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Sens unique

 Dans la multiplicité des revues qui émanent des diverses sphères religieuses, on peut être parfois frappé par certaines convergences tant parmi les thèmes traités qu’au travers des préoccupations des responsables d’églises.

 Il nous semble par exemple qu’on veuille aujourd’hui privilégier l’union à tout prix entre les chrétiens de tous horizons, pour aboutir à une unité – voire une uniformité – qui irait bien au-delà du courant oecuménique, déjà vieillot et menacé d’enlisement.

 Comment s’y prend-on?
 Pour réaliser cet objectif on met en avant une mission à laquelle tout chrétien se doit d’adhérer: l’évangélisation du monde. Et les mouvements religieux de tous bords abondent dans le même sens:
 – le CGE (Conseil oecuménique des églises) projette une conférence mondiale sur ce thème;
 – le pape a lancé son encyclique «Evangélisation du monde aujourd’hui»;
 – le monde protestant se préoccupe régulièrement de ce sujet sous forme de colloques, synodes, forums…

La cacophonie

 Le problème est que chacun donne au mot «évangélisation» un contenu différent: le CGE parlera de «théologie de la libération»; le pape parlera de «Marie inspiratrice et directrice d’une évangélisation toujours renouvelée»; les églises officielles protestantes parleront de «transformation de l’humanité en un peuple de Dieu où règnent la justice et la paix».

 Nous sommes loin de ce que l’Ecriture enseigne à propos de la repentance et de la foi en Jésus-Christ, et loin du chrétien qui se fonde sur les valeurs de la parole de Dieu, qui est l’antithèse de l’humanisme et qui libère de la très légale religion-tradition! Il n’y aura pas de vrai progrès moral, social et religieux sans une soumission de l’homme à Dieu.

Tous dans le même sens?

 Il n’est pas inutile de se poser quelques brèves questions sur les motifs qui inspirent cet élan à évangéliser le monde.

 Faut-il faire sienne la déclaration du pape à Strasbourg: «L’unité spirituelle et morale devraient être les éléments indispensables de l’identité de notre monde christianisé»? N’y a-t-il rien de plus que la tentative de réunir en un seul groupe les diverses familles chrétiennes? Une réédition de Babel?

 Nous nous posons en tout cas vivement la question: peut-on être d’accord avec cette idée que ce qui est primordial, c’est de poursuivre tous le même but? N’est-ce pas une ruse nouvelle que de s’interdire toutes questions au moment où nous sommes tous invités à nous engager dans une évangélisation en commun?

 Il semble que l’essentiel est que «ça marche»! Un bel héritage de notre monde de consommation: peu importent les moyens… Pourtant, comme on ne veut pas se payer de mots seulement, il faut se donner les moyens pour réaliser cette ambition.

La ruse

 A «mission commune» on a donc associé l’idée «d’union nécessaire». Encore faut-il la faire sentir concrètement, montrer que l’on décloisonne, que l’on est nombreux. Pour éviter de mesurer les éloignements mutuels et de constater les incohérences par l’examen de la Parole, on propose de mesurer la proximité mutuelle par «la prière inter-groupes». Voilà enfin trouvé le terrain commun, unificateur, qui vient élargir le courant oecuménique.

 On détourne la prière de sa fonction première: parler à Dieu. On la récupère comme instrument de «dialogue intercommunautaire». Même s’il est vrai que la prière en commun nécessite la communion, on oublie que cet accord, voire cette harmonie, doit avoir au départ une base biblique.

 La confusion peut séduire n’importe qui et aller jusqu’à entraîner une église entière, même si l’on prétend ne pas vouloir «marcher» avec ce qui est proposé. L’enjeu est de taille: l’amalgame mission/union/prière, avec l’étude trop sommaire de la Bible, peut déteindre sur toutes les activités d’une église locale.

Le préalable

 Et si nous posions la question à rebours? Si justement l’étude approfondie de la Parole était un atout? Un atout parce qu’elle nous oblige à un effort tout à fait irremplaçable en vue de notre maturité chrétienne.
 Prêcherions-nous à des gens convaincus? Pas si sûr…

 L’étude de la Bible a pour rôle de nous entraîner à rester attachés à la pensée de Dieu. L’apprentissage de l’étude systématique des Ecritures nous oblige à faire un effort, à élaborer une méthode, à exercer une certaine rigueur – autant de termes qui sont catalogués de «rétros» s’ils font peur, éludés s’ils sont liés au travail, mais entendus par ceux qui veulent aller plus loin…

 Il est malheureusement courant de voir que la connaissance de la Bible est traitée de la même manière que l’apprentissage de notre langue maternelle en classe à notre époque. On s’est peu à peu aligné au but qu’on poursuit en apprenant une langue étrangère, c’est-à-dire savoir communiquer immédiatement. L’efficacité se pare du même coup de l’à-peu-près. On apprend des mots, des tournures toutes faites, ce qui se dit ou ne se dit pas, mais on délaisse tout ce qui n’est pas indispensable à la communication orale, et on perd un immense trésor de littérature qui restera à jamais inaccessible.

 Il en va de même pour l’étude des Ecritures. L’étude des livres de la Bible qui n’ont pas d’implications pratiques immédiates reste facilement à l’écart. C’est une grave erreur de ne pas croire profondément à l’unité de la Parole dans tous les domaines. Il en résulte un état de fait: une connaissance insuffisante de la Bible et l’incapacité notoire de conduire une déduction conforme à la pensée de Dieu.

Le retour à l’équilibre

 Ce qui est vrai dans notre étude personnelle des Ecritures l’est aussi dans celle pratiquée en commun. Il nous faut absolument revenir à une instruction systématique et solide de la Bible. C’est une nécessité dans nos églises afin que les chrétiens acquièrent du discernement spirituel.

 L’étude de la Bible et la prière sont d’une importance égale. Etude et prière se complètent nécessairement. Comment pourrions-nous privilégier la prière (= l’homme parle à Dieu) par rapport à sa Parole (z Dieu parle à l’homme) sans nous laisser inspirer par cette dernière? Comment un concert de prières, qui se voudrait harmonieux, pourrait-il se jouer si la partition n’est pas la même pour tous?

La direction

 La prière sans sa source d’inspiration, la Bible, devient une activité charnelle qui risque en plus de se tarir.

 Mais là où nous réitérons toutes nos réserves, c’est lorsque la prière devient la base du «dialogue» entre tous les participants. N’entend-on pas souvent cette phrase: «Soyons heureux, nous avons pu prier ensemble!»

 C’est une joie en effet si cette exclamation est le reflet d’une communion retrouvée dans la vérité. Mais ce sera très artificiel si, pour que cette prière-prétexte puisse se réaliser, on a dû d’abord piétiner ses propres convictions et s’interdire ensuite tout autre dialogue spirituel.

 Ils persévéraient dans l’enseignement des apôtres, dans la communion fraternelle, dans la fraction du pain et dans les prières (Act 2.42).

Bernard Cousyn
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Cousyn Bernard
Bernard Cousyn a été durant plusieurs années ancien dans son église locale dans le Nord de la France. Jeune retraité, il vit à Evian et est membre du Comité de rédaction de Promesses.