaires, dans l’espérance que Dieu leur donnera la repentance pour arriver à la connaissance de la vérité, et que, revenus à leur bon sens, ils se dégageront des pièges du diable, qui s’est emparé d’eux pour les soumettre à sa volonté. » Les adversaires (les contradicteurs) n’ont pas la connaissance de la vérité, ni leur bon sens et ont perdu leur liberté, capturés qu’ils sont par le diable. Dieu a pour objectif de les amener à la repentance qui conduit à la délivrance des pièges du diable. Ce texte nous donne la ligne de conduite à adopter envers des gens qui sont pris dans l’occultisme. Notre rôle est de les enseigner en sorte que Dieu leur donne la repentance — et c’est lui seul qui peut la donner.

Jacques 4.7 va dans le même sens : « Soumettez-vous donc à Dieu ; résistez au diable » — ce sont les deux impératifs qui nous concernent — « et il fuira loin de vous » — c’est la promesse de Dieu.

Cette approche me semble cohérente avec l’enseignement magistral d’Éphésiens 6.10-17 :

– La prière est centrale.

– La posture n’est pas agressive : il ne s’agit pas de partir à la chasse aux démons. Toutes les armes sont défensives, à l’exception de l’épée de l’Esprit, c’est-à-dire la Parole de Dieu. Il faut avant tout « tenir ferme ».

– Le côté le plus dangereux est le dos — là où d’autres doivent ou devraient nous protéger. Il y a dans la guerre spirituelle une notion fondamentale et peu soulignée : le rôle protecteur de l’Église. Chacun est invité à ne pas être pour l’autre une occasion de chute (suscitant l’amertume, la colère, la tentation, etc.).

Vers une méthodologie

Des éléments possibles à repérer

Comment déterminer si une personne est réellement possédée ? Le discernement spirituel est de mise. La présence de certains éléments peut alerter :

– des influences marquées (occultisme, violence — subie ou exercée —, immoralité, mysticisme…) ;

– des voix distinctes (mais la schizophrénie existe aussi !) ;

– des comportements asociaux, notamment à proximité de chrétiens, d’églises ou de la Bible ;

– des dons médiumniques ou paranormaux ; etc. ;

Dans ma (petite) expérience, les liens les plus forts correspondent aux pratiques occultes et à l’absence de pardon délibérée qui conduit à une amertume cultivée.

Sept pratiques fondamentales

1. Prier pour une illumination puissante des vérités chrétiennes (Éph 3.14-21). Le diable empêche la parole de pénétrer (Mat 13.19).

2. Enseigner l’Évangile dans la puissance de l’Esprit (en identifiant les points de mensonge, de blocage, les « forteresses », cf. 2 Cor 10.4-5).

3. Enseigner la victoire objective du Christ sur les puissances des ténèbres (cf. Col 2.15) afin que la personne ait une assise de foi suffisante pour faire face à des situations aussi oppressantes que peut être la présence d’un démon dans une pièce.

4. Enseigner la mise en pratique de la victoire du Christ, notamment auprès des jeunes chrétiens (cf. Jac 4.7).

5. Enseigner le devoir d’une repentance spécifique et accompagner la personne dans ce sens (cf. 2 Tim 2.24-26), ce qui peut passer par une séparation de certains objets à cause de sa conscience faible (Jér 10.5 ; 1 Cor 8.7-12).

6. Enseigner la mise en place de toutes les armes de Dieu (Éph 6.10-20), en prenant conscience des deux armes mobiles de la foi et de l’épée de l’Esprit (cf. Jean 8.32).

7. Enseigner à tous le besoin de ne pas être une occasion de chute : même si cela va rarement jusqu’au stade de la possession, la colère (Éph 4.27), l’abstinence forcée dans le couple marié (1 Cor 7.5), l’absence délibérée de pardon (2 Cor 2.11), un esprit de provocation (1 Cor 10.19-22), sont des terrains fertiles pour donner au diable un « accès » et cela peut affecter toute l’église.

1Ces éléments sont tirés de Clinton E. Arnold, Ephesians Power and Magic, Baker, 1992.
2Le verbe grec ekballo est souvent utilisé lorsque Jésus ou les apôtres chassent les démons.

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Varak Florent
Florent Varak est pasteur, auteur de nombreux livres. Il est aussi conférencier, et professeur d’homilétique à l’Institut biblique de Genève. Il est le directeur international du développement des Églises au sein de la mission Encompass liée aux églises Charis France. Il est marié avec Lori et ont trois enfants adultes ainsi que quatre petits-enfants.