Dossier: La Bible, repère pour la vie
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Pourquoi 66 Livres? Le Canon

L’auteur de cet article, Pierre BLOND, est belge. Il est né en Afrique (Rwanda-Urundi). Il est marié et père de trois enfants, dont l’une est décédée à l’âge de 18 ans.. Licencié en théologie protestante, en histoire du christianisme et agrégé pour l’enseignement secondaire supérieur, il est professeur, chargé de cours de religion protestante. Il exerce un ministère itinérant d’enseignant biblique dans les assemblées évangéliques et s’occupe également des jeunes.

I. GENERALITES

Le mot français canon est dérivé du grec kanôn, traduction du terme sémite qanu et de l’hébreu qaneh signifiant à l’origine « roseau » ou « canne » (Ez 40.3) puis, par extension, « norme » ou « règle » (Gal 6.16). Plus tard, on parlera de « décret », de « mesure officielle », puis de « liste officielle ». Le canon des Ecritures Saintes constitue donc la liste des livres reconnus dignes d’être incorporés à un recueil d’écrits inspirés de Dieu : la Bible.

Plusieurs facteurs ont guidé le choix des livres canoniques :

a) L’inspiration directe, pleine et entière de Dieu : « Toute écriture est inspirée de Dieu, et utile pour enseigner, pour convaincre, pour corriger, pour instruire… » (2 Tim 3.16). Ce verset prouve l’inerrance (état de ce qui est sans erreur) des écrits divinement inspirés : une quarantaine d’auteurs différents ont transmis une même et unique pensée divine pendant une période de rédaction particulièrement longue, plus de 15 siècles !

b) La prophétie inhérente et la conviction interne à l’Ecriture elle-même : « Aucune prophétie de l’écriture ne s’interprète elle-même ; car la prophétie n’est jamais venue par la volonté de l’homme, mais de saints hommes de Dieu ont parlé, étant poussés par l’Esprit Saint. » (2 Pi 1.20-21). Remarquons, à cet égard, que le N.T. cite pratiquement chacun des 39 livres de l’A.T.

c) La puissance spirituelle propre au texte: elle octroie à ce dernier une autorité spontanée : « La parole de Dieu est vivante et opérante, et plus pénétrante qu’aucune épée à deux tranchants, et atteignant jusqu’à la division de l’âme et de l’esprit, des jointures et des moelles ; et elle discerne les pensées et les intentions du cœur » (Héb 4.12).

d) La cohérence doctrinale et l’exactitude historique : ce qui est faux (comme les erreurs historiques du livre de Judith) et incohérent avec l’ensemble de la révélation divine (comme la prière des morts dans le livre de Baruch 3.4 et en 2 Maccabées 12.45) est irrémédiablement rejeté.

e) L’authenticité d’un texte naturellement reconnue vis-à-vis de son auteur et/ou de son objet, tels les chrétiens de Bérée qui « reçurent la parole avec toute bonne volonté, examinant chaque jour les écritures (pour voir) si elles étaient ainsi» (Act 17.11).

II. LE CANON DE L’ANCIEN TESTAMENT (ou de la Torah1)

A. LE COURANT JUIF

1. Le canon juif

Le canon juif a été établi progressivement, au fur et à mesure de la rédaction des livres inspirés. Lorsqu’un prophète écrivait un ouvrage, celui-ci était tout naturellement incorporé parmi les textes sacrés. Par exemple, le prophète Daniel considérait les écrits de Jérémie, son aîné de quelques décennies, comme faisant partie du canon biblique (Dan 9.2).

En l’an 70 ap. J.C., l’anéantissement de la révolte juive par le général romain Titus a été un désastre, tant sur le plan national (par la dispersion des Juifs dans l’Empire romain) que religieux (par la destruction du second temple de l’Éternel à Jérusalem). Peu après, en 98, quelques rabbins, tous issus des milieux pharisiens, se retrouvèrent à Jamnia, bourgade proche de Jaffa, pour restructurer la religion juive et répondre à certaines questions relatives au canon. Ils fixèrent de manière définitive le canon des livres saints.

Cette publication officielle ne fit que confirmer un état de fait, puisque Flavius Josèphe (historien juif, 37-100) signalait déjà dans un de ses ouvrages (Contre Appion, 1.8) l’existence d’un ensemble de 22 rouleaux qui faisaient référence dans la religion juive. Jésus et les apôtres se sont d’ailleurs toujours référé à cet ensemble de 22 livres lorsqu’ils parlaient de l’Ecriture (appelée parfois "loi" ou "loi et prophètes" ou encore "loi, prophètes et psaumes").

Pour les responsables religieux juifs de Jamnia, la période d’inspiration des textes sacrés a duré de Moïse (considéré comme le rédacteur des 5 premiers livres, la Torah) jusqu’à Artaxerxès (465-423). En effet, ils ont estimé que l’ère prophétique est révolue depuis Malachie (vers 420 avant J.-C.). Cette limite dans le temps permet d’éliminer systématiquement tous les écrits postérieurs à cette date, notamment le foisonnement des productions apocalyptiques qui risquaient de remplacer, par un illuminisme individualiste, le solide attachement aux écrits reconnus.

2. Livres retenus

Les 22 rouleaux « officialisés » (correspondant exactement aux 39 livres répertoriés dans les versions protestantes de la Bible mais dans un ordre différent) sont répartis en trois grandes divisions dont parle Jésus lui-même en Luc 24.44 : « Il fallait que toutes les choses qui sont écrites de moi dans la loi de Moïse, et dans les prophètes, et dans les psaumes (ou autres écritures), fussent accomplies » :

a) la Loi (la Torah) : Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome
b) les Prophètes (les Nebiim) :

1. Premiers Prophètes : Josué, Juges, Samuel (1 et 2), Rois (1 et 2)
2. Prophètes Seconds : Esaïe, Jérémie, Ezéchiel + les Douze (petits prophètes)

c) les Écrits (les Ketoubim) : Psaumes, Job, Proverbes, Ruth, Cantique des Cantiques, Ecclésiaste, Lamentations, Esther, Daniel, Esdras, Néhémie, Chroniques (1 et 2).

3. Livres refusés

Une quinzaine de livres, de chapitres et de fragments de textes ont été écartés.

a) Les sept livres figurant dans le canon catholique :

Tobie ou Tobit : curieuse épopée d’un père aveugle (Tobit) et de son fils (Tobie) conduits par un ange du territoire de Nephtali jusqu’à Ecbatane (en Médie), écrite vers 200 av. J.-C.
1 et 2 Maccabées : récits historiques ou légendaires exaltant les révoltes juives dirigées par les Maccabées contre les rois de Syrie (en premier lieu Antiochus Épiphane) entre 175 et 135 av. J.-C.
Judith : histoire d’une héroïne nationale juive s’introduisant dans le camp d’un général assyrien pour lui trancher la tête et assurer une délivrance inespérée au peuple juif, vers 150 av. J.-C.
Baruch : court livre de cinq chapitres attribués au secrétaire du prophète Jérémie poursuivant son message en 3 grands thèmes (confession des péchés d’Israël, éloge de la sagesse, chants sur la captivité et le retour).
Le Siracide (ou Ecclésiastique) : enseignement d’un maître de sagesse dispensé à Jérusalem au IVème siècle av. J.-C. et ressemblant aux Proverbes de Salomon.
Le Livre de la Sagesse : traité de morale attribué à un certain Salomon vivant à Alexandrie au Ier siècle av. J.-C., qui désapprouve le scepticisme, le matérialisme et l’apostasie.

b) Divers ajouts également intégrés dans l’A.T. des Bibles catholiques :

Le Cantique des trois enfants saints (ou des trois jeunes gens, c’est-à-dire Schadrac, Meschac et Abed-Nego), généralement incorporé au chapitre 3 de Daniel.
L’histoire de Suzanne : chapitre 13 ajouté au livre de Daniel.
L’histoire de Bel et du Dragon : chapitre 14 ajouté au livre de Daniel.
Compléments à Esther : ajoutés pour introduire la mention officielle de Dieu dans ce livre.

c) D’autres livres ou fragments écartés également du canon catholique :

La prière de Manassé*2 : œuvre lyrique de 15 versets, inspirée par 2 Chroniques 33.12-16, ajoutée généralement à 1 Esdras (cf. infra).
La lettre de Jérémie : message destiné aux captifs de Babylone et abusivement attribué à Jérémie.
1 Esdras : complément historique douteux des récits de captivité et du retour d’exil (adaptation de 2 Chroniques 35-36 ; Esdras 8 et Néhémie 8).
2 Esdras (ou Apocalypse d’Esdras)* : probablement un pseudépigraphe, écrit juif rédigé entre 150 av. J.-C. et 100 ap. .J.-C., abusivement attribué au scribe Esdras.
3 et 4 Maccabées : récits fantaisistes sur la période antérieure à celle des Macchabées.

4. Les raisons de leur refus

Une simple lecture et une étude rapide de ces écrits nous permettent de comprendre aisément pourquoi les autorités juives (et à leur suite, les responsables des églises protestantes, anglicane et même grecque orthodoxe, pour les mêmes raisons) ne leur ont jamais accordé le statut de livres canoniques :

a) le caractère réellement prophétique fait défaut ;
b) la véritable autorité divine est passée sous silence ;
c) aucune nouvelle révélation messianique n’est affirmée ;
d) plusieurs erreurs doctrinales ou historiques sont présentées ;
e) les destinataires présumés les ont eux-mêmes déconsidérés.

B. LE COURANT CATHOLIQUE

Pourquoi des livres présentant si peu d’intérêt ont-ils été introduits, puis maintenus dans les versions catholiques de la Bible ? Qui est responsable d’une telle confusion et comment s’est-elle développée ?

1. La Version des Septante

Entre le IIIème et le IIème siècle av. J.-C., les textes sacrés juifs ont été traduits pour la première fois en une langue étrangère, en grec en l’occurrence : il s’agit de la célèbre version des Septante. Selon la légende, le roi Ptolémée II (285-246) aurait réuni à Alexandrie (ville du nord de l’Égypte), 72 traducteurs (6 par tribu d’Israël) qui auraient réalisé leur travail en 72 jours (!). En réalité, certains spécialistes estiment que cette œuvre magistrale a probablement été réalisée sur un siècle. Elle était destinée aux Juifs de la dispersion qui éprouvaient quelques difficultés à utiliser leur littérature religieuse dans la langue originelle (l’hébreu).

Les textes qui ont été plus tard refusés par les rabbins juifs à Jamnia, ont ainsi été progressivement incorporés à cette version grecque et ont acquis peu à peu une certaine notoriété de par leur utilisation. En effet, la Septante a connu un vif succès, tout d’abord auprès des communautés juives de la diaspora et ensuite parmi les communautés chrétiennes des premiers siècles de notre ère, à une époque où le grec constituait la langue internationale par excellence.

2. La Vulgate

A la fin du IVème siècle de notre ère, la nécessité d’une traduction latine de la Bible complète (A.T. + N.T.) s’est imposée pour les besoins de l’évangélisation de l’immense Empire romain. Jérôme (Père de l’Église latine, propagateur de l’idéal monastique, 347-419) réalisa cette tâche grandiose entre 390 et 405 à partir des originaux hébreux et grecs et de la version des Septante. C’est ainsi que l’A.T. de la version latine de la Bible s’est augmenté, par rapport à la Torah, de plusieurs écrits contestés par Jérôme lui-même. En effet, le célèbre traducteur, tout en les incluant dans son travail, les a présentés aux lecteurs comme suspects, tant par leur origine incertaine que par leur prétendue valeur doctrinale. Jérôme qualifiait ces écrits de « contes profanes » par rapport aux 39 « livres inspirés ».

Grâce au poids de l’église catholique romaine, cette version latine de la Bible a connu au cours des siècles une telle diffusion qu’on l’appellera la Vulgate (du terme latin vulgata, signifiant « répandue »).

Dès l’époque de Jérôme, Augustin (Père de l’Eglise latine, évêque d’Hippone, 354-430) s’opposa ouvertement aux conceptions du traducteur et reconnut aux livres « ajoutés » une grande valeur due, selon lui, à «l’inspiration de la version des Septante». Augustin fit d’ailleurs prévaloir son opinion au concile de Carthage en 397.

3. La confusion

Le doute est désormais semé et la confusion ira en s’amplifiant au cours du Moyen Age. D’une part, la Vulgate se répand très largement ; d’autre part, la mise en garde de Jérôme tombe en désuétude au profit de la pensée augustinienne.

A la suite de la réforme protestante du XVIème siècle, l’Église catholique profita du concile de Trente (1546-1563) pour organiser sa contre-réforme et consacrer la Vulgate comme version officielle de l’Eglise. Ainsi, les livres « ajoutés » dans l’A.T. devinrent « deutérocanoniques », ce qui leur confère une certaine autorité dans le canon catholique.

Toutefois, cette décision était guidée par le contexte théologique de l’époque : les autorités catholiques puisaient dans ces livres deutérocanoniques des arguments légitimant les indulgences, les œuvres, le purgatoire, les prières pour les morts, l’invocation des saints, le sacerdoce et le célibat des prêtres, etc. — tous ces points étant vigoureusement combattus par les protestants, au premier rang desquels Luther.

C. LE COURANT PROTESTANT

1. Le constat

La position de tous les Réformateurs sur le canon de l’A.T. (et à leur suite, de tous les mouvements religieux issus de la Réforme) a été unanime, claire et précise : une confiance absolue au canon connu et approuvé par Jésus et les apôtres, canon confirmé ultérieurement par les spécialistes juifs qui avaient statué en la matière à la fin du Ier siècle de notre ère – (d’autant plus qu’il s’agissait d’écrits touchant à leur propre histoire, leur législation, leur culture et leur religion).

Les églises protestantes ont donc repris purement et simplement le canon de l’A.T. déjà constitué, sans rien y ajouter et sans rien en retrancher, selon la recommandation d’Exode 12.32 : « Toutes les paroles que je vous commande, vous prendrez garde de les pratiquer. Tu n’y ajouteras rien, tu n’en retrancheras rien ». Cette exhortation est d’ailleurs répétée en Apocalypse 22.18-19, accompagnée de sentences punitives.

En agissant de la sorte, les Réformateurs ne faisaient qu’appliquer une de leurs revendications essentielles : «Sola Scriptura !» Seule, en effet, l’Écriture Sainte, divinement inspirée et unanimement acceptée comme telle, détient toute autorité utile et nécessaire dans le domaine de la foi.

2. La classification

La seule modification apportée par les protestants concerne le classement des 39 livres selon leur genre littéraire :

a) Livres législatifs : Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome.
b) Livres historiques : Josué, Juges, Ruth, Samuel (1 et 2), Rois (1 et 2), Chroniques (1 et 2), Esdras, Néhémie, Esther.
c) Livres sapientiaux : Job, Psaumes, Proverbes, Ecclésiaste, Cantique des Cantiques.
d) Livres prophétiques : Esaïe, Jérémie, Lamentations, Ezéchiel, Daniel, 12 petits prophètes.

3. Conclusion

La raison principale du rejet des apocryphes par les protestants vient de leur absence visible de toute inspiration divine, comme le confesse d’ailleurs l’auteur inconnu de 2 Macchabées : « Si la composition (de cet ouvrage) est bonne et réussie, c’est aussi ce que j’ai voulu ; si elle a peu de valeur et ne dépasse guère la médiocrité, c’est tout ce que j’ai pu faire » (2 Macc 15.38).

III. LE CANON DU NOUVEAU TESTAMENT

A. LES LIVRES CANONIQUES

1. Le choix

Le foisonnement des écrits religieux entre les années 50 et 150 de l’ère chrétienne a obligé les Pères de l’Eglise à établir un choix rigoureux. Un des critères essentiels pris en considération a été leur caractère « apostolique ». En effet, l’apôtre a, dans l’histoire de l’Eglise, une fonction unique qui ne se répète pas : il est témoin oculaire et auditif de l’événement « Jésus ». Par conséquent, seuls les écrits ayant pour auteur un apôtre – ou un de ses disciples directs (Marc interprète de Pierre et Luc interprète de Paul) ou un frère du Seigneur (Jacques et Jude) sont censés garantir la pureté du témoignage chrétien. Le canon du N.T. s’est donc formé par élimination.

2. L’évolution

a) Liste de Marcion

Le plus ancien recueil d’écrits néo-testamentaires connu aujourd’hui est l’œuvre d’un certain Marcion, vers 150, qui a été condamné comme hérétique, car il rejetait d’office tout ce qui était en relation étroite avec l’A.T. Selon sa théorie, les seuls auteurs légitimes étaient Paul (apôtre des nations) et Luc (disciple de Paul). Son canon ne renferme donc que le seul évangile selon Luc et dix épîtres de Paul.

b) Canon de Muratori

La seconde liste bien établie que nous possédons, date de la seconde moitié du IIème siècle. Elle a été mise à jour par le bibliothécaire Muratori († 1750) à la Bibliothèque ambrosienne de Milan. Cette liste (probablement établie en réaction contre celle de Marcion) reconnaît comme canoniques les 4 évangiles, les Actes, 13 épîtres pauliniennes, Jude, 1 et 2 Jean, l’Apocalypse de Jean et celle de Pierre (avec une certaine réserve, il est vrai).

c) Table d’Origène

Vers 230, Origène (Père de l’Eglise grecque, exégète et théologien, 185-254) publia en Egypte une liste complète des livres canoniques qui fit petit à petit autorité dans le monde chrétien.

3. La décision

Finalement, 27 ouvrages ont été déclarés canoniques. Deux critères les recommandent :

– ils ont tous été reconnus écrits au cours de la 2nde moitié du Ier siècle (critère d’ancienneté) ;
– ils émanent des apôtres eux-mêmes ou de leurs disciples directs (critère d’authenticité).

Toutefois, il a fallu patienter jusqu’à la fin du IVème siècle pour que ce canon soit accepté par toutes les composantes du monde chrétien : en Orient, Athanase, évêque d’Alexandrie, inclut les 27 livres dans sa lettre pastorale de Pâques de l’an 367 et en Occident, c’est vers l’an 400 que Jérôme et Augustin officialisèrent ces mêmes 27 livres. La décision finale fut prise à la suite de plusieurs rencontres ecclésiastiques importantes : synode de Rome (382), concile d’Hippone (393) et les deux conciles de Carthage (397 et 419).

4. Les réticences

7 livres apostoliques ont été discutés, voire même contestés par certains, avant de voir leur « canonicité » reconnue unanimement:

Hébreux : à cause de l’anonymat de son auteur ;
Jacques : à cause de son insistance sur les œuvres (Luther la qualifiera d’ « épître de paille ») ;
2 Pierre : à cause d’une différence de style trop marquée par rapport à la 1ère épître de Pierre ;
2 et 3 Jean : à cause de l’ambiguïté des termes « l’ancien », « la dame élue », « la sœur élue » (2 Jean 1,13), et des termes « l’ancien » et « Gaïus » de 3 Jean 1 ;
Jude : à cause de certaines références à des livres apocryphes ;
Apocalypse : à cause de son caractère visionnaire3.

B. LES LIVRES APOCRYPHES

Les livres apocryphes du N.T. n’occasionnent pas les mêmes débats que ceux de l’A.T. car tous les chrétiens (catholiques, orthodoxes, protestants, anglicans) se sont conformés au choix historique de leurs prédécesseurs à la fin du IVème siècle. Au cours des siècles, les Eglises chrétiennes (toutes tendances confondues) n’ont jamais essayé d’adjoindre de la littérature apocryphe au canon constitué, estimant que, par les 27 livres désignés, la révélation de Dieu au monde par Jésus-Christ est suffisante, complète et parfaite.

Même si les livres apocryphes, tous postérieurs au 1er siècle, ont été refusés par manque d’inspiration divine et de profondeur spirituelle, ils n’en constituent pas moins une source de renseignements intéressants concernant le développement de la doctrine, d’hérésies et de la liturgie de l’Eglise primitive.

Comme pour les livres canoniques, tous les genres littéraires sont représentés4:

a) évangiles : l’évangile selon les Hébreux et l’évangile de Thomas ; ils sont censés fournir des détails sur deux périodes de la vie de Jésus occultées dans le N.T. : l’enfance et l’adolescence de Jésus et les 40 jours du Ressuscité avant l’Ascension ;
b) actes : les actes de Paul et de Thécla (vers 170) ;
c) épîtres : les sept épîtres d’Ignace (vers 110) ; l’épître de Polycarpe aux Philippiens (vers 115) ; l’épître de Clément aux Corinthiens (vers 100) ; l’épître de Barnabas (entre 70 et 135) ; l’ancienne homélie aussi nommée seconde épître de Clément (entre 120 et 140) ; la Didachè des douze apôtres (enseignement des 12 apôtres, entre 100 et 120) ; le Berger d’Hermas (allégorie écrite entre 115 et 145) ; l’épître aux Laodicéens (IVème s.)
d) apocalypse : l’apocalypse de Pierre (vers 150).

C. CONCLUSION

N’est-il pas merveilleux de considérer que tous les chrétiens ont à leur entière disposition exactement les mêmes textes néo-testamentaires qui, faveur supplémentaire, sont placés dans le même ordre ?

a) Livres historiques : Evangiles de Matthieu, Marc, Luc et Jean, Actes des Apôtres
b) Livres doctrinaux : Epîtres de Paul aux Romains, Corinthiens (1 et 2), Galates, Éphésiens Philippiens, Colossiens, Thessaloniciens (1 et 2), Timothée (1 et 2), Tite et Philémon, Epître aux Hébreux, Epîtres de Jacques, Pierre (1 et 2), Jean (1,2 et 3) et Jude
c) Livre prophétique : Apocalypse de Jean

Au fil du temps, ces 27 livres, qui constituent finalement le canon du N.T., se sont imposés d’eux-mêmes grâce à une triple action :

1) leur inspiration divine intrinsèque,
2) le caractère unique et concordant de leur contenu
3) la personnalité de leurs auteurs, tous proches de Jésus-Christ.

En soi, nous pouvons y discerner un véritable miracle de Dieu : c’est Sa Parole qui est intemporelle et universelle et qui se maintient « incorruptible, vivante et permanente » (1 Pierre 1.23). En fait, « la Parole de notre Dieu demeure à toujours. » (Esaïe 40.8). « Or c’est cette parole qui vous a été annoncée » (1 Pierre 1.25).

1 En regroupant certains petits livres (par exemple les 12 "petits prophètes" réuinis dans un seul volume), le canon des écritures juives (appelé par extension "Torah") comporte, par analogie au nombre de lettres de l’alphabet hébreu, 22 rouleaux pour un total effectif de 39 livres.
2 Les livres marqués par une astérisque son également absents de la version des Septante.
3 Ce livre a été l’un des premiers dont l’autorité divine ait été attestée; paradoxalement, il sera le dernier à être incorporé au Canon après diverses hésitations.
4 Il est possible de se procurer chacun de ces ouvrages dans des librairies spécialisées.

Soli Deo Gloria !

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Dossier : La Bible, repère pour la vie
 

Blond Pierre
L'auteur de cet article, Pierre BLOND, est belge. Il est né en Afrique (Rwanda-Urundi). Il est marié et père de trois enfants, dont l'une est décédée à l'âge de 18 ans.. Licencié en théologie protestante, en histoire du christianisme et agrégé pour l'enseignement secondaire supérieur, il est professeur, chargé de cours de religion protestante. Il exerce un ministère itinérant d'enseignant biblique dans les assemblées évangéliques et s'occupe également des jeunes.