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Tour d’horizon oecuménique (2)

L’oecuménisme faisait au Concile l’objet d’un texte déjà voté par les pères. Le pape y apporta dix-neuf corrections, en particulier la suivante, où le cardinal Béa et ses collaborateurs avaient écrit: «Les protestants trouvent Dieu leur parlant en Christ dans la Sainte Ecriture», Paul VI a fait mettre: les chrétiens séparés «cherchent à trouver Christ dans la Sainte Ecriture» «Messager Social», 10 déc. 1964).
Avec une grande habileté, les deux derniers papes ont saisi l’initiative dans l’actuelle situation oecuménique. On ne peut oublier cependant que, pendant des dizaines d’années, ce sont les protestants et les orthodoxes qui ont été les promoteurs du mouvement. Le pasteur Lukas Vischer, délégué au Concile par le Conseil OEcuménique des Eglises, a donné son opinion sur l’idée que l’Eglise catholique romaine puisse se considérer désormais comme le centre des efforts pour l’unité. «Les évêques, a-t-il dit, sont trop profondément convaincus de la nécessité d’un renouveau pour parler d’un retour à l’Eglise catholique romaine telle qu’elle est aujourd’hui. Mais ils ne sont pas moins convaincus que l’unité ne pourra finalement se réaliser que dans le sein de l’Eglise catholique romaine. Cependant, pour que s’établisse un dialogue durable entre Eglises séparées, il faut trouver une forme de communion qui ne contraigne pas les Eglises non romaines à accepter, déjà dans la période du dialogue, la conception catholique romaine de l’unité et de l’union. Toute prétention à prendre la direction des opérations ne peut que freiner le développement du mouvement oecuménique» (S.CE.P.I., 23 janvier 1964).

Le grand retour à l’unique bercail: Aux déclarations du cardinal Béa, citées plus haut, joignons celles d’un professeur catholique de Nimègue, L,-J. Rogier: «Quand nous parlons de réunion, nous entendons le retour à une seule Eglise, placée sous l’autorité d’un chef spirituel suprême, une Eglise qui peut subir de profonds changements de structure, mais dont l’enseignement et l’autorité doctrinale restent toujours les mêmes, Il me semble que les exigences de la charité chrétienne et celles d’un oecuménisme authentique nous rendent impossible de laisser nos frères chrétiens d’autres confessions dans le doute sur ce point» (S,OE.P.I » 11 juin 1964).
De semblables affirmations ont été répétées si souvent qu’elles ne nous surprennent nullement, Ce qui nous étonne, par contre, c’est la candeur et la persistance avec lesquelles les chefs oecuméniques protestants déclarent que leur but est l’union avec Rome. Le Dr Ramsey, archevêque anglican de Canterbury, dit qu’en cherchant l’unité entre les anglicans et les méthodistes, il faut prendre garde de ne pas compromettre «les principes que nous devons observer par souci de l’union finale avec les Eglises orthodoxes d’Orient et avec Rome». Le rapprochement avec Rome doit comporter deux étapes: «La première consiste à établir des relations fraternelles. ..La seconde vise à réaliser l’unité en une seule Eglise» (S.OE.P.I., 15 oct. 1964). Le principal observateur anglican au Concile du Vatican, l’évêque J.-R. Moorman, de Ripon, s’est exprimé comme suit: «Je pense que si l’on parvient finalement à l’unité entre chrétiens, il faudra bien une seule tête à l’Eglise, et, évidemment, cette tête devra. être l’évêque de Rome» «Christian Beacon»,5 mars 1964).
Dans une conférence sur «le Renouveau de l’Eglise à la lumière du Concile du Vatican», le Dr J.-V. Langmead-Casserly, théologien épiscopal, annonça que d’ici au XXIe siècle, il y aura «une grande Eglise unie sous la direction d’une papauté «réinterprétée». Cette Eglise mondiale «aura une base doctrinale, liturgique et sacramentelle». Bien qu’il y ait eu une «catholicisation» du protestantisme, la grande difficulté pour les protestants est encore la papauté. Les chefs catholiques s’efforcent de réinterpréter le dogme de la papauté, mais la difficulté pour les catholiques est de déterminer jusqu’où les principes de la Réformation peuvent être retenus dans une Eglise unie «Sunday School Times», 8 févr. 1964).

La super-Eglise: On répète sans cesse que le Conseil OEcuménique des Eglises n’est pas, et ne peut pas tendre à devenir lui-même une super-Eglise. Le Dr Visser’t Hooft écrit à ce propos: «Le C.O.E., tel qu’il est aujourd’hui, n’est qu’un instrument pour l’unité chrétienne. Il devra disparaître sous sa forme actuelle lorsque l’unité de l’Eglise deviendra une réalité » «Christian Century », 9 sept. 1964). Pour le pasteur L. Vischer, le C.O.E. est une «communauté provisoire sur la route de l’unité,> (S.OE.P.I., 23 janv. 1964). On peut donc dire qu’il est comme l’échafaudage servant à construire le futur sanctuaire. Le Dr J.-I. Mc Cord, président de la Faculté de Théologie de Princeton et de la commission de Foi et Constitution aux Etats-Unis, a affirmé: «II est impossible de concevoir que les Eglises chrétiennes puissent vivre encore isolées les unes des autres. Finalement, nous serons tous ensemble dans une seule Eglise chrétienne. » Il s’est déclaré optimiste quant à la réunion finale de la chrétienté, insistant sur le fait que «l’unité est dans l’air ». Il a ajouté: «Les mêmes forces qui nous ont entraînés dans la séparation au XVie siècle (la Réformation), nous entraînent ensemble au XXe siècle» («Christian Beacon»), 9 mai 1963).

La fin des deux Réformations? Selon un article du «Sunday School Times» du 14 novembre 1964, Vatican Il occupait une telle place dans la presse parce qu’il marque la fin de la contre-Réformation, rendue possible du côté protestant par la fin de la Réformation. Depuis l’admission des Eglises orthodoxes au C.O.E., on a cessé de rendre un hommage même théorique aux doctrines de la Réformation dans la plupart des anciennes dénominations. A Chicago, le Dr Howard Schomer, président du Chicago Theological Seminary, a proposé que le rappel protestant traditionnel du jour de la Réformation soit remplacé à l’avenir par la célébration commune d’un jour du renouveau protestant, catholique et orthodoxe. «L’heure est finalement venue, a-t-il dit, pour les protestants, de reconnaître publiquement que leur Réformation a été un échec, et pour les catholiques, que leur contre-Réformation a également échoué.»
A la session de printemps 1964 du Comité Général du Conseil National des Eglises Protestantes des Etats-Unis, il fut déclaré ceci: «La tendance mondiale actuelle à une plus grande collaboration entre les Eglises protestantes et l’Eglise catholique romaine pourrait conduire prochainement à un effort missionnaire commun catholique romain et protestant. On entrevoyait cela comme le résultat du renouvellement tout à fait visible de l’Eglise romaine, et de son changement radical d’attitude à l’égard des protestants»(«Sunday School Times» 4 juillet 1964).


(à suivre)
Extrait avec autorisation du périodique «Le Chrétien évangélique»

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Pache René
René Pache (1904-1979) a été directeur de l’Institut biblique d’Emmaüs et auteur de plusieurs livres de doctrine chrétienne. Cet article est extrait du livre Notes sur l’Évangile de Jean (éd. Emmaüs, Vennes sur Lausanne, 1963, p. 153-157, 32ème leçon, Le Saint-Esprit).