Dossier: La Bible, parole de Dieu ou paroles d'hommes ?
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Pourquoi la Bible est-elle si bien conservée ? Un survol historique

Les questions sur la transmission et la conservation du texte biblique reviennent toujours. Si Dieu est bien l’auteur d’un livre qu’il a inspiré pour nous parler, comment la Bible, donnée à ses premiers lecteurs il y a si longtemps,a-t-elle été préservée et transmise aux générations futures ?

Nous voudrions d’abord rappeler qu’il a plu à Dieu de conserver le texte sacré parla considération dont il fut l’objet au sein du judaïsme et de la chrétienté.1

I. Témoignages passés et présents à l’autorité des Écritures

1. Le judaïsme rabbinique

À partir de l’exil babylonien (586-539 av. J-C.), le judaïsme s’ancra fortement dans les 39 livres de l’Ancien Testament, considéré comme entièrement inspiré, jusqu’à la moindre lettre.En voici deux témoignages : « Celui qui dit que laToran’est pas venue du ciel n’a pas part dans le monde à venir. » (Sanh.10.1) Et touchant l’inspiration du livre d’Esther : il a été « écrit par le Saint-Esprit. » (Meg. 7a)

Cependant, le judaïsme rabbinique ajouta peu à peu à l’Ancien Testament la loi orale :la Mishna. Cette compilation d’explications formulées par des juifs érudits gravitait autour des textes bibliques rassemblés après l’Exil.2 Dès avant l’époque néotestamentaire, les rabbinss’octroyèrentprogressivement le droit d’imposer à leurs disciples la mémorisation de tous ces commentaires (d’où l’expression de « loi orale »). À l’époque de Jésus, ces interprétations rigidestenaient le haut du pavé dans les synagogues. On honorait le texte biblique, mais en forçant son interprétation comme son application. Le Nouveau Testament évoque les préceptes abusifs et légalistes propres à la tradition pharisienne (Mat 12.2 ; 15.1–3).

Après la destruction du Temple en 70 apr. J-C, la mouvance intellectuelle juive commença à mettre la loi oralepar écrit. Ainsi fut achevée, au IIe siècle apr. J-C., la rédaction complète de la Mishna,qui devint partie intégrante du Talmud(collection des enseignements divers des plus grand rabbins). Cette tradition écrite se veut (encore) l’instrument d’interprétation suprême de l’Ancien Testament, auquel elle se réfère constamment.3

Ainsi, de manière paradoxale, le texte de l’Ancien Testament fut conservé intact grâce à une tradition qui, à sa façon, s’arrogeait des droits supérieurs à ceux de l’Écriture ou en dénaturait parfois l’application (cf. Mat 15.6-9). Ce phénomène n’est pas sans parenté avec ce que le catholicisme fera de sa tradition (voir plus loin).

2. La période de l’Église dite « primitive » (70-150 apr. J-C.)

De même que Jésus et les auteurs du Nouveau Testament affirmaient l’inspiration pleinement divine de l’Ancien Testament, ainsi les « Pères de l’Église » affirmaient la pleine inspiration du Nouveau Testament. Clément de Rome le qualifiait de « Saintes Écritures […] données par le Saint-Esprit » (ch. 45 de son Épître aux Corinthiens). Polycarpe, disciple de l’apôtre Jean, dans son Épître aux Philippiens (ch. 12), cite de nombreux passages des deux Testaments en les rangeant dans la catégorie des « Écritures ». Papias, disciple de Polycarpe, confère la qualité d’« oracles » à des passages des deux Testaments dans son commentaire de Romains 3.2 (cf.son Exposition des Oracles du Seigneur).

3. La période pré-nicéenne et nicéenne 4(150-350 apr. J-C)

Justin Martyr désigne les Évangiles comme la « Voix de Dieu »dans son Apologie(ch. 65), puisil affirme que le langage inspiré employé par les apôtres fut celui « de la Parole divine ». Irénée, qui avait connu Polycarpe, écrit dans Contre les Hérésies(II.28.2) : « Les Écrituressont certainement parfaites, parce qu’elles ont été prononcées par la Parole de Dieu (Christ) et par son Esprit. »  Hippolyte, disciple d’Irénée, fut davantage explicite en parlant de la Loi, des Prophètes et de l’Évangile. Tertullien, considéré comme le père de la théologie latine, affirma l’inspiration par l’Esprit de toutes les Écritures. Clément d’Alexandrie, dans ses Stromata(2 : 408-9), désigne la Loi, les Prophètes, et l’Évangile comme « les Écritures […] valides à causede leur autorité omnipotente ».Pendanttoute cette période fructueuse, nous constatons facilement que tous ces « Pères » (et d’autres, commeOrigène, Cyprien, Athanase d’Alexandrie, Cyril de Jérusalem, etc.) considéraient les Écritures (notre Bible) comme la véritable Parole de Dieu donnée comme guide de la vraie foi et de la conduitepour tous les convertis. Que leurs interprétations n’aient pas concordé en tous points est un autre sujet…

4. La période de l’Église médiévale (350-1350apr. J-C.)

Jérôme (~347-420) futle plus grand érudit biblique de son tempset le traducteur de toute la Bible en latin (la Vulgate). On lui doit la phrase célèbre : « Ignorer les Écritures, c’est ignorer le Christ ».Il se distingua par son opposition radicale à l’inclusion des livres « apocryphes » dans sa traduction.Malheureusement le Pape Damasel’y contraint.Voici le conseil de Jérôme : « Lisez les divines Écritures constamment ; jamais ne les laissezglisser de vos mains. »

Ambroise de Milan, qui amena Augustin au Sauveur, adressa une lettre à l’Empereur Gratien dans laquelle il parle des « Écritures divines. »  Augustin affirma sans aucune hésitation  la vérité, l’autorité, et l’origine divine des « Écritures infaillibles », allant jusqu’à défendre qu’aucun auteur des Écritures n’a commis d’erreur dans les textes reconnus comme canoniques.Anselme de Canterbury et Thomas d’Aquin étaient du même avis.

5. La période de la pré-Réforme (1350-1500)

Avant la Réforme du XVIe sièclecommença à se manifester parmi des gens ordinaires le désir d’entendre la Parole de Dieu. Suite à la lecture du Nouveau Testament, un riche marchand lyonnais, Pierre Valdès(ou Valdo ; ~1140~1206), se convertit et devint l’instrument d’un réveil spirituel. Ceux qui se convertissaient reçurent le nom de « Vaudois ». Leurs convictions évangéliques se propagèrent dans le sud de la France, en Italie du Nord, en Espagne, en Allemagne. La doctrine traditionnelle de l’inspiration et de l’autorité des Écritures fut la base de leur foi.

Plus tard, le réveil spirituel anglais, sous l’influence de l’érudit biblique John Wycliffe (1320-1384),se développa surla conviction que la Bible, pleinement inspirée, est l’unique fondement de l’Église et de la vie chrétienne. Encouragé par ses disciples, Wycliffe traduisit la Bible en anglais courant. Cette entreprise eut plus tard une très grande influence sur Jan Hus et sur Martin Luther.

6. La période de la Réforme (dès le XVIe siècle)

Ce temps fut traversé par un bouleversant retour à la Bible. Le pape et le système romain virent leurs prétentions à l’autorité spirituelle absolue contestées en plusieurs régions d’Europe. Les « protestants »partageaient la devise :Sola Scriptura —la Bible seule contient l’unique vérité nécessaire au salut et à la vie chrétienne. Malgré les divergences entre réformés,on s’accordait sur ce point. Ce fut le cas de Martin Luther, d’UlrichZwingli, des anabaptistes, de Martin Bucer (dont l’influence sur les gouvernants de Strasbourg amena ceux-ci à promulguer officiellement que les Écritures inspirées faisaient autorité pour leurs citoyens !), et bien sûr de Jean Calvin.5

Historiquement, il faut reconnaître que l’Église catholique romaine a aussi admis, bien avant Luther, l’inspiration plénière et l’autorité des Saintes Écritures. Or, à partir de la Contre-Réforme et du Concile de Trente (1545-1564), la Rome papale décrète : « Les sources de la foi se trouvent non seulement dans les Écritures, mais également dans les traditions apostoliques non écrites. L’Écriture s’interprète d’après l’enseignement de l’Église et le consentement unanime des Pères. » (8 avril 1546) 6La compréhension de la Bible se trouve donc accaparée par le clergé catholique. Mais que penser lorsque les interprètes principaux, les Papes, se contredisent, et que l’enseignement officiel déforme le sens évident du texte biblique ?

7. Le catholicisme romain actuel

« L’Église tient les livres de l’Ancien Testament et du Nouveau Testament pour saints et canoniques parce que, composés sous l’inspiration de l’Esprit Saint, ils ont Dieu pour auteur… » (Concile de Vatican II, 1965). Toutefois, ce Concile a aussi affirmé solennellement : « La charge d’interpréter de façon authentique la Parole de Dieu, écrite ou transmise, a été confiée au seul Magistère vivant de l’Église dont l’autorité s’exerce au nom de Jésus-Christ, c’est-à-dire aux évêques en communion avec le successeur de Pierre, l’évêque de Rome.[…] Les fidèles,se souvenant de la parole du Christ à ses apôtres : Qui vous écoute, m’écoute (Luc 10.16), reçoivent avec docilité les enseignements et directives que leurs pasteurs leur donnent sous différentes formes. » (Catéchisme de l’Église catholique, Éd. Mame/Plon, nov. 1992,p. 32,33). Ainsi, pratiquement, Rome hisse les décrets du Pape et l’enseignement du Magistère au niveau des Saintes Écritures !

*          *          *

En résumé, jusqu’au XXIe siècle, il s’est trouvé des défenseurs de l’autorité et de la perfection du texte inspiré de la Bible parmi les représentants du judaïsme (pour l’Ancien Testament), du catholicisme et du protestantisme. Parallèlement, et ce dès le début de l’Église, une multituded’interprétations tendancieuses ou d’instrumentalisations partisanes du texte sacré ont ternil’éclat de la Révélation. Dieu a néanmoins permis qu’un consensus sur l’origine et la nature des Écrituresen préserve la place éminente et facilite sa transmission jusqu’à nous. Qu’en est-il du statut de la Révélation inspirée et infaillible en nos temps ?

 II. L’autorité divine des Écritures en péril

1. Le protestantisme libéral

Les partisans de cette tendance, opposés aux convictions évangéliques, soutiennent que toute allusion au surnaturelest problématique : il faut s’en écarter. Selon eux, les Saintes Écritures ne sont ni plus saintes ni plus inspirées que n’importe quel autre livre.Pour les théologiens libéraux héritiers du déisme de Voltaire, des philosophies post révolutionnaires (Hegel, Marx, Darwin) ou des thèses rationalistes d’un ErnestRenan (1823-1892), la Bible n’est qu’un livre humain jalonnéd’obscurités, de contradictions et d’histoires immorales. Cette forme de théologie rationaliste et critique sera celle de beaucoup de facultés universitaires dès le XIXe siècle. L’inerrance ou l’infaillibilité bibliques semblent alors destinées aux oubliettes.

2. La néo-orthodoxie européenne à partir des années 1920

Ce courant,différent du précédent, mais partageant un certain bagage philosophique avec lui, naquit après la Première Guerre mondiale, essentiellement sous l’influence du théologien suisse Karl Barth. Ce dernier fut lui-même marqué par Søren Kierkegaard7 qui postulait que les vérités exprimées en clair dans la Bible ne sauraient faire naître la foi chez l’homme qui les entend, parce que, à cause du péché, tout homme tend à se soustraire à l’autorité de Dieu. Selon Kierkegaard, la vraie foi chrétienne implique un « saut » irrationnel en direction de Dieu.Ce « saut de la foi » est rendu possible sous la pression, non seulement de la Révélation écrite, mais d’états d’anxiété, de tension et de crise.

Dans cette ligne, Barth estimait que la Bible n’est pas la Parole de Dieu, mais contient un « témoignage » à cette parole, et qu’elle peut devenir « révélation » pour un lecteur particulier dans des circonstances spéciales. Il va de soi que la position évangélique traditionnelle n’est pas conciliable avec ces concepts. Affirmer que le texte biblique ne devient réellement Parole de Dieu que pour le lecteur dont le cœur est extraordinairement « touché » par tel verset, par telle « vérité », au point d’expérimenter une vraie « rencontre avec Christ », tout cela porte gravement atteinte à la nature de la Révélation. La Bible existe en effet de manière objective, en elle-même. Son statut de Parole permanente de Dieu ne dépend pas de mon ressentisubjectif, ni de mon évaluation à un instant particulier. Ses mots et son contenu sont Parole divine propre à engendrer et à nourrir ma foi (2 Tim 3.16,17 ; Rom 10.16-21 ; Mat 5.18,19 ; 1 Pi 1.23-25).Et si un verset ne me « parle » pas, il n’en est pas moins Parole de Dieu !  Il me parlera peut-être plus tard…

La néo-orthodoxie qui s’est développée à partir de ces concepts ne propose pas une doctrine unifiée et fermée. La démarche fondamentale de ce mouvement repose sur une théologie du paradoxe et des crises (inspirée par Kierkegaard) et sur la méthode dialectique (issue de Hegel, et résumée par l’axiome : thèse + antithèse => synthèse).Pour le néo-orthodoxe, la foi doit rester paradoxale : elle se nourrit d’éléments apparemment incompatibles (les vérités spirituelles que l’on a reconnues dans l’Écriture d’un côté, et les chocs de l’existence de l’autre) pour produire une foi dynamique et authentique… mais cette foi « contingente »8 est-elle pleinement chrétienne ?

3. Les partisansde l’inerrance partielle(ou limitée)

Succinctement, ces nouveaux interprètes9 ne reconnaissent la véracité et l’autorité des Saintes Écritures que dans les passages concernant l’objectif central de celles-ci, à savoir le salut.

Le reste du texte biblique subit le sort de toute littérature. On va se distancer plus ou moins :

  • de certaines expressions culturelles ou éthiques particulières à une époque,
  • de certaines déclarations considérées comme fausses en regard desspéculationsdescientifiques actuels,
  • de certaines difficultés de chronologie historique.

Ce traitement de l’Écriture nous amènelogiquement à la conclusion qu’un lecteur chrétien contemporain peut être aussi inspiré que les auteurs bibliques traditionnels,ou alors que la Bible n’est qu’une collection de toutes sortes de traditions et de convictions dépassées. On en vient aussi à classer les auteurs bibliques en catégories, des plus autorisés aux moins dignes de crédit.

De plus, ces interprètes distinguent entre divers niveaux de communication du texte biblique. Il y a le noyau du message, d’origine divine, comparé à un grain à l’intérieur d’un épi de blé. Puis il y a la balle du grain, c’est-à-dire la forme historico-grammatico-culturelle, d’origine strictement humaine et de nature transitoire.Le noyau est ce qui est important, tandis que la balle joue un rôle très secondaire. Il est probable que cette conception de la Bible soit de loin la plus dangereuse pour le chrétien, car elle accorde à chacun le droit de décider par lui-même ce qui est vrai ou non, et d’en faire ou non un objet de foi et d’obéissance. C’est une perversion du principe de libre-examen cher aux réformés. On devine qu’un tel lecteur aura vite fait d’adopter les passages qui lui plaisent et d’éliminer ceux qui heurtent sa nature pécheresse !

4. Le mysticisme

Cette tendance aspire à mieux qu’à l’humble étude de la Bible. Elle préconise,pour recevoir « la lumière intérieure », pour entrer en communion directe avec Dieu et pour atteindre à la vérité dans notre expérience et dansnos sentiments, dese mettre en condition par divers exercices spirituels, par des pratiques ascétiques ou par des rituels.Le mysticisme suppose qu’une telle approche nous ouvre à de nouveaux états de conscience et à la compréhension de la parole de Dieu, laquelle peut alors nous parvenir avec ou sans l’aide du texte biblique.

5. Fausses interprétations

La place manque pour détailler toutes les voix qui, à notre époque, se sont inscrites en faux à propos de l’inerrance, soit en la contestant directement, soit en l’annulant par des positions incompatibles avec le contenu de la Bible. Quelques exemples :

L’agnosticisme

Bertrand Russell (1872-1970), logicien, philosophe et pacifiste américain bien connu, a décrété que la Bible n’est pas inspirée, car pleine de légendes, ponctuée de récit immoraux et d’erreurs.

Des sectes

– La Science chrétienne prétend que les écrits de Mary Baker Eddy (1821-1910, fondatrice du mouvement)dévoilent le sens profond de la Bible et que la Bible ne peut être comprise sans eux.

– Les Témoins de Jéhovah suivent la ligne de leur fondateur, C. T. Russell (1852-1916), qui a estimé que ses propres commentaires sur la Bible étaient plus nécessaires qu’une simple lecture de la Bible.

– Les Mormons affirment que Le Livre de Mormon possède la même valeur que la Bible ; on doitdonc intégrer cette nouvelle révélationà la Bible, avec l’avantage d’une « mise à jour » plus sûre.

III. L’autorité des Écritures réaffirmée

Bien que les tentatives de discréditer la Bible se soient multipliées du XIXe siècle à nos jours, il s’est toujours trouvé des résistants pour affirmer leur foi indéfectible en l’inspiration et en l’inerrance du Texte sacré.

À la fin du XIXe siècle, un groupe de chrétiens évangéliques ont voulu relever le défi posé par les négateurs du statut divin de l’Écriture. Ce fut la naissance du « fondamentalisme » chrétien. Arrêtons-nous un instant sur son développement.

1. Inerrance biblique et fondamentalisme

Le terme « fondamentaliste » n’a pas, à l’origine, le sens général de « fanatique religieux » qu’il a pris aujourd’hui. Il est né de l’initiative de quelques chrétiens américains d’obédience presbytérienne qui désiraient s’opposer aux tendances théologiques rationalistes et libérales, ainsi qu’à l’évolutionnisme de la fin du XIXe siècle. Réunis annuellement en conférence de 1876 à 1897, ces croyants publièrent un credo en 14 points : le Niagara Creed (1878). Le premier point affirme l’inspiration verbale et plénière des Écritures dans les manuscrits originaux. Parmi ces chrétiens se trouvaient A.A. Hodge, B.B. Warfield, J. Brookes, D.L. Moody, J.H. Taylor, C.I. Scofield. Plusieurs des participants étaient calvinistes et/ou prémillénaristes.

L’influence de ce groupe va s’étendre. Entre 1910 et 1915 paraissent 12 volumes regroupés sous le titre de The Fundamentals : A Testimony to the Truth (sous la supervision de R.A. Torrey). Succès de la publication jusqu’en France ! En 1919, des pasteurs presbytériens, baptistes et méthodistes fondent la World’s Christian Fundamentals Association, pour défendre les éléments fondamentaux de la foi.

Toutefois, à partir de cette époque, certains tenants des positions fondamentalistes commenceront à en critiquer les orientations prémillénaristes et dispensationalistes10, tout en restant fermement attachés à l’inerrance biblique (comme, par exemple, le calviniste J.G. Machen).

Après la SecondeGuerre mondiale, des chrétiens persistent à se qualifier de « fondamentalistes », montrant ainsi leur attachement aux points principaux du Niagara Creed. Ilsfondent l’International Council of Christian Churches (ICCC) en 1948.

Plusieursde ces fondamentalistes, craignant que le mouvement néo-évangélique (dont Billy Graham deviendra le fer de lance) n’aboutisse, dans les faits, à une ouverture en direction de l’œcuménisme, s’en distancientpubliquement dès la fin des années 1950.

2. L’inerrance aujourd’hui

Un récent congrès s’est penché sur le thème de l’inerrance biblique. Sous l’égide de John MacArthur, cette Conference on Inerrancy a eu lieu en mars 2015 à Los Angeles. On y a reparlé des Déclarations de Chicago 11.Un site Internet et une pétition en sont nés 12. Quelques pages abordent la question : l’affirmation de l’inerrance biblique est-elle le fait d’une dénomination particulière ? Les réponses sont claires : aucun mouvement chrétien ne détient l’exclusivité de cet article de foi. Du début du christianisme à nos jours, cette doctrine a eu ses illustres défenseurs. Pour appuyer cette réalité, des porte-paroles de mouvements évangéliques divers attestent de leur fidélité à une Parole de Dieu pleinement inspirée, infaillible et inerrante. Réjouissons-nous de cette belle harmonie.

Quant aux courants historiques représentés par les tenants de l’inerrance biblique, on les voit défiler sous la forme de citations des Pères de l’Église (à l’exclusion d’Origène), des docteurs médiévaux (Augustin, Thomas d’Aquin), des réformateurs (Calvin, Luther, Wesley) et de leur descendance spirituelle. Dans les temps modernes, les auteurs du site mentionnent à plusieurs reprises le rôle déterminant de A.A. Hodge (1823-1886) et de B.B. Warfield (1851-1921) évoquésdans le point précédent (III,1). Ces derniers contribuèrent à perpétuer la doctrine de l’autorité du texte biblique dans leur ouvrage Inspiration (1881).13] Ici aussi, nous pouvons nous réjouir de ce que des chrétiens se soient mobilisés pour réaffirmer d’antiques vérités, parce qu’elles sont vitales pour la foi et pour l’Église de Christ. Mais attention : la proclamation de l’inerrance des Écritures ne dispense aucun lecteur de « veiller sur lui-même » et sur sa conduite(cf.1 Tim 4.12-16), car l’histoire démontre que quelques-uns ont défendu cette doctrine, mais se sont néanmoins fourvoyés.

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  1. Les références suivantes témoignent de ce statut reconnu : Ex 24.4 ; 34.27 ; Deut 18.17-22 ; Néh 9.13-14 ; Zach 7.12 ; Act 22.12-15 ; 1 Cor 2.12-13 ; 2 Tim 3.16-17 ; Apoc 1.1-3
  2. Cf. Esd 7.10 et Néh 8.8 : ces passages offrent des modèlesd’enseignement fructueux du texte biblique à cette époque
  3. À noter qu’au sein du judaïsme, les partisans du mouvement nommé le « karaïsme » ont choisi de s’émanciper du joug talmudique pour remettre le texte biblique au centre (dès le IXe siècle apr. J-C.)
  4. « Nicéen » fait référence au premier Concile œcuménique de Nicée, en 325 apr. J-C. Ce concile vit la rédaction du Symbole (ou Credo) de Nicée, qui contribua à étayer la doctrine de la divinité de Christ. Malheureusement, ce Concile autorisa le culte des images, avec des nuances qui n’empêchèrent pas cette pratique d’ouvrir la porte à l’idolâtrie
  5. « Comme Dieu ne parle pas chaque jour du ciel et que sa vérité, selon sa volonté, est et sera connue jusqu’à la fin dans les seules Écritures, les croyants doivent considérer comme arrêté et certain qu’elles émanent du ciel et qu’en les lisant, c’est comme s’ils entendaient Dieu parler de sa propre bouche. » (Institution de la religion chrétienne, I,vii,1, transcription en français moderne, Éd. Kerygma-Excelsis, Aix-en-Provence, France, 2009, p.36)
  6. Simultanément, les livres apocryphes furent officiellement intégrés au canon biblique (sous l’appellation ambiguë de « livres deutérocanoniques ») et les traductions en langues communes mises à l’index (c.à.d. interdites)
  7. 1813-1855, écrivain, théologien et philosophe danois, considéré comme le père de l’existentialisme moderne
  8. « Contingent » : ici dans le sens de « qui peut arriver ou ne pas arriver ; fortuit, occasionnel ; accidentel, incertain »
  9. De leur nombre sont par exemple Henry P. Smith (1847-1927), Richard Coleman, Stephen T. Davis… ou les rédacteurs du document Dei Verbum lors du Concile Vatican II en 1965 (art.11)
  10. Les dispensationalistes, à l’instar de J.N. Darby, découpent l’histoire humaine en périodes distinctes, ou « dispensations »
  11. Voir l’introduction à l’article de P. Wells dans ce numéro
  12. http://defendinginerrancy.com/sign-the-petition/
  13. Non sans prendre une distance critique par rapport à la défense magistrale de l’inspiration biblique offerte par L. Gaussen en 1840 dans sa Théopneustie
Dossier : La Bible, parole de Dieu ou paroles d'hommes ?
 

McCarty Scott
Scott McCarty a fait ses études en théologie au Dallas Theological Seminary, aux États-Unis. Il exerce un ministère d’enseignement biblique en France depuis 1971. Cofondateur du Centre d’information à l’évangélisation et à la mission à Grenoble, il est membre de Promesses et auteur de nombreux articles.