Série: Les enseignements de l'Ancien Testament
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Avant les jours mauvais

Les enseignements de l’Ancien Testament (25)

Lire Ecc 11.9 à 12.7 (certaines versions numérotent 12.1-9)

Ce texte s’adresse à une jeune per­sonne afin de l’avertir sur les consé­quences de la vieillesse. Peut-être parce qu’aucun jeune n’aimerait être vieux mais que tous souhaitent le devenir, le passage est humoristique: il utilise l’iro­nie et la métaphore. Les figures de rhé­torique sont courantes dans le langage de la Bible, comme dans le langage par­lé, et ne présentent pas de grandes diffi­cultés.

La métaphore est une image basée sur une ressemblance entre deux objets ou deux actes; elle attribue à l’un une partie des caractères de l’autre (pas tous). Quand le Seigneur dit qu’il est le che­min, c’est une métaphore; intuitivement on comprend quels sont les caractères dudit chemin qui le concernent, et on écarte ceux qui ne le concernent pas. On fait ainsi l’économie d’un grand nombre de phrases explicatives moins précises. Il est important de délimiter l’enseigne­ment apporté par une métaphore, au même titre que celui d’une parabole par exemple; mais on est mieux prévenu des limites de cette dernière.

Entre chrétiens, on parle des choses de la Bible en se servant de métaphores; c’est pratique, car en peu de mots on serre le sens biblique de près.

Ironie et solennité

Pour le jeune interlocuteur du Sei­gneur, le texte emploie d’abord   l’ironie, procédé qui consiste à dire le contraire   de ce que l’on veut faire comprendre. On l’utilise pour se moquer de quel­qu’un   ou de quelque chose, tout en dé­plorant sa bêtise plus que   sa méchance­té. 

Lorsqu’un enfant rentre à la maison mâchuré comme un charbonnier, sa ma­man lui dit: «Eh bien, tu es beau, tu es propre!» S’il ne comprend pas immédia­tement, l’enfant n’a qu’à interroger un miroir et il sera confus: c’est une ironie. 

Paul emploie l’ironie en disant des faux docteurs qu’ils sont des apôtres par excellence. Il se moque d’eux, et chacun comprend qu’ils sont n’importe quoi, sauf des apôtres du Seigneur (2 Cor 11.5, Scofield).

Dans cette introduction ironique, le Seigneur dit: Toi qui est jeune, profite de ta jeunesse. Sois heureux… Fais tout ce que tu désires, tout ce qui te plaît (11.9, français courant).

Si un lecteur ne prenait pas le ton très ironique de circonstance, l’auditeur pourrait être étonné d’un si mauvais conseil donné au jeune. Mais l’in­compréhension ne durerait pas long­temps, parce que la seconde partie du verset change sans transition de forme et de ton, et enchaîne solennellement: Mais sache bien que pour tout cela Dieu te fera venir en jugement.

Il en résulte que si le jeune sourit à la première partie du verset parce qu’il croit avoir la bride sur le cou, la force de l’avertissement qui suit est décuplée et se grave dans sa conscience: c’est un avertissement «coup de poing».  

Le conseil au jeune

Immédiatement après, au v. 10, le Sei­gneur conseille   affectueusement, rappe­lant que la jeunesse passe vite et qu’il est plus   sage d’éviter les causes de tris­tesse et de maladie. La compassion   est incluse dans ce conseil parce que le dé­tonateur du jugement   est intégré dans le choix qui serait mauvais: celui qui pra­tiquera   telle habitude néfaste s’attirera en même temps le tracas   et le mal; la relation de cause à effet est automa­tique.

Alors, poursuit le Seigneur, pendant que tu es jeune, n’oublie pas ton créa­teur; souviens-toi de lui avant les jours mauvais (12.1, Darby). Plus tard il sera bien tard, parce que les jours mauvais ne facilitent rien.

Il est du reste inutile de chercher à les éviter, ils viennent dans tous les cas, pour qui meurt jeune et pour les autres: dans les deux hypothèses possibles, on subit de mauvais jours. Le verset pousse très fortement à ne pas les attendre pour faire la paix avec son Créateur.

Un de mes petits-enfants me disait qu’il ne voulait pas devenir vieux. Alors je lui ai demandé s’il était décidé à mou­rir jeune. Non, cela c’était le pire. Je lui ai donc dit que s’il ne voulait pas mourir jeune, c’est parce qu’il préférait devenir vieux. Il suffit aux vérités logiques d’être énoncées pour s’imposer.  

Les jours mauvais de demain

Vient ensuite la partie explicative de la vieillesse, avec les jours   mauvais qui lui sont propres, rendant la vie moins agréable et le   retour à Dieu plus diffi­cile. Segond et Chouraqui disent qu’à   cette échéance on n’a pas de plaisir, ou pas de désir   de se souvenir de son Créa­teur. Mais hormis la mort, tout n’arrive   pas subitement, en bloc: chaque année nouvelle peut voir s’installer   une nou­velle phase mauvaise.

La forme allégorique (ensemble de plusieurs métaphores) cherche sans doute à être moins brutale, à ne pas traumatiser le jeune lecteur; jugez vous-mêmes: 

Souviens-toi de ton Créateur… Avant que s ‘obscurscissent le soleil et la lumière, la lune et les étoiles, et que les nuages re­viennent après la pluie (12.2). On sait que le soleil ne change pas derrière les nuages, alors on comprend que c’est notre vue qui a baissé: l’oeil voit moins et n’a plus le même plaisir à regarder la nature de Dieu. Il faut aussi lutter pour lire, les yeux sur la page, ou avec une forte loupe.

Ce jour-là les gardiens de la maison tremblent, les hommes vaillants se courbent (12.3 a). En gardant à l’esprit que l’on parle du déclin de l’homme, on comprend que la maison, c’est le corps dont les membres (les gardiens) fai­blissent en même temps que lui. Ce sont les bras et les mains qui protègent en amortissant les chutes et en écartant ce qui peut nuire: ils tremblent. Quant aux hommes vaillants qui se courbent (en soutenant la maison), ce sont les jambes, et peut-être la colonne vertébrale, qui ne sont plus très fermes sous le poids du corps.

Celles qui doivent moudre s’arrêtent parce qu’elles sont devenues peu nom­breuses (12.3 b): ce sont des dents qui ne mâchent plus faute d’avoir un vis-à-vis, une autre dent sur la mâchoire en face.

Je revois l’enfant que j’étais, ouvrant les yeux comme des portes cochères de­vant une vieille femme qui riait de toute sa dent: je ne comprenais pas comment elle pouvait manger.

Ceux qui regardent par les fenêtres sont obscurcis (12.3 c): ce sont les yeux. Le français courant traduit par: la femme qui cesse de paraître à sa fenêtre, et il fait penser à l’âme qui ne contemple plus le monde entre les paupières.

Les deux battants de la porte se ferment sur la rue quand s’abaisse le bruit de la meule (12.4 a). C’est-à-dire: les lèvres se ferment quand tarit le babil de la langue, car les vieillards parlent peu et n’éprouvent plus autant le besoin de communiquer avec les passants fami­liers.

On se lève au chant de l’oiseau, toutes les chanteuses s’affaiblissent (12.4 b) parce que les vieillards dorment peu, ils sont souvent aussi matinaux que les pre­miers oiseaux du matin; d’autre part, les cordes vocales s’affaiblissant, la voix de­vient chevrotante.

Quand aussi on craint ce qui est haut (12.5 a, Darby) à cause du souffle et du coeur.

Tes cheveux blanchiront comme l’aubé­pine en fleur (12.5b, français courant), c’est clair, comme généralement les in­convénients qui peuvent apporter une note poétique.

La sauterelle devient pesante (12.5 c). C’est le jeune qui est une sauterelle, l’enfant; infatigable, il court et il saute sans répit. Mais il deviendra pesant, lent à se mouvoir.

La câpre n’a plus d’effet (12.5d). Ce condiment stimule l’appétit et les sens, mais l’un et l’autre s’affaibliront.

L’homme s’en va vers sa maison d’éter­nité, et déjà les pleureuses rôdent dans la rue (12.5 e). Pendant la jeunesse, la mort surprend, mais quand on arrive au dé­clin, les professionnelles de la mort savent, et elles attendent l’heure de ga­gner leur vie.

Le cordon d’argent se détache, le globe d’or se casse (12.6 a). Ce sont des métaux précieux dans des objets anciens et fra­giles. Il est question de la valeur et de la fragilité de la vie.

La jarre se brise sur la source, et la roue se casse sur la citerne (12.6 b). La cruche brisée et la poulie cassée ne permettent plus de puiser l’eau nécessaire à la vie: après la mort, l’air ne circule plus entre la poitrine et l’extérieur.

Avant que la poussière retourne à la terre, comme elle y était, et que l’esprit re­tourne à Dieu qui l’a donné (12.7). Cette image est habituelle pour désigner la mort physique. La conclusion est impor­tante; elle parle de la finalité de la vie terrestre.

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