Sur les traces d’un jeune chrétien fidèle
Les deux disciples les plus connus de l’apôtre Paul sont sans doute Tite et Timothée. Tous les deux sont appelés par l’apôtre « mon véritable enfant dans la foi » (Tite 1.4, 1 Tim 1. 2). Tous les deux étaient de jeunes hommes d’origine grecque (Gal 2.3, Act 16.3) et Paul considérait chacun d’eux comme son « compagnon d’œuvre » (2 Cor 8. 23, Rom 16.21).
Une étude de la vie de Tite
Je me suis demandé de nombreuses fois ce que ce serait d’être à leur place, de voyager avec ce grand apôtre investi de sa mission, de le voir s’expliquer et débattre avec des foules hostiles, d’échanger sur certains des nombreux problèmes d’assemblée ; de l’entendre prier ; de l’entendre parler de ses projets évangéliques et d’expliquer sa stratégie d’édification. N’êtes-vous pas aussi un peu jaloux de ces deux jeunes hommes ? Nous en savons plus au sujet de Timothée qui est mentionné deux fois plus souvent que Tite dans la Parole. Pourtant, en mettant bout à bout la douzaine de fois où Tite est mentionné, nous trouvons un exemple stimulant d’un jeune homme pieux et pragmatique. Ces références à Tite se regroupent autour de cinq situations ou événements distincts sur une période d’environ 13 années.
1. Tite à Jérusalem – Fidèle à ses convictions<
La première fois que nous lisons quelque chose au sujet de Tite, il est en voyage pour Jérusalem en bonne compagnie, celle de Barnabas et Paul (Gal 2.1-5). Ce n’était probablement pas un voyage très heureux, puisqu’un problème sérieux occupait leur esprit. Ces hommes étaient accusés de promouvoir un christianisme très libéral, sans circoncision, dénué de tout le respect dû à la loi et aux traditions juives. Certains érudits associent ce voyage au Conseil de Jérusalem en Actes 15, fixant l’événement autour de 49-50 après J.-C. Aujourd’hui, la plupart des jeunes hommes préféreraient aller skier ou jouer au football plutôt que d’assister à des réunions doctrinales aux débats intenses – on est tenté de laisser les études bibliques sérieuses et les conférences aux retraités, aux frères intellectuels ou excentriques. Tite s’est peut-être demandé si les problèmes du moment valaient la peine d’un si long voyage et d’une telle dépense d’énergie. Pourquoi ne pas simplement faire preuve d’un esprit docile et se conformer à la pression légaliste ? Pourquoi ne pas sacrifier une partie de « la liberté que nous avons dans le Christ Jésus » pour avoir la paix et l’unité ? L’apôtre des nations, pieux et expérimenté, se rendait compte du danger à long terme d’un tel compromis. Nous pouvons presque entendre sa voix sévère quand il dit « pas même un moment, nous ne leur avons cédé par soumission, afin que la vérité de l’Évangile demeure avec vous. » (Gal 2.5) Le jeune Tite a pris position, avec Paul et Barnabas. Il y a environ 500-600 ans, les chrétiens en Europe préféraient être brûlés vivants plutôt que de renier leurs convictions reçues de Dieu. Avons-nous encore quelques convictions bibliques pour lesquelles il vaut la peine de souffrir ?
2. Tite à Corinthe – Fidèle dans son amour pour ses frères chrétiens
Environ cinq ans après, nous trouvons Tite rattaché à l’assemblée chrétienne à Corinthe. Dans sa deuxième lettre à l’église à Corinthe, Paul relate une rencontre avec Tite : « Nous nous sommes encore plus abondamment réjouis de la joie de Tite, parce que son esprit a été apaisé grâce à vous tous. » (2 Cor 7.13) Tite ne faisait pas machinalement son devoir de chrétien à Corinthe, il a ressenti une grande affection (2 Cor 7.15) pour ces frères.
N’oublions pas que l’assemblée à Corinthe était loin de la perfection. Il y avait des tensions entre les frères les plus légalistes (« Moi, je suis de Pierre »), les activistes progressistes (« Moi, je suis de Paul »), les intellectuels (« Moi, je suis d’Apollos ») et ceux qui se sentaient au-dessus des autres (« Moi, je suis de Christ »). Il y avait de l’immoralité parmi certains et une triste indifférence chez la plupart ; des comportements charnels et de la rivalité entre les plus sages. Pourtant Tite les aimait. Ils étaient ses frères. Qu’apportez-vous à la vie d’assemblée ? Contribuez-vous à cette atmosphère lourde et critique ? Êtes-vous un frère difficile à contenter ? Aucun rassemblement de chrétiens ne sera jamais parfait ici sur la terre. Les assemblées doivent constamment chercher à changer pour le meilleur.
Je suis sûr que Tite a joué un rôle clé dans les changements positifs à Corinthe, mais d’une manière heureuse. Pendant que nous voyageons à travers la vie, laissons-nous derrière nous une odeur agréable ou désagréable ? Aimons-nous assez nos frères pour rayonner de chaleur et d’accueil ? Même envers ceux avec qui nous sommes en désaccord ? La vraie communion chaleureuse au sein du peuple de Dieu exige une marche en relation étroite avec Dieu. Tite était devenu une source de consolation pour un apôtre fatigué et affligé (2 Cor 7.5, 6). Si nous aimons vraiment nos frères, le Seigneur pourra également nous employer pour les encourager et les consoler.
>3. Tite en mouvement – Le fidèle administrateur des ressources
Dans le chapitre suivant (2 Cor 8), nous trouvons Tite impliqué dans des questions d’argent. Le projet était de rassembler des dons de différentes assemblées et de les porter aux frères et soeurs dans le besoin en Judée. Nous devons tristement admettre que le coeur humain est enclin à la tromperie, que ce soit en détournant les fonds, en les gaspillant ou en les utilisant pour contrôler les autres. L’apôtre expérimenté avait probablement déjà beaucoup vu de telles anomalies, c’est pourquoi il veillait « à ce qui est honnête, non seulement devant le Seigneur, mais aussi devant les hommes » (2 Cor 8.21). L’apôtre a eu besoin de croyants fidèles pour concrétiser son projet de collecte.
On a toujours grand besoin d’hommes et de femmes administrativement honnêtes et fidèles aujourd’hui. Il y a un manque inquiétant de telles personnes dans la plupart des champs de missions. Êtes-vous digne de confiance ? Votre comportement passé inspire-t-il la confiance ? Aucune équipe de chrétiens ne fonctionne bien avec des frères sur qui on ne peut pas compter. Tite et les autres choisis pour ce travail sensible ont été des hommes disciplinés et transparents. Leur honnêteté et leur sérieux ont été prouvés par un comportement constant dans le temps (2 Cor 8.22). Si vous viviez à cette époque, est-ce que ceux qui vous connaissent auraient proposé votre nom pour un travail si sensible ? Est-ce que les autres peuvent dépendre de nous ? Finissons-nous ce que nous commençons ? Notre vie a-t-elle montré notre engagement pour la cause de Christ ?
À chacun de nous, le Seigneur a confié du temps, de l’énergie et quelques possessions matérielles. À certains, il a également confié des enfants, un travail, un ministère, etc. Sommes-nous trouvés fidèles ? Les paroles de notre Seigneur Jésus sont toujours vraies aujourd’hui : « Celui qui est fidèle dans ce qui est très petit, est fidèle aussi dans ce qui est grand ; et celui qui est injuste dans ce qui est très petit, est injuste aussi dans ce qui est grand. » (Luc 16.10)
4. Tite en Crète – Fidèle pour mener à bien une mission difficile
Tite travaillait avec Paul sur l’île de Crète. Les croyants se réunissaient maintenant dans un certain nombre de villes sur l’île. Nous pouvons imaginer qu’il y avait là beaucoup de vie et d’enthousiasme, mais il y avait également beaucoup de défaillances. Autour de l’année 62 après J.-C., à un point critique dans le travail, l’apôtre quitte l’île mais Tite reste. Peu après, l’apôtre écrit : « Je t’ai laissé en Crète dans ce but, que tu mettes en bon ordre les choses qui restent [à régler], et que, dans chaque ville, tu établisses des anciens. » (Tite 1.5) Ce n’était pas une tâche facile. L’état moral de l’île était décadent : « Les Crétois sont toujours menteurs, de méchantes bêtes, des ventres paresseux. » (Tite 1.12) Certains se sont opposés au message (Tite 1.9). Parmi les nombreux nouveaux croyants, il y en avait probablement de plus expérimentés. Certains Crétois avaient pris part au jour particulier de la Pentecôte (Actes 2.11). À compter de ce jour, ces frères pouvaient revendiquer presque 30 ans de tradition et pouvaient s’opposer à Tite en lui disant : « Nous avons toujours fait comme ceci.» Parmi les frères en Crète, nous trouvons de vains discoureurs insubordonnés, des séducteurs, et les légalistes obnubilés par la circoncision (Tite 1.10). Certains se plaisaient dans les contestations et les disputes (Tite 3.9), tandis que d’autres étaient animés d’un esprit sectaires (Tite 3.10). Je suis sûr que le service d’amour fidèle de Tite à Corinthe a été employé par Dieu pour préparer ce jeune homme à ce nouveau défi.
Peut-être vivez-vous une situation difficile en ce moment. Les situations difficiles ne durent pas à toujours. La tension et la douleur sont employées par le Seigneur pour former et faire mûrir ses serviteurs. Comment apprendrions-nous la persévérance autrement ? Dans ses mains, les déceptions et les larmes peuvent être employées pour réduire le fossé entre ce que nous professons et ce que nous vivons (Tite 1.16). L’autorité apostolique avait été déléguée à Tite pour cette tâche. Aujourd’hui notre base est l’autorité des Écritures. Mais la vie conséquente et fidèle de Tite était une source d’inspiration pour d’autres en Crète. L’autorité morale n’est pas déléguée et elle ne peut pas être imposée ou exigée. Elle doit être méritée : « Te montrant toi-même en toutes choses un modèle de bonnes oeuvres, [faisant preuve] dans l’enseignement, de pureté de doctrine, de gravité » (Tite 2.7,8). Notre mode de vie devrait « faire honorer en tout la doctrine de Dieu notre Sauveur » (Tite 2.10). Sommes-nous à la hauteur ? Est-ce que la joie que nous procure notre style de vie chrétienne inspire les autres ? C’est la meilleure façon de montrer l’exemple.
5. Tite en Dalmatie – Fidèle quand il est seul
Nous trouvons la dernière référence à Tite en 2 Tim 4. 10. C’est la dernière lettre de l’apôtre Paul. Comme parfois dans les paroles de serviteurs vieillissants, nous y trouvons de tristes accents de solitude : « Tous ceux qui sont en Asie se sont détournés de moi. » (2 Tim 1.15) « Dans ma première défense, personne n’a été avec moi, mais tous m’ont abandonné. » (2 Tim 4.16) Au fur et à mesure que l’âge et l’infirmité limitent la joie que procure un service actif, le croyant pieux apprend de plus en plus à comprendre et à apprécier le Seigneur lui-même. « Mais le Seigneur s’est tenu près de moi et m’a fortifié. » (2 Tim 4.17).
L’apôtre a réfléchi à ses années de ministère et de sacrifices. Il en conclut : « J’ai combattu le bon combat, j’ai achevé la course, j’ai gardé la foi. » (2 Tim 4.7) Il attend maintenant avec intérêt cette couronne de justice (2 Tim 4.8). Mais il a également quelques derniers conseils pour ses plus jeunes compagnons d’oeuvre : « Sois sobre en toutes choses, endure les souffrances (…) accomplis pleinement ton service. » (2 Tim 4.5) Achève fidèlement ton service ; mène-le à bonne fin.
La pensée de l’apôtre se tourne alors vers certains compagnons d’oeuvre spécifiques : « Démas m’a abandonné, ayant aimé le présent siècle ; et il s’en est allé à Thessalonique. » (2 Tim 4.10) Qu’est-ce qui a attiré Démas à Thessalonique ? Une vie d’alcoolique et de drogué ? Un mode de vie immoral ? Ou était-il simplement absorbé par un bon emploi séculier, stimulant, et financièrement stable ? Cela ne nous est pas dit.
Et Tite ? Le verset continue : « Crescens en Galatie, Tite en Dalmatie » (2 Tim 4.10). Tite entrait maintenant dans une nouvelle étape de sa vie. S’il avait un peu plus de 20 ans quand il avait commencé ses voyages avec Paul, il arrivait maintenant à la fin de la trentaine. Une décennie et demie à travailler dans l’ombre du grand apôtre touchait à sa fin. Remerciez le Seigneur de ce qu’il vous ait donné des parents chrétiens, mais le jour viendra où il vous faudra vivre votre foi sans eux. Remerciez le Seigneur pour les hommes et les femmes pieux qui nous conseillent et nous encouragent et qui nous disent « c’est bien ». Mais ils partiront également. Sommes-nous prêts à nous tenir seuls ? Sommes- nous prêts à continuer à marcher sans leur appui et leur vigilance ? D’après ce que nous savons, Tite a été fidèle jusqu’à la fin.
Des traces à suivre
La fréquentation, même brève, de croyants utiles et enthousiastes comme Tite stimule notre manière de vivre et nos priorités. Tite a suivi l’exemple et les recommandations de l’apôtre, afin que les croyants apprennent eux aussi à être les premiers dans les bonnes œuvres et qu’ils ne soient pas sans fruit (Tite 3. 13). Tite a laissé de bonnes traces à suivre.