Dossier: Création en crise
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Un regard écologique équilibré

Quelle attitude le chrétien doit-il avoir par rapport à la terre, notre bien matériel commun ? La question concerne l’immédiat (notre génération) et le long terme (les générations à venir).

Les questions écologiques sont d’actualité. L’Église commence aussi à se préoccuper de ces questions.

La préoccupation du rapport de l’homme à la terre n’est pourtant pas nouvelle. De tout temps, les hommes se sont souciés de cette question, mais leur approche était plus religieuse que scientifique. Les catastrophes naturelles étaient conjurées par la prière et par des rites religieux. Les prêtres de Baal se mutilaient pour inciter leur divinité à envoyer la foudre, annonciatrice de l’orage, après trois ans de sécheresse : « Ils crièrent à haute voix, et ils se firent, selon leur coutume, des incisions avec des épées et avec des lances, jusqu’à ce que le sang coule sur eux. » (1 Rois 18.28) Élie, le prophète, se moque de leurs pratiques : « À midi, Élie se moqua d’eux et dit : Criez à haute voix, puisqu’il est dieu ; il pense à quelque chose, ou il est occupé, ou il est en voyage ; peut-être qu’il dort, et il se réveillera. » (1 Rois 18.27) Pourtant, lui aussi recourt à la prière pour ramener la pluie dont Dieu avait pourtant annoncé le retour (1 Rois 18.1,41-45).

Aujourd’hui, les idéologies ne sont pas absentes du débat écologique, mais elles sont parfois masquées par un discours scientifique.

Pour une juste approche des choses, le regard biblique est fondamental. En voici les points principaux :

  • Toute la création est une œuvre exceptionnelle reflétant les perfections invisibles de Dieu (Rom 1.20). Elle ne doit jamais être admirée pour elle-même, car seul le Créateur est digne d’adoration (Apoc 4.11). D’ailleurs, toute la création loue le Seigneur et reconnaît sa grandeur et sa magnificence (Ps 148).
  • Cette œuvre de création est corrompue depuis le péché d’Adam et Ève. La responsabilité humaine par rapport aux catastrophes naturelles est indéniable. Elle est même nettement plus grande que ne l’affirment les mouvements écologistes, car elle ne date pas de ces cent dernières années, mais remonte au début de l’humanité. Ce n’est pas la fausse relation à la création qui en est la cause première, mais la fausse relation à Dieu. Les victimes des catastrophes ne sont pas toujours directement responsables. Ainsi, les dix-huit victimes de l’effondrement de la tour de Siloé n’étaient pas plus coupables que les autres habitants de Jérusalem (Luc 13.4).
  • La création est donnée pour la jouissance de l’homme (Gen 1.29) et des animaux (Gen 1.30), mais Dieu a confié à l’homme le soin de gérer toute chose (Gen 1.26,28). Il est appelé à « dominer sur les animaux » et à « soumettre la terre », ce qui ne signifie pas qu’il doive tout massacrer sur son passage. L’homme reçoit le mandat d’un serviteur qui doit prendre soin d’un domaine. Le bien-être des autres créatures humaines doit être prioritaire comme pour toute autre entreprise humaine. Celui qui construit une maison doit ériger une barrière sur le toit plat, si un escalier y donne accès, pour éviter que des personnes qui s’y rendraient ne se blessent (Deut 22.8). De même, celui qui détruit une forêt en montagne pour des besoins industriels doit s’assurer qu’aucune avalanche ne menace ensuite des habitations, ni n’entraîne un autre fléau en aval. Il doit réfléchir et prévenir tout inconvénient que son action pourrait avoir pour d’autres. La responsabilité des hommes dépasse la génération présente. Lors du siège d’une ville, certains arbres pouvaient être coupés pour les besoins de l’opération, mais les arbres fruitiers devaient être préservés pour les générations futures (Deut 20.19-20). La préoccupation du bonheur des générations suivantes est largement soulignée dans l’Écriture.
  • Le respect des hommes envers les animaux y est aussi enseigné, mais à un moindre degré. D’un côté, l’animal domestique doit être nourri pour son travail (Deut 25.4) et a droit au repos sabbatique (Ex 20.10 ; 23.12 ; Deut 5.14). De l’autre, les animaux peuvent être tués et mangés par l’homme (Gen 9.3). Ils servent aussi d’offrandes pour des sacrifices. Tout animal domestique qui présente un danger pour l’homme doit être abattu (Ex 21.28). Le propriétaire qui n’a pas pris toutes les mesures pour surveiller un bœuf réputé dangereux sera condamné comme meurtrier en cas d’agression mortelle de son animal (Ex 21.29). Par analogie, on peut en déduire qu’un lynx qui ravage des troupeaux de brebis dans les montagnes et détruit le travail d’un berger, voire menace des promeneurs, doit être neutralisé, c’est-à-dire abattu ou enfermé. Le laisser en liberté est un non-sens. Que le fauve soit le dernier de la région (ou le premier à repeupler une contrée) ne change rien. La protection de l’environnement doit toujours privilégier l’homme. D’un autre côté, l’affection qu’un individu peut avoir pour un animal n’est pas négligeable, et doit être respectée. Le roi David condamne sévèrement un riche pour avoir pris et tué la brebis du pauvre, car l’animal était non seulement son moyen de survie, mais sa compagne (« il la regardait comme sa fille », 2 Sam 12.3). Les espèces animales et végétales doivent être protégées, dans la mesure du possible, car chacune est un témoin de l’activité du Créateur, et constitue une raison supplémentaire pour l’adorer.
  • Le rapport à la terre est fondamental pour Israël. La promesse faite à Abraham concerne une descendance et une terre d’accueil. La Genèse rapporte la longue attente des patriarches qui n’étaient qu’« étrangers et voyageurs » sur la terre promise ( Héb 11.13 ; 1 Pi 2.11), Abraham n’acquérant pour seule propriété qu’une grotte pour y enterrer son épouse (Gen 23). Ce n’est que quatre siècles plus tard qu’Israël reçoit enfin la domination de la terre promise sous la conduite de Josué. Par la suite, la bénédiction du peuple élu est étroitement liée à cette terre promise, l’Éternel repoussant ou renforçant divers envahisseurs en fonction de la fidélité ou de la désobéissance de son peuple. Dieu montre au travers de l’histoire d’Israël que le salut pour l’homme n’est pas désincarné, mais qu’il est lié à la création.
  • À long terme, la survie de la planète échappe à tout effort humain. L’homme ne peut pas vaincre la mort. Il peut au mieux la retarder. L’espoir fondamental de toute vie ne peut reposer qu’en Dieu. Il est le Créateur, le Juge et le Rédempteur. C’est lui qui renouvelle toute chose en temps voulu. Jésus est la résurrection et la vie. À la suite d’un long développement sur la rédemption divine, l’apôtre Paul inclut une pensée sur la création : « La création attend avec un ardent désir la révélation des fils de Dieu. Car la création a été soumise à la vanité — non de son gré, mais à cause de celui qui l’y a soumise — avec l’espérance qu’elle aussi sera affranchie de la servitude de la corruption, pour avoir part à la liberté de la gloire des enfants de Dieu. Or, nous savons que, jusqu’à ce jour, la création tout entière soupire et souffre les douleurs de l’enfantement. » (Rom 8.19-22).
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Dossier : Création en crise
 

Arnold Daniel
Daniel Arnold a été, pendant de longues années, professeur à l’Institut biblique Emmaüs. Membre du comité de rédaction de Promesses, il est un conférencier apprécié et l’auteur de nombreux livres, parmi lesquels des commentaires sur des livres bibliques.