7 tableaux pour aujourd’hui (Apocalypse 11.19 à 15.4)
Par l’Apocalypse, non seulement Dieu veut nous avertir de ce qui va arriver demain — « bientôt » — mais il désire affermir notre foi d’aujourd’hui. Quelle perte si nous ne voyons dans ce livre, et en particulier dans les chapitres 4 à 22, qu’un développement d’événements à venir, sans relation avec notre situation. Quelle instruction si nous savons discerner les leçons pratiques intemporelles développées dans les divers tableaux présentés dans ce livre ! Ces leçons sont vraies et utiles pour 2013 et le seront jusqu’à la fin.
Jésus et Paul utilisent une image très parlante pour relier la conflagration finale encore à venir et les soubresauts que vit l’Église depuis le début : celle de l’accouchement (Mat 24.8 ; 1 Thes 5.3)1. La femme enceinte ressent des contractions de plus en plus fortes, entrecoupées de moments de répit, jusqu’à la contraction ultime qui marque l’expulsion, la naissance du bébé. Telle est l’histoire du monde entre les deux venues de Jésus-Christ : des « contractions », marquées par des combats, des persécutions, des épreuves, qui vont croissantes jusqu’à la lutte finale décrite dans ces chapitres de l’Apocalypse. Mais, même si l’affrontement n’est pas aussi intense qu’il le sera dans le futur, la même opposition existe aujourd’hui. Jean le disait dès l’an 90 : « C’est la dernière heure » ; l’Antichrist vient (il n’est pas encore là), mais plusieurs antichrist sont d’ores et déjà présents (1 Jean 2.18). Combien plus pourrait-il le dire à notre époque !
Dans la partie qui va de 11.19 à 15.4, à travers sept tableaux, Jean présente sept signes ou visions qui décrivent les principaux acteurs de la lutte entre le bien et le mal. À la trinité victorieuse présentée dans le ch. 1 puis dans les ch. 4 et 5, répond une anti-trinité maléfique décrite dans les ch. 12 et 13, dont on sait par avance qu’elle sera finalement vaincue et dont la puissance est limitée2, mais dont l’action est et sera destructrice. Cet article ne vise qu’à relever quelques leçons utiles pour nous, sans développer tous les détails de ces chapitres.
1. Le diable est enragé mais vaincu (11.19-12.17)
Le premier signe est celui du « grand dragon rouge feu ». Son identification est facile : c’est « le serpent ancien, appelé le diable et Satan, celui qui séduit toute la terre » (12.9). L’origine de tout le mal et de toute l’opposition à Dieu vient de la chute du diable qui a entraîné à sa suite une partie des anges (peut-être un ange sur trois, selon 12.4 ?). C’est lui qui séduisit le premier couple sous la forme du « serpent ancien » (Gen 3.1).
Ce chapitre entrouvre le voile pour nous montrer que, derrière les causes premières que nous attribuons volontiers à des éléments tangibles, se déroule une bataille spirituelle où le diable essaie de contrecarrer les plans divins et de s’opposer au peuple de Dieu. Sachons discerner son emprise derrière tel mouvement idéologique, tel événement politique. Même si son action est peut-être plus souterraine dans les pays occidentaux que dans des pays longtemps marqués par l’animisme, il n’en est pas moins actif partout, avec ses sbires les démons, pour tromper et séduire. Il est même « animé d’une grande colère, sachant qu’il a peu de temps » (12.12). En effet, il a déjà été vaincu à la croix et il sait par avance que son sort est scellé, mais il profite de ce temps intermédiaire qui lui est laissé pour renforcer toujours plus son opposition envers le peuple de Dieu. Celle-ci prend aujourd’hui la forme du fanatisme islamique, du matérialisme athée, de la spiritualité ésotérique, etc. Mais le peuple de Dieu peut être assuré qu’il sera gardé jusqu’au bout par la puissance de Dieu, aussi dure que puisse paraître l’épreuve (12.14).
Pour remporter la victoire contre ce diable enragé, trois armes sont fournies à tout croyant :
– Le « sang de l’Agneau » (12.11a) : Ce n’est que par la mort du Sauveur que nous pouvons être délivrés des accusations du diable (12.10). Dieu ne les écoute plus : il a chassé Satan de sa présence ; n’y cédons pas non plus. « Qui accusera les élus de Dieu ? C’est Dieu qui justifie ! Qui les condamnera ? Christ est mort ; bien plus, il est ressuscité, il est à la droite de Dieu. » (Rom 8.33-34) Imprégnons-nous de la victoire remportée par Jésus à la croix qui nous assure définitivement la faveur de Dieu et nous purifie de tout péché, même de ceux que le diable voudrait nous faire croire impardonnables.
– La « parole de leur témoignage » (12.11b) : La seule arme offensive à notre disposition est la Parole de Dieu qui a la puissance de faire fuir le diable, aujourd’hui comme au désert pour Jésus autrefois (Luc 4). Chaque fois que nous prêchons la parole, que nous rendons témoignage à la vérité de l’Évangile, nous détruisons les œuvres du diable !
– Le mépris de sa vie (12.11c) : Dans certains pays, ce verset se vit littéralement, dans la torture et le martyre. Nous n’avons peut-être pas à craindre la mort physique, mais nous avons souvent peur de « prendre notre croix » et mourir à nous-mêmes — oubliant que le renoncement à soi pour servir Dieu et son prochain est le chemin de la victoire : que peut faire le diable à quelqu’un qui, dans sa vie pratique, se considère vraiment comme « mort avec Christ » ?
2. L’esprit de l’antichrist est déjà présent (13.1-10)
Le deuxième tableau présente une terrible bête, réminiscence de celles de Daniel, dont la caractéristique principale est de représenter physiquement le diable sur la terre. Elle en reçoit le pouvoir (13.3), singeant Christ jusqu’à imiter sa mort et sa résurrection (13.3,12b,14b).
Un jour paraîtra sur terre un homme en qui culmineront ces caractères, l’Antichrist avec un grand « A ». En attendant, depuis Néron, « beaucoup » d’antichrists se sont levés, s’opposant frontalement au peuple de Dieu et s’arrogeant le pouvoir qui ne revient qu’à Dieu seul. L’esprit de l’antichrist est déjà à l’œuvre.
Nous le voyons, brutalement, dans l’opposition frontale de dictateurs contre les chrétiens : les Staline, Hitler, Mao, Pol-Pot, Kadhafi, etc., demandaient une allégeance totale de leurs sujets qui a conduit bien des chrétiens fidèles à être « vaincus » (13.7). Vaincus physiquement, alors que leur persévérance et leur foi (13.10) leur assuraient la victoire morale aux conséquences éternelles.
Nous le voyons, plus subtilement, dans les blasphèmes sous quatre formes :
– « contre Dieu » : la culture de notre époque dénigre Dieu, s’en moque par des caricatures, par des paroles injurieuses, par un manque total de respect ;
– « contre son nom » : au lieu d’accepter la révélation de Dieu sur lui-même telle que présentée dans la Bible (son « nom »), on se construit un Dieu à son image, comme on aimerait se l’imaginer — et, ce faisant, on nie et le Père et le Fils ;
– « contre son tabernacle » : l’Église, temple spirituel de Dieu sur terre, est l’objet de moqueries ; la parole des chrétiens sur la place publique est rejetée comme obsolète, ringarde, inutile ;
– « contre ceux qui habitent dans le ciel » : les croyants, individuellement, sont rejetés s’ils tiennent ferme contre le vent du moment en refusant les façons de faire du monde pour suivre les enseignements divins : par exemple, quelle jeune fille qui veut se garder pure pour le mariage n’a-t-elle pas eu à subir des remarques vexatoires plus ou moins fines de la part de son entourage non croyant ?
L’esprit de l’antichrist souffle déjà fort : soyons persévérants et pleins de foi !
3. Le faux prophète veut nous séduire (13.11-18)
Le troisième tableau présente une autre bête, dont toute l’action vise à pousser « les habitants de la terre » (en opposition aux saints, qui « habitent dans le ciel ») à se soumettre et à adorer la première bête. Cet « anti-Esprit saint » est appelé ensuite le « faux prophète » (16.13 ; 19.20 ; 20.10), complément de cette trinité maléfique. Là encore, la manifestation ultime est encore à venir, dans un autre homme qui servira l’Antichrist, mais combien de faux prophètes se sont déjà élevés pour séduire beaucoup de gens, voire même, s’il était possible, les élus (Mat 24.11,24) !
Satan ne se contente pas d’attaquer frontalement les chrétiens ; il cherche aussi à les séduire et à corrompre la vérité en travestissant le christianisme. Le « lion rugissant » (1 Pi 5.8) se fait « ange de lumière » (2 Cor 11.14). Cette séduction revêt plusieurs aspects auxquels nous sommes appelés à résister :
– Tout miracle ne vient pas de Dieu (13.13-14a) : Par exemple, penser que toute guérison miraculeuse est le signe de l’action de Dieu est une grande tromperie dans l’Église aujourd’hui où la recherche du sensationnel l’emporte parfois sur la poursuite de la vraie spiritualité3.
– La communication est trompeuse (13.14b-15) : La seconde bête s’occupe de « l’image » de la première bête. Notre siècle de communication privilégie trop souvent l’apparence à la substance, la forme au fond et, par ce moyen, nous pouvons être entraînés vers des adorations mauvaises. Par exemple, refuser de voir tel film à succès peut représenter une « mort » culturelle ou sociale, en particulier pour des adolescents ou des jeunes. Aidons-les à résister !
– La vraie idolâtrie est l’auto-divinisation : Ce nombre 666, qui a fait couler tant d’encre, peut se comprendre dans le symbolisme de l’Apocalypse, comme un triple essai infructueux d’atteindre la plénitude divine (6 au lieu de 7). L’homme veut se faire Dieu, mais son nombre reste celui d’un homme déchu (13.18) qui a cru au mensonge du diable : « Vous serez comme Dieu. » (Gen 3.5) Cet égocentrisme infuse ses pensées (son « front ») et ses actions (sa « main droite »). Soyons intelligents et calculons ce nombre, c’est-à-dire mettons Dieu au centre — et non plus notre petit « moi » orgueilleux.
4. Le peuple de Dieu reste fidèle (14.1-5)
La scène suivante forme un contraste total. Le peuple des vrais croyants, symboliquement vu au travers des 144 0004 sur la montagne de Sion (cf. Héb 12.22). Sept caractéristiques sont données, que nous pouvons faire nôtres ; elles sont à la fois des affirmations d’une position et des exhortations implicites à la fidélité :
– nous sommes marqués du sceau de Dieu et de l’Agneau par la présence du Saint Esprit en nous (14.1 ; Éph 1.14) ;
– nous avons été « rachetés d’entre les hommes » (14.3b ; 1 Cor 6.20) ;
– comme conséquence, gardons-nous purs de tout adultère spirituel5 (14.4a ; Jac 4.4) et suivons fidèlement l’exemple que nous a laissé le Seigneur dans sa vie sur la terre jusqu’à son sacrifice d’Agneau de Dieu (14.4b ; 1 Pi 2.21) ;
– nous sommes les prémices de la nouvelle création (14.4c ; Jac 1.18) ;
– comme conséquence, parlons la vérité en rejetant le mensonge (14.5a ; Éph 4.25) ;
– nous sommes déjà « irréprochables » devant Dieu grâce à l’œuvre de la croix (14.5b ; Éph 1.4) et Dieu peut nous garder de chutes pendant notre vie sur terre avant de nous « faire paraître devant sa gloire irréprochables » (Jude 24).
5. L’Évangile est annoncé, seul moyen d’échapper au jugement (14.6-13)
Trois anges se succèdent dans ce tableau. L’annonce de l’Évangile éternel6 (proclamation du premier ange, 14.6-7) récapitule le seul moyen d’échapper au jugement qui va s’abattre sur le monde (Babylone, que ce soit sous sa forme religieuse ou économique, 14.8). Ceux qui meurent n’ont que deux destinées :
– soit « dans le Seigneur » (14.13) — et ils seront bienheureux dans le repos éternel,
– soit en ayant fait allégeance à l’esprit de l’antichrist (14.11) — et ils seront dans les tourments éternels.
En quelques versets, quelle extraordinaire motivation pour nous pousser à prêcher l’Évangile !
6. Il faut avertir que le jugement est certain et terrible (14.14-20)
Le jugement final est présenté sous la double image de la moisson (14.14-16) et de la vendange (14.17-20). C’est le Fils de l’homme lui-même qui l’exécute (14.14), comme il en a reçu le droit (Jean 5.22). Parler du jugement n’est pas populaire aujourd’hui et certains essaient de biaiser avec les textes bibliques pourtant clairs qui l’annoncent avec certitude. Et c’est Jésus lui-même qui en parle le plus ! Aussi n’hésitons pas à avertir avec émotion nos contemporains du sort terrible qui les attendent s’ils refusent le salut offert.
7. La louange sera éternelle (15.1-4)
Le dernier tableau introduit le détail du jugement final donné dans les sept coupes. Suit un des magnifiques cantiques qui parsèment l’Apocalypse : une fois la victoire remportée, il proclame la souveraineté de Dieu et la justice parfaite de ses actes, y compris ses œuvres en jugement. Enfin, toutes les injustices que nous constatons si souvent autour de nous seront punies et tous les actes positifs si souvent méconnus seront récompensés. Et notre louange à notre juste Souverain montera au siècle des siècles. Amen, viens, Seigneur Jésus !
1 Le ch. 12 de l’Apocalypse reprend la même image, mais dans un sens différent : la femme représente la communauté fidèle qui attendait le Messie promis, dans un temps de souffrance et de persécution, en particulier sous Antiochus Épiphane et sous la domination romaine.
2 Deux éléments à noter sur la limite donnée à la puissance du mal : 1° le nombre de verbes au passif, indiquant que le contrôle ultime appartient à Dieu seul ; 2° le combat dirigé par Michel et ses anges contre le diable et où Michel vainc. La Bible n’est pas dualiste et n’oppose pas deux dieux, l’un du bien, l’autre du mal, de force égale : l’Agneau a déjà vaincu et Dieu garde le contrôle de tout, même des forces du mal.
3 Un témoignage éclairant sur ce thème : La guérison du guérisseur, de Walter Vappiani, BLF.
4 12 x 12 x 1000 : selon le symbolisme numérique de l’Apocalypse, on peut y voir tous les nombreux (1000) croyants des deux Testaments : l’Ancien (12 tribus) et le Nouveau (12 apôtres). Plusieurs font le rapprochement avec le ch. 7 où les 144 000 sont distribués entre des tribus d’Israël (avec la tribu de Dan omise et celle de Joseph citée avec celle de son fils Manassé).
5 Il serait faux de prendre 14.4a comme une exaltation du célibat ou une condamnation des relations sexuelles comme une souillure. Dans le langage de l’Apocalypse, la virginité est l’absence de relation impure avec le monde, plus loin décrit sous les traits d’une prostituée (cf. 2 Cor 11.2).
6 Ce qualificatif est particulièrement approprié ici, car la réception ou non de l’Évangile de la grâce est ce qui décide du sort éternel de l’âme de chaque être humain.