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La Bible et ses manuscrits

L’étude qui suit est adaptée d’un article de la nouvelle édition du Nouveau Dictionnaire Biblique: Manuscrits

Introduction

De tous les livres de l’Antiquité, religieux et profanes, qui ont été écrits sur papyrus ou sur parchemin, aucun autographe ne nous est parvenu. La toute première rédaction, écrite de la main même de l’auteur ou de son scribe, semble irrémédiablement perdue, à moins d’une stupéfiante découverte à venir…

Pour connaître cette rédaction première, les érudits doivent donc chaque fois la rétablir à partir d’un examen minutieux des copies manuscrites qu ‘ils possèdent. Ce travail est toujours nécessaire pour tous les écrits – des auteurs grecs et latins comme des auteurs bibliques. Evidemment, le rétablissement de la rédaction première est d’autant plus aisé que 1’on possède des copies en grand nombre et que leur origine est plus ancienne.

Ce grand travail de «résurrection» du texte original s’appelle critique textuelle ou basse critique, en contraste avec la haute critique qui, pour sa part, essaie de remonter aux sources et de découvrir les auteurs de l’ouvrage.

Manuscrits bibliques

Les manuscrits bibliques nous sont parvenus sur papyrus et sur parchemin. Moïse aurait pu éventuellement écrire ses premiers textes sur des tablettes faites d’argile, surtout le texte du Deutéronome écrit dans la vallée du Jourdain où il y avait de l’argile, (voir 1 Rois 7.46), mais les textes eux-mêmes ne nous disent pas quel type de support a pu être utilisé après Moïse. Quoi qu’il en soit, nous ne possédons aujourd’hui que des textes calligraphiés sur papyrus et parchemin. ils sont précieusement conservés dans les grands musées et bibliothèques, publics, privés et universitaires, et sont rarement exposés au grand public en raison de leur valeur inestimable et de leur fragilité. Assurément, ils sont plus précieux que des joyaux…

Depuis bientôt deux siècles, une tendance fâcheuse de la plupart des exposants de la haute critique a été de postuler que la première rédaction d’un livre biblique a été généralement faite longtemps après la période contemporaine de l’auteur supposé. il y aurait donc, disent-ils, entre un auteur donné et le texte qui lui est attribué, une longue période de tradition orale.

Les exégètes évangéliques refusent- en principe – cette hypothèse dans la mesure où un examen détaillé du texte biblique ne semble pas soutenir l’existence d’un laps de temps nécessaire à la tradition orale. Certains livres de l’Ancien Testament portent des indices d’un témoin oculaire et nomment parfois très pertinemment l’auteur du livre ou d’une partie du livre. Ces données, éléments aussi de la haute critique, doivent être prises en considération: ne pas les reconnaître serait un manque évident de sérieux et d’objectivité dans l’approche du sujet. C’est pourquoi, dans un élan plein de foi, nous acceptons les divers manuscrits comme copies de la Parole de Dieu; tout en reconnaissant que les copistes, étant humains, ont pu commettre des erreurs dans leur travail.

Critique textuelle

Les manuscrits de la Bible sont beaucoup plus nombreux que ceux d’autres livres antiques. De plus, un grand nombre d’entre eux sont bien plus près du temps de la rédaction première que peuvent l’être les manuscrits des ouvrages profanes. Il s’agit là d’un incroyable avantage… aussi la critique textuelle arrive-t-elle assez facilement à rétablir le texte biblique original.

Evidemment, le travail de base est plus long pour la Bible puisque le nombre de manuscrits à consulter est bien plus élevé. La basse critique doit d’abord dater toutes ces multiples copies – quelque 6000 à 7000! Ensuite il lui faut les classer par «famille» ou «type de texte». Pour effectuer ce classement, la date de la copie n’entre pas nécessairement en ligne de compte.

Variantes

La finalité du difficile travail de la critique textuelle est de reconnaître et ensuite d’éliminer les erreurs des copistes, ll est impossible qu’un copiste ne fasse pas de temps en temps quelques fautes, et celles-ci ne peuvent malheureusement que se perpétuer dans les copies des copies.

Heureusement que les copistes ont souvent tendance à faire les mêmes types d’erreurs! On les désigne par une terminologie précise: haplographie, dittographie, métathèse, fusion, fission, homophonie, homoeo-téleuton, etc1. Une telle classification aide à reconnaître l’origine des variantes et à rectifier aussitôt le texte.

Cependant, le nombre astronomique de toutes les variantes – n’a-t-on pas annoncé le chiffre de 200’000 pour le seul Nouveau Testament? – pourrait faire frémir. Même quand on apprend que ces variantes ne se trouvent qu’en 10’000 endroits différents du texte du Nouveau Testament, on n’est guère rassuré! Pourtant, lorsqu’on découvre que 98,33% du texte est pur, l’inquiétude disparaît. A. T. Robinson suggère que seule une millième partie de la totalité du texte néo-testamentaire pose de vrais problèmes à la basse critique, nous donnant donc des écrits justes à 99,9%! C’est fantastique! Si les experts de la critique textuelle des classiques grecs pouvaient se fier avec la même certitude aux copies de la République de Platon ou de la Physique et de la Métaphysique d’Aristote…

Basse critique de l’ Ancien Testament

Le travail des experts de la basse critique de l’ Ancien Testament n’est peut-être pas aussi difficile que le travail correspondant propre au Nouveau Testament, par le fait que de prestigieux copistes juifs, les Massorètes, ont déjà fixé le texte hébreu entre le Ve et le Xe siècle après Jésus-Christ.

L’activité de ces docteurs juifs consistait à ajouter au texte biblique copié toute une série de notes et de «corrections» dans les marges, appelées «massore parva» , ainsi que sur le haut et le bas de chaque page, appelées «massore magna». La «massore finalis» se trouvait à la fin de chaque livre. Les massorètes y inscrivaient scrupuleusement le nombre de mots de chaque livre, ainsi que le mot du milieu du livre. Ils comptaient aussi le nombre d’occurences d’une lettre dans un livre. «Tout ce qui pouvait être compté, l’était» disait le Docteur W .Robinson. Et comme de surcroît ils avaient inventé le système des signes vocaliques, indiquant la prononciation exacte de chaque mot, les massorètes ont accompli une tâche prodigieuse de fixation de texte qui ne peut guère être surpassée.

Travaux actuels

Pourtant, l’étude de la basse critique de l’Ancien Testament se poursuit encore de nos jours car l’examen de nouveaux manuscrits bibliques – ceux de Qumran, par exemple, les fameux Rouleaux de la mer Morte – peuvent encore éclairer les spécialistes. Il s’est constitué tout dernièrement un nouveau comité de travail, international et interconfessionnel, qui s’y attelle, les Sociétés Bibliques ayant pris l’initiative de ce projet. Le professeur Schenker , récemment interviewé à ce sujet, a déclaré que tous les membres de cette équipe reconnaissent que «la Bible est inspirée et, dans ce sens, est Parole de Dieu». «… nous ne nous plaçons pas au- dessus du texte, dit- il encore, nous sommes à son service», Ces paroles rassurent ainsi les évangéliques. Ils espèrent seulement que ce travail sera fait dans le respect ABSOLU du texte sacré. Nous pouvons encore prier pour ces hommes.

Force nous est de constater que de toutes façons la totalité de la chrétienté a toujours été dépendante de ce genre de travail spécialisé; qu’il ait été fait par des juifs ou par des chrétiens de différentes confessions. Mais nous croyons aussi à la puissance inhérente de la Parole de Dieu. Elle s’imposera toujours.

Basse critique du Nouveau Testament

Tout au long des siècles les spécialistes de la basse critique du Nouveau Testament ont toujours été nombreux. Parmi les Pères de l’Eglise citons Origène et Jérôme, et aussi Eusèbe de Césarée. Celui-ci était chargé par Constantin le Grand de faire copier 50 exemplaires du Nouveau Testament tous frais payés par la trésorerie impériale. Origène et Jérôme ont, quant à eux, travaillé le texte de toute la Bible: Origène, le texte de l’Ancien Testament dans l’ «Hexapla» – cinq différents types de textes grecs, en colonnes, avec le texte hébreu, mais cette oeuvre resta inachevée; et Jérôme, avec la Vulgate, la première version latine officielle, traduite directement de l’hébreu pour l’Ancien Testament et du grec pour le Nouveau Testament.

Ensuite, au Moyen Age, Alcuin de York et Théodulph d’Orléans, pendant le règne de Charlemagne, ont travaillé le texte de la Vulgate, à partir de nombreuses copies existantes.

Au moment de la Renaissance et de la Réforme, un nouveau travail d’érudition était entrepris, d’abord parce que le texte original de la Vulgate s’était perdu au cours des siècles, ensuite parce que le texte hébreu et grec avait été reconnu comme bien plus sûr. Aussi, Erasme des Pays-Bas et le Cardinal Ximénès en Espagne ont publié chacun un Nouveau Testament latin-grec. Ces éditions étaient véritablement révolutionnaires car, pour Rome, le texte latin de la Vulgate, et nul autre, constituait la Bible catholique. Par la suite, Robert Estienne, Théodore de Bèze et surtout les Elzevir (oncle et neveu) ont établi le «textus receptus» -«texte reçu» grec, du Nouveau Testament, tant respecté. Ensuite et surtout au XIXe siècle, les hellénistes se sont éloignés du «texte reçu», principalement parce que d’autres manuscrits du Nouveau Testament ont été découverts: Sinaïticus, Vaticanus, etc. Une «bataille» s’est engagée par la suite, surtout parmi les chrétiens anglo-saxons, gravitant autour des versions anglaises dépendantes, soit du texte reçu soit de nouveaux textes grecs, établis par Tregelles, Westcott, Hort et d’autres, – gentille «bataille» qui se poursuit encore aujourd’hui dans certains milieux.

Conclusion

Pour les spécialistes, les différences entre les éditions du texte grec sont importantes et les chrétiens ne doivent pas fermer les yeux sur les vrais problèmes qui en découlent. Il serait facile de terminer avec une Bible tronquée et par conséquent hérétique – comme la version des Témoins de Jéhovah. Mais reconnaissons que la plupart des différences sont plutôt d’ordre technique et non pas d’ordre doctrinal. Les diverses leçons proposées ne viennent pas gêner la rédaction d’une Confession de Foi, même très détaillée. Mais pour ne pas rester dans l’ignorance concernant certaines difficultés – comme celle, par exemple, qui caractérise la fm de l’évangile de Marc2 – les chrétiens feront bien de se servir d’une version de la Bible, telle que celle dite de la Colombe, où bon nombre de ces problèmes textuels sont mentionnés dans des notes en bas de page.

Combien nous devrions être reconnaissants aujourd’hui envers notre Dieu d’avoir veillé sur Sa Parole, (Jér 1.12), d’avoir suscité tout au long des siècles, et encore de nos jours, des érudits spécialisés qui, comprenant les langues anciennes que Dieu a employées pour nous donner la Bible, sont encore prêts à se pencher sur les textes bibliques pour en faire de meilleures traductions.

C’est grâce à leurs travaux, combien précieux, que des millions de chrétiens nés de nouveau peuvent encore recevoir sans obstacle majeur, jour après jour et tout au long de leur pélerinage terrestre, toute parole qui sort de la bouche de Dieu.

Notes:
1 Voir pour plus de détails: Gleason Archer. Introduction à L’Ancien Testament. 1978. Emmaüs. Pages 52 -56.
2 Voir pour plus de détails: Nouveau Commentaire Biblique. 1978. Emrnaüs. Page 924.

P.W
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