Dossier: Les doutes
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On ne voit pas avec ses yeux, mais avec ses croyances

Le doute est un sentiment d’incertitude qui remet en question l’existence ou la vérité même des choses. Il se manifeste dans tous les domaines et de différentes manières. Il est commun à tous les êtres humains, c’est un sentiment naturel. Il est souvent présent dans la pensée de ceux qui croient en Dieu. C’est l’arme privilégiée du diable qu’il a utilisée dès le commencement lors de la tentation dans le jardin d’Éden. Déguisé en serpent, il suggéra à Ève qu’elle avait mal compris l’ordre de Dieu et que ce dernier avait menti. Il lui dit : « Vous ne mourrez point ; mais Dieu sait que, le jour où vous en mangerez, vos yeux s’ouvriront, et que vous serez comme des dieux, connaissant le bien et le mal. » (Gen 3.4) Ainsi le doute s’oppose à la foi qui est une ferme assurance.

Doute ou incrédulité ?

Il ne faut cependant pas confondre doute et incrédulité. L’incrédulité est le refus délibéré de croire, tandis que le doute est une forme d’hésitation, de flux et de reflux, comme le définit l’apôtre Jacques : « Celui qui doute est semblable au flot de la mer, agité par le vent et poussé de côté et d’autre, il est irrésolu, inconstant dans tout ce qu’il entreprend. » (Jac 1.6,8)
L’incrédulité n’a pas son origine dans l’impossibilité de résoudre des problèmes intellectuels, mais elle est d’ordre sentimental et spirituel. L’orgueil incite l’incrédule à demeurer délibérément indépendant de Dieu ; il refuse de se soumettre à sa volonté afin de décider seul pour sa vie.
Le doute, quant à lui (traduction, entre autres, des mots grecs dipsuchos : l’état d’un homme chroniquement partagé entre deux opinions, irrésolu ;  oudiakrinô : séparer, porter un jugement, faire une distinction), est une remise en question, une hésitation, un acte de la raison. Il s’exprime par cette question « Est-ce bien vrai ? ». Cette remise en question est nécessaire et positive dans le domaine des connaissances et de la recherche scientifique, pour inciter à approfondir toutes les preuves qui rendront les découvertes sûres. Elle est également utile dans le domaine subjectif donc dans celui de la foi où l’on a besoin de confirmations, mais ce n’est pas cet aspect que je souhaite traiter ici. Le doute devient nocif dans le domaine objectif, en particulier dans le rapport avec la parole de Dieu, donnée autrefois soit directement à la personne soit par le moyen des prophètes et aujourd’hui parla Bible. Il trouve sa source dans la suspicion, la méfiance, l’incompréhension, mais surtout dans les « croyances limitantes » qui résultent de l’éducation, de nos blessures, de certains échecs, de ce que nous avons vu et entendu au cours de notre vie. Ces croyances 1 s’ancrent dans nos pensées et construisent nos raisonnements. Nos choix de vie résultent de nos croyances. Une croyance devient certaine lorsqu’on a trouvé plusieurs faits qui convergent pour la rendre crédible. La difficulté est que le diable a toujours menti et sait utiliser soit des personnes que nous côtoyons soit nos faiblesses pour influencer nos pensées, et par là nous tromper. Mais le chrétien a le Saint Esprit pour renouveler ses pensées.
Expliquons cela. Les événements de la vie sont des choses réelles que nos yeux voient, que nos oreilles entendent, qui mettent en éveil nos cinq sens. Et pourtant deux personnes confrontées à une même réalité vont opter pour des attitudes et des choix différents.
Prenons deux exemples, celui des douze espions envoyés par Moïse et celui du combat des Philistins contre Israël (Goliath / David).

L’exemple des douze espions: le doute a gagné tout le peuple d’Israël (Nom 13-14)

L’événement et ses deux perceptions

Douze explorateurs, choisis parmi les chefs de tribu, sont envoyés par Moïse pour évaluer le pays promis. Ils ont quarante jours pour explorer les différents lieux. Leur rapport est surprenant : ils ont tous vu la même chose mais dix ont une perception commune de leur visite alors que les deux autres en ont une totalement différente. Ils proposent donc deux plans d’action opposés.
L’événement : ils découvrent tous un pays riche (lait, miel, fruits), un peuple fort parmi lesquels certains sont des géants, des villes fortifiées. Tout cela est vrai, réel.
La perception des dix : « Oui, c’est vraiment un pays ruisselant de lait et de miel ; et en voici les fruits ». Seulement les hommes sont « terriblement forts », les forteresses sont « immenses » (13.28). La perception de ce qu’ils ont vu, passée par le filtre de ce qu’ils croient (même avec Dieu on ne pourra pas les vaincre), les amènent à surévaluer la puissance de l’ennemi, et ainsi à ne pas comprendre le vrai rapport de force.
La perception de Caleb et de Josué : rien dans le texte ne permet de penser qu’ils remettent en cause les observations factuelles des dix.
Sentiments des dix : ils prennent une attitude de vaincus en dénigrant devant les fils d’Israël le pays choisi par Dieu et ajoutent : « Nous ne sommes pas capables de monter contre ce peuple, car il est plus fort que nous[…] à côté d’eux, nous avons l’impression d‘être comme des sauterelles, et c’est bien l’effet que nous leur faisons ; c’est un peuple de cannibales « qui dévore ses habitants », nos enfants et nos petits-enfants deviendront la proie de l’ennemi » (13.32,33 ; 14.3). Le doute s’installe ; la perception de la situation met en évidence leurs croyances : « Dieu veut notre malheur, il veut nous faire tous mourir, y compris les femmes et les enfants, il est contre nous ». Ces croyances sont fausses et pourtant elles semblent bien étayées par les faits.
Sentiments de Caleb et Josué : ils montrent une attitude de confiance et d’assurance, ils affirment « Nous en sommes vraiment capables ».Leurs croyances sont alimentées par la foi dans la Parole et la puissance de Dieu. Ils ont appris à connaître Dieu par des victoires passées, par sa fidélité lorsqu’il renouvelait les promesses faites à l’ancêtre Abraham au moment où le peuple méritait le jugement et l’abandon. Ils sont intimes de Dieu qui manifeste sa gloire par la libération du pouvoir du Pharaon et la traversée de la mer Rouge, par ses soins au quotidien avec la manne et l’eau du rocher. Pour ces deux chefs, pas d’inquiétude : « Si l’Éternel prend plaisir en nous, il nous fera entrer[…]Ne craignez pas le peuple du pays, nous n’en ferons qu’une bouchée, leur protection s’est retirée de dessus eux. L’Éternel est avec nous » (14.8,9).

L’action et ses conséquences

Les dix sont centrés sur eux-mêmes. Leur doute, fondé sur ce qu’ils pensent d’eux-mêmes, est hélas contagieux. Les Israélites veulent retourner dans le pays où ils avaient été esclaves. « Toute l’assemblée se souleva… ». Ils décident de choisir un autre guide, ils préparent un complot pour lapider Moïse et Aaron. Ainsi, ceux qui avaient besoin d’encouragement et d’espérance pour poursuivre le chemin sont entraînés par ces dix chefs dans le dénigrement et la révolte. Ensemble, ils méprisent Dieu. Quand Caleb et Josué s’opposent à eux et déclarent qui est vraiment Dieu, ils persistent dans leurs fausses croyances, leur doute fait place à l’incrédulité. C’est pour cela que Dieu exprime sa colère ; la mort atteint toute une génération : « Jusqu’à quand ce peuple me méprisera-t-il, ne me croira-t-il pas ? » (14.11) ; « Je vous traiterai selon les plaintes que vous avez exprimées : vos cadavres tomberont dans le désert » (14.28,29).
Caleb et Josué sont centrés sur les promesses de Dieu : le pays est un très bon pays, nous ne ferons qu’une bouchée des Cananéens, leur protection s’est éloignée d’eux, l’Éternel est avec nous, montons et prenons possession. Leurs croyances, leur foi, leur fait voir, au-delà de la réalité, le but ultime de Dieu : offrir le pays promis à son peuple choisi pour qu’il ait tout en abondance, pour habiter au milieu de lui, pour être son Dieu. Caleb et Josué n’ont pas confondu la réalité avec la vérité (la réalité invisible Héb.11.1) qui est contenue dans la Parole de Dieu. « Caleb a été animé d’un autre esprit et il m’a pleinement suivi » dit l’Éternel (14.24).La marche par la foi est le chemin de la maturité où le doute fait place à la ferme assurance.
La récompense : de cette génération, seuls Caleb et Josué entreront dans le pays. « Mais vos enfants, dont vous avez dit qu’ils deviendraient une proie de l’ennemi, je les y conduirai et ils connaîtront le pays que vous avez méprisé » (14.31). La bonne nouvelle est que la promesse de Dieu n’est pas annulée, mais différée ; ainsi Caleb, animé par sa foi, réclame pour héritage une montagne dont il prendra réellement possession quarante ans plus tard (Jos 14.12,13).

Exemple du combat de Goliath contre le peuple d’Israël : le doute a perdu (1 Sam 17)

L’événement

Le géant Goliath, champion des Philistins, méprise le peuple de Dieu et en même temps Dieu lui-même. Conscient de sa force et sûr de lui, il a en face de lui un peuple terrorisé et en plein doute, puis David, inconnu de tous, mais bien connu de Dieu. Il méprise ce jeune homme au teint rosé qui n’a aucune envergure : « Suis-je un chien, moi pour que tu viennes à moi avec des bâtons ? » (1 Sam. 17.43) Même Saül pose la question à son chef d’armée Abner : « De qui ce jeune homme est-il fils ? »(17.55) Pourtant David s’est illustré par une confiance indéfectible en Dieu. Pour nous, les « Goliath » ne sont pas des formateurs, mais des révélateurs de ce que nous sommes déjà, révélateurs de nos croyances.

La perception du peuple et de Saül

Toute l’armée est en train de prendre position pour le combat, on pousse bien le cri de guerre, mais « à la vue de cet homme[…] chacun disait : l’avez-vous vu avancer contre nous ? »(v.25) Autrement dit, c’est perdu d’avance, au minimum nous serons faits prisonniers et serviteurs pour toujours. Ils essaient de se motiver mutuellement pour aller au combat en parlant entre eux de la récompense que le roi a promise au vainqueur, sans succès. Le roi Saül a également perdu tout espoir, « il est effrayé » (v.11), et lorsque David se présente, il lui fait comprendre qu’il est un gamin inexpérimenté alors que la situation désespérée nécessite les compétences d’un combattant exceptionnel.

Perception de David

Avant d’être en première ligne devant ce géant, il a déjà connu des situations qui le dépassaient. Il a vécu des victoires extraordinaires dans le secret de ses journées de travail : « Ton serviteur a frappé le lion et l’ours ; et ce Philistin, cet incirconcis, sera comme l’un d’eux, car il a insulté l’armée du Dieu vivant. » (v.36)

Sentiments de Saül et du peuple

Une attitude de vaincus les anime : « démoralisés et une grande peur » ; « Goliath, champion des Philistins sortit de leurs rangs, et lança son défi habituel. David l’entendit. À la vue de cet homme, tous les soldats d’Israël s’enfuirent terrorisés. »(v.11,23) Saül dit à David : « tu n’es pas capable » (v.33). Leurs pensées sont déformées par les fausses croyances qu’ils se sont forgées en prenant l’habitude de vivre sans se placer sous la protection de leur Dieu.

Sentiments de David

Il prend l’attitude de vainqueur car c’est un habitué des victoires : « L’Éternel m’a délivré des griffes du lion et de l’ours, lui me délivrera de la main de ce Philistin » (v.37). David dit au Philistin : « Tu marches contre moi avec l’épée, la lance et le javelot ; moi, je marche contre toi au nom de l’Éternel, le maître de l’univers, au nom du Dieu de l’armée d’Israël que tu as insulté. Aujourd’hui l’Éternel va te livrer entre mes mains. Je t’abattrai et je te couperai la tête. Aujourd’hui je vais donner les cadavres du camp des Philistins aux oiseaux du ciel et aux bêtes sauvages. Toute la terre saura alors qu’Israël a un Dieu » (v.45,46). Ses croyances sont établies sur la connaissance du Dieu victorieux. La Parole de Dieu est l’arme efficace contre le doute, car elle pénètre l’âme et l’esprit et juge les sentiments et les pensées du cœur. (Héb 4.12)

L’action et ses conséquences

David décide d’aller au combat : « ton serviteur ira et combattra avec ce Philistin » (v.32). Mais il doit faire face à plusieurs obstacles qui sont susceptibles de le faire douter :
1. Le mépris et les critiques de son frère qui le traite d’orgueilleux (v.28). L’assurance des humbles paraît toujours de l’orgueil pour les orgueilleux. David ferme ses oreilles à la critique et passe son chemin pour aller à l’essentiel.
2. L’ampleur du défi. David ne craint pas les défis, la marche n’est pas trop haute car il a l’habitude de vivre des victoires au quotidien. Depuis son enfance, son activité de berger lui a donné l’occasion de connaître celui qui donne la victoire.
3. Être quelqu’un d’autre. Quand Saül lui propose son armure qui lui permettrait d’apparaître devant l’ennemi comme un grand combattant, il refuse : « Je ne peux pas marcher avec cette armure, je n’y suis pas habitué »(v.39). Il est impossible de vivre avec la foi (la croyance) d’un autre. Cela est également créateur de doute (lui, il y arrive, moi pas).
4. Voir la réalité avec ses yeux en perdant de vue le but suprême du combat :la mise en évidence de la gloire de Dieu par la victoire : « la bataille est à l’Éternel » (v.47). Le but n’est pas la victoire, mais d’entrer dans le projet de Dieu, de le considérer comme le seul Dieu qui voit tous les géants comme des nains.

La récompense

David ne vacille pas et reste ferme dans sa décision :« David avec une fronde et une pierre fut plus fort que le Philistin, et frappa le Philistin et le tua » (v.50). David aura la fille du roi pour femme, selon la promesse de Saül au vainqueur. Le peuple est associé à la victoire, le doute fait place à l’assurance. L’armée reprend vie, se lève, pousse des cris, poursuit l’ennemi et l’écrase.

Conclusion

Les fils d’Anak rencontrés par les explorateurs de Moïse, ou Goliath contre lequel David a lutté, qui sont-ils aujourd’hui ? Ils prennent la forme de défis dont la puissance et l’enjeu nous dépassent. Nous font-ils douter et paniquer ou au contraire nous donnent-ils l’occasion de laisser Dieu briller à travers nous ? Ils mettent en évidence les croyances qui orientent nos choix. Comme dit le proverbe : «Comme il a pensé dans son âme, tel il est. » (23.7)Ces géants ont divers noms. Ils peuvent s’appeler alcool, drogue, pornographie, jeu, smartphone ; ce sont les addictions. Mais il y a beaucoup plus subtil : la moquerie, les fausses accusations, le paraître qui nous fait revêtir des tenues (armure) que nous n’arrivons pas à porter, le complexe d’infériorité qui nous fait répéter au fil des jours que nous ne sommes pas capables mais nuls, la jalousie, la colère, etc. L’enjeu est de taille, comme l’exprime l’apôtre Paul :« Le Christ nous a rendus libres pour que nous connaissions la vraie liberté. C’est pourquoi tenez bon et ne vous laissez pas réduire à nouveau (par le doute) en esclavage » (Gal5.1).
Soit nous vivons en croyant que les délivrances sont pour les autres et jamais pour nous, soit nous décidons de croire que nous ne pouvons pas perdre la liberté que Dieu nous a donnée d’être victorieux dans nos défis. Ne doutons jamais de la bonté de Dieu qui accomplit ses promesses. Rappelons-nous que lorsqu’un géant tombe, notre destinée, c’est-à-dire la raison pour laquelle Dieu nous a fait naître, est pleinement vécue.

Les citations sont extraites de la version Darby

 

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  1. Les croyances : tout ce que je considère vrai, peu importe l’origine de ces convictions. La foi :tout ce que j’accepte car Dieu l’a dit. (NDLR)
Calame Philippe
Philippe Calame est marié, père de 5 enfants et grand-père de 8 petits-enfants. Il est actif dans son église locale et dans l’enseignement écrit et oral de la Parole.