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En dernière heure

Très brusquement, le propriétaire d’une fabrique, nommé Mûller, tomba malade. Un mal probablement resté latent pendant de longues années se révéla avec une telle force que le malade crut sa dernière heure venue. Il envoya chercher le médecin de famille, qu’il connaissait bien, ayant passé de bonnes heures avec lui, jouant aux cartes et dégustant quelque bonne bouteille. Le bon docteur l’ausculta posément et dit en souriant:

– Pas grand-chose! Je vais vous faire une piqûre de camphre; votre brave vieux coeur va gagner la course contre quelques stupides bacilles qui l’ont envahi. Demain, vous serez mieux.

Mais, dans le hall, devenu très sérieux, il ajouta à l’adresse de l’épouse du malade :

– Madame Mûller, attendez-vous au plus mal. Il ne passera pas la nuit. Il n’y a plus rien à faire. Aucun remède ne peut le sauver.

Lorsque l’épouse entra à nouveau dans la chambre, le malade s’aperçut que son visage était bouleversé et plein d’anxiété, il lui demanda:

-T’a-t-il dit peut-être autre chose?

L’épouse fondit en larmes et fit un signe avec la tête.

– Quel coquin, s’exclama en haletant le malade, devenu furieux.

– Quel menteur! Envoie chercher le professeur Schuler; je vais étouffer si l’on ne fait pas quelque chose.

Le professeur vint une heure plus tard et l’ausculta soigneusement. A la demande expresse du malade, il lui fit part de toute la vérité:

– D’après les connaissances que nous avons, humainement parlant toute aide est exclue. Je ne crois pas que demain vous serez encore en vie. Si vous avez quelque affaire à régler pour votre succession, faites-le de préférence tout de suite. Vous pourriez vous évanouir.

Lorsque le professeur se fut éloigné, Mûller s’adressa à sa femme, le coeur serré:

– Gertrude, ne pleure pas! Je dois mourir. Mon testament est fait depuis longtemps. Vous ne manquerez de rien. Finalement, il y a encore une vie après la mort, puis il y a encore là-haut le juste jugement de Dieu. Comment m’excuserai-je, vu que Je ne me suis guère conduit d’après la Parole et selon la volonté de Dieu. il me faut vraiment une aide spirituelle; envoie donc chercher le pasteur à la tête de notre église, M. Karo.

Ce qui fut fait, et vers les 20 heures, le pasteur s’annonça. Il était connu comme bon prédicateur. il passait pour un homme cultivé, moderne dans ses opinions. De plus, il était aimé dans la société pour son amabilité et sa vivacité d’esprit. A peine assis, il commença à alimenter la conversation comme si tout était au mieux sous un ciel serein. Cependant, le fabricant l’interrompit avec quelque brusquerie:

– Monsieur le pasteur, je n’ai plus le temps pour des babillages. Cette nuit, je dois mourir. Dites-moi clairement: existe-t-il des preuves scientifiques qu’avec la mort tout est fini ?

– Des preuves? peut-être beaucoup moins que de probabilités, mon cher monsieur, répondit l’ecclésiastique d’un air souriant et hautain. Ce que l’on nomme généralement l’âme de l’être humain n’est qu’une activité du cerveau. Dès que ces atomes se dissocient, ce que l’on nomme notre âme se dissout dans le néant. La conscience de soi-même s’éteint et ne se réveille pas. L’homme continue à vivre dans ses enfants, dans ses oeuvres et se trouve ainsi réuni à l’âme universelle. C’est ainsi que tombe dans le néant l’idée de récompense ou de juste punition après la mort. Tout le reste n’est que légende, poésie ou symbole pour la satisfaction de l’intelligence.

Le malade respira plus profondément, ses yeux changèrent d’expression, son regard se fit pénétrant et il répondit avec amertume :

– C’est bien de cette manière, à quelques nuances près, que je me figurais les choses; nos journaux et de nombreux savants les présentent dans ce sens. Mais aujourd’hui, face à la mort, tout ce déluge d’explications se dissipe disparaît. Ma foi d’enfant se réveille et je sais, j’en suis sûr, que le Dieu vivant va m’appeler devant son tribunal. Si vous n’avez rien d’autre à me dire, vous ne m’êtes en cette heure d’aucune utilité… Ou bien avez-vous de réelles preuves pour votre enseignement?

– J’avoue que, sur cette terre, ce que vous nommez l’âme immortelle ne se laisse nulle part saisir. Chaque atome a une petite valeur d’énergie, une espèce d’âme. Lorsque la connexion entre les atomes cesse, la conscience d’être en vie disparaît. Vous devez vous contenter de ce que vous avez: ce que vous avez vécu et ce que vous avez pu faire…. répondit l’ecclésiastique.

– Mais, justement, ce sont mes actes qui m’accusent et me disent que Je suis un pécheur. Ce que vous dites n’est que non-sens, répliqua le fabricant. Un tas de houille formerait aussi une espèce d’âme universelle, tout comme un éléphant. Mais l’homme a une conscience de lui-même. Son « MOI » reste le même, même si sa nature change et si les souvenirs de l’enfance ne s’effacent jamais ! Notre cerveau ne serait-il qu’une roue liée à une autre roue, l’esprit, et les deux liés ici-bas pour notre vie corporelle sur cette terre? Si cette connexion se brise, et si l’une des roues, le cerveau, se désaxe, l’esprit demeure, une vie se poursuit. L’esprit peut encore paraître devant Dieu !

– Ce ne sont que tracasseries personnelles sans fruit, répondit le pasteur contrarié. La feuille de l’arbre reçoit sa couleur verte en été, elle se colore d’autres couleurs à l’automne, puis elle tombe sans bruit à terre, l’enrichissant pour la saison suivante. Ne vous creusez donc pas la tête pour cela et consolez-vous en pensant que vous continuez à vivre dans vos enfants et vos oeuvres.

– Monsieur le pasteur, si c’est comme vous dites, alors je suis perdu ! Mes enfants n’ont reçu de moi que de mauvais exemples. ils sont, à l’exception de ma fille Eifriede, tous devenus des incroyants, et mes oeuvres m’accusent ! Malhonnête avec l’argent, infidèle dans le mariage, faux dans mes paroles, orgueilleux et dur envers mes employés, jaloux contre ceux qui étaient plus riches que moi c’est le tableau de ma personne. Serait-ce une consolation si je dois continuer à vivre dans mes mauvaises actions? Non. Si vous n’avez aucune aide à m’apporter dans mes remords de conscience, réveillés par le souvenir de mes péchés, alors votre religion n’est que néant, moins que rien et votre enseignement moderne est vain et induit en erreur.

– Vous devriez prendre un peu de morphine, dernier conseil que donna le pasteur en se levant, sans pouvoir cacher sa contrariété face à l’opposition du malade. Peut-être votre anxiété pourra-t-elle se calmer et vous pourrez vous assoupir doucement.

– Où aller, alors, cria le malade furieux, au tribunal divin? C’est là que j’intenterai une action contre vous. Vous m’avez flatté au cours de ma vie et vous avez endormi mon âme par vos belles paroles, et maintenant, à l’heure de la mort, vous me laissez mourir de soif.

Branlant le chef, secouant les épaules, l’ecclésiastique quitta le lit du malade, en murmurant par devers lui :

– Toujours la même scène. Ces mourants, semble-t-il, paraissent tous retourner en enfance; ils reviennent à ces vieilles histoires de vie après la mort et de Jugement. Je ne m’y attendais pas de la part d’un homme si éduqué et si éclairé que ce M. Muller a toujours été.

Une heure plus tard, l’angoisse du mourant était à son comble. il certifiait à sa femme qu’il n’avait pas de douleurs corporelles, qu’il ne sentait pas son corps, mais que seule la crainte du Jugement divin le tourmentait terriblement. Subitement, sa femme lui dit:

– Lorsque notre fille Elfriede vivait encore à Zurich, elle estimait beaucoup le jeune prédicateur Schafer, qui parlait souvent dans leur petit cercle missionnaire. il n’habite pas loin d’ici. Puis-je le faire chercher?

– Schafer? Oui, c’est ce qu’on appelle un momier, un piétiste! Celui-là croit au moins en quelque chose. Va toi-même le chercher, Gertrude, et dis-lui ma grande anxiété, lui demandant s’il peut venir, malgré l’heure si tardive?

Une demi-heure plus tard environ, le pasteur Schafer arrivait au pied du lit du malade et prenait dans sa main la main tremblante du mourant.

– Monsieur le pasteur, Je n’ai plus beaucoup de temps. Permettez que j’avoue devant vous mes nombreux péchés, afin que vous sachiez quel homme vous avez devant vous, dit M. Mûller, s’exprimant avec difficulté. Puis il fit l’image d’un homme égoîste et avide de jouissances, tant et si bien que son épouse s’effondrait de terreur en entendant les méfaits qu’il avouait et dont elle ne l’aurait jamais cru capable. Que de fois avait-il été infidèle à sa femme, faussé ses déclarations d’impôts, triché en jouant aux cartes, cherché à écraser ses concurrents, manqué de respect à ses employés, et autres choses encore ! Quand Il eut terminé et retomba sur le coussin épuisé, le pasteur lui dit sérieusement:

Alors, assurément, vous êtes perdu!

– Perdu! C’est bien ce que je pense, répondit le désespéré.

Mais Schâfer reprit:

– Mais Jésus est venu pour chercher et sauver ceux qui sont perdus. Dès que vous admettrez que vous ne pouvez personnellement rien faire pour vous sauver, que vous êtes un nageur perdu dans le flot des vagues qui se brisent contre les rochers, alors, vous êtes dans le chemin de la grâce en Jésus.

Comme M. Mûller avait fermé les yeux et se taisait, Schàfer parlait des souffrances de Jésus, de sa mort; comment, à cause de nos péchés Il avait accompli tout ce que demandait Dieu, et comment Il tendait maintenant ses bras vers le pécheur perdu, afin de le sauver. Aujourd’hui encore Jésus désirait lui pardonner toute sa dette et l’effacer, pour en enlever jusqu’au souvenir.

– TOUT? – Tout à coup Mûller parla si fort et si brusquement que le pasteur sursauta.

– Oui, tout! La punition, Il la prend sur Lui, afin que nous recevions la paix dans notre coeur.

Pendant un moment, le silence régna dans la chambre, si bien que l’on entendit sonner onze heures à l’horloge, sur la cheminée. A l’arrière-plan, l’épouse retenait ses sanglots. Alors, le malade s’exprima doucement:

– Priez pour moi!

Schâfer se mit à genoux et pria d’une manière si confiante, comme un enfant. Gertrude, l’épouse, n’avait jamais entendu pareille prière. Lorsqu’il eut dit « Amen », le malade murmura:

– Jésus, aie pitié de moi.

Schâfer reprit ensuite:

– Ainsi parle le Seigneur: je ne mettrai point dehors celui qui vient à moi; si vos péchés sont comme le cramoisi, ils deviendront comme la neige. Le sang de son Fils, Jésus-Christ, nous purifie de tout péché.

– C’est ce qu’a dit ma mère défunte lorsqu’elle mourut – mère, je veux aller là où tu es. Jésus, prends soin de moi!

A vue d’oeil le visage du mourant se modifiait…

– Monsieur Mûller, croyez-vous que Jésus vous pardonne tous vos péchés?, demanda le pasteur après une courte pause.

– Oui, je crois en Toi, Seigneur Jésus! Prends aussi soin de ma pauvre femme et de mes enfants, à l’âme desquels je n’ai fait que du mal. Jésus, fais-nous du bien !

Il priait à voix basse.

Brusquement sa main saisit la couverture, les yeux grands ouverts, le regard fixé vers le ciel, comme s’il voyait.., puis, avec un râle, il s’éteignit.

En pleurs, Gertrude se jeta à genoux au pied du lit. Schàfer fit de même et remercia Dieu pour la grâce manifestée à la dernière heure et pria, demandant la bénédiction divine pour toute la famille.

* * *

Pourquoi attendre jusqu’au dernier moment? Adressez-vous au Seigneur avant qu’il ne soit trop tard. Aujourd’hui est le jour du salut. Ne mettez pas votre confiance dans un avenir Incertain. Bien souvent, il n’y a qu’un pas entre la vie et la mort (I Sa. 20: 3). Vous pourriez, mieux que cela, vous devez posséder dès maintenant l’assurance du salut éternel.

« JE NE METTRAI PAS DEHORS CELUI OUI VIENT A MOI » (Jn 6: 37).
Il tiendra parole.

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