Catastrophes naturelles et encouragement pastoral
L’article qui suit est un condensé de l’article original paru dans le « Journal for Baptist Theology & Ministry » au printemps 2007.
L’auteur aborde ici la question de l’encouragement pastoral en temps de catastrophe naturelle de manière originale en pointant l’importance d’une bonne perspective biblique sur les catastrophes.
Tout d’abord, nous devons reconnaître que le problème le plus troublant qui émerge lors de toute grande catastrophe naturelle n’est pas que des gens meurent. C’est un vrai problème humain et émotionnel, mais ce n’est pas le plus important. Les ouragans, les tsunamis, les tremblements de terre, les incendies, les tornades ou les inondations ne modifient pas les statistiques sur le nombre de décès de la race humaine, ne serait-ce que d’une décimale. Un typhon au Bangladesh a emporté entre 300 000 et 500 000 vies en 19701et la pandémie mondiale de la grippe de 1918 a exterminé entre 50 et 100 millions de personnes2, mais aucun de ces événements catastrophiques ne changera le sombre pronostic selon lequel tout être humain va mourir.
Ce n’est pas non plus le problème général que les événements naturels détruisent ce que nous avons fait — nos maisons, nos bâtiments, nos routes, etc. Personne ne devrait s’étonner qu’une maison ou un bâtiment soit réduit à néant dans une coulée de boue, étant donné que Dieu déclare que tout sera finalement détruit par la décomposition de toute façon (Mat 6.19 ; Rom 8.20-25). La destruction cataclysmique à venir de la terre entière telle que nous la connaissons nous est annoncée (2 Pi 3.11-13). Certains ont perdu ces choses plus tôt qu’ils ne l’avaient espéré, mais le fait qu’elles soient détruites ne devrait jamais faire l’objet d’un débat parmi les évangéliques.
En outre, le fait que de nombreuses personnes soient confrontées à une dégradation de leurs conditions d’existence en raison d’une catastrophe ne devrait pas être une énigme pour nous. Un nouvel ordre viendra finalement pour tous ; les uns connaîtront le ciel et une nouvelle terre (2 Pi 3.13) et les autres l’enfer. La mort change tout, tout comme le retour du Christ.
Nous devrions également nous rappeler qu’il n’y a pas de différence significative entre l’horreur de la mort lors d’une catastrophe naturelle et celle qui se produit en temps normal. S’il était possible de demander à un homme qui se trouve dans l’environnement aseptisé d’un hôpital ce que c’est que de rendre son dernier souffle alors qu’il se noie dans son propre liquide, il vous dirait que c’est tout aussi horrible que d’être noyé dans une inondation. Parce que Dieu permet que le corps subisse un choc dans les moments de peur, nombreux sont ceux qui, heureusement, bénéficient d’une anesthésie lorsqu’ils meurent, qu’elle soit ou non narcotique. Mais la mort reste un ennemi ravageur, où qu’elle se produise et quelle que soit la manière dont on la rencontre.
Qu’est-ce qui est si étonnamment unique dans une catastrophe naturelle ? Pourquoi devenons-nous poétiques et diserts à son sujet ? Nous sommes effrayés parce qu’une catastrophe naturelle met en évidence ces faits universels inévitables. Elle les peint en couleurs vives pile en face de nous pour que nous ne puissions pas y échapper. Nous voyons à quel point nous sommes impuissants. Notre invincibilité s’évapore ; notre vulnérabilité nous apparaît et se rit de nous. Nous voyons des personnes comme nous vaquer à leurs occupations, puis tout perdre et mourir en un instant.
Toute mort et toute destruction proviennent de l’événement le plus cataclysmique de l’histoire : la chute de l’homme, et le juste jugement de Dieu qui en résulte (Gen 3). Notre monde naturel gémit sous l’esclavage qui en résulte (Rom 8.18-25)3 . De tous les hommes, les croyants devraient apprendre à apprivoiser cette situation.
La certitude que la mort, la corruption et la destruction vont, de toute façon nous atteindre, nous tous et tout ce que nous possédons, n’éradique cependant pas la douleur intérieure que les croyants peuvent éprouver. Même le Christ, qui a dit : « Que votre cœur ne soit pas troublé », a été « affligé et troublé » et « profondément affligé, jusqu’à la mort » par le poids du péché placé sur lui. Avec une connaissance parfaite et une confiance absolue, il a trouvé la paix par rapport à la croix à Gethsémané. Certes, son fardeau était infiniment plus lourd que le nôtre, mais il y a sûrement une leçon à en tirer.
Certains des plus grands saints ont également été déprimés par des pertes ou des bouleversements (David, Élie, Spurgeon, et Martyn Lloyd-Jones, etc.). Des troubles émotionnels permanents nous rappellent qu’une catastrophe, quelle qu’elle soit, est souvent une immense épreuve qui entraîne des catastrophes secondaires, comme les ouragans entraînent des tornades, même chez les croyants. Si c’est le cas, nous, des saints « ordinaires », devons recevoir beaucoup d’aide pour comprendre et faire face aux catastrophes naturelles lorsqu’elles nous touchent ou touchent ceux que nous aimons. Qu’est-ce qui peut nous aider ?
Lorsqu’une catastrophe se produit, l’état mental ou émotionnel du croyant est directement lié à sa perception spirituelle. En fin de compte, et souvent immédiatement, les croyants peuvent surmonter une plongée en chute libre liée au traumatisme de ce qui s’est passé. Le travail pastoral consiste non seulement à faire preuve d’empathie, mais aussi à amener les croyants à avoir une perspective biblique sur la catastrophe et la perte dès que possible, de préférence avant que l’événement ne se produise. C’est sur cette perspective que je souhaite attirer notre attention.
La nature obéit à Dieu
Les disciples ont dit de Jésus « Quel est donc celui-ci, à qui obéissent même le vent et la mer » (Marc 4.41)4 . Ce verset est souvent utilisé pour défendre la foi face à des sceptiques afin de prouver que Jésus est réellement Dieu. Les chrétiens ont presque toujours affirmé, en des temps paisibles, que Dieu contrôle la nature. Le fermier prie Dieu pour qu’il pleuve sur ses champs secs, tout comme l’instituteur chrétien demande à Dieu un ciel clair pour le pique-nique de sa classe, car nous supposons que Dieu gère tout cela. Mais cette croyance évangélique générale, presque implicite, va-t-elle assez loin lorsque les temps sont plus difficiles ?
Le psalmiste parle de façon convaincante du contrôle de Dieu sur les événements : « Tout ce que l’Éternel veut, il le fait, dans les cieux et sur la terre, dans les mers et dans tous les abîmes. Il fait monter les nuages des extrémités de la terre, il produit les éclairs et la pluie, il tire le vent de ses trésors » (Ps 135.6-7).
C’est Dieu qui a ordonné chacun des fléaux naturels sur l’Égypte, comme la transformation de l’eau en sang, l’invasion de la terre par des grenouilles, l’envoi de la grêle et des criquets dévastateurs. Même Pharaon l’a reconnu (Ex 9.27-28). « Moïse étendit sa verge vers le ciel ; et l’Éternel envoya des coups de tonnerre et de la grêle, et le feu se promenait sur la terre. L’Éternel fit pleuvoir de la grêle sur le pays d’Égypte » (Ex 9.23).
Avant cela, le déluge avait été attribué à l’intervention directe de Dieu : « Encore sept jours, et je ferai pleuvoir sur la terre quarante jours et quarante nuits, et j’exterminerai de la face de la terre tous les êtres que j’ai faits » (Gen 7.4). La fin du déluge était également l’action de Dieu : « Dieu se souvint de Noé, de tous les animaux et de tout le bétail qui étaient avec lui dans l’arche ; et Dieu fit passer un vent sur la terre, et les eaux s’apaisèrent. » (Gen 8.1).
Dieu a combattu pour Israël en envoyant de gros grêlons sur les Amorites : « Comme ils fuyaient devant Israël, et qu’ils étaient à la descente de Beth-Horon, l’Éternel fit tomber du ciel sur eux de grosses pierres jusqu’à Azéka, et ils périrent » (Jos 10.11).
Jonas fit l’expérience du contrôle souverain de Dieu sur la sphère naturelle : « L’Éternel Dieu fit croître un ricin, qui s’éleva au-dessus de Jonas, pour donner de l’ombre à sa tête et pour lui ôter son irritation. Jonas éprouva une grande joie à cause de ce ricin. Mais le lendemain, à l’aurore, Dieu fit venir un ver qui rongea le ricin, et le ricin sécha. Au lever du soleil, Dieu fit souffler un vent chaud d’orient, et le soleil frappa la tête de Jonas » (Jon 4.6-8).
Et quelle que soit l’option millénariste que l’on ait, il ne fait aucun doute que la vision de Jean sur l’île de Patmos réaffirme que Dieu contrôle parfaitement toute la nature et l’utilise comme il le souhaite, en particulier dans le jugement (cf. Apoc 16.18, etc.).
La bonté de Dieu
Voici quelques bonnes raisons pour affirmer qu’une catastrophe naturelle vient d’un Dieu bon et attentionné :
1. Dieu est reconnu comme puissant et il ne faut pas se moquer de lui. Dieu a souvent affirmé que les événements cataclysmiques avaient pour but de montrer sa puissance envers les hommes (Ex 9.14-16 ; 14.31).
2. La société est avertie de la plus grande calamité : le jugement éternel. Un désastre physique n’est rien comparé à la damnation éternelle. Un ouragan est une annonce : si vous ne vous repentez pas, pire que cela va vous arriver (cf. Luc 13.1-5).
3. Certaines personnes sont punies à juste titre pour leur rébellion. La Bible déclare que « la colère de Dieu se révèle du ciel contre toute impiété et toute injustice des hommes » (Rom 1.18). Les ouragans ne sont que l’un des moyens de son action (cf. Ps 7.11-13). Nous devrions nous réjouir de la bonté de Dieu dans sa victoire sur les impies.
4. Certains vrais croyants sont mis à l’épreuve ou disciplinés et leur foi est renforcée. La même tempête qui juge un homme non croyant peut être le creuset de l’épreuve et/ou de la discipline pour un vrai chrétien, et le fortifiera et le purifiera pour l’avenir (Jac 1.2-3 ; Héb 12.5-11).
5. Les croyants peuvent être emmenés au ciel, et certains ennemis de Dieu peuvent être retirés de la terre. C’est une réalité difficile à accepter, mais vraie néanmoins. La Bible dit que nos jours sont inscrits par Dieu avant même que l’un d’eux ne soit vécu (Ps 139.16). Il promet également que de nombreux rebelles connaîtront une fin calamiteuse (Ps 73.18-19).
6. Les fidèles reçoivent l’occasion d’aimer de façon sacrificielle. En raison de la nature du vrai croyant, vous trouverez toujours des chrétiens parmi ceux qui sont sur place pour aider à soulager la détresse (1 Jean 3.17 ; Gal 6.10). Leur amour peut orienter de nombreuses personnes vers le Christ.5
La disposition de Dieu envers le croyant
Il y a encore plus de raisons d’encouragement pour les croyants en particulier. Pierre a rappelé aux croyants de tous les temps qu’ils étaient appelés à bénir « afin d’hériter la bénédiction » (1 Pi 3.9). En fait, Dieu comble le croyant de bénédictions. David a écrit : « Que tes pensées, ô Dieu, me semblent impénétrables ! Que le nombre en est grand ! Si je les compte, elles sont plus nombreuses que les grains de sable. » (Ps 139.17-18). Parmi les autres promesses, qui s’accomplissent toutes en Christ et qui sont la part du croyant, il y a cette promesse de bénédiction : « Je te bénirai ; je rendrai ton nom grand, et tu seras une source de bénédiction. Je bénirai ceux qui te béniront, et je maudirai ceux qui te maudiront ; et toutes les familles de la terre seront bénies en toi » (Gen 12.2-3)6. Cette « bénédiction » ou faveur de Dieu, sur la vie du croyant, est le droit de naissance de tous les chrétiens, juifs ou païens 7.
C’est sur la base de cette confiance dans la disposition favorable de Dieu envers le croyant que Paul peut affirmer dans Romains 8.28 que « toutes choses concourent au bien de ceux qui aiment Dieu, de ceux qui sont appelés selon son dessein ». Les versets 29 et 30 situent ce « bien » dans son contexte. Chaque aspect mentionné conduit au don final et parfait de la glorification. D’une part, nous pouvons dire que tout ce qui finit bien doit concourir pour le bien. Mais, il y a plus que cela. Au verset 29, Paul lie le bien que Dieu accomplit à la sanctification (le déroulement de son « dessein » du verset 28), car ceux qui sont connus d’avance sont prédestinés à être « semblables à l’image de son Fils ».
Dieu veut nous rendre éternellement heureux et déverser sur nous « les richesses de sa grâce » (Éph 2). Pour nous préparer à cet état de bonheur absolu, il nous soumet à tout ce qui est nécessaire pour notre sanctification. Dans la pensée de Paul, l’activité de Dieu pour nous rendre conforme à lui fait partie du bien qu’il fait « concourir » pour nous avant notre glorification finale. La souffrance est bonne pour le croyant parce qu’être rendu conforme à Christ est bon.
Dieu veut soit discipliner, soit éprouver par la souffrance, et les deux produisent le bien dans le sens d’une progression dans la sanctification8 . Il ne nous est pas permis de retirer la calamité naturelle de cet ensemble de souffrances nécessaires pour le croyant. Nous devons considérer tout cela comme de la joie (Jac 1.2-3) car la souffrance est un aspect fondamental de la sanctification.
Dans le même chapitre de l’Épître aux Romains, Paul affirme que tous les futurs héritiers souffriront avec Christ ». Il décrit les gémissements que toute la création pousse en raison de l’entrée du péché dans le monde. Maintenant, nos corps sont soumis, avec toute la création, à la « futilité » que le péché de l’homme a apportée dans l’univers. Ce n’est pas une « futilité » facile, ni une « corruption » gentille à laquelle nous sommes confrontés. Mais tout va changer pour le croyant : il sera un jour glorifié par « la rédemption de son corps ». La nature sera libérée de cette corruption, et cela inclut tout d’abord notre propre corps. En fait, c’est la libération de notre corps qui entraîne la liberté de la création. Paul dit : « J’estime que les souffrances du temps présent ne sauraient être comparées à la gloire à venir qui sera révélée pour nous » (Rom 8.18.). Quel espoir nous avons !
Dans nos prédications et dans nos conseils pastoraux lors de calamités naturelles, nous ne rendons pas service à ceux qui souffrent physiquement et mentalement en évitant de parler de la souveraineté de Dieu et du plan divin de sanctification qui s’achève par la glorification. Leur souffrance n’est pas vaine et Dieu est bon dans tout cela. Bien que le malade soit au fond du trou et qu’il lutte souvent à travers des douleurs et des pertes immenses, il reste une espérance réaliste pour lui — tant dans ce que ces pertes apportent à son développement spirituel que dans son anticipation de la gloire future. Nous honorerons Dieu au plus haut point, non pas en essayant d’empêcher les gens de comprendre ses attributs et ses desseins, mais en affirmant sa bonté envers les croyants, quelle que soit la forme sous laquelle ses bénédictions sont administrées. Au ciel, nous apprécierons et louerons Dieu pour le moment choisi et la parfaite exécution de ses plans, car Dieu fait tout bien. Bien que notre compréhension sur terre soit imparfaite, nous devons amener le peuple de Dieu, dans la mesure du possible pour l’instant, à se réjouir et à avoir foi dans le Dieu qui est à la fois souverain et bon.
- NOAA News Online (http://www.noaanews.noaa.gov/stories/s334b.htm).
- Encyclopédie en ligne Wikipédia (http://en.wikipedia.org/wiki/Spanish_flu). Certaines estimations sont plus basses (20 à 40 millions) mais même les estimations plus basses en font la pire pandémie de l’histoire.
- Ce passage montre sans conteste le lien entre la chute de l’homme et l’esclavage dont souffre toute la nature. La création attend que les hommes soient libérés de leurs péchés. Lors de la restauration de toutes choses, les nouveaux cieux et la nouvelle terre (2 Pi 3.13 ; Apoc 21.1) sont décrits comme un monde dans lequel la justice habite. Lorsque l’homme racheté est ultimement libéré de son péché, l’univers lui-même est simultanément rétabli dans sa liberté originelle, hors de toute décadence.
- De même, Luc 8.24 déclare que Jésus « menaça le vent et les flots, qui s’apaisèrent, et le calme revint ».
- Adapté de « Do Hurricane Just Happen ? », Jim Elliff, 2004, http://www.bulletininserts.org/hurri.html.
- Selon moi, la promesse de la terre du chapitre 12 se réalise pour le croyant dans la nouvelle terre. Voir Héb 11.8-16, 39-40.
- Parce que nous sommes tous « fils d’Abraham » par la foi, tous les croyants du Nouveau Testament partagent la promesse. Ceci est clairement établi par Paul en Galates 3.
- Cf. Héb 12.10 où il est dit que la discipline est « pour notre bien, afin que nous participions à sa sainteté ».