Suicide ou sacrifice
SUICIDE OU SACRIFICE ?
Il existe plusieurs types de morts. La plus troublante est celle que l’on s’applique contre soi-même : le suicide (de sui : soi et caedere : tuer : « le meurtre de soi »). La Bible n’est pas silencieuse à ce sujet. Plusieurs récits font part d’hommes qui se sont donné la mort. La question est de savoir s’ils sont pour autant suicidaires ? Ce ne semble pas le cas de tous. Nous allons voir que certains envisagent la mort comme une fin, tandis que d’autres pensent la mort comme un moyen.
1. La mort comme une fin
Les hommes de cette première catégorie se sont suicidés pour eux-mêmes. Ils ont — faussement — cru pouvoir se délivrer des conséquences de leurs actes. Ils voulaient en finir avec leur mal-être ou avec leurs remords.
Remords stériles, du reste. Car si le remord pousse à s’apitoyer sur ses actes, il ne provoque pas forcément la prise de conscience du péché. C’est la repentance qui permet de s’humilier sincèrement devant Dieu, demandant ce pardon qu’il ne peut accorder qu’à tout pécheur contrit, implorant sa grâce (Rom 2.4 ; 2 Pi 3.9). La repentance donne aussi à cette âme la volonté de changer le cap de sa vie, avec l’aide de Dieu.
Le remord ne va pas si loin. C’est la tristesse causée par le résultat de son iniquité, alors qu’elle devrait l’être par l’offense faite à Dieu et le mal occasionné à autrui. Cet accablement, dévoyé par les modes de pensée de ce monde sans Dieu, ne peut que conduire à la mort (2 Corinthiens 7.10).
Quelques exemples
Abimélec, fils de Gédéon, a mis à mort ses frères pour prendre le pouvoir (Juges 9.1-6). L’Éternel ne peut oublier cet acte odieux. Ainsi, lors d’un siège, Abimélec a le crâne fracassé par un morceau de pierre jeté par une femme. Alors, mourant, il ne veut pas saisir cette ultime occasion pour manifester un quelconque regret. Non ! ce qui compte à ses yeux, c’est de ne pas perdre la face. Lui, le roi, être battu par une femme… quelle honte ! Il ordonne donc à son porteur d’armes de le transpercer de son épée (Juges 9.54). Cette fin tragique n’a rien de noble ou d’héroïque. Elle ne relève en rien l’image de cet homme violent et imbu de sa personne.
Saül débute bien comme roi d’Israël — tant qu’il est humble à ses yeux. Il suit le chemin de la volonté propre et finit lamentablement sur la montagne de Guilboa. Rejeté par Dieu à cause de ses péchés et de son obstination, il est acculé par les Philistins lors du dernier combat de sa vie égoïste et jalouse. Grièvement blessé, il demande à son porteur d’armes de mettre fin à ses jours. Tremblant, ce dernier n’ose pas… ce qui pousse Saül à se jeter lui-même sur son épée (1 Samuel 31.4). Le serviteur imite ensuite son maître. Dans cette scène qui a conduit à ces « meurtres », c’est la peur d’être livré à ses ennemis, la peur d’être humilié, battu, torturé et mis à mort qui l’emporte.
Achitophel, conseiller d’Absalom, préfère se donner la mort en s’étranglant plutôt que d’affronter les conséquences de sa trahison envers le roi David (2 Samuel 15.12,31 ; 17.23). Quand il comprend que son plan astucieux pour tuer David ne serait pas suivi par Absalom, il décide de mourir de peur de devoir rendre compte un jour à l’ami trahi.
Zimri, conspirateur et meurtrier de son roi, voyant qu’à son tour il va être renversé et tué, se retire dans son palais et le brûle sur lui (1 Rois 16.18-19). C’est ainsi qu’il meurt à cause de ses péchés !
Judas, disciple de Jésus, troublé et pris de vains remords, rapporte l’argent de sa trahison pour ensuite aller se pendre (Matthieu 27.5). Au-delà de cette terre, il devra pourtant poursuivre son existence loin de Dieu avec ces deux crimes, lui qui est appelé le « fils de perdition » (Jean 17.12).
2. La mort comme un moyen
La seconde catégorie d’hommes exprime autre chose : le sacrifice — au sens de « renoncement à soi » — est le seul chemin pour vaincre l’ennemi, pour ouvrir les trésors de la bonté divine à notre prochain, pour aimer selon Dieu, en action et en vérité !
Quelques exemples
Samson, fils de Manoach, est vu par certains comme ayant commis beaucoup d’écarts et de chutes dans sa vie de serviteur de Dieu1 . Il termine cependant par ce qui n’est pas un suicide mais bien plutôt un sacrifice. L’Éternel lui permet de remporter une dernière victoire en s’offrant pour la délivrance de son peuple. Par sa mort, sous les décombres du palais des Philistins, il entraîne bon nombre de ceux-ci (Juges 16.22-31).
Jésus, Fils de Dieu, unique et parfait en toutes choses, a donné sa vie pour glorifier son Dieu et satisfaire sa justice, pour nous délivrer de la main de l’ennemi de nos âmes (Hébreux 2.15), pour nous délivrer de la puissance des ténèbres (Colossiens 1.13), pour nous délivrer de la colère à venir (1 Thes 1.10), pour nous associer à sa mort et à sa résurrection, pour nous ouvrir les immenses richesses de la grâce de Dieu, pour nous donner, par-delà la mort physique, un sûr et éternel avenir avec lui.
Le Seigneur Jésus a donné sa vie (Jean 10.17-18), personne ne la lui a prise ! Il s’est livré en sacrifice à Dieu. S’il a accepté de mourir c’est pour nous sauver. S’il s’est laissé conduire au supplice et ne s’est esquivé en rien à cette mort ignominieuse, alors qu’il avait le pouvoir de le faire (Matthieu 26.53), c’est par amour pour son Dieu et Père et par amour pour sa créature.
3. La mort comme tentation finale de l’homme découragé
Job, accablé par le deuil et le dénuement, est poussé par son épouse folle de tristesse ou de rage à se laisser mourir (Job 2.9). Job reste ferme. Il ne cède pas à la tentation d’en finir. Et même s’il regrette, dans son chagrin, le jour de sa naissance (Job 3.1), il est consolé par Dieu et béni durant le reste de ses jours.
Élie, après une éclatante victoire sur l’idolâtrie, en vient à demander la mort parce qu’il se croit, à tort, seul contre vents et marées (1 Rois 19). L’Éternel doit alors remettre ses idées en place et lui révéler qu’il ne connaît pas tout et qu’il ne peut pas juger de la sorte. L’Éternel a encore besoin de lui. Élie n’a pas à décider du moment de son départ.
Jonas, fils d’Amitthaï, doit être repris par l’Éternel pour avoir demandé la mort plutôt que de voir ses ennemis bénéficier de la bonté de Dieu (Jonas 4). Son cœur, exclusif dans ses amitiés et ses affinités, s’irrite de ce que Dieu ne fasse pas de différences, de ce qu’il soit également bon envers les méchants et leur fasse grâce s’ils se repentent.
Nous, fils et filles de Dieu, devons aussi prendre garde à nos pensées. Laissons Dieu les renouveler en nous (Rom 12.2). Ne laissons pas les fruits de notre esprit se gâter et amener la corruption de la mort dans notre vie. Rejetons toute idée qui chérirait la mort physique comme délivrance de l’adversité et des soucis. Il peut arriver que, dans des circonstances extrêmes, nous aspirions à quitter notre corps de misère. Mais notre espérance repose sur un fait grandiose : non pas tant la délivrance des infirmités de cette terre, mais surtout le fait d’être revêtus de la plénitude de la grâce de Dieu (2 Corinthiens 5.1-4).
Conclusion
Il y a donc ceux qui se prennent la vie et ceux qui demandent à Dieu de leur prendre la vie. Il y a ceux visent un objectif plus grand que leur vie, et ceux qui portent comme une charge trop lourde le poids de leur vie.
Certains hommes de Dieu sont allés plus loin. Découragés, ils ont été tentés de demander à Dieu d’abréger leur souffrance. Ne critiquons pas cette volonté émanant d’hommes écrasés par les circonstances, même si le passage à l’acte doit nous choquer. Mais montrons bien plutôt à nos contemporains un modèle d’abnégation, à la suite de notre bon Berger.
Nous, frères et sœurs en Jésus-Christ, nous connaissons le véritable amour en ce que Jésus a laissé sa vie pour nous et que nous devons laisser nos vies pour ceux et celles de la famille de la foi (1 Jean 3.16-17 ; Gal 6.10).