Dossier: Passer le témoin
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Un passage de témoin réussi

L’exemple de Moïse et Josué

De tout temps, l’être humain passe le témoin. Il le fait dans le cadre familial entre parents et enfants, dans le cadre professionnel, ecclésial et jusque dans la remise de la plus petite responsabilité.

Cette transmission à différents degrés comprend les valeurs éthiques, familiales, spirituelles et sociales. Souvent les protagonistes ne se rendent même pas compte de ce transfert.

Cadre historique

Le livre des Nombres fait partie des écrits de Moïse qui constituent les cinq premiers livres de la Bible, communément appelés le Pentateuque. La Genèse parle de l’origine, l’Exode de la présence de Dieu parmi son peuple, le Lévitique de la façon de s’approcher de Dieu, les Nombres de l’organisation du peuple et le Deutéronome est un rappel et un résumé des instructions fondamentales.

Ces cinq premiers livres de la Bible nous montrent comment Dieu choisit un peuple (Genèse), le rachète (Exode), le sanctifie (Lévitique), le dirige (Nombres) et l’enseigne (Deutéronome). Ils préfigurent le plan du salut en Jésus-Christ.

Dans la direction et l’organisation du peuple, le livre des Nombres indique bien des éléments utiles quant à l’attitude, la responsabilité, l’autorité et la charge des dirigeants :
– la consécration des Lévites dans leurs fonctions (chapitres 3-4, 8),
– la désignation des 70 anciens (11),
– la rébellion d’Aaron et Myriam contre l’autorité de Moïse (12),
– la révolte au retour des espions, et la fidélité de Caleb et de Josué (13-14),
– la révolte de Qoré, et la confirmation de Moïse et d’Aaron (16-17),
– la faute de Moïse et d’Aaron (20),
– les préparatifs pour l’entrée en Canaan (26-36).

C’est dans la préparation pour l’entrée en Canaan que nous trouvons le texte de Nom 27.15-23. Dieu demande à Moïse de monter sur une montagne, lui fait voir le beau pays et lui rappelle qu’il n’entrera pas dans la terre promise. Moïse, prévenu de sa mort prochaine, élève « un cri du cœur » vers Dieu pour demander un successeur, et le Seigneur répond.

Moïse premier conducteur spirituel

Moïse naît dans des circonstances où, comme tous les bébés mâles de son peuple, il est condamné à mourir. Il est choisi, sauvé et préparé par Dieu pour devenir le chef des Hébreux. Il reçoit une éducation aristocratique, étant instruit dans toute la science des Égyptiens. Son apprentissage de l’écriture lui sera utile pour transcrire les ordonnances de Dieu. Au pays de Madian, Moïse apprend à vivre dans le désert comme berger et à exercer la patience. Il entend l’appel divin, devant un buisson embrasé qui ne se consume pas.

Moïse conduit le peuple de Dieu hors d’Égypte, transmet la loi, et la manière d’entrer en communion avec Dieu. Moïse est le témoin vivant de l’alliance que Dieu a conclue avec son peuple au Mont Sinaï. Dans le N.T., il a l’honneur d’être présent lors de la transfiguration, aux côtés de Jésus et d’Élie.

Il ne s’est plus levé en Israël de prophète comme Moïse, que l’Éternel connaissait face à face. Il est incomparable pour tous les signes et prodiges que l’Éternel l’envoya accomplir au pays d’Égypte contre le Pharaon, contre ses serviteurs et contre tout son pays, et pour les actes redoutables qu’il exécuta avec autorité sous les yeux de tout Israël (Deut 34.10-11).

Suite à une désobéissance à Dieu, Moïse se voit interdit d’entrée dans le pays découlant de lait et de miel, c’est pourquoi il demande un successeur pour terminer son mandat. Moïse initie ce que son successeur est appelé à continuer : il démontre sa dépendance de Dieu à maintes reprises ; il responsabilise les anciens en les faisant participer à la conduite du peuple ; il enseigne et met en pratique la loi et les ordonnances de Dieu. Quand au caractère de Moïse, nous savons qu’il est humble (fort patient ou très doux, selon les traductions). Il est prêt à se donner totalement pour le peuple, jusqu’à intercéder pour le pardon de celui-ci au risque de sa vie.

1. Le besoin d’un successeur (Nom 27.15-17)

« Moïse parla à l’Éternel et dit : Que l’Éternel, le Dieu des esprits de toute chair, établisse sur la communauté un homme qui sorte devant eux et qui entre devant eux, qui les fasse sortir et qui les fasse entrer, afin que la communauté de l’Éternel ne soit pas comme des brebis qui n’ont point de berger. »

a) L’importance de la demande d’un successeur

Dans la perspective de la préparation à la transmission de charges, la demande d’un successeur est capitale. Pour transmettre une responsabilité, il est indispensable de découvrir une (ou plusieurs) personne(s) qui poursuive(nt) l’œuvre commencée.

A qui est adressée la demande ?

La demande est adressée à l’Éternel, « le Dieu des esprits de toute chair ». Moïse, en utilisant cette expression, démontre donc qu’il sait que c’est Dieu qui a autorité sur la vie, et dans cette attitude, montre humblement sa confiance en celui qui a déjà souvent répondu favorablement à ses requêtes.

Quelle est la demande ?

La demande est claire et précise. Moïse demande à Dieu d’établir (désigner, placer, nommer, donner) un homme sur la communauté. Moïse demande à Dieu de désigner un homme. Un autre devra conduire le peuple dans le pays promis et terminer le voyage. Il ne mentionne pas Josué dans sa prière : il est essentiel que ce ne soit pas Moïse qui désigne son successeur, mais Dieu lui-même.

Qu’est-ce qui motive la demande ?

Ce qui motive la demande de Moïse, c’est l’humilité, le don de soi et le souci pour son peuple en tant que berger expérimenté. Moïse désirait ardemment entrer en Canaan. Il sait maintenant qu’il n’y entrera pas. Mais Dieu tient parole selon le jugement qu’il a prononcé à Qadech, aux eaux de Meriba. Moïse réagit sans un mot de plainte. Il est préoccupé par la communauté de l’Éternel : il ne dit pas mon troupeau. Il ne se place pas au-dessus des autres, bien qu’il ait reçu l’autorité (déléguée par Dieu) sur le peuple.

b) Le profil du successeur

Dans la demande de Moïse, nous pouvons discerner deux éléments essentiels concernant le profil de son remplaçant :
– capable de diriger (faire entrer et sortir) : cette expression « entrer et sortir » désigne le commandement, la conduite du peuple ; l’image est tirée de l’office du berger à l’égard du troupeau ;
– capable de « paître » (berger) : le peuple d’Israël a besoin d’un conducteur qui le mène au combat dans la conquête de la terre promise, mais ce conducteur ne doit pas seulement être un guerrier. Il doit également savoir soutenir, encourager, enseigner, guider, soulager, et soigner le peuple.

c) La réponse souveraine de Dieu (Nom 27.18-21)

« L’Éternel dit à Moïse : Prends Josué, fils de Noun, homme en qui (se trouve) l’Esprit ; et tu poseras ta main sur lui. Tu le placeras devant le sacrificateur Éléazar et devant toute la communauté, et tu lui donneras des ordres sous leurs yeux. Tu le rendras participant de ta dignité, de sorte que toute la communauté des Israélites l’entende. Il se tiendra devant le sacrificateur Éléazar, qui consultera pour lui le jugement de l’ourim devant l’Éternel ; et lui-même, ainsi que tous les Israélites avec lui, et toute la communauté, sortiront sur l’ordre d’Éléazar et rentreront sur son ordre ».

Dieu répond à Moïse de façon précise et le met à l’œuvre. Dieu est souverain, il contrôle et dirige tout. Il demande cependant la participation de Moïse : Moïse n’est pas passif, mais responsable et actif, dans le courant de l’action de Dieu.

2) La désignation d’un homme préparé

a) Un homme courageux et fidèle

La mention initiale de Josué se trouve en Exode 17.8-16 lors du premier combat que les Israélites ont dû livrer après la sortie d’Égypte. Généralement, le contexte de la première mention d’un personnage dans la Bible nous donne des indications sur sa personnalité. Ici, Josué est nommé chef militaire pour sortir au combat. Josué fait partie des 12 espions qui vont explorer le pays de Canaan. C’est à ce moment-là que Moïse change le nom de Hochéa (salut) en Josué (L’Éternel sauve). Avec Caleb, il reste fidèle et confiant en Dieu, malgré la révolte des autres espions et du peuple. Ainsi Josué reçoit la promesse d’entrer dans le pays promis. Dieu l’a préparé à l’avance au travers de ces différentes étapes de vie.

b) Un homme en qui se trouve l’Esprit

Lors de la désignation officielle de Josué comme successeur, Dieu utilise l’expression « un homme en qui se trouve l’Esprit ». Il est vrai que, d’une manière générale, nul esprit humain ne peut exister ni subsister sans l’œuvre vivifiante de Dieu. Mais dans cette expression, il est également possible de comprendre que Dieu a imparti à Josué les qualités nécessaires à l’exécution de son futur mandat. Que Dieu lui ait donné toutes ces qualités dès le début de son ministère, ou qu’il les lui ait dispensées en temps opportun, le texte ne nous le dit pas. Le seul indice qui puisse nous faire pencher pour un complément d’équipement étape par étape est la mention dans Deut 34.9 de l’esprit de sagesse pour conduire le peuple, que Josué reçoit lors de l’imposition des mains de Moïse.

c) Un homme préparé

Josué est l’assistant de Moïse lorsque celui-ci monte sur le mont Sinaï. Nous le trouvons dans la tente de la rencontre lorsque l’Éternel parle à Moïse face à face. Assistant et confident de Moïse, Josué a l’occasion d’écouter ce que Dieu dit à son illustre aîné. En mettant Josué dans cette situation d’écoute, Dieu le prépare et le fortifie pour son mandat. Josué était donc idéalement préparé pour ce service (Nom 11.28 ; Ex 17.9ss ; 24.13 ; 32.17). Il avait également visité le pays de Canaan avec les autres espions (Nom 13.8 ; 14.6).

3) Le passage de témoin

a) Une nomination personnelle

« Prends Josué. » Sans développer longuement, nous soulignons que ce geste est important. Moïse n’est pas appelé à se mettre devant le peuple et à appeler « du haut de la chaire » celui qui deviendra son successeur. Il n’est pas suggéré de demander qui veut bien assumer ce travail. Prendre Josué signifie aller chercher un homme désigné par le souverain Berger, Dieu.

b) Une identification par l’imposition des mains

Dieu demande à Moïse de poser sa main sur Josué. Si Dieu fait cette demande avant de placer Josué devant le peuple, c’est parce que l’identification est plus importante. La présentation devant le peuple en découle. L’imposition des mains est un acte d’identification et de transmission. Celui qui transmet son mandat doit clairement indiquer qui est son successeur, et donner sa bénédiction. La manière de le faire à l’époque de Moïse était de mettre la main sur la tête.

c) Une mise à part visible

L’Éternel demande de présenter Josué devant deux témoins de cette transmission : le sacrificateur Éléazar et le peuple. Pourquoi devant le sacrificateur Éléazar ? Bien que rempli de l’Esprit, et honoré, le successeur ne doit rien faire sans demander conseil à Dieu, et ne pas se fier à son propre jugement. Cela souligne la réalité du gouvernement divin ! Éléazar est le représentant du système sacrificiel, seul moyen d’entrer en contact avec Dieu ; il est le médiateur entre Dieu et les hommes. Dieu demande également à Moïse de placer Josué devant tout le peuple. Le peuple doit savoir que Josué est désigné par Dieu et être témoin de la charge qu’il reçoit (et donc entendre les modalités de cette charge). Ainsi, la communauté entière participe comme témoin, donnant une validité juridique à une cérémonie où le rite de l’imposition des mains est pratiqué, symbole de la transmission d’une charge. Rien n’est fait en cachette, et comme Josué sera le conducteur du peuple, il importe que le peuple connaisse son nouveau conducteur.

d) Une transmission transparente

L’Éternel demande à Moïse de donner des ordres (des instructions) à Josué devant les Israélites. Les consignes de Dieu sont ainsi transmises afin que tous comprennent que même si Josué est investi de la charge suprême, Dieu reste le Souverain. Et qu’ainsi les membres du peuple prennent conscience de la charge que Josué porte, et qu’ils s’engagent à l’assister et à l’encourager. Quelles sont les consignes que Moïse donne à Josué ? L’ordre de conduire le peuple dans la crainte et l’obéissance à Dieu, d’être courageux, de marcher en tête du peuple lors de la conquête du pays promis, car il peut être assuré de la présence et de l’aide divine, et libéré de toute crainte des ennemis. Ces dispositions sont confirmées par Dieu en Deut 31.23. Si les ordres sont maintenant donnés devant le peuple, c’est afin que tout le peuple soit informé du but à atteindre et des promesses de Dieu. Ne pas donner d’ordres devant le peuple reviendrait à cacher les promesses de Dieu et à rendre confus le rôle du successeur.

e) Une transmission progressive

Moïse fait participer Josué à l’honneur du gouvernement civil ; il ne l’utilise plus comme serviteur, mais comme partenaire. Il lui donne une part d’autorité, et une part d’exercice de celle-ci. Non seulement pour l’introduire dans le gouvernement, mais aussi pour le rendre respectable aux yeux du peuple, afin que toute la congrégation d’Israël le reconnaisse comme législateur et gouverneur, s’attache à sa parole et obéisse à ses directives. Dans cette perspective, Moïse est appelé à prendre Josué à part pour un temps de formation spécifique. Josué doit l’accompagner et prendre sa place petit à petit. La transmission entre Moïse et Josué n’est pas abrupte. Dieu n’a pas seulement préparé Josué, mais il a aussi préparé le peuple, par la participation de Josué à la dignité de Moïse.

4) Mise en pratique (Nom 27.22-23)

Moïse agit comme l’Éternel le lui avait ordonné. Il prit Josué et le plaça devant le sacrificateur Éléazar et devant toute la communauté. Il posa ses mains sur lui et lui donna des ordres, comme l’Éternel l’avait dit par l’intermédiaire de Moïse.

Moïse agit comme l’Éternel le lui avait ordonné ! Moïse fait même plus que ce que Dieu lui a demandé, puisqu’il impose les deux mains au lieu d’une seule. Cela prouve que Moïse n’est pas un imposteur et ne cherche pas à tirer la couverture de son côté, du côté de sa famille ou de sa tribu. Le pouvoir est transmis à son serviteur, un Éphraïmite, et non pas à son fils, comme ce fut le cas pour Aaron dans le cadre du sacerdoce

« Agir comme l’Eternel le demande », cette phrase devrait être notre devise. Pour en faire l’expérience pratique, il est nécessaire de connaître ce que Dieu demande ! Moïse, dans les versets 22-23 nous donne un aperçu de son obéissance, mais son action envers Josué ne s’arrête pas là. À partir de ce jour, Josué participe avec lui à la conduite du peuple. Quel exemple de consécration et de renoncement ! Ce qui importait pour Moïse, ce n’était pas sa position, ni celle de Josué, mais leur obéissance à Dieu.

Josué a-t-il suivi l’exemple de Moïse ? Oui. En Jos 24, nous voyons qu’il place le peuple face à ses responsabilités devant Dieu. Il lui rappelle l’œuvre de Dieu et lui donne des ordres. A la mort de Josué, ce sont les anciens qui ont la responsabilité du peuple, et nous voyons que tant qu’ils sont en vie, Israël sert l’Éternel (Jos 24.31 ; Jug 2.7). Mais curieusement, la génération suivante fait ce qui est mal aux yeux de l’Éternel, car ils ne le connaissent pas (Jug 2.10-11). Les anciens ont-ils pratiqué la transmission de témoin dans le même esprit que Moïse à l’égard de Josué ? Et nous aujourd’hui, comment transmettons-nous le témoin ? L’histoire de Moïse a beaucoup à nous apporter : obéissants et dépendants de Dieu, cherchons à laisser l’exemple d’une vie de foi altruiste et totalement tournée vers Dieu.

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