Toronto… le feu renversant
Qui n’a pas déjà entendu parler du nouveau phénomène religieux de «la bénédiction de Toronto» qui s’est répandu avec une rapidité inégalée dans le monde? La presse, en général, nous a donné beaucoup d’informations à ce sujet. Ce feu renversant est entré dans des milliers d’églises pour bousculer traditions, esprits et modes de pensée.
Mais qu’est donc au juste cette bénédiction de Toronto?
John Amott, pasteur d’une église Vineyard (Airport à Toronto) languissait après une nouvelle onction dans son ministère. Lors d’une assemblée régionale des églises Vineyard du centre ouest du Canada en automne 1993, Randy Clark, pasteur d’une autre église Vineyard à St-Louis, Missouri, partagea l’onction reçue de Rodney Howard-Browne. «Quand la réunion passa à un temps de mise en pratique, beaucoup de ceux qui étaient présents ressentirent une effusion merveilleuse de joie et de puissance. John demanda aussitôt à Randy de venir prêcher quatre jours en janvier ( 1994) à Toronto» (1). Et John Amott reçut cette «onction» à Toronto par le ministère de Randy Clark durant cette campagne (2). En même temps, des phénomènes particuliers s’y manifestèrent: écroulements, tremblements, rires, pleurs, soubresauts, sensations d’ivresse, etc. Depuis lors, des dizaines de milliers de chrétiens, des milliers de pasteurs et responsables d’églises se sont rendus à Toronto pour recevoir cette «effusion» et la rapporter dans leurs églises.
Il est intéressant de constater qu’à la racine de ce mouvement qui se réclame du Saint-Esprit, il existe des connexions historiques entre ses leaders et des mouvements pentecôtistes charriant des erreurs doctrinales graves. Ainsi, l’arrière-plan de Rodney Howard-Browne est lié au mouvement «Parole et Foi» (évangile de la prospérité de Hagin, Copeland); John Amott et Randy Clark dépendent du ministère de R. Howard-Browne (3). Il s’agit là «d’un phénomène remarquable de transmission» (4). D’autre part, John Amott est un ami de Benny Hinn (5) connu également pour des manifestations similaires, et des vues doctrinales pour le moins douteuses (6). Il a également été impressionné par le ministère de Kathryn Kuhlman et son cortège de prétendues guérisons (7). John Wimber, leader du mouvement Vineyard est historiquement connecté aux «Grace Ministries» de Kansas City Fellowship (KCF) (connu par ses fameux prophètes de Kansas City). Et la KCF tire ses racines du Latter Rain movement, pentecôtisme extrémiste connu par ses fausses doctrines du Restaurationnisme et de la Manifestation des Fils de Dieu. Pour autant que nos renseignements s’avèrent corrects, le Pentecôtisme classique n’est pas impliqué dans ce mouvement de Toronto.
Actuellement, il y a une grande confusion parmi les chrétiens à ce sujet, et ce qui nous inquiète, c’est que les églises sont mal équipées pour résister à un pareil courant, qui emporte de plus en plus de communautés. Cette faiblesse est en grande partie due aux raisons suivantes:
-la Parole de Dieu n’est plus lue, méditée et étudiée avec sérieux et systématiquement. Nos églises souffrent d’un manque cruel de prédications systématiques de toute la Bible et des doctrines fondamentales (Dieu, la Trinité, la création, la chute, la rédemption, la repentance, la foi, la justification, la sanctification, etc. ) L’esprit du siècle y est entré avec le pragmatisme: «ça marche, donc ça compte». L’expérience remplace la théologie biblique, alors qu’une théologique saine donne l’impulsion à une expérience saine comme cela fut souvent le cas lors des grands réveils dans l’histoire de l’Eglise.
-ceci a comme conséquence que des besoins spirituels profonds ne sont pas comblés par une véritable nourriture biblique bien préparée, et les gens sont enclins à se tourner vers ce qui, au premier abord, est plus attrayant et chaleureux.
-beaucoup d’églises ressemblent à celle de Sardes: elles ont le renom d’être vivantes, mais elles sont mortes ( Apoc 3.l ). La tradition et le matérialisme étouffent la vie de Dieu.
-le Nouvel Age a su tirer profit du grand changement de notre société en introduisant subtilement un autre mode de pensée, un changement de paradigme. On fait grand cas des sciences de l’esprit, de la parapsychologie, du surnaturel, du bien être à travers des méthodes orientales de communication avec l’invisible. Notre mode de pensée logique évolue vers une mentalité plutôt orientale où l’intuition, l’expérience sont dominantes. N’assistons-nous pas à l’entrée de ces séductions dans les églises? Imprégnés par l’esprit des consommateurs de fast food, les gens sont attirés par des manifestations où le bien-être personnel passe avant la gloire de Dieu. La théologie de la souveraineté de Dieu, de la souffrance, de la sanctification constante font cruellement défaut. Il n’est donc plus étonnant de rencontrer des phénomènes religieux comme celui de Toronto.
Ensuite, il convient d’analyser «ce feu qui renverse» à la lumière de la Parole de Dieu. Nous aimerions vous soumettre cinq tests scripturaires dont quatre ont été évoqués par le pasteur Richat:d D. Holliday de l’Eglise Baptiste de Toronto West pour discerner spirituellement d’où vient un mouvement:
1. Que tout se fasse pour l’édification (1 Cor 14.26). Or le mouvement de Toronto provoque des divisions parmi le corps de Christ. Même au sein des Eglises pentecôtistes et charismatiques, des voix résolues s’élèvent contre ce courant. Le pasteur Y von Charles écrit à ce sujet: «Il me semble que l’on est là en pleine et redoutable dérive» (9).
2. Que tout se fasse avec bienséance et avec ordre… Dieu n’est pas l’auteur de confusion, mais de paix, comme dans toutes les églises des saints (1 Cor 14.33,40). Est-il honnête d’affirmer que les rencontres du mouvement de Toronto se déroulent dans l’ordre et la bienséance?
3. Le fruit de l’Esprit est… la maîtrise de soi (Gal5.22). Les nombreux témoignages confirment que cette nouvelle onction est souvent incontrôlable et que la plupart de ceux qui la reçoivent s’écroulent sur le tapis, secoués par des fous-rires ou d’autres phénomènes irrésistibles.
4. La prédication et le ministère doivent être centrés sur Christ et son oeuvre rédemptrice à la Croix, ce qui implique la repentance (1 Cor 1.18-21). La prédication de la Croix est-elle l’élément principal dans la Bénédiction de Toronto?
5. La Parole de Dieu est-elle la seule norme de foi dans ce mouvement? Guy Chevreau avoue que «tenter …de prouver la validité scripturaire des manifestations physiques observées à Airport s’apparente à vouloir marcher sur des oeufs… Une adhésion littérale et rigide à la Bible n’est pas faite pour conduire à l’Esprit de réveil» (10). Nous craignons que ces expériences ne soient pas subordonnées à l’Ecriture.
Ce numéro spécial sur Toronto a comme but de faire réfléchir nos lecteurs. Dans quels temps vivons-nous? Est-ce que nous arrivons à une époque préparatoire à l’instauration de l’Antichrist? Les phénomènes rencontrés de plus en plus dans les églises ne seraient-ils pas un prélude à ce que Paul prédisait dans 2 Thes 2.9-12 au sujet de la séduction par des prodiges et des miracles? Faut-il rapprocher ces derniers des expériences analogues prônées par le Nouvel Age? D’autre part, tout cela doit nous interpeller quant à notre vie intime avec le Seigneur, notre foi, notre ferveur, notre désir profond d’être visités par Dieu en confessant nos péchés et ceux du peuple de Dieu. Le Seigneur est parfaitement capable de nous renouveler puissamment ainsi que toute église locale qui se soumet à la Parole. Oui, nous sommes pour le REVEIL BIBLIQUE.
D’ ores et déjà nous pouvons vous annoncer que nous poursuivrons notre réflexion sur ces thèmes dans le numéro suivant de PROMESSES. N’hésitez pas à nous communiquer vos remarques et vos questions. Cela nous permettra de publier des articles selon les besoins de nos lecteurs.
(1) Embrase nos cours, par Guy Chevrau, éditions Carrefour, CH-1023 Crissier (p. 45).
(2) Toronto-Segen, Erweckung oderfrommgetamte Ve1:fiihrungpar ErichMauerhofer (p.l).
(3) Embrase nos cours, (p. 46).
(4) Ibid (p. 46).
(5) Ibid (p. 43). –
(6) Der Heilungsevangelist Benny Hinn kam nach Basel. Was lehrt Benny Hinn par le pasteur Reinhardt Moller dans Signal 90/1993.
(7) Embrase nos cours (p. 42).
(8) Toronto Blessing, Spiritual mediocrity par le pasteur Richard D. Holliday de l’Eglise Baptiste de West Toronto.
(9) Le Réveil de Toronto par le pasteur Y von Charles dans Femme chrétienne 1/95, Carhaix.