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Calmons-nous

Il n’est pas possible de rencontrer Dieu sans un minimum de calme. Et, s’il y a quelque chose de rare aujourd’hui, c’est bien le calme.

Nous vivons dans un siècle de vitesse et de bruit. Le monde est une grande roue qui tourne bruyamment du matin au soir. Et nous sommes tous, chrétiens ou non, pris dans ce tourbillon incessant. Nous sommes comme de petites souris blanches qui, courant dans leur cerceau, le font tourner à toute vitesse et n’arrivent plus à l’arrêter, prises par le mouvement. A moins que, au lieu de courir avec les gens du monde et de gaspiller notre calme, nous décidions de consacrer jalousement tout instant de tranquillité pour être avec Dieu et fortifier notre homme intérieur. Les gens du monde gaspillent leur calme notamment des quatre façons suivantes: en s’inondant de bruit; en s’agitant pour épargner quelques francs; en cherchant à jouir de la vie au maximum; en consommant et en produisant des activités spirituelles. Qu’en est-il de nous chrétiens?

Sommes-nous de ceux qui s’inondent de bruit?

Avons-nous besoin de bruit dès le réveil? D’ouvrir le poste de radio, le téléviseur ou la chaîne stéréo du matin au soir? C’est ce que font plusieurs autour de nous. Ils s’inondent de bruit à longueur de journée et fuient leur sentiment de vide. N’ayant pas de vie intérieure satisfaisante, ils sont vides et préfèrent ne pas être, dans le calme, confrontés à ce vide. Beaucoup fuient la solitude et cherchent à se donner, par le bruit, l’impression d’une plénitude. On s’accorde à dire que le bruit distrait, détourne l’attention et transporte même l’esprit, à forte intensité, dans un état d’extase. N’est-ce pas ce que recherchent les gens du monde? Se distraire de leur pauvreté spirituelle, s’abasourdir afin de se cacher d’eux-mêmes.

De nombreuses stations de radio diffusent vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Qui n’a pas sa chaîne stéréo dans le salon prête à dégager un son assez puissant pour faire éclater les tympans? Il est devenu presque impossible de lire ou de réfléchir dans les lieux publics. La musique et le bruit nous accompagnent dans l’autobus, au centre commercial, au salon de coiffure, au restaurant et même sur la piste de ski et à la patinoire.

Et tout cela, sans parler des bruits du trafic, de la machinerie, des industries, des foules et j’en passe.

Voici ce qu’en dit Thierry Maulnier, journaliste au quotidien français «Le Figaro»: «Il faut défendre le silence, car le silence est menacé. La civilisation moderne, la civilisation de la technique pourrait bien être en train de le tuer sans que nous y prenions garde. Déjà on peut se demander si des millions de nos contemporains n’ont pas commencé d’en perdre le goût et le besoin. Nous vivons dans la rumeur continuelle des grandes villes. Le bruit est pour nous une souffrance, en même temps qu’un besoin, comme si nous étions intoxiqués, et sans doute le sommes-nous. Nous travaillons à faire nos demeures imperméables au bruit, à rendre plus silencieuses nos automobiles, mais c’est pour y tourner à toute heure du jour les boutons de nos postes radiophoniques, pour y entendre le son de paroles dont nous n’écoutons pas le sens, car nous leur demandons seulement d’endormir nos consciences. Le bruit est un stupéfiant et, comme tous les stupéfiants, un remède à l’angoisse d’être seul… Le silence n’est richesse que pour ceux qui ont une richesse en eux-mêmes».

Dans la Bible, le bruit est presque toujours associé à la foule, à la foule qui s’amuse sans se douter qu’un jugement sévère pèse sur elle (cf. Es 5.14; 22.2). Le monde a besoin de bruit pour combler son coeur. Mais le chrétien, dans lequel habite celui qui remplit tout en tous, a-t-il besoin de cela? Le chrétien dans le coeur duquel coulent des fleuves d’eau vive a- t-il besoin de tout ce bruit (cf. Jean 7.37-39)? Si le chrétien s’assomme de bruit comme les gens du monde, c’est qu’il ne connaît pas Christ comme il faudrait. Il ferait mieux d’engager toutes ses forces à mieux le connaître s’il ne veut pas avoir honte lorsqu’il le verra face à face (cf. Es 1.3; 1 Jean 2.28). Tous les moments de silence sont des moments opportuns pour rencontrer Dieu et croître dans sa connaissance. Choisirons-nous le bruit?

Gaspillons-nous notre calme pour épargner quelques francs?

Nombre de personnes autour de nous s’agitent à gauche et à droite pour épargner quelques francs, alors que, paradoxalement, ils en dépensent des milliers, impulsivement, sans compter. La plupart des gens passent des heures à feuilleter les dépliants publicitaires. Ils vont de magasin en magasin pour examiner la marchandise, comparer les prix. Ils dépensent du temps, de l’essence et de l’énergie. Ils gaspillent aussi leur calme pour n’épargner parfois qu’une poignée de misérables francs. Il arrive aussi souvent que les mêmes soient fascinés, peu après, par quelque nouveau truc: micro-ordinateur à piles, automobile parlante, téléphone sans fil. Poussés par leur convoitise, ils dépensent sans compter. Cela ne manque-t-il pas de bon sens?

Autrefois l’assortiment d’un seul magasin suffisait à la demande. Tu avais besoin d’une paire de chaussettes, il y en avait deux sortes, des grandes et des petites. Tu ne te cassais pas la tête pour savoir lesquelles tu allais prendre. Tu regardais seulement le bout de tes pieds. Si tu ne voyait pas tes orteils, tu achetais les petites. Et ce qui était vrai pour les chaussettes l’était pour le reste. Il y avait dans ce magasin tout ce qui était essentiel à la vie, et croyez-moi, les gens d’alors vivaient dans des conditions nettement plus rigoureuses que les nôtres.

Mais aujourd’hui, ce n’est pas facile d’acheter une paire de chaussettes. Ca prend du temps. Va-t-on acheter celles en laine, ou celles en acrylique, ou celles en coton, ou celles en nylon? Et va-t-on choisir les bleues, les rouges, les blanches, les noires, les rayées? Et si les mêmes chaussettes étaient moins chères ailleurs? Pourquoi ne pas faire le tour des magasins, on verra bien…

Les riches et les pauvres de ce monde s’échinent à poursuivre la fortune et n’ont pas de pensée pour Dieu. Qu’en est-il de nous chrétiens à qui Jésus dit: Tu ne peux servir deux maîtres (cf. Luc 16.13-14).

Qu’allons-nous choisir? De réserver nos instants de calme pour nous attacher à Dieu ou de les gaspiller pour quelques francs sans valeur?

Gaspillons-nous notre calme en cherchant à jouir au maximum de la vie?

Le monde ne peut s’arrêter, tant pis pour les cardiaques et les traîne-la-patte. Il est une foire où le silence et le calme sont souvent exclus. Vivre, dit le monde, c’est jouir pleinement de tout, jour et nuit; c’est surtout de ne pas perdre une minute, car demain, c’est la fin. N’est-ce pas une pensée logique et normale de la part d’hommes qui n’ont pas d’espérance? Mangeons et buvons, disent- ils, puisque demain nous mourrons (Es 22.13; 1 Cor 15.32). Les gens cherchent avidement à jouir de la vie présente parce qu’ils n’ont pas d’espérance. Ils ne s’arrêtent pas parce qu’ils ne veulent surtout pas perdre une minute de plaisir.

Mange et bois, dit le monde: les super-marchés seront bientôt à ta disposition jour et nuit, semaine et dimanche; achète sans compter! Distrais-toi, dit le monde, installe-toi confortablement, tourne le bouton de la télé et je te captiverai des soirées entières. Ne perds pas de temps. Profite de la nuit, dit le monde: c’est le moment par excellence pour t’amuser: films, vidéos, discothèques, restaurants, boîtes de nuit.

Je te donne tout cela et bien plus encore. Derrière la voix du monde se cache la voix du diable qui cherche à détourner de Dieu tous les hommes. Il fait en sorte qu’ils aient de la jouissance à volonté et qu’ils ne s’arrêtent surtout pas pour penser à leur créateur ou à leur destinée. Qu’en est-il de nous? Sommes-nous, comme les gens qui nous entourent, si préoccupés à jouir de la vie que nous en oublions l’essentiel ? Jésus nous avertit maintes fois qu’il n’est pas possible de jouir sans réserve de la vie présente sans perdre la vie qui est à venir (cf. Mat 16.21-27; Luc 12.13-21). L’apôtre Paul aussi profite d’une question qu’avaient posé les Corinthiens pour les exhorter à s’attacher au Seigneur sans distraction (cf. 1 Cor 7.29-32, 35). Choisirons-nous la vie présente ou celle qui est à venir?

Gaspillons-nous notre calme en consommant et en produisant des activités spirituelles?

Nous vivons dans une société capitaliste. Il va sans dire que les deux activités principales d’une telle société ne sont ni la prière ni la contemplation, mais la consommation et la production de biens matériels. Nous avons été, dès l’enfance, initiés à ces deux activités de telle sorte qu’elles sont devenues en nous des réflexes. Des petites autos au tricycle, du tricycle à la bicyclette et de la bicyclette à la motocyclette, notre élan de consommateur n’a cessé de grandir. De cette façon, nous avons adhéré, sans trop nous en rendre compte, à l’illusion du bonheur par la consommation, illusion, soit dit en passant, bien encouragée par la publicité: machine à café dernier cri! – Saveurs exotiques à prix imbattables ! – Nouveau: à présent en super-compact! – Avec ce modèle: nouvelle conception du confort. – Notre méthode, une découverte spectaculaire!

Et comme pour consommer, il faut des produits de consommation, nous nous sommes mis à l’oeuvre et sommes devenus d’actifs producteurs. Motivés par la pensée qu’être heureux signifie consommer sans cesse, nous avons dû produire, à l’excès, toutes sortes de biens matériels. Avec toute cette production et toute cette consommation, il va sans dire que Dieu a été négligé et que le bonheur n’a pu être obtenu. Maintenant que nous sommes chrétiens, que nous connaissons Dieu, croyons-nous encore que le bonheur s’obtient par la consommation? Comment agissons-nous dans l’Eglise? Attachons-nous plus d’importance à la consommation de prédications et de messages évangéliques qu’à notre intimité avec Dieu? Certains chrétiens courent les conférences, les films, ne manquent aucun évangéliste à la télé, écoutent des cassettes, lisent des ouvrages chrétiens, mais n’ont jamais de temps pour un tête-à-tête avec Dieu. Ces chrétiens pensent qu’en consommant des choses spirituelles, ils deviendront eux-mêmes spirituels et jouiront ainsi du bonheur. Les Pharisiens avaient une pensée semblable. Ils croyaient qu’en consommant une bonne dose de vérités spirituelles, ils auraient la vie. Mais Jésus les détrompe (cf. Jean 5.39,40).

Et que dire du réflexe de production? Croyons-nous que l’Eglise de Dieu soit une industrie semblable à celle de notre monde? Et qu’il s’agisse d’y travailler à la sueur de son front pour y produire: conversions, consécration, foi, sainteté et amour fraternel? Puisque le monde nous a enseigné qu’il s’agissait de s’activer, de foncer et de bûcher pour produire, il faut désapprendre. On peut produire de bons messages, de bons enseignements. On peut évangéliser une ville entière. On peut mettre sur pied de belles églises, bien structurées, bien organisées. Mais on ne peut produire, même à force de travail et d’acharnement, quoi que ce soit de spirituel dans le coeur de l’homme. Or, heureusement, ce qui nous est impossible est possible à Dieu. Il a le pouvoir de produire la vie dans le coeur des hommes. Et comme co-ouvriers, nous bâtissons l’Eglise avec lui. Cesserons-nous donc de nous agiter comme si nous bâtissions seuls? Prendrons-nous davantage de temps dans le calme avec l’architecte? Avec celui qui a les plans et qui, en nous révélant chaque nouvelle phase, saura aussi nous fournir les instruments de leur réalisation?

Si nous acceptons d’agir dans cette optique, nous pourrons dire comme Esaïe: Eternel, tu mets en nous la paix, car tout ce que nous faisons, c’est toi qui l’accomplis pour nous (Es 26.12).

Il y a pour nous chrétiens un choix vital à faire: courir avec les gens du monde et gaspiller notre calme ou consacrer jalousement tout instant de tranquillité pour être avec Dieu et fortifier notre homme intérieur.

B.G.

Eternel, tu mets en nous la paix, car tout ce que nous faisons, c’est toi qui l’accomplis pour nous.

Esaïe 26.1

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