Dossier: 1-2 Samuel
Share on FacebookShare on Google+Tweet about this on TwitterShare on LinkedInEmail this to someonePrint this page

La grâce royale manifestée envers un infirme – 2 Samuel 9


David dit : Reste-t-il encore quelqu’un de la maison de Saül, pour que je lui fasse du bien à cause de Jonathan ? Il y avait un serviteur de la maison de Saül, nommé Tsiba, que l’on fit venir auprès de David. Le roi lui dit : Es-tu Tsiba ? Et il répondit : Ton serviteur ! Le roi dit : N’y a-t-il plus personne de la maison de Saül, pour que j’use envers lui de la bonté de Dieu ? Et Tsiba répondit au roi : Il y a encore un fils de Jonathan, perclus des pieds. Le roi lui dit : Où est-il ? Et Tsiba répondit au roi : Il est dans la maison de Makir, fils d’Ammiel, à Lodebar. Le roi David l’envoya chercher dans la maison de Makir, fils d’Ammiel, à Lodebar. Et Méphiboscheth, fils de Jonathan, fils de Saül, vint auprès de David, tomba sur sa face et se prosterna. David dit : Méphiboscheth ! Et il répondit : Voici ton serviteur. David lui dit : Ne crains point, car je veux te faire du bien à cause de Jonathan, ton père. Je te rendrai toutes les terres de Saül, ton père, et tu mangeras toujours à ma table. Il se prosterna, et dit : Qu’est ton serviteur, pour que tu regardes un chien mort, tel que moi ? Le roi appela Tsiba, serviteur de Saül, et lui dit : Je donne au fils de ton maître tout ce qui appartenait à Saül et à toute sa maison. Tu cultiveras pour lui les terres, toi, tes fils, et tes serviteurs, et tu feras les récoltes, afin que le fils de ton maître ait du pain à manger ; et Méphiboscheth, fils de ton maître, mangera toujours à ma table. Or Tsiba avait quinze fils et vingt serviteurs. Il dit au roi : Ton serviteur fera tout ce que le roi mon seigneur ordonne à son serviteur.  Et Méphiboscheth mangea à la table de David, comme l’un des fils du roi.  Méphiboscheth avait un jeune fils, nommé Mica, et tous ceux qui demeuraient dans la maison de Tsiba étaient serviteurs de Méphiboscheth. Méphiboscheth habitait à Jérusalem, car il mangeait toujours à la table du roi. Il était boiteux des deux pieds.
Le but des chapitres 9 et 10 de 2 Samuel est de montrer comment David a géré la transition officielle entre son règne et celui de son prédécesseur, Saül. La première étape était de remporter l’adhésion des tribus du Nord en se montrant plein de grâce envers un survivant de la tribu de Saül.
David avait promis à Jonathan (1 Sam 20.14-17,42) et à Saül (1 Sam 24.17-23) qu’il ne retrancherait pas leur postérité ni leur nom d’Israël. Dans ce récit de 2 Samuel 9, je suggère que nous nous focalisions sur Méphiboscheth, le descendant du roi Saül.

1. Le descendant du roi Saül recherché (v.1-3a)

Bien que David n’ait aucun état d’âme pour faire mourir ses ennemis (1 Sam 25.34), et même s’il considérait les gens de la maison de Saül comme ses ennemis méritant la mort (2 Sam 3.1,6,8,10), David se met en recherche, afin de trouver quelqu’un de la maison de Saül pour lui faire du bien.
Le mobile de sa recherche est clairement identifié : « à cause de Jonathan » (v. 1). Une amitié forte les liait. David avait demandé à Jonathan de l’aide (1 Sam 20.8), et Jonathan avait fait de même vis-à-vis de David : « Si je meurs, ne retire jamais ta bonté envers ma maison, pas même lorsque l’Éternel retranchera chacun des ennemis de David de dessus la face de la terre .» (1 Sam 20.14). C’est donc maintenant le temps pour David de tenir sa promesse.
David se met méthodiquement à la recherche d’éventuels descendants de Jonathan en interrogeant un serviteur de la maison de Saül, Tsiba. David précise bien ses intentions : démontrer envers lui la bonté de Dieu (v. 3). Tsiba indique au roi qu’il existe bel et bien un descendant de Jonathan, son fils Méphiboscheth, et que celui-ci est infirme des pieds.

2. Le descendant du roi Saül retrouvé (v. 3b-5)

Que savons-nous de Méphiboscheth ? Il est le fils de Jonathan, le petit-fils de Saül. L’étymologie de son prénom est parlante : « boscheth » signifie « honte ». Il est « perclus » des pieds, c’est-à-dire infirme. Lorsque la nouvelle est arrivée que son père et son grand-père avaient été tués (2 Sam 4.1-4), sa nourrice l’a pris et a couru pour le protéger. Mais dans sa fuite, Méphiboscheth est accidentellement tombé des bras de sa nourrice et est handicapé depuis ce jour-là : il avait cinq ans. Il a trouvé refuge chez un certain Makir, fils d’Ammiel. Il n’avait probablement aucun moyen de gagner sa vie si ce n’est de demander l’aumône. Vraisemblablement, il fuyait le nouveau régime, car Lodebar se trouve à 15 kilomètres au sud-est de la mer de Galilée, dans le désert près du Jourdain. Il était également un oublié, car il a fallu faire des recherches pour le retrouver et voir s’il restait à Jonathan des descendants.
Saül, le grand-père de Méphiboscheth, avait refusé d’obéir à Dieu et recherché sa propre gloire. C’est pourquoi Dieu l’avait rejeté. Saül s’est suicidé sur le champ de bataille après avoir été mortellement blessé (1 Sam 31.4). L’oncle de Méphiboscheth, Ish-Boscheth, fils de Saül, n’avait pas été tué comme ses frères au mont Guilboa. Sous la protection d’Abner, chef de l’armée de Saül, il a commencé à régner en Israël suite au décès de son père (2 Sam 2.8-9). La guerre entre la maison de Saül et celle de David a duré des années (2 Sam 3.1). Mais pendant que la maison de Saül s’affaiblissait, celle de David se fortifiait. Ish-Boscheth et Abner furent tués. Dès lors, David devenait le roi non seulement de Juda, mais également d’Israël ; le royaume était ainsi unifié (2 Sam 5.1-6).
Après que David a été établi roi sur tout le pays, il eût été juste pour lui d’éliminer tous les descendants de son rival, Saül, comme le faisaient tous les rois de l’époque. Méphiboscheth lui-même a reconnu qu’il méritait la mort (2 Sam 9.8, 19.27-28) : il était un ennemi naturel de David. Cela rend cette histoire d’autant plus extraordinaire : le roi fait grâce à un condamné à mort !

3. Le descendant du roi escorté (v. 6)

Imaginez la scène : les hommes du roi frappent à la porte de Makir dans le désert, où Méphiboscheth se cache, et lui disent que le roi David souhaite le voir, Méphiboscheth pense que sa dernière heure est venue ! Il est escorté jusqu’à Jérusalem où il est introduit devant le roi.
En présence du roi, Méphiboscheth tombe sur sa face devant David ! Il se prosterne devant lui et démontre une attitude respectueuse, de crainte.

4. Le descendant du roi effrayé (v. 7)

Méphiboscheth a tout à craindre de son audition devant David, il connaît le sort réservé en général aux descendants de la famille d’un roi déchu ou vaincu. Quel devait être son état psychologique au moment où il accède à la présence du roi ! Il savait que son oncle Ish-Boscheth avait été décapité (2 Sam 4.5-8).
Mais dès qu’il est en présence de David, ce dernier lui dit : « Ne crains point » (v. 7a). David surenchérit immédiatement et lui annonce qu’il veut lui faire du bien à cause de son père Jonathan. Cette grâce que Méphiboscheth va éprouver n’a rien à voir avec lui-même, ni à cause de ce qu’il est ou ce qu’il a fait. La raison de la grâce royale est dévoilée : c’est à cause d’une promesse faite à son père par David.

5. Le descendant du roi déconcerté (v. 8)

Méphiboscheth, qui vient d’apprendre que David lui fait non seulement grâce, mais l’invite à la table du roi tous les jours et lui donne toutes les terres de son père, est déconcerté ! Il ne comprend pas… « Qu’est ton serviteur, pour que tu regardes un chien mort, tel que moi ? » (2 Sam 9.8) Il se considère comme un chien mort, qui ne vaut absolument rien ! Non seulement il se compare à un chien, mais qui plus est à un chien mort !1

6. Le descendant du roi élevé (v. 9-13)

Méphiboscheth reçoit les biens de Saül et 35 serviteurs pour cultiver ses terres, ce qui démontre qu’il ne s’agissait pas d’un petit lopin de terre ! Il déménage de sa cachette pour rejoindre Jérusalem avec son jeune fils Mica, probablement dans une maison qui avait appartenu à Saül. Il mangea ainsi toujours à la table du roi et était comme un fils du roi. Toutefois, son handicap restait, en rappel à sa condition première.
Ce récit d’un roi qui fait grâce à un homme handicapé, à cause de la promesse faite à son père, est une illustration étonnante de la sublime grâce de Dieu à notre égard.
« Rendez grâce au Père, qui vous a rendus capables d’avoir part à l’héritage des saints dans la lumière ; il nous a délivrés de la puissance des ténèbres et nous a transportés dans le royaume de son Fils bien-aimé, en qui nous avons la rédemption, le pardon des péchés » (Col 1.12-14).
Ce récit illustre sept merveilleuses composantes de la grâce de Dieu à notre égard :

1) La grâce de Dieu est divine

C’est à cause de sa promesse à Jonathan que David a recherché Méphiboscheth. David s’est souvenu de l’alliance qu’il avait faite. Cet accord a sans doute été conclu avant même la naissance de Méphiboscheth. David a pris l’initiative de faire du bien à son ennemi. C’est ce que Dieu a fait avec nous : « Mais, lorsque la bonté de Dieu notre Sauveur et son amour pour les hommes ont été manifestés, il nous a sauvés, non à cause des œuvres de justice que nous aurions faites, mais selon sa miséricorde » (Tite 3.4-5a)2 . Nous étions ennemis de Dieu, et il a pris l’initiative de nous révéler sa miséricorde et de nous sauver. Quelle grâce magnifique !

2) La grâce de Dieu est nécessaire

La condition de Méphiboscheth avant de recevoir cette grâce de David nous rappelle notre état avant d’avoir été les bénéficiaires de la grâce de Dieu.
a. Il était maudit
Parce qu’il est le petit-fils de Saül, Méphiboscheth est né dans une famille ennemie de David. Il a hérité, sans le vouloir, d’une malédiction. Nous aussi, nés d’Adam, avons reçu de celui-ci la nature pécheresse (Rom 5.12), car à cause d’une seule offense, la condamnation a atteint tous les hommes (Rom 5.18).
b. Il avait un nom de honte
Méphiboscheth signifie « honte ». Devant Dieu, tout homme, à cause de son péché, devrait avoir honte. Suite à leur péché, Adam et Ève ont eu honte (Gen 3.7).
c. Il était infirme
Méphiboscheth est infirme des pieds. De son côté, l’homme pécheur ne peut marcher devant Dieu d’une manière satisfaisante.
d. Il était pauvre
Méphiboscheth était pauvre avant de recevoir de David toutes les terres de son père. Avant d’être enrichis par Dieu de nombreuses bénédictions spirituelles (Éph 1.3ss), nous étions pauvres.
e. Il était fugitif
Vraisemblablement, Méphiboscheth fuyait le nouveau régime. L’homme pécheur fuit Dieu : Adam et Ève après avoir péché ont fui la présence de Dieu. Jonas également a fui la présence de Dieu après lui avoir désobéi.
f. Il était oublié
Si le serviteur de Saül n’avait pas été là ; qui se serait souvenu de Méphiboscheth ? Aujourd’hui, combien d’hommes et de femmes ont l’impression de ne compter pour personne ? d’être abandonnés ?
g. Il était condamné à mort
Méphiboscheth se savait condamné à mort tout comme la juste rétribution du péché, c’est la mort (Rom 3.23 ; 6.23).
h. Il était un ennemi de David
Si Méphiboscheth était de facto un ennemi de David, notre nature caractérisée par le péché nous constitue, que nous le voulions ou pas, comme des ennemis de Dieu (Rom 5.10).

3) La grâce de Dieu est active

La grâce de Dieu nous cherche. Elle nous débusque, là où nous sommes — même parfois dans les situations les plus improbables. Dieu a activement travaillé pour nous offrir le salut en Jésus-Christ (Rom 5.6-11). David n’a pas simplement envoyé des béquilles à Méphiboscheth, mais il l’a fait venir vers lui dans son palais. Il s’est engagé pour lui et a fait preuve d’initiative.

4) La grâce de Dieu est inattendue

Pour Paul, la grâce de Dieu s’est manifestée sur le chemin de Damas, de manière totalement inattendue (Act 9.3ss). Matthieu était assis à son bureau de collecteur d’impôt quand Jésus l’a appelé à le suivre comme disciple ; il s’est exécuté sur-le-champ (Mat 9.9). Le geôlier de la prison dans laquelle Paul et Silas chantaient a eu une occasion unique de laisser la grâce de Dieu l’atteindre et il l’a saisie (Act 16.25-34).

5) La grâce de Dieu est surprenante

Moïse a été épouvanté dans la présence de Dieu (Héb 12.21). Pierre, Jacques et Jean ont été saisis de peur devant la sainteté de Dieu (Mat 17.6). Devant Dieu, tout pécheur sait qu’il mérite la mort. Il tremble. Mais Dieu dit : « Ne crains point. Bien qu’il soit vrai que tu mérites mon courroux, je t’aime et te pardonne. Mon Fils est mort à ta place. Tu as été choisi avant la fondation du monde pour être adopté dans ma famille. Je t’ai racheté par mon Fils. En lui, il y a pardon et bénédiction pour tous les pécheurs repentants. Aujourd’hui, je fais de toi un fils de Dieu et je te donne la vie ! »

6) La grâce de Dieu élève

David a donné à Méphiboscheth les terres de son père et une place à la table du roi. Tous les croyants seront conviés aux noces de l’Agneau (Apoc 19.7-10) et assis à la table du roi. Mieux encore, nous sommes fils de Dieu (Jean 1.12), car nous avons été adoptés par Dieu (Rom 8.14-15). Celui-ci nous comble de bénédictions spirituelles (Éph 1.3ss) pour l’éternité (Jean 3.16).

7) La grâce de Dieu est disponible

« Demandez, et l’on vous donnera ; cherchez, et vous trouverez ; frappez, et l’on vous ouvrira » (Mat 7.7).
« Jésus, se tenant debout s’écria : Si quelqu’un a soif, qu’il vienne à moi, et qu’il la boive » (Jean 7.37-38).
Share on FacebookShare on Google+Tweet about this on TwitterShare on LinkedInEmail this to someonePrint this page
  1. A noter que le chien n’a jamais été considéré en Orient comme l’ami et le compagnon de l’homme. En général, les chiens étaient laids, sales et repoussants. Ils erraient dans les rues à la recherche de quelque nourriture, se nourrissant même de cadavres (cf. 1 Rois 14.11, 16.4, 21.23-24, 2 Rois 9.10,36), se reproduisant beaucoup trop facilement et hurlant la nuit (cf. Ps 59.6,14).
  2. Voir aussi Jean 6.37,44,65, 15.16
Glass John
John Glass est enseignant dans l’Église Évangélique Internationale de Genève, fondateur de Calvin Tours (calvintours.com), et titulaire d’un doctorat en théologie du Master’s Seminary à Los Angeles.