La paix
(1re partie)
Le plan de paix de Dieu
Nous avons le plaisir de présenter deux articles sur le thème général de LA PAIX. Son auteur, Joël Prohin, est marié, père de deux enfants, et suit une carrière professionnelle financière, tout en s’impliquant dans la vie de l’église. Il a collaboré à la collection de commentaires bibliques «Sondez les Ecritures ». Dans son premier article, Joël Prohin expose, en huit points, le plan de paix de Dieu à travers les âges dont le fondement est Jésus-Christ, le Prince de paix, son œuvre de paix à la Croix et son retour pour établir son Règne de paix sur la terre. Dans son second article qui paraîtra dans un prochain numéro, il abordera sept éléments qui contribuent à la paix du croyant.
A. Introduction
1. À la recherche de la paix
Les hommes sont en recherche constante de la paix. Sur le plan collectif, il y a quelques mois, un sommet extraordinaire a réuni plus de 150 chefs d’état et de gouvernement au siège de l’ONU pour s’occuper de la paix dans le monde au XXIe siècle. Cet organisme fut créé à la fin de la Seconde guerre mondiale dans le but de maintenir la paix dans le monde. Toutefois les trop nombreux conflits qui émaillèrent l’histoire mondiale de ces cinquante dernières années et dont certains sont encore en cours, montrent bien que ces efforts – pourtant souvent sincères et généreux – ont été vains. La volonté est là, mais le pouvoir manque, pour paraphraser l’apôtre (Rom 7.18).
Sur le plan personnel, chacun recherche également la paix. Les médiateurs et conciliateurs croulent sous les dossiers; les techniques «apaisantes » ont de plus en plus d’adeptes. L’homme moderne se doit d’être «zen», traversant l’existence sans se laisser émouvoir. Mais en même temps, les désordres psychologiques semblent être toujours plus nombreux, les conflits sur tous les plans (conjugal, professionnel, de voisinage…) abondent.
Il y a donc un réel problème. L’homme veut la paix, mais n’arrive jamais à l’obtenir (au moins durablement). C’est donc qu’il s’y prend mal, sans la chercher à la source, celle du seul vrai Dieu, celui qui s’intitule lui-même «le Dieu de paix».
Dans cette courte étude, nous essayerons, après avoir cherché à définir la paix au sens biblique, de montrer que Dieu a un plan de paix pour l’homme, qui traverse toute la révélation. Puis, avec une visée pratique, nous examinerons quelle paix peut ressentir un chrétien né de nouveau.
2. Qu’est-ce que la paix?
Pour définir un mot, il est parfois utile de trouver des antonymes. D’après la Bible, la paix peut être vue comme l’absence de conflit, de trouble ou de désordre.
– L’absence de conflit: c’est en général le premier sens qui vient à l’esprit: un temps pour la guerre et un temps pour la paix (Ecc 3.8). Par exemple, sous le règne de Salomon (dont le nom même signifie «pacifique »), Israël était en paix avec ses voisins: Il dominait sur tout le pays de l’autre côté du fleuve, depuis Thiphsach jusqu’à Gaza, sur tous les rois de l’autre côté du fleuve. Et il avait la paix de tous les côtés (1 Rois 4.24). La paix signifie l’accord, l’entente, la trêve, la conciliation.
– L’absence de trouble: la paix ne concerne pas seulement les relations des hommes entre eux; elle est aussi «l’état d’une personne que rien ne vient troubler»1. Le prophète Esaïe évoque une telle personne: A celui qui est ferme dans ses sentiments, tu assures la paix, la paix, parce qu’il se confie en toi (Es 26.3). Cette paix est synonyme de calme, de quiétude, de tranquillité, de repos.
– L’absence de désordre: c’est peutêtre le sens le moins immédiat. Pourtant, Paul dit explicitement que Dieu n’est pas un Dieu de désordre, mais de paix (1 Cor 14.33). Ce verset, sur lequel nous reviendrons plus loin, oppose clairement la paix et la confusion, l’anarchie, la désorganisation.
L’étude détaillée des termes hébreux et grecs traduits par «paix» dépasse le cadre de cet article. Relevons seulement quelques points saillants. Le mot hébreu pour «paix» est universellement connu: «shalom». Aujourd’hui encore, dans l’état moderne d’Israël, on se salue traditionnellement par ce mot. Il est donc un des termes les plus employés dans une zone où l’on ne peut pas dire, hélas, que la paix soit particulièrement bien établie… «Shalom», étymologiquement, signifie d’abord «état complet, état fini, solidité»; puis il a aussi pour sens «bien-être, santé, prospérité»2.
Cela montre que:
– l’homme ne peut pas être «complet», être totalement lui-même sans connaître la paix,
– sa santé est liée à sa paix (et en premier lieu à sa paix intérieure). Qui oserait dire qu’il n’a pas souvent vérifié ces interactions dans sa propre vie ?
Le mot grec pour «paix» est «eirenè»; il apparaît dans presque tous les livres du NT. Le souhait de «la grâce et la paix» introduit souvent les épîtres et parfois les termine. C’est un concept central de l’enseignement du Seigneur et des apôtres. Ce mot viendrait d’une racine signifiant «joindre». La paix, selon le NT, établit donc les liens: entre l’homme et Dieu, entre l’homme et son semblable, entre l’homme et lui-même.
B. Le plan de paix de Dieu
1. La rupture de la paix
Dieu est le «Dieu de paix» et sa paix est éternelle. Avant que le temps fût, dans l’éternité des relations entre les personnes divines, il n’y avait que paix: nul conflit entre elles, pas de trouble ni de désordre pour le «Dieu bienheureux».
Avec la création du ciel et de la terre, Dieu crée ex nihilo des êtres auxquels il accorde une liberté cadrée – prenant pour ainsi dire le «risque» du conflit et du désordre. La révolte de Satan est la concrétisation de ce risque. L’Ecriture fournit peu d’informations précises quant à l’origine de cette chute dans l’orgueil de l’ange de lumière.
Le second point de rupture a pour scène le jardin d’Eden. Quel contraste entre la paisible description du chapitre 2 de la Genèse et le trouble qui a résulté du péché d’Adam et Eve! Les voilà chassés du jardin, en butte à une nature hostile et, plus grave encore, privés des paisibles relations avec leur Créateur. C’est à partir de ce moment que les relations de l’homme sont altérées: désormais, il ne sera en paix ni avec Dieu (qui doit le chasser), ni avec ses semblables (comme le prouve le meurtre d’Abel par Caïn), ni avec lui-même3.
Quelques générations après, Dieu doit faire le constat que la terre est pleine de violence (Gen 6.11). Le déluge vient en jugement sur les hommes, mais par la suite la descendance de Noé ne se montre pas meilleure.
2. L’absence générale de paix
Le prophète Esaïe est amené à faire un double constat:
– Il n’y a point de paix pour les méchants, dit l’Eternel (Es 48.22);
– Il n’y a point de paix pour les méchants, dit Dieu (Es 57.21).
Qui sont ces «méchants»? Ces «égarés », ces «pervertis» dont parle Paul, qui ne connaissent pas le chemin de la paix (Rom 3.11,17). Sans doute y classons-nous volontiers les tyrans de l’histoire ou notre voisin irritable qui se chamaille avec chacun… oubliant que Paul commence par dire: Il n’y a point de juste, pas même un seul (Rom 3.10). Ces méchants – nous en sommes tous, que nous ayons une certaine connaissance de Dieu (comme dans la première citation d’Esaïe, attribuée à «l’Eternel», le Dieu de l’alliance) ou que nous ne le connaissions pas (comme dans la seconde citation d’Esaïe, attribuée à «Dieu»). Point de paix: constat terrible, mais réaliste; tous les hommes sont méchants et ils ne peuvent pas connaître la paix.
3. La venue de l’enfant de paix
Dieu va-t-il en rester à cette terrible situation ? Heureusement, son plan de paix n’est pas interrompu par la révolte du diable et de l’homme. Après des siècles de conflits, de troubles, de désordres, voici qu’apparaît sur la terre «l’enfant de paix». Dès avant sa naissance, Zacharie salue le soleil levant qui nous a visités d’en haut, pour éclairer ceux qui sont assis dans les ténèbres et dans l’ombre de la mort, pour diriger nos pas dans le chemin de la paix (Luc 1.78-79).
Lorsque le Seigneur naît à Bethléhem, les bergers aux champs entendent la multitude de l’armée céleste louer Dieu: Gloire à Dieu dans les lieux très-hauts; et sur la terre, paix; et bon plaisir dans les hommes ! (Luc 2.14, version Darby). La paix est venue sur la terre, sous la forme la plus humble et la plus fragile qui soit: un petit bébé couché dans une crèche.
4. Le ministère de l’homme de paix
La vie de Jésus reste empreinte de cette paix:
– la paix dans sa vie personnelle: par exemple, pendant son enfance, nulle trace de conflit avec ses parents auxquels il était soumis (Luc 2.51);
– la paix par ses paroles: il annonce aux fils d’Israël la paix de la part de Dieu (Act 10.36); ses paroles apportent le repos à l’âme troublée;
– la paix par ses actes: il peut renvoyer une pécheresse repentante (Luc 7.50) ou une malade inguérissable qui a osé toucher son vêtement (Luc 8.48) par un affectueux: Va en paix.
Et pourtant, le voilà rejeté par ceux auxquels il vient apporter la paix. Ne croyez pas que je sois venu apporter la paix sur la terre; je ne suis pas venu apporter la paix, mais l’épée est-il obligé de dire (Mat 10.34; voir Luc 12.51). Non pas, certainement, que son but ait été de fomenter des divisions dans les familles, mais son rejet par les uns et son acceptation par les autres doit immanquablement créer des conflits.
Le refus des Juifs de recevoir le Seigneur trouve son écho dans les exclamations des disciples lors de l’arrivée triomphale de Jésus à Jérusalem. Ils louent Dieu en disant: Béni soit le roi qui vient au nom du Seigneur! Paix dans le ciel, et gloire dans les lieux très hauts! (Luc 19.38). La multitude des anges a annoncé la paix sur la terre à Bethléhem; ici, dirigée à son insu par l’Esprit de Dieu, la foule reconnaît implicitement que la paix n’est plus possible sur la terre, puisque le prince de paix est rejeté. Désormais, la paix est dans le ciel, là où Jésus va bientôt s’asseoir, après avoir accompli l’œuvre de la paix. Et cette scène paradoxale s’achève par les pleurs du Seigneur sur Jérusalem infidèle, la ville bien-aimée: Si toi aussi, au moins en ce jour qui t’est donné, tu connaissais les choses qui appartiennent à ta paix! (Luc 19.42). Il est alors obligé d’annoncer le jugement qui va tomber sur Jérusalem: la terrible guerre qui culminera par la destruction de la cité en l’an 70.
5. L’œuvre de paix à la croix
Quelques jours après, la foule, sous l’influence de Satan, s’amasse pour demander la crucifixion de Jésus. Le conflit sans cesse ranimé depuis le jardin d’Eden entre Dieu et ses fidèles d’un côté, et le diable et ses suppôts de l’autre, atteint son paroxysme. Christ meurt sur la croix, ayant porté les péchés de nombreux croyants. Mais ce que l’aspect extérieur de la scène ne peut révéler, c’est que sa mort est la seule base par laquelle la paix est rétablie entre l’homme et Dieu:
– Maintenant, en Jésus-Christ, vous qui étiez jadis éloignés, vous avez été rapprochés par le sang de Christ. Car il est notre paix, lui qui des deux n’en a fait qu’un, et qui a renversé le mur de séparation, l’inimitié, ayant anéanti par sa chair la loi des ordonnances dans ses prescriptions; il a voulu créer en lui-même avec les deux un seul homme nouveau, en établissant la paix, et les réconcilier avec Dieu l’un et l’autre en un seul corps, par la croix, en détruisant par elle l’inimitié. Il est venu annoncer la paix à vous qui étiez loin, et la paix à ceux qui étaient près (Eph 2.14-17).
Les diverses mentions de la paix dans ces versets montrent trois aspects de son œuvre:
1° la paix est liée à sa personne même car elle s’identifie à la personne qui la garantit;
2° la paix faite à la croix supprime l’obstacle qui sépare l’homme de Dieu: elle produit la réconciliation; l’homme une fois sauvé (qu’il ait été autrefois extérieurement près ou loin de Dieu) n’est désormais plus l’ennemi de Dieu, car Dieu est apaisé;
3° la croix permet de mettre fin à l’inimitié entre des ennemis ancestraux: les Juifs (peuple élu de Dieu) et les païens (autrefois en dehors de l’alliance).
– Il a voulu par lui tout réconcilier avec lui-même, tant ce qui est sur la terre que ce qui est dans les cieux, en faisant la paix par lui, par le sang de sa croix (Col 1.20). Ce verset complète le développement de l’épître aux Ephésiens, en mettant l’accent sur l’universalité de la paix introduite par la croix. Elle permet non seulement la réconciliation des personnes, mais aussi celle de la création entière: assujettie au diable, troublée par le péché, la création est désormais mise en ordre. Cette paix dans la création ne sera cependant visible que plus tard: sur la terre, lors du règne de Christ, et dans le ciel, lorsque Satan et ses anges en auront été chassés.
– La paix a été faite par le sang de sa croix. Un sacrifice était nécessaire; il est préfiguré par les divers types d’offrandes du Lévitique, et, en particulier, par le sacrifice de paix (Lév 3): l’Israélite et le sacrificateur y avaient une part, car nous sommes partie prenante de cette paix établie4.
– Enfin, une des plus touchantes mentions de la paix que Jésus nous a acquise à la croix se trouve en Esaïe 53.5: Il était blessé pour nos péchés, brisé pour nos iniquités; le châtiment qui nous donne la paix est tombé sur lui, et c’est par ses meurtrissures que nous sommes guéris. La partie repentante du peuple d’Israël prononcera bientôt ces paroles, en regardant vers leur Messie méconnu, mais les chrétiens se les approprient déjà avec bonheur.
6. La paix aujourd’hui
Depuis la croix, le monde est dans une situation paradoxale: la paix a été acquise en principe, elle est assurée, mais elle n’est pas encore effective. Elle est reçue et peut être vécue par ceux qui acceptent le salut offert par les messagers de la bonne nouvelle de la paix. La seconde partie de cette étude développera ce point.
7. La paix ôtée demain
L’enlèvement de tous les vrais croyants qui constituent l’Eglise de Jésus Christ amènera des jugements terribles sur la terre (Apoc 6-19). Le deuxième de ces jugements consiste précisément à enlever la paix de la terre (Apoc 6.4). Les descriptions terrifiantes de cette période montrent que la paix sous toutes ses formes sera impossible:
– alors même que les hommes croiront la paix établie sur la terre (1 Thes 5.3), des conflits d’une violence jamais vue éclateront et culmineront à la bataille d’Harmaguédon;
– le trouble saisira les hommes au point qu’ils rendront l’âme de peur (Luc 21.26);
– le désordre sera indescriptible, comme l’indiquent symboliquement diverses images de l’Apocalypse. Plus terrible encore, ceux qui auront refusé la paix annoncée pendant la période de la grâce ne pourront plus jamais la trouver (2 Thes 2.10-12).
8. Le règne de paix
Quel bonheur alors de voir venir le prince de paix (Es. 9.6) pour établir un règne dont la paix sera une des bases (Ps 85.10)! Les passages qui évoquent la paix de cette période sont trop nombreux pour être tous cités. L’un des plus caractéristiques est celui de Michée 4.3-4, car il présente la paix sous ses trois aspects:
– Plus de conflit: Il sera le juge d’un grand nombre de peuples, l’arbitre de nations puissantes, lointaines. De leurs glaives ils forgeront des socs, et de leurs lances des serpes; une nation ne tirera plus l’épée contre une autre, et l’on n’apprendra plus la guerre.
– Plus de désordre: Ils habiteront chacun sous sa vigne et sous son figuier.
– Plus de trouble: Il n’y aura personne pour les troubler; car la bouche de l’Eternel des armées a parlé.
Pendant des années, on a enseigné la guerre. Il existe en France une école militaire supérieure qui s’appelle l’Ecole de guerre. Il y a quelques décennies, les ministères aujourd’hui pudiquement appelés «ministères de la Défense», s’appelaient plus crûment «ministères de la Guerre». Quelle joie de penser que ces funestes établissements n’existeront plus!
Quand nous voyons tous les conflits que la folie de l’homme sème aux quatre coins de la planète, quand nous pensons à ces milliers d’innocents – en particulier aux enfants et aux femmes – massacrés, torturés, mutilés, blessés, déplacés, et cela depuis des dizaines de siècles, quand nous sommes accablés par la folie de l’homme – notre propre folie – regardons à l’avenir! Demain, Jésus régnera sur l’univers et toutes les armes seront enterrées (Ez 39.9). Demain, la paix sera sans fin, la paix sera comme un fleuve puissant (Es 9.7; 66.12). Seigneur, fais que ce temps vienne vite !
J.P.
Notes
1 Petit Robert.
2 Vine’s Expository Dictionary of Biblical Words
3 cf. l’étude très intéressante de Francis Schaeffer «La Genèse» sur ces chapitres.
4 Pour un exposé détaillé de cette offrande, cf. l’étude de «Sondez les Ecritures», vol. 7.