Dossier: Egaux mais différents
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On s’aime bien, mais on se dispute

Gérard DUCROZET et Ginette GAASCH
Gérard Ducrozet est conseiller conjugal et familial. Auteur du livre Parlez-moi d’Amour à destination des jeunes, il est un orateur régulier de l’association Famille Je t’Aime, dont il est membre fondateur, et un des formateurs des cours de relation d’aide.
Ginette Gaasch est fondatrice avec son époux Claude de l’association Famille Je t’Aime. Elle est conseillère conjugale et familiale. Durant ces vingt dernières années, elle a apporté aux familles, et aux femmes en particulier, le message d’espoir et de réconciliation de Christ pour la famille. Actuellement à la retraite, elle rédige encore de nombreux articles et collabore au Top Féminin sur Internet
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On voudrait tous vivre sans conflits, sans disputes, et pourtant depuis que le monde existe, les humains trouvent sans cesse des occasions d’entrer en conflit. D’où vient donc cette mauvaise habitude ?

Elle est très lointaine. Souvenez-vous du jardin d’Eden… lorsque l’homme dit à Dieu : « La femme que tu as mise auprès de moi m’a fait manger du fruit que tu avais défendu de manger ». C’est elle la responsable, ce n’est pas moi…
Nous connaissons bien cette façon de faire. Lorsque quelque chose tourne mal dans nos couples ou nos familles, nous accusons l’autre, en évitant de voir notre propre responsabilité, et c’est ainsi que l’on espère fuir le problème. Quelle erreur ! la fuite ne nous fait pas avancer, mais plutôt reculer.

Ne croyons pas qu’il existe des individus parfaits, ou des couples parfaits, et d’autres qui ne le sont pas. Mais il s’agit plutôt de dire qu’il y a des individus qui savent régler leurs conflits, et d’autres qui n’y parviennent pas.
Nous n’avons pas à avoir peur des conflits dans la mesure où nous sommes capables de les résoudre. Ce sont eux qui nous donnent des possibilités d’apprendre et de changer. La plupart des conflits ne prennent pas d’ampleur si nous les réglons rapidement. Par contre, si nous ne les réglons pas, ils s’enveniment, parasitent d’autres domaines de la vie de couple, et risquent de déboucher sur une crise grave.

D’OÙ PROVIENNENT DONC NOS CONFLITS ?

1. De nos différences

L’un se couche tôt, l’autre tard. L’un est méticuleux et ordonné, l’autre plutôt désordonné et brouillon. L’un est très relationnel et l’autre solitaire, l’un aime remplir la maison de ses amis, et l’autre préfère un peu plus de tranquillité.
Si nous n’acceptons pas notre conjoint avec son tempérament, nous ne sortirons jamais des difficultés. On peut souhaiter des changements, mais on ne peut demander à l’autre d’être ce qu’il n’est pas. Nos différences peuvent être une richesse pour notre couple, elles sont source de complémentarité, d’équilibre et d’enrichissement mutuel.

2. De notre passé et de notre arrière-plan

Nous entrons dans le mariage avec des valises pleines de notre passé (culture, éducation, milieu socioprofessionnel…). Ce passé nous a profondément façonnés, souvent de manière inconsciente. Il influence nos goûts, nos habitudes, notre manière de réagir, la conception de nos rôles respectifs.
Les conflits nés de ces différences d’arrière-plan ne sont pas impossibles à résoudre, mais il faut en identifier les causes et pour cela, communiquer.

3. De nos convictions et de nos objectifs

On n’en parle pas assez avant le mariage. On croit que la force du sentiment amoureux va surmonter tous les problèmes. Mais on n’a pas forcément les mêmes buts, les mêmes priorités, les mêmes valeurs… Il faut vivre ensemble sans renier ses convictions, et ce n’est pas facile.

4. De nos attentes

Nous entrons dans le mariage avec des désirs et des attentes, et nous idéalisons la vie conjugale. Le conjoint est perçu comme celui avec lequel nous allons pouvoir réaliser nos rêves.
Derrière vos conflits, identifiez vos attentes insatisfaites, avec deux questions-clés :
– Mes attentes sont réelles, mais sont-elles réalistes ?
– Quelles stratagèmes ai-je développés vis-à-vis de mon conjoint pour chercher à satisfaire mes attentes (manipulation, critique, chantage…) ?

5. De notre égoïsme

Jacques 4.1-3 dit : « D’où viennent les conflits et les querelles entre vous? N’est-ce pas des désirs égoïstes qui combattent sans cesse en vous ? Vous convoitez beaucoup de choses, mais vos désirs restent insatisfaits. »
Les conflits sont de redoutables révélateurs de l’état de notre cœur, de nos motivations, de notre nature pécheresse et égocentrique. « Le cœur est tortueux par dessus tout et méchant. » (Jér 17.9) Dans vos attitudes lors de vos conflits conjugaux, cherchez votre péché…

QUELQUES PRINCIPES POUR AIDER A RESOUDRE LES CONFLITS

1. Reconnaître qu’il y a un conflit

C’est une évidence, mais il vaut mieux s’assurer que les deux conjoints reconnaissent que quelque chose ne va pas.

2. Identifier la racine du conflit

C’est une seconde évidence, mais l’expérience montre qu’il est difficile pour un couple de rester lucide dans un conflit. On ne s’affronte pas toujours sur les vraies causes du conflit, mais sur des causes annexes.
C’est le cas lorsque le couple n’a pas développé une communication profonde, et qu’il y a une grande part de non-dit. Le conflit va se développer sur un mode de communication indirecte. La soupe est trop salée ; les yaourts sont passés de date ; les chaussures ne sont pas à leur place…

3. Accepter d’être co-responsables de la résolution du conflit

Matthieu 5.23-24 indique : « Si ton frère a quelque chose contre toi… va te réconcilier. » Matthieu 18.15 complète : « Si ton frère a péché, va vers lui. » Que j’aie offensé ou que j’aie été offensé, je suis invité à me réconcilier. Mais comment faire pour y arriver ?
– Prendre la décision d’aller vers l’autre dans une attitude constructive.
– S’engager à faire ce qui est bon pour nous, même si l’autre n’est pas constructif. Ne pas adopter ses méthodes.
– Faire un effort pour comprendre les peurs et les émotions de l’autre.
– Faire un effort pour comprendre l’autre, même si je ne suis pas d’accord avec ce qu’il dit. C’est l’écoute qui va faire tomber ses peurs. Par ailleurs, rappelons-nous que tout ce que dit l’autre est lié à son appréciation du problème, et que dans tout ce qui est dit, il y a une part de vérité. On est souvent aveuglé sur soi-même.
– Veiller à ne pas humilier l’autre.

4. Viser le problème, pas la personne

La difficulté, dans un conflit conjugal, est que le désaccord n’est pas perçu comme un problème interpersonnel (lié au mode de relation mis en place) mais comme imputable à l’autre. Le problème c’est lui, c’est elle. Il (ou elle) est la cause de mes blessures, de mes frustrations. La communication s’est cristallisée sur la personne et non sur le problème.
– « Je suis agressive parce que tu te replies sur toi. »
– « Je me replie sur moi parce que tu es agressive. »
Le doigt est toujours tourné vers l’autre qui est perçu comme étant le problème. La communication se fait sur un mode accusatoire avec l’usage répété du TU.
Il faut donc viser le problème et non la personne. Cela implique d’être honnête avec soi-même (JE suis blessé, JE souffre de…) et d’être honnête avec mon vis-à-vis. On ne règle pas les conflits si l’on n’est pas honnête avec soi-même et avec l’autre. Il est important d’employer le JE et le TU : « Quand tu as dit ou fait ceci, j’ai ressenti… Quand tu invites des gens sans m’en parler, je ressens que tu ne te soucies pas du travail que ça me donne. »

5. Rechercher une solution

Il y a plusieurs manières possibles de procéder :
– Le compromis : C’est un arrangement dans lequel on fait mutuellement des concessions. On cherche un juste milieu, une solution intermédiaire. Stratégie « perdant-perdant », utile pour des conflits mineurs, ou pour une solution temporaire.
– La conciliation : On ne cherche pas à savoir qui a raison et qui a tort, on coopère pour rechercher une solution satisfaisante, une alternative créatrice. Stratégie « gagnant-gagnant » ou « sans perdant ».
– La coexistence pacifique : On est d’accord de ne pas être d’accord. On relativise les problèmes, on hiérarchise les priorités.

6. Chercher la paix, pas la victoire

Dans un conflit, il n’y aura pas un gagnant et un perdant : il y aura deux gagnants ou deux perdants. Si tu cherches la victoire en dominant, en manipulant ou en blessant, qu’as-tu gagné ? L’amour de ton conjoint ? Son respect ? La bénédiction de Dieu sur ton couple ? Tu as tout perdu, y compris la paix avec toi-même et le respect de toi-même.
Si vous cherchez la victoire, il y aura plus de deux perdants, car vos enfants vous observent, vos déchirures les déchirent, ils en porteront les traces indélébiles. Ils seront les grands perdants et les premières victimes des déchirures de votre couple.

a) Rechercher la paix est une vocation (Éph 4.1-3)

La vocation du chrétien est de vivre en paix. Dieu veut des chercheurs de paix, des artisans de paix. La paix intérieure et extérieure est un signe majeur de la maturité chrétienne, c’est-à-dire de la ressemblance avec le Christ. « Autant que possible, et dans la mesure où cela dépend de vous, vivez en paix avec tous les hommes. » (Rom 12.18)
Notre cause est juste devant Dieu si nous cherchons la paix. Le cœur de Dieu bat pour la paix, et c’est la paix qui nous lie et nous unit.

b) Rechercher la paix est une attitude intérieure (Éph 4.2)

La paix est la marque de la présence du Saint-Esprit. Nous sommes appelés à être des ouvriers de paix dans notre couple, dans notre famille. Dieu nous a donné le pouvoir d’expérimenter la paix intérieure par son pardon et son amour. Cette paix intérieure doit rejaillir dans notre couple.
Ce texte nous propose quatre dispositions intérieures qui favorisent la paix :
– L’humilité : C’est l’orgueil qui nous pousse à chercher la victoire dans les conflits — l’orgueil qui montre du doigt, accuse, se défend, fuit sa responsabilité. Dieu déteste l’orgueil et les orgueilleux (Jac 4.6) Il ne peut travailler avec eux. Le caractère de Dieu que nous voyons en Christ, c’est l’humilité (Phil 2.6-8). Mais qu’il m’est difficile de venir vers mon conjoint et de lui dire : « Pardonne-moi de t’avoir fait mal, j’ai eu tort d’agir ainsi. » Or c’est l’humilité qui ouvre la porte de la paix.
– La douceur : Ce mot décrit un animal dompté. On peut devenir violent dans les conflits. La paix appelle la douceur, le « moi » souverain et égoïste doit être dompté. Dans les conflits, le « moi » revendique son droit. Nos attitudes sont centrées sur la conquête de ce droit. JE demande justice, réparation. Comme un animal dompté, le « moi » doit apprendre à s’effacer pour devenir sensible aux besoins de l’autre. La douceur est cette disposition du cœur qui oublie un peu son propre droit pour s’ouvrir au besoin de l’autre.
– La patience : Il faut du temps pour régler les conflits et reconstruire. Dieu est patient (pensez à son attitude envers Israël). Il n’a pas fini de travailler dans le cœur de notre conjoint. Mais nous voudrions constater un changement immédiat chez celui-ci, faire le travail à la place du Saint-Esprit. Parfois, dans notre impatience, c’est nous qui empêchons Dieu d’agir.
– L’acceptation : Accepter la différence, accepter l’autre tel qu’il est, renoncer à le changer — c’est peut-être ça, la solution. Parfois un conjoint exerce une très forte pression sur l’autre pour qu’il soit à la hauteur de ses attentes. Une telle attente, qui va au delà de ce qu’un humain peut donner, est irréaliste. Il faut laisser de la place aux échecs, ne pas toujours rappeler les fautes, mais encourager et communiquer l’espoir.
– L’amour : Tout cela dans l’amour. Il réunit toutes les qualités que Dieu veut produire en nous par le Saint-Esprit. « L’amour est patient, il est plein de bonté ; l’amour n’est pas envieux, il ne se vante point, il ne s’enfle point d’orgueil, il ne fait rien de malhonnête, il ne cherche pas son intérêt, il ne s’irrite point, il ne soupçonne point le mal, il ne se réjouit point de l’injustice, mais il se réjouit de la vérité ; il excuse tout, il croit tout, il espère tout, il supporte tout. » (1 Cor 13.4-7)

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