Dossier: Le chrétien et la politique
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Le chrétien et la politique dans le contexte africain.

La politique dans le contexte de cet article signifie la gestion de nos pays par les représentants du peuple qu’ils soient élus ou nommés.
Il a toujours été discuté de savoir si le chrétien doit y prendre part. La question se pose avec autant d’acuité lorsqu’on voit la situation désastreuse dans laquelle vivent la plupart des pays africains aujourd’hui. Que peut faire l’homme de Dieu ou le chrétien tout court dans un tel contexte ? On peut considérer cette question sous trois angles.

De son identité

Le chrétien est la seule personne au monde qui possède la nationalité terrestre et la citoyenneté céleste. À ce double titre, il doit vivre dans deux mondes différents tout en respectant les consignes bibliques.
Le Seigneur Jésus avait prié le Père de ne pas nous ôter du monde, mais de nous préserver du mal (Jean 17.15). Il est donc conséquent que le chrétien puisse vivre dans son pays en évitant le mal et en se préservant des souillures du monde (Jac 1.27).
Le Seigneur nous fait comprendre aussi que le chrétien est le sel de la terre et la lumière du monde. Cette identité nous permet d’éclairer les uns et les autres à la lumière des saintes Ecritures, et de préserver notre entourage de la pourriture, tout en insufflant une bonne saveur comme le fait le sel.
Nos pays africains ont désespérément besoin aujourd’hui des chrétiens qui, loin de vouloir s’emparer du pouvoir politique, sont de véritables Joseph auprès de Pharaon ; de véritables Nathan auprès de David ; de véritables Daniel auprès des rois babyloniens ; et même de véritables Jean Baptiste auprès du roi Hérode. La double identité du chrétien veut aussi qu’il soit à la fois soumis aux autorités nationales (Rom 13.1-7), tout en obéissant à Dieu plutôt qu’aux hommes (Act 4.19 ; 5.29). Le chrétien, même s’il fait la politique, a ce devoir de par son identité de chrétien, de ne pas se conformer au monde (Rom 12.1-2).
De son engagement
Savoir si le chrétien doit prendre part à la vie politique de son pays est une question à laquelle il est très difficile de répondre.
S’il s’agit de la simple participation à la politique, il faut dire qu’il a ce devoir en tant que citoyen terrestre de voter pour désigner les élus qui le sont par le peuple, et de donner ses points de vue sur toutes questions non seulement pour dénoncer le mal, mais aussi pour conseiller le bien.
Mais qu’en est-il de ce que nous pouvons appeler la politique partisane ? Le chrétien doit-il fonder et diriger des partis politiques ? Doit-il postuler aux postes de Président de la République, de député, ou de sénateur etc ? C’est ce qui a toujours fait l’objet de vifs débats parmi les chrétiens. Il faut rappeler que sous la théocratie, les rois et leurs conseillers pouvaient être des croyants ou des impies, mais ils devaient diriger le pays d’Israël selon les lois divines.
À leurs côtés se trouvaient des prophètes qui avaient le devoir de leur rappeler le respect de ces lois. Malheureusement, il y avait aussi des faux prophètes qui les entouraient. D’un cas comme de l’autre, le véritable croyant devait participer à la vie politique selon les lois divines ; et c’est en respectant ces lois que Dieu leur avait promis la paix, la prospérité, et la longue vie (Deut 28.1-14 ; Rom 10.5). Si c’était le cas (la théocratie), la réponse serait absolument positive à cette question. Mais nos pays aujourd’hui sont soit sous la monarchie, soit sous la démocratie, soit même sous la dictature.
Depuis que les pays africains se sont engagés dans la voie de la démocratisation à l’occidentale, les choses deviennent de plus en plus chaotiques sur tous les plans. Il y a des lois dans la plupart des pays qui sont anti-bibliques (légalisation de l’homosexualité, des avortements, et d’autres vices de société, légalisation des emprisonnements à but d’élimination des opposants politiques etc).
La question qui se pose est donc de savoir si le chrétien africain qui veut avoir son parti politique et qui veut devenir Président de la République ou autre  sera capable de maintenir et de préserver son identité de lumière du monde et de sel de la terre dans ce contexte.
Il n’est pas question ici de trancher le débat. Si le chrétien pense qu’il peut toujours dans ce contexte être un acteur politique de premier plan et glorifier Dieu selon 1 Corinthiens 10.31, qu’il le fasse, c’est Dieu qui le jugera. Il faut aussi se rappeler que devant Dieu, il n’y a point de favoritisme. Or les mœurs africaines sont toujours dominées par le favoritisme, le népotisme, et le tribalisme dont la plupart des chrétiens ont de la peine à se débarrasser.
Notre conviction est que, dans le contexte de la situation politique de nos pays, où les ténèbres morales dominent, le chrétien doit se préoccuper beaucoup plus de prêcher l’Évangile à toute la création, et de vivre comme un flambeau au milieu de cette génération perverse (Marc 16.15 ; Phil 2.15-16). L’apôtre Paul faisait remarquer à Timothée qu’« il n’est pas de soldat qui s’embarrasse des affaires de la vie, s’il veut plaire à celui qui l’a enrôlé. »
Si ceux qui étaient appelés à diriger les conférences souveraines organisées en Afrique dans les premières années 90, et même ceux qui sont appelés aujourd’hui à réconcilier les hommes politiques, en tant que chrétiens avaient vu les choses ainsi, il y aurait tout au moins un apaisement social aujourd’hui dans nos pays. Mais il semble qu’ils ont plutôt été motivés par le « partisanisme » et l’ambition de régner déjà dans ce monde. Or Jésus dit à Pilate : « mon royaume n’est pas de ce monde » (Jean 18.36).

De la non-résistance

Plusieurs mouvements politiques existent en Afrique se réclamant du christianisme. Il y en a qui font de la politique démocratique, c’est-à-dire qu’ils participent au jeu démocratique comme tous les autres partis, et d’autres qui sont des branches armées, c’est-à-dire qu’ils sont prêts à prendre le pouvoir même par les armes.
Il faut tout simplement rappeler que lorsque nous regardons l’enseignement du Nouveau Testament, et même les exemples des prophètes et des apôtres, nous verrons qu’ils ont toujours pratiqué comme Jésus lui-même la politique de la non-résistance (Mat 5.38-48). Les prophètes, comme les apôtres, lorsqu’ils étaient arrêtés par les rois ou les gouverneurs de ce monde, n’ont jamais résisté à une arrestation. Ils fuyaient plutôt lorsqu’ils en avaient l’occasion, et ils se défendaient selon la Parole de Dieu lorsqu’ils étaient conduits devant les tribunaux. Lorsqu’il arriva même à l’apôtre Paul d’insulter le souverain sacrificateur, il demanda pardon en confessant qu’il n’est même pas permis de parler mal du chef de son peuple (Act 23.3-5).
Alors ceux des chrétiens qui pensent qu’ils doivent faire de la politique partisane, qu’ils sachent que les Écritures leur imposent un comportement de non-résistance à la persécution des autres hommes politiques qui ne connaissent pas Dieu. Ces persécutions devraient être plutôt l’occasion de prêcher l’Évangile.
Au lieu de s’engager dans les luttes politiques, il faut plutôt penser à combattre pour la foi transmise aux saints une fois pour toutes (Jude 3). Le malheur est que ce comportement porte atteinte à l’image de l’Église de Dieu dans le monde. Encore faut-il chercher à savoir s’il s’agit de véritables chrétiens (2 Pi 2.1-2).
En Afrique, il y a des cas où un mandat d’arrêt est lancé contre un pasteur, ainsi le pasteur est poussé à se cacher dans la forêt et devient incapable de s’occuper de ses brebis (si brebis il y en a). Il devient impossible de remplir la mission de Matthieu 28.18-20. Il apparaît comme si Christ n’avait pas reçu tout pouvoir dans le ciel et sur la terre. Il faut donc que les chrétiens africains qui pensent faire la politique partisane puissent bien y réfléchir.
Les mandats d’arrêt contre l’apôtre Paul l’ont conduit devant les gouverneurs et les rois pour prêcher l’Évangile de Christ. C’est pourtant aussi grâce à l’arrestation de Jean et son séjour en prison sur une île que nous avons le dernier livre de la Bible à savoir l’Apocalypse.
En conclusion, dans le contexte politique africain d’aujourd’hui, le chrétien doit comprendre que les jours sont mauvais, et qu’il est dès lors appelé et interpellé à un engagement politique de plus en plus avisé et brillant. Il doit participer à l’expression de sa volonté dans le choix des dirigeants de la société. Il doit dénoncer le mal et il doit conseiller les dirigeants politiques. S’il arrive par providence de Dieu et en vertu de sa souveraineté qu’il accède à un poste de dirigeant politique (comme ce fut le cas de Joseph, Daniel, Néhémie et autres), il doit gérer en s’assurant que lorsque les lois du pays sont en contradiction avec la Parole de Dieu, il agira selon la Parole de Dieu même s’il faut qu’il soit jeté dans la fournaise ardente (Daniel 3).
Chercher à savoir si le chrétien doit ou non faire la politique, n’est pas une question à trancher pour tous et de manière absolue. Ce n’est qu’avec la maturité d’esprit qu’on peut agir sachant que le chrétien est l’ouvrage de Dieu en Jésus-Christ pour des bonnes œuvres que Dieu a préparées d’avance pour qu’il les pratique (Éph 2.10). Et il n’est pas exclu que Dieu utilise son enfant partout où il veut, et lui donne la capacité de faire comme il veut.
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Dossier : Le chrétien et la politique
 

Mvondo Simon
Le Dr Simon Mvondo est doyen de la Faculté de théologie biblique du Cameroun, pasteur des EBG au Cameroun, et membre du Comité national de Promesses dans ce pays. Il est marié et père de 8 enfants.