Connaître plus pour adorer plus
Lire, rencontrer, adorer
Dieu recherche des adorateurs en vérité (Jean 4.23) : la connaissance vraie de Dieu nourrit la vérité de l’adoration. Chaque fois que nous en apprenons davantage sur Dieu, n’oublions pas de prendre aussi le temps d’exprimer du fond de notre cœur notre reconnaissance à Dieu pour ce qu’il est. La vraie théologie mène à l’adoration. Le croyant qui ouvre sa Bible entrebâille la porte du temple céleste, et doit s’attendre à entrer dans la présence du Dieu saint. Qu’est-ce qui me motive à ouvrir ma Bible ? Mon attitude spirituelle fera de ce moment une lecture aussitôt oubliée, un savoir cumulé mais stérile… ou une rencontre qui me transformera encore un peu plus.
Le cœur de la théologie
Comment ne pas adorer Dieu quand nous le rencontrons ? Chaque ligne de la Bible, chaque phrase, sont marqués du sceau de la divinité (2 Tim 3.16 ; 2 Pi 1.21). Inspiré par l’Esprit, l’apôtre Paul rédigeait sa théologie non pour remplir les têtes de ses lecteurs, mais pour transformer leurs cœurs (1 Cor 14.20 ; Col 4.12 ; etc.). Les Épîtres de Paul ne sont certes pas faciles d’accès. Toutefois, la complexité harmonieuse de leur architecture et la solidité des vérités qu’elles révèlent ne saurait masquer toute l’adoration, toute l’émotion, et l’intense spiritualité qui en émanent.
Pour écrire sur Dieu, Paul puise dans cette intense communion qu’il cultive ardemment avec son Sauveur et Seigneur. Ses écrits sont régulièrement ponctués de prières.
Il lui arrive même de s’arrêter au beau milieu d’un raisonnement (Éph 3.1 est une phrase inachevée, peut-être reprise au verset 14), émerveillé par « les richesses incompréhensibles de Christ » (v. 8), et finissant, débordant de reconnaissance, par s’agenouiller dans une prière prodigieusement émouvante (v. 14-21) : « Je fléchis les genoux devant le Père […] afin qu’il vous donne, selon la richesse de sa gloire, d’être puissamment fortifiés par son Esprit dans l’homme intérieur, en sorte que Christ habite dans vos cœurs par la foi ; que vous puissiez […] connaître l’amour de Christ, qui surpasse toute connaissance, en sorte que vous soyez remplis jusqu’à toute la plénitude de Dieu. Or, à celui qui peut faire, par la puissance qui agit en nous, infiniment au-delà de tout ce que nous demandons ou pensons, à lui soit la gloire dans l’Église et en Jésus-Christ, dans toutes les générations, aux siècles des siècles ! Amen ! »
La théologie de Paul révèle aussi bien son intelligence que ses émotions. Il veut connaître Dieu pour mieux le célébrer et l’adorer. Pour mieux être bouleversé par ce qu’il apprend de son Créateur. C’est cette connaissance vivante qu’il tente de transmettre, par toutes sortes de figures de styles, de métaphores et de mots étirés à l’extrême, en en appelant à la raison, aux émotions, etc.
Le chœur des doxologies
Les écrivains sacrés peuvent différer dans l’expression de leur théologie, mais tous, après avoir palpé l’Ineffable, ne peuvent se contenir en cherchant leurs mots. Leur cœur reconnaissant commence par exprimer une louange vibrante qui finit par éclater à la gloire de Dieu. Cette prière particulière, les théologiens l’appellent une doxologie (litt. : discours sur la gloire).
– Lorsque Moïse célèbre la délivrance que Dieu opère en engloutissant les Égyptiens dans la mer Rouge (Exode 15), il conclut ainsi : « L’Éternel est roi pour toujours et à jamais ! » (v. 18 – transcription libre).
– David, après la révélation du prophète Nathan sur sa future dynastie, tombe en adoration et délivre une magnifique prière, dont une doxologie : « Que tu es donc grand, Éternel Dieu ! car nul n’est semblable à toi, et il n’y a point d’autre Dieu que toi, d’après tout ce que nous avons entendu de nos oreilles. » (2 Sam 7.22)
– La louange du psaume 146 se conclut aussi sur une doxologie : « L’Éternel règne éternellement ; ton Dieu, ô Sion ! subsiste d’âge en âge ! Louez l’Éternel ! » (Ps 146.10)
– Une doxologie conclut chacune des quatre parties du psautier : Ps 41.13 ; 72.19 ; 89.52 ; 106.48, et Ps 150.1, sans compter que ce dernier psaume semble servir, dans son entier, de conclusion finale : une doxologie à lui seul pour la collection des cinq livres des Psaumes.
– Le modèle global de la prière au Père se poursuit par une doxologie : « Car c’est à toi qu’appartiennent, dans tous les siècles, le règne, la puissance et la gloire. Amen ! » (Matt 6.13)
– Paul conclut régulièrement ses lettres de doxologies, comme celle écrite aux Philippiens : « À notre Dieu et Père soit la gloire aux siècles des siècles ! Amen ! » (Phil 4.20 ; cf. aussi Rom 16.27 ; Éph 4.20-21 ; 1 Tim 6.16 ; 2 Tim 4.18)
– Les autres écrivains sacrés du N.T. ne sont pas en marge de cette pratique, comme Jude dont la doxologie est peut-être la plus apprise de toutes : « Or, à celui qui peut vous préserver de toute chute et vous faire paraître devant sa gloire irréprochables et dans l’allégresse, à Dieu seul, notre Sauveur, par Jésus-Christ notre Seigneur, soient gloire, majesté, force et puissance, dès avant tous les temps, et maintenant, et dans tous les siècles ! Amen ! » (Jude 24-25 ; cf. aussi Héb 13.21 ; 1 Pi 5.11 ; 2 Pi 3.18)
– Les doxologies figurent aussi en bonne place dans l’Apocalypse, dont ce célèbre cantique : « À celui qui nous aime, qui nous a délivrés de nos péchés par son sang, et qui a fait de nous un royaume, des sacrificateurs pour Dieu son Père, à lui soient la gloire et la puissance, aux siècles des siècles ! Amen ! » (1.5-6 ; cf. aussi 4.8 ; 5.13 ; 7.12)
De toute évidence, la plupart des doxologies concluent un passage, voire un livre entier. Quoi de plus normal, au fond, que de tomber à genoux dans l’adoration après avoir rencontré Dieu ? après l’avoir un peu mieux connu ? L’adoration est une conclusion toute légitime. En ce sens, la théologie a pour but la doxologie.
« Méditez Dieu avec Dieu »
La célébration du Dieu glorieux est le but de toute connaissance sur Dieu. Et c’est au sein de cette gloire que les hommes retrouveront des relations harmonieuses (cf. Éph 2.14-18).
Nous avons besoin de suivre le modèle de ces hommes de la Bible qui ponctuent leurs écrits de doxologies. Comme l’écrit le puritain anglais du xviie s. John Owen : « Quand vous méditez Dieu, méditez avec Dieu. » Ces hommes ne manipulent pas des concepts théologiques abstraits, mais tout en eux respire Dieu : leurs mots, leurs méditations, leurs chants, leurs psaumes et leurs exhortations. Les écrivains sacrés ne font pas qu’enseigner des doctrines. Ils excitent notre appétit spirituel, raniment la flamme de l’Esprit en nous, stimulent son ardent désir de nous révéler plus amplement une Personne infinie et infiniment aimable. Leur objectif est celui de l’Esprit divin planté en nous : toujours mieux connaître Dieu pour toujours mieux l’adorer et lui rendre gloire.
Y a-t-il plus noble activité que la lecture des écrivains sacrés dans un esprit bien orienté, désireux d’apprendre toujours davantage à mieux célébrer la gloire de son Créateur ?