Série: Histoire de l'Eglise
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Du concile de Trente à nos jours (12)

L’évolution du christianisme en Occident

En 1564, le concile de Trente rejette la Réforme protestante. Les doctrines suivantes sont condamnées : la justification par la foi seule, le salut uniquement par la grâce, les Saintes Écritures comme seule source d’autorité en matière de doctrine et de pratique chrétienne. Pour Rome, les bonnes œuvres doivent accompagner la foi, elles sont donc méritoires : la grâce a besoin de la coopération humaine pour le salut. Seul le Pape et les évêques ont le droit d’interpréter la Bible. En 2005, Jean-Paul II a confirmé l’attachement de l’église romaine aux décisions de ce Concile. Ainsi, le catholicisme actuel maintient les sept sacrements, l’efficacité de la messe, le rôle des saints, la confession au prêtre, les indulgences, etc.

Le 16ème siècle

Au 16ème siècle, l’unité de la chrétienté occidentale est brisée. Chaque camp estime que sa conception spirituelle est la seule qui soit acceptable devant Dieu, et essaie de détruire l’autre par la force ! Finalement chacun doit se résoudre à accepter la réalité historique : la diversité religieuse s’installe au sein de chaque nation.

Le 17ème siècle

Au 17ème siècle, les souverains des deux camps entendent être les maîtres dans leurs domaines territoriaux et se servent de la religion à des fins politiques. Cela aboutit parfois à des situations paradoxales. Ainsi, la France catholique s’allie avec l’Allemagne protestante contre les Turcs mais aussi contre le très catholique empereur et roi d’Espagne ! En France, les protestants (huguenots) sont néanmoins de plus en plus malmenés. La guerre de Trente Ans (1618-1648) ravage toute l’Europe. Elle oppose l’Empereur aux princes protestants allemands qui s’allient avec les suédois (protestants) et les français (catholiques). Le traité de Westphalie y met fin : les protestants retrouvent la situation de 1618 et le calvinisme est reconnu dans l’Empire, même si le pape Innocent X proteste vigoureusement. La papauté est définitivement écartée, au moins ouvertement, des décisions politiques internationales.

Entre 1620 et 1681, l’Angleterre est perturbée par les guerres entre catholiques et protestants : toutes les institutions de l’État s’en mêlent. C’est à cette époque que des puritains émigrent en Amérique pour fonder une société qui corresponde à leur idéal du royaume de Dieu (les « Pilgrim Fathers » ou Pères pèlerins). Les pays scandinaves sont, eux, solidement ancrés dans le luthéranisme. Catholiques et protestants cherchent par tous les moyens à gagner des adhérents.

Rome résiste aux avancées scientifiques : aux 16ème et 17ème siècles, des érudits comme Copernic, Bruno et Galilée sont malmenés. Ce n’est qu’en 1989 que le pape Jean-Paul II réhabilitera définitivement la recherche scientifique et les condamnés de jadis !

A partir de 1640, le jansénisme – une sorte de catholicisme augustinien et calviniste – se développe en banlieue parisienne et bouleverse le catholicisme français jusqu’à son déclin un siècle plus tard. Aux 18ème et 19ème siècles, le catholicisme hollandais est perturbé et un schisme y persiste encore de nos jours.

L’Édit de Nantes et la Révocation

L’Édit de Nantes (1598-1685) – un accord mutuel de paix initié par le roi Henri IV (protestant devenu catholique pour pouvoir régner sur la France, 1594), déclaré perpétuel et irrévocable – devient la loi du royaume. En voici les principales dispositions : le catholicisme est la religion d’État et est rétabli partout ; les protestants bénéficient cependant de la liberté de conscience et ont accès à tout emploi et à toute dignité, ils jouissent de toutes les garanties judiciaires, la liberté de culte leur est accordée à certains endroits et sous certaines conditions (mais pas à Paris et dans certaines villes, ni dans les résidences royales) ; quatre universités sont autorisées dans le pays ; les huguenots peuvent conserver leurs lieux fortifiés et leurs garnisons huit ans ; ils doivent respecter les fêtes catholiques, payer la dîme à l’État qui s’engage à verser un subside annuel aux pasteurs (clause peu respectée !). Du vivant d’Henri IV, cet Édit est respecté. Mais l’assassinat du roi en 1610, puis la politique de Richelieu, et finalement celle de Louis XIV y mettent fin. En 1685, l’irrévocable est révoqué. Applaudie à l’époque, la Révocation sera unanimement blâmée par la postérité !

Avec la Révocation, les huguenots ne peuvent plus exercer de pouvoir politique, ni même se rassembler pour le culte. Les autorités catholiques envoient des missionnaires pour ramener les brebis égarées au sein de l’église romaine, et ceci par tous les moyens, même les plus vils et les plus odieux. Les conséquences sont horribles pour les huguenots : des centaines de milliers émigrent en Angleterre, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Amérique, en Prusse, en Afrique du Sud, en Irlande, en Suisse, etc. Ils font prospérer l’économie et la vie spirituelle de leur terre d’accueil. Ces émigrés dressent l’opinion publique contre l’intolérance de la France. Les huguenots restés en France se trouvent, quant à eux, privés de leurs pasteurs et leur vie devient presque intolérable : leurs enfants doivent être baptisés par des curés (rétrécissement du protestantisme). Malgré toutes ces injustices, le petit îlot de résistants se trouve fortifié spirituellement ! La France, elle, est appauvrie spirituellement à l’aube du siècle des « Lumières », siècle durant lequel les philosophes s’opposent au christianisme.

La multiplication des dénominations

Le 16ème siècle est marqué par un retour à la Bible sous l’influence des Réformateurs. Toutefois, au 17ème siècle, une « orthodoxie » protestante se développe sans qu’elle s’accompagne toujours de la vie spirituelle apportée par la nouvelle naissance. Il en résulte une « scolastique » protestante où le travail intellectuel devient plus important que l’application des principes néo-testamentaires au quotidien (le 21ème siècle n’a rien apporté de nouveau de ce côté-là). La religion rationaliste produit un intellectualisme froid, des guerres de religion (1560-1648), l’émergence de la philosophie orgueilleuse et celle des sciences empiriques, tout en préparant le terrain pour les vrais réveils spirituels du 18ème siècle et des suivants, réveils qui s’opposent au rationalisme. Ce regain de ferveur religieuse débouche également sur le « dénominationalisme » et la tolérance pour des idées et des pratiques différentes entre les protestants eux-mêmes. Le foisonnement des dénominations d’origine protestante provient essentiellement du fait que désormais chacun, selon ses capacités et sa compréhension de la vérité biblique, peut se former sa propre opinion sur bien des questions délicates. Mais cette tendance au chacun pour soi reste généralement soumise à une forme de consensus. En effet, on admet généralement :

– que les différences d’opinions ne doivent pas toucher aux vérités fondamentales de la foi ;
– qu’aucune église ni association d’églises ne peut comprendre la totalité de la Révélation biblique, qu’aucune structure ne peut englober la totalité du corps de Christ ;
– que l’unité spirituelle existe entre tous ceux qui sont nés de nouveau ;
– que la tolérance, dans de sages limites, n’accepte pas de perversions doctrinales, même celles qui sont professées au nom du Christ.

Le dénominationalisme marque fortement l’histoire du protestantisme du 17ème au 21ème siècle. L’éparpillement des familles chrétiennes n’est sûrement pas idéal, mais il vaut mieux que l’autoritarisme de certains Réformateurs et de leurs successeurs directs.

L’extension du christianisme dans le monde

Du 16ème au 18ème siècle, on assiste à la propagation du christianisme sur les cinq continents. Celle-ci est bien plus importante que celle des religions humaines en place depuis des siècles, qui essaient aujourd’hui encore de rattraper leur retard. Cette progression phénoménale est accompagnée de l’émigration des peuples et de l’expansion des cultures et du commerce européens. Les conquêtes sont souvent militaires. Malheureusement, l’avance du « christianisme » est trop souvent entravée par :

– la piètre qualité de vie de ceux qui confessent le Christ,
– l’exploitation cruelle et malhonnête, parfois même l’extermination des indigènes,
– l’immoralité des conquérants,
– l’établissement de traditions et de rites dépourvus de spiritualité biblique.

L’expansion géographique est dominée par l’Espagne en Amérique, aux Philippines et aux Caraïbes ; par le Portugal au Brésil, sur les côtes africaines, en Inde, en Malaisie et en Chine ; par la France en Amérique du Nord et en Chine. Cette expansion coïncide avec les grandes explorations et la colonisation par les grandes puissances européennes ; mais elle est aussi liée à la Contre-Réforme catholique. De nouveaux ordres apparaissent qui apportent d’importants moyens humains et financiers (jésuites, capucins, théatins, lazaristes) ; des « réveils » touchent également des ordres plus anciens comme les franciscains, les dominicains et les augustins.

Aux 16ème et 17ème siècles, les protestants, eux, cherchent à consolider leurs gains en Europe et ne s’intéressent que trop peu à la mission à l’étranger. Heureusement, ce désintéressement initial cède la place à l’amour du Christ pour tous les nouveaux peuples découverts.

Il faudrait des livres pour résumer le travail missionnaire sur tous les continents. L’éclatement du christianisme depuis le 16ème siècle rend impossible le traitement détaillé de cette histoire dans le cadre de cette série d’articles. C’est une histoire où se mêlent privations, victoires, décès de missionnaires et avances parfois fulgurantes. Certains « indigènes » font également des œuvres dynamiques dont les résultats sont à couper le souffle. Si des transformations de tous ordres s’opèrent, il y a bien sûr aussi des tragédies et des erreurs nombreuses.

L’œuvre du Seigneur Jésus-Christ continue envers et contre tout. Il est toujours fidèle à son œuvre commencée il y a 2000 ans. Nous pouvons lui faire confiance, même si aujourd’hui, les persécutions contre les chrétiens ravagent de nombreux pays, même si les déviations doctrinales pullulent, et même si de vrais croyants s’assoupissent parfois, donnant l’impression que les paroles adressées à Laodicée s’appliquent à nous (Apoc 3.14-21). Le Seigneur aura pourtant le dernier mot de la victoire !

Conclusion

Tout au long de cette série d’articles sur l’histoire de l’Église, mon but a été de présenter la vérité historique, en ne cachant pas les erreurs de ceux qui sont considérés comme les plus grands chrétiens. La vérité ne doit pas avoir de préférence lorsqu’elle relate les faits. Mais aussi désagréable que soit l’examen des imperfections et des échecs de l’Église, on aurait grand tort de se détourner de son histoire : cela revient à contester les œuvres et le gouvernement souverain du Créateur. Même si nous ne comprenons pas toujours ce qu’il est en train de faire, faisons-lui confiance ! Et soyons reconnaissants de toutes les choses excellentes que nous devons à l’obéissance, aux sacrifices et à l’amour de la Vérité de ceux qui nous ont précédés sur le chemin de la foi.

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Série : Histoire de l'Eglise
McCarty Scott
Scott McCarty a fait ses études en théologie au Dallas Theological Seminary, aux États-Unis. Il exerce un ministère d’enseignement biblique en France depuis 1971. Cofondateur du Centre d’information à l’évangélisation et à la mission à Grenoble, il est membre de Promesses et auteur de nombreux articles.