Interview d’une ancienne faiseuse de « secret »
Jacqueline F., d’origine alsacienne, est née en France en 1945 à Cornimont, dans les Vosges. Elle vit dans le canton du Jura en Suisse. Elle est mariée, mère et grand-mère. Elle a pratiqué le « secret » 1 durant douze ans. |
Qu’est-ce qui motivait votre pratique du secret?
J’étais heureuse de pouvoir aider les gens et j’avais l’impression de me rendre utile en faisant le bien.
Aviez-vous reçu plusieurs secrets?
Oui, trois : pour l’arthrose, les verrues et les brûlures, chaque secret étant spécifique à une maladie. Mon mari, qui avait des sciatiques, devait régulièrement contacter une personne qui avait celui correspondant à son problème.
Par qui vous ont-ils été transmis ?
Le premier, celui de l’arthrose, m’a été donné par un monsieur âgé, célibataire, que j’ai rencontré dans un hôpital alors que j’y travaillais. Cet homme n’avait pas de famille. En principe, le secret se transmet dans le cadre familial, de génération en génération. Il faut toujours le donner à un plus jeune que soi.
Vous a-t-on demandé de vous engager à garder le secret?
Oui, et l’homme qui m’a donné celui pour l’arthrose m’avait ordonné de n’accepter ni merci ni argent, ce que j’ai toujours respecté pour les secrets que j’utilisais.
Les gens étaient-ils systématiquement et définitivement guéris ?
Non. Par exemple, pour le secret de l’arthrose, j’étais la seule dans le Jura à l’exercer et c’est celui que je pratiquais le plus ; les personnes allaient mieux durant trois mois seulement, puis devaient revenir.
L’un de mes neveux se brûlait fréquemment. Le secret des brûlures fonctionnait, mais, quelque temps après, il se brûlait de nouveau ; c’était une sorte de cercle vicieux. Depuis que j’ai arrêté, il ne s’est plus jamais brûlé.
À qui fait-on appel dans l’invocation du secret ?
Pour le secret de l’arthrose, j’invoquais un archange. Je n’en avais pas le droit, car seul Dieu peut leur donner des ordres. Pour le secret des verrues, je priais une sainte décédée. Qui donc répondait à mes prières ? Pour le secret des brûlures, je parlais au feu de l’enfer et j’évoquais la trahison de Judas au jardin des Oliviers.
Vous étiez croyante, mais pratiquiez le secret… Est-ce compatible?
J’avais une forme de croyance en Dieu. J’étais vraiment sincère, pieuse et persuadée d’être un canal par lequel Dieu guérissait les malades. De plus, dans l’une de mes prières, après avoir invoqué une sainte, je devais réciter le « Notre Père », ce qui me confortait dans ma religion.
Pour quelle raison avez-vous renoncé à cette pratique ?
En 1989, j’ai eu la révélation que Jésus-Christ est vivant. Je me suis convertie et j’ai été baptisée. À la suite de cela, j’ai commencé à lire la Bible. J’ai été particulièrement interpellée par le verset de Marc 16.17, où Jésus dit : « En mon nom, ils chasseront les démons, ils imposeront les mains aux malades et les malades seront guéris. » J’ai alors réalisé que, dans le secret, le nom et l’œuvre de Jésus ne sont jamais invoqués !
Quelle différence y a-t-il entre la prière d’un chrétien et celle d’un faiseur de secret ?
Le chrétien prie Dieu, le Père, dans le nom de Jésus en raison du sacrifice qui a été accompli à la croix. Dans le secret, on s’adresse au feu de l’enfer ou à des morts, mais jamais à Jésus-Christ2.
Ceux qui pratiquent le secret sont-ils au bénéfice d’un épanouissement particulier ?
Dans les familles qui pratiquent le secret, que ce soit dans mes Vosges natales, en Alsace ou dans certains villages jurassiens, je constate de nombreux décès dans des circonstances terribles, tels que suicides, assassinats, accidents, ainsi que des dépressions et des maladies héréditaires et mystérieuses sur plusieurs générations.
Qu’est-ce qui a changé dans votre vie après avoir renoncé à ces pratiques?
J’ai enfin la paix, elle est dans tout mon être, elle est là de jour comme de nuit. Elle dépasse tout ce que nous pouvons imaginer. Plus de dépression, plus de présences démoniaques dans ma chambre… Jésus a tout changé.
Avez-vous déjà été guérie physiquement par Dieu ?
Oui. Un soir, j’ai fait six crises d’asthme. J’étais seule et j’ai essayé d’appeler les urgences, mais j’étais à terre, sans voix. J’ai alors appelé Jésus et je me suis endormie. Le lendemain, alors que j’avais frôlé la mort, j’ai fait le choix de pardonner à mon père terrestre tout ce qu’il m’avait fait subir. J’ai aussi demandé pardon à Dieu de tout ce que j’avais fait de mauvais dans ma vie. Le jour même, des chrétiens ont proposé de prier pour moi. Je ne croyais pas que je pouvais être guérie, car j’avais déjà cherché ma guérison dans l’occultisme, sans succès. Sur le moment, rien ne s’est passé visiblement. Toutefois, une semaine plus tard, j’ai cru que Jésus pouvait m’accorder la guérison. Les chrétiens d’une église évangélique de La Chaux-de-Fonds ont prié pour moi en me faisant l’onction d’huile. Instantanément, j’ai été guérie de cet asthme qui me faisait souffrir depuis l’enfance !
Que faut-il faire si quelqu’un appelle un faiseur de secret à notre insu ?
Si vous êtes un chrétien né de nouveau et pas seulement un chrétien de nom, vous n’avez rien à craindre, ni à faire. Si vous ne l’êtes pas, votre corps sera peut-être guéri, mais votre âme sera liée à Satan pour le « service » qu’il vous a rendu, car il ne fait rien gratuitement !
Interview réalisé par D. L.
- Le « secret » est une méthode de guérison basée sur des formules occultes. Dans la pratique, il s’agit de guérir bon nombre de maladies, et même les troubles psychologiques, par le moyen de formules occultes. Il s’apparente au chamanisme et à la pratique des guérisseurs africains.
- Certains secrets peuvent inclure des invocations aux trois personnes de la Trinité, mais on ne peut assimiler la récitation de telles formules à la prière du vrai croyant qui s’adresse à Dieu qu’il reconnaît comme son Père céleste, son Seigneur et Sauveur personnel. Quant à la manière de comprendre le passage de marc 16.17, voir l’article de F. Varak dans ce numéro (NDLR)