Dossier: Le royaume de Dieu
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Avant l’établissement du royaume (Marc 13)

Avant l’établissement du royaume (Marc 13)

Difficultés futures

Après avoir publiquement manifesté son autorité au temple, Jésus se retire du lieu « saint » pour annoncer à ses disciples les signes relatifs à l’établissement de son royaume. Ce discours peut nous étonner. En effet, Jésus vient de se présenter comme maître et Seigneur qui reprend tout contestataire (Marc 12). Les disciples pourraient croire que la vie du fidèle sera aisée avec un chef qui peut réduire au silence chaque ennemi. Il n’en est rien. Jésus annonce dans son discours eschatologique une série de calamités qui atteindront la terre et les chrétiens. Jésus est Seigneur, mais la manifestation de son règne n’est pas pour l’immédiat.

Dans l’avenir, les problèmes vont se multiplier. Une intensification des difficultés est perceptible. Pour commencer, Jésus relève des problèmes auxquels tous les hommes seront confrontés : bruits de guerres, guerres, catastrophes naturelles (Marc 13.7-8). Puis il annonce les troubles supplémentaires que subiront les chrétiens (les persécutions religieuses : 13.9-13). Ensuite, il décrit un temps d’épreuves unique dans l’histoire de l’humanité (13.14-23). « Car la détresse, en ces jours, sera telle qu’il n’y en a point eu de semblable depuis le commencement du monde que Dieu a créé jusqu’à présent, et qu’il n’y en aura jamais. » (13.19) Pour finir, juste avant l’avènement du Fils de l’homme, « les cieux seront ébranlés » (13.25).

Les fidèles sont exhortés à persévérer, à mettre leur confiance dans leur Seigneur et à ne pas se laisser troubler par ces difficultés1. Jésus les a annoncées (13.23), elles ne doivent donc pas nous surprendre lorsqu’elles surviennent. Les premières difficultés seront suivies d’autres (« il faut que ces choses arrivent, mais ce ne sera pas encore la fin », 13.7), puis d’autres encore (« Ce ne sera que le commencement des douleurs », 13.8). Aucune promesse de salut n’est formulée pour ce temps d’épreuve, car la délivrance est pour un temps futur (« celui qui persévérera jusqu’à la fin sera sauvé », 13.13). Les seules aides reçues serviront au témoignage clair de notre foi (« ce n’est pas vous qui parlerez, mais l’Esprit-Saint », 13.11). L’épreuve finale sera aussi abrégée « à cause des élus qu’il a choisis » (13.20).

Comparaison avec les paraboles du royaume

Ce discours est le second discours développé de Jésus que Marc nous transmet, le premier ayant été prononcé au début du ministère de Jésus sous forme de paraboles (4.1-34). Les deux discours présentent des similitudes et des contrastes. Le discours en paraboles était résolument optimiste. Chaque parabole se terminait par le succès qui augmentait d’une parabole à l’autre. Les difficultés initiales étaient non seulement résolues à la fin de la première parabole, mais elles n’étaient même plus mentionnées par la suite.

Au chapitre 13, le discours eschatologique est différent. Le ton en est sinistre, car les difficultés ne cessent de croître. Certes, la victoire finale est promise (13.26-27), mais elle viendra comme une surprise et non comme l’aboutissement d’un long mûrissement. La différence de ton entre ces deux discours tient au fait que le premier est centré sur le royaume de Dieu et le second sur le monde. Le premier garantit le succès de l’Évangile et le second décrit l’effondrement inéluctable du monde. Que les disciples ne placent pas leur espoir dans le monde, car celui-ci n’a pas d’avenir ; il finira par s’écrouler. Jésus annonce pour commencer la destruction du temple (« Il ne restera pas pierre sur pierre qui ne soit renversée », 13.2), une construction qui suscitait l’admiration de tous (« Maître, regarde quelles pierres, et quelles constructions ! », 13.1). À la fin de son discours, Jésus annonce que même l’univers sera touché par la déchéance : « Le soleil s’obscurcira, la lune ne donnera plus sa lumière, les étoiles tomberont du ciel, et les puissances qui sont dans les cieux seront ébranlées. » (13.24-25) Ces deux discours sont complémentaires et non pas contradictoires.

Dans ces deux récits, l’auditeur ou le lecteur est exhorté à comprendre la parole : « Que celui qui a des oreilles pour entendre entende » (4.9) ; « Si quelqu’un a des oreilles pour entendre, qu’il entende. » (4.23) ; « Que celui qui lit fasse attention. » (13.14)

Comparaison avec l’Apocalypse

Le discours eschatologique de Jésus est appelé parfois « la petite apocalypse ». Il se rapproche en particulier du livre de l’Apocalypse et de la deuxième partie du livre de Daniel qui soulignent :

1. des guerres entre nations (13.7,8),

2. la persécution religieuse (13.9,11),

3. des fléaux climatiques (13.8a),

4. l’intensification des difficultés (13.8b),

5. un tournant décisif (13.14),

6. des références géographiques à la Judée (13.14),

7. des exhortations à veiller et persévérer malgré les difficultés (13.13),

8. la manifestation temporaire de l’Antichrist (13.14),

9. la venue glorieuse du Fils de l’homme (13.26),

10. le salut final des élus (13.27).

Notons dans le discours de Jésus l’absence de toute référence au royaume divin, un aspect apocalyptique fréquent. La « petite apocalypse » est aussi dépourvue de tout langage symbolique, contrairement à de nombreux textes apocalyptiques. Jésus suit ainsi le mouvement général de la révélation qui devient de plus en plus explicite. En effet, lors de son premier discours (les paraboles du royaume), il avait utilisé des images, mais maintenant, il parle en termes clairs à ses disciples.

Utilité de ce discours

Personne ne connaît « le jour et l’heure » du retour de Jésus (13.32). Bien que le retour de Christ puisse être daté par rapport à l’avènement de l’Antichrist (moins d’une génération), cela ne signifie pas que tout soit dévoilé concernant la durée de cette période : « Pour ce qui est du jour ou de l’heure, personne ne les connaît, pas même les anges dans le ciel, pas même le Fils, mais le Père seul. » (13.32) Le chrétien doit vivre dans la dépendance de Dieu, qui connaît tout, mais qui a décidé de ne pas tout révéler. Il suffit au chrétien de savoir que Dieu connaît toutes choses pour être rassuré, car tout « connaître » signifie pour Dieu tout contrôler. Les jours et les heures sont fixés par le Seigneur (cf. Apoc 9.15). Le monde court à sa perte, mais le fidèle est entre de sûres mains.

Jésus termine son discours par diverses exhortations à « veiller en tout temps ». La connaissance de certains signes précis (par exemple la profanation du temple par l’Antichrist) ou la prolongation de l’attente du Seigneur (cf. 2 Pi 3.3-10) ne doit pas diminuer l’intensité de notre attente. Jésus peut revenir à n’importe quel moment.

Jésus avait commencé son discours avec l’impératif du verbe blepô (« prenez garde », litt. « voyez », « veillez » : 13.5 ; même mot qu’en 13.2, « vois », 13.9,33, « prenez garde » et 13.23, « soyez sur vos gardes »). Il le termine avec un autre impératif qui souligne encore davantage la vigilance : grêgoreite (« veillez comme des veilleurs professionnels », 13.35,37).

1Il y a 19 impératifs dans les versets 5 à 37. Il est donc manifeste que le but principal de ce discours n’est pas de satisfaire notre curiosité concernant le futur, mais de nous donner un enseignement pratique et éthique.

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Arnold Daniel
Daniel Arnold a été, pendant de longues années, professeur à l’Institut biblique Emmaüs. Membre du comité de rédaction de Promesses, il est un conférencier apprécié et l’auteur de nombreux livres, parmi lesquels des commentaires sur des livres bibliques.