La musique et le chant dans la Bible et dans l’Eglise
L’origine de la musique est surnaturelle, c’est-à-dire qu’elle vient de Dieu qui a créé les oiseaux avant les hommes! Nous disons que les oiseaux «chantent»; en réalité, ils font résonner leur voix librement et spontanément, (tout étant «programmé» pour cela) et Dieu a fait en sorte que dans la plupart des cas, le résultat soit agréable à entendre.
Le premier «musicien» de la Bible n’était pas un «chrétien» (Gen 4.21), mais Youbal, fils de l’affreux Lémek, le premier bigame; il n’empêche que la musique est un des plus merveilleux dons de Dieu, et nous voyons que Dieu prodigue ses dons naturels sur les méchants comme sur les bons. C’est ce que nous appelons la «grâce commune», les bonnes choses que Dieu accorde indifféremment aux justes et aux injustes, en tant qu’hommes. Cela veut dire pratiquement que nous ne devons pas avoir honte d’être culturellement redevables à quelqu’un qui n’est pas converti, et nous pouvons utiliser librement pour le chant chrétien une mélodie composée par un païen, à condition seulement qu’elle y convienne. C’est ainsi que dans nos recueils de cantiques nous pouvons avoir, et à juste titre, des mélodies de tel ou tel compositeur à la vie parfois déréglée, sans préjuger de son état spirituel.
Il va sans dire que le roi David est le grand musicien de la Bible; il jouait très bien de la harpe 1 Sam 16.23 et nous pouvons supposer qu’il s’y était exercé tout en paissant les troupeaux de son père, car la harpe de l’époque était beaucoup plus portative que le grand instrument moderne. David avait ceci de particulier, qu’il était en même temps musicien, poète et prophète, comme nous le voyons dans le livre des Psaumes, dont la moitié lui sont attribués dans leur titre. En fait, le chant consacre le mariage parfait de deux arts, la musique et la poésie, et celui qui s’accompagne d’un instrument de musique, dans un chant qu’il a lui-même composé, comme ce fut le cas de David, est ou doit être un artiste achevé. Ajoutons qu’en plus David fut prophète, homme inspiré! Il était donc particulièrement doué sur le plan naturel et spirituel.
Le passage mentionné ci-dessus nous montre la valeur thérapeutique de la musique, qui a été reconnue depuis fort longtemps. Elle peut être aussi une inspiration (2 Rois 3.15). L’un des plus grands prédicateurs de notre siècle, Martin Lloyd Jones, conseillait aux pasteurs en manque «d’inspiration» pour leur sermon, d’écouter de la belle musique pour se mettre d’attaque!
David n’était pas seulement prophète, mais aussi ancêtre et préfiguration de Christ en tant que l’Oint de l’Eternelle Messie (2 Sam 23.1). A ce titre il a pu écrire en 2 Sam 22.50, Je te célébrerai parmi les nations. ô Eternel, et je psalmodierai (en l’ honneur de) ton nom, car il fut le chantre agréable d’Israël (2 Sam 23.1; voir Ps 22.23: Je te louerai au milieu de l’assemblée. Or, il se trouve que ces deux paroles sont citées dans le NT à propos de Christ (Rom 15.9 et Héb 2.12).
Dans quel sens le Christ glorifié chante-t-il les louanges de Dieu parmi les nations? Il le fait par son esprit qu’il a donné à tous ceux qui lui obéissent, quelle que soit leur origine ethnique. (Act 16.25) Vers le milieu de la nuit, Paul et Silas chantaient les louanges de Dieu, et les prisonniers les écoutaient. Dans les jours de sa chair, nous savons que Jésus aimait chanter les louanges de Dieu avec ses disciples, (Mat 26.30: Après avoir chanté (les psaumes..), (probablement les Ps 115-118 que les Juifs chantaient après la Pâque). Lui seul formait les chants en pleine connaissance de cause.
Tout ceci nous prépare pour considérer la place du chant dans l’Eglise. Quatre passages des épîtres de Paul nous en parlent.
1) 1 Cor 14.15: Je chanterai par l’esprit. mais je chanterai aussi avec l’intelligence. Dans ce passage étrangement actuel, Paul combat l’enthousiasme des Corinthiens. Ils étaient les frères «pentecôtistes» et «charismatiques» de l’époque! Il est bien possible qu’à leurs yeux, seul le chant «en langues» (glossolalie) pouvait être dans I ‘Esprit. L’apôtre inspiré n’est pas de cet avis; il n’y a chez lui aucune opposition entre l’Esprit et l’intelligence, voir (Es 11.2). « Chanter avec intelligence » fait allusion au Ps 47.8 dans la version grecque (LXX) qui était la Bible de la Diaspora juive et des premiers chrétiens: Car Dieu est Roi de toute la terre : psalmodiez avec intelligence! {version Darby ) Cela veut dire pratiquement que dans l’Eglise nous devons comprendre et approuver ce que nous chantons, ce qui ne va pas de soi. Que signifie, par ex., « Ta gloire est encore voilée, d’un voile ensanglanté? » Comment concilier cela avec 2 Cor 4.3: Si notre évangile est voilé, il est voilé pour ceux qui périssent ? Et combien peuvent dire sincèrement «Et tout bas je dis sans cesse, Il est à moi, je suis à lui» ? Ce que l’on ne peut chanter avec intelligence, on ne devrait pas le chanter du tout… Cela ne veut pas dire que nous savons tout; mais que nous sommes toujours désireux d’apprendre. L’avantage du chant des psaumes est que l’on peut vraiment les chanter avec intelligence spirituelle; mais (comme pour les cantiques modernes) il faut aussi qu’ils soient «chantables», ce qui n’est pas toujours le cas.
2) 1 Cor 14.26. Ce verset nous donne un aperçu de la liberté spirituelle dont jouissaient les premiers chrétiens dans leur culte, qui n’était pas figé dans une liturgie traditionnelle comme cela est trop souvent le cas, même chez ceux qui se glorifient de «la liberté de l’Esprit» Il semblerait qu’une grande place y fut laissée à la spontanéité. Il n ‘y avait pas encore de recueil de cantiques en dehors du livre des Psaumes. Si nous considérons l’origine de chacun de nos cantiques, il a bien fallu qu’il y eut une première fois où ils ont été chanté en public. Aussi est-il indispensable que ce processus continue; que les poètes et musiciens chrétiens se mettent donc à l’oeuvre, en disant: Mon oeuvre est pour le Seigneur!
Seulement, il y a une double exigence; d’une part, il faut qu’il soit possible de chanter tel cantique «avec intelligence», ce qui nécessite une certaine qualité théologique qui manque trop souvent; d’autre part, comme nous l’avons déjà remarqué, il faut que la mélodie soit chantable par tous, ou du moins par la grande majorité des chrétiens. De grâce, ne retombons pas dans le phénomène des années 60 où des guitaristes aux cheveux longs mais aux idées parfois aussi étriquées que leurs jeans, entraînaient l’Eglise (ou une partie de celle-ci) dans leur sillon. (Que veut dire «dans l’éternité bleutée de son ciel si calme» ? -à moins que ce ne soit une allusion prophétique à la «planète bleue» qui, une fois renouvelée, sera l’habitat éternel des élus? Il faut aussi que la mélodie convienne aux paroles, et que le tout soit digne de Dieu et de son peuple.
3) Eph 5.19. Cette exhortation est la suite logique du v. 18b, Soyez remplis de l’Esprit. Le chant chrétien est donc à la fois un moyen de grâce en vue de cette plénitude, et l’expression idéale de celle-ci. Beaucoup de chrétiens peuvent témoigner de cette réalité, et il est frappant que le bien que certains prétendent retirer du «parler en langues», d’autres l’expérimentent plus simplement et plus bibliquement dans le chant des cantiques, qui ont l’avantage de permettre, comme nous l’avons vu, de «chanter avec intelligence». La fin de ce verset nous révèle une autre exigence du chant chrétien; pour qu’il soit agréable à Dieu, il faut que nous le chantions de tout coeur, ce qui suppose une attention soutenue au sens des paroles, et aussi, autant que possible, à la musique qui en est le support.
4) Col 3.16. Ce passage est bien entendu parallèle au précédent. On y voit que le chant dans l’Eglise doit être instructif (et même «avertisseur») et sage, ce qui exclut toute banalité et platitude des paroles. Nos cantiques doivent être au contraire l’expression juste et mélodieuse de la «parole de Christ» , et non celle de tel ou tel étourdi tapageur… Il faut donc que nos compositeurs chrétiens soient « prophètes » au sens le plus actuel du terme, au même titre que les docteurs et pasteurs de l’Eglise. Je dirais même que la première qualification pour être chantre de l’Eglise (compositeur de ses cantiques), est d’être théologien: qu’il plaise à Dieu de nous en susciter encore et toujours! Nous voyons aussi que le chant convenable nécessite l’action de la grâce, et si cela est vrai des exécutants, à combien plus forte raison des compositeurs.
En résumé, nous pouvons constater que le chant est un don merveilleux qui doit être pratiqué avec sérieux et intelligence dans l’Eglise, à la plus grande gloire de notre Dieu et de notre Sauveur Jésus-Christ. Le chant est une forme privilégiée de «prophétie» (au sens le plus large du terme); il est censé être une expression de la parole de Christ: par conséquent, sans être sourcilleux, il faut dans ce domaine aussi examiner toutes choses, et n’en retenir que ce qui est bon, c’est-à-dire ce qui est conforme à cette Parole. Chantons donc avec intelligence, et de tout notre coeur.