Dossier: La Bible, repère pour la vie
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Peut-on questionner Dieu ?

“ Tais-toi et crois ”. C’est la réponse souvent donnée par l’église aux fidèles qui expriment un doute ou qui rejettent un point de doctrine. Puisque Dieu s’est révélé, puisque la Bible est inspirée, puisque l’Eglise est le porte-parole du Christ sur terre, tout questionnement des choses divines est rejeté et condamné. L’église est le lieu du silence et de l’adoration, non celui des discussions et des contestations. Mais cette attitude est-elle vraiment biblique ? Dieu rejette-t-il toute personne qui questionne ses paroles ?

La Bible contient plusieurs récits dans lesquels des hommes pieux ont questionné Dieu. Un passage très connu et central à l’histoire du peuple élu est l’appel de Moïse à Horeb (Exode 3.1-4.17).

Les objections de Moïse au buisson ardent

Lorsque l’Eternel apparaît dans une flamme de feu et demande à Moïse de délivrer Israël de l’esclavage d’Egypte, celui-ci objecte à plusieurs reprises. Pour commencer, Moïse estime ne pas être à la hauteur de la tâche. “ Qui suis-je, pour aller vers Pharaon, et pour faire sortir les enfants d’Israël ? ” (Ex 3.11). N’a-t-il pas déjà 80 ans et ne vient-il pas de passer 40 ans dans le désert du Sinaï à faire paître le bétail de son beau-père ? N’a-t-il pas dû fuir l’Egypte pour avoir tué un Egyptien ? Moïse ne se sent manifestement pas qualifié pour la tâche que Dieu lui confie.

Persona non grata auprès du Pharaon, Moïse se demande aussi comment son peuple l’accueillera. Que dire au peuple, demande-t-il à l’Eternel : “ J’irai donc vers les enfants d’Israël, et je leur dirai: Le Dieu de vos pères m’envoie vers vous. Mais, s’ils me demandent quel est son nom, que leur répondrai-je ? ” (Ex 3.13).

La longue réponse de l’Eternel (Ex 3.14-22) ne le satisfait pas puisqu’il réplique immédiatement : “ Voici, ils ne me croiront point, et ils n’écouteront point ma voix. Mais ils diront: L’Éternel ne t’est point apparu ” (Ex 4.1). Dieu promet alors de multiplier les prodiges pour convaincre le peuple et il lui donne même un avant-goût par deux miracles effectués sous ses yeux (Ex 4.2-9).

Ces signes ne convainquent Moïse qu’à moitié. D’un côté, il renonce à son objection relative à l’incrédulité du peuple, mais d’un autre côté, il avance une nouvelle objection concernant son parler difficile : “ Ah! Seigneur, je ne suis pas un homme qui ait la parole facile, et ce n’est ni d’hier ni d’avant-hier, ni même depuis que tu parles à ton serviteur; car j’ai la bouche et la langue embarrassées ” (Ex 4.10). Dieu écarte une nouvelle fois l’objection en rappelant à Moïse que le créateur peut donner à tout homme d’exprimer exactement ce qu’il désire (Ex 4.11-12).

La cinquième et dernière objection de Moïse entraîne, pour la première fois, la colère de l’Eternel. En effet, Moïse ne se contente plus d’énoncer des réserves à l’égard du projet divin, mais il exprime son refus de se soumettre à Dieu : “ Ah! Seigneur, envoie qui tu voudras envoyer ” (Ex 4.13).

Les réponses de l’Eternel

Les réponses de l’Eternel à Moïse sont révélatrices de l’attitude de Dieu face aux questionnements des hommes à l’égard des paroles divines. Peut-on questionner Dieu ? Oui et non.

Positivement, Dieu laisse un espace pour le dialogue et les questionnements. Les hésitations et les doutes à l’égard des paroles divines ne sont pas immédiatement condamnés. Dieu prend le temps de répondre à chaque objection. Parfois, ses réponses sont brèves, parfois élaborées (un verset pour répondre à la première objection, Ex 3.12; neuf versets comme réponse à la deuxième, Ex 3.14-22). Parfois, Dieu se contente de répondre par des paroles, et parfois il accompagne ses paroles de miracles.

Au sujet des miracles, Dieu va quelquefois au-delà de ce que les hommes demandent. Ainsi, Moïse peut voir un buisson ardent qui ne se consume pas ; il doit jeter lui-même le bâton qui devient un serpent, puis saisir ce serpent par la queue (ce qu’il ne faut jamais faire avec un serpent) pour qu’il redevienne un bâton ; il met sa main sur sa poitrine à deux reprises pour en faire apparaître, puis disparaître la lèpre. Moïse assiste à tous ces miracles qu’il n’avait pas demandés, mais il se voit refuser le droit d’examiner de plus près le miracle du buisson ardent. Lorsque Moïse veut s’approcher du buisson ardent “ pour voir quel est ce spectacle extraordinaire, et pourquoi le buisson ne brûle pas ” (Ex 3.3), l’Eternel lui ordonne non seulement de ne pas approcher, mais d’enlever ses sandales de ses pieds, car “ l’endroit où tu te tiens est une terre sainte ” (Ex 3.5). Dieu est saint et il est souverain en matière de révélation. Il se laisse chercher, mais il ne révèle pas tout. C’est lui qui fixe les limites de la révélation.

L’homme qui sonde les Ecritures trouvera une réponse satisfaisante aux questions fondamentales de la vie, car tout ce qui est nécessaire pour une vie de foi nous est donné. De plus, la Parole de Dieu est cohérente. Les difficultés suscitées par le texte biblique ont reçu, pour la plupart, des réponses satisfaisantes. Cela ne signifie pas que le chrétien peut tout expliquer. Certains mystères lui échappent. Certains sont gardés pour la fin des temps (Dan 12.4). Peu importe, car tout ce qui est nécessaire pour plaire à Dieu a été révélé.

Peut-on questionner Dieu ? Manifestement, la réponse est affirmative… jusqu’à un certain point. Dieu ne perd patience avec les interrogations et les doutes de Moïse, que lorsque celui-ci refuse d’obtempérer : “ Alors la colère de l’Éternel s’enflamma contre Moïse ” (Ex 4.14). Dieu ne condamne pas nos questions, mais notre désobéissance. Lorsque les pharisiens demandent un signe à Jésus, celui-ci refuse de les aider, car les chefs religieux étaient venus pour le piéger et avaient déjà rejeté toute aide préalable (Mc 8.11-12). Les miracles du Christ ne les avaient pas ouverts à la foi, mais les avaient endurcis.

La parole que l’église doit adresser à celui qui questionne Dieu n’est pas “ Tais-toi et crois ”, mais “ Ecoute et crois ”. La foi vient de ce qu’on entend (Rom 10.17). Il faut se laisser instruire par Dieu. Venir à Christ et lui faire confiance. A la première objection de Moïse qui se sent inapte au ministère divin, Dieu répond de ne pas regarder à l’homme, mais à Dieu. « Je serai avec toi » dit l’Eternel à Moïse (Ex 3.12). Moïse ne peut pas, mais l’Eternel peut tout. La foi ne consiste pas à mettre la raison sous un boisseau, mais à reconnaître que la raison humaine a ses limites, et que le mot de la fin est à celui qui a créé la raison, à celui qui a répondu avec patience à nos objections et qui demande qu’en dernier lieu, l’homme s’en remette à celui qui est vérité et amour, et qui sait tout.

Ce qui est difficile dans l’Ecriture n’est pas ce que l’on ne comprend pas, mais ce que l’on comprend, car Dieu nous tient responsables de tout ce qu’on a compris. A celui qui questionne Dieu, on doit répondre : “ Pose toutes les questions que tu veux, mais n’oublie pas d’écouter la Parole de Dieu, et quand tu l’as compris, sur un point particulier, mets-la en pratique sans tarder ”.

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Arnold Daniel
Daniel Arnold a été, pendant de longues années, professeur à l’Institut biblique Emmaüs. Membre du comité de rédaction de Promesses, il est un conférencier apprécié et l’auteur de nombreux livres, parmi lesquels des commentaires sur des livres bibliques.