Dossier: Épidémies et fléaux
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Pourquoi est-il né aveugle ? (Jean 9)

Pourquoi le mal ?
Pourquoi la souffrance ?
Comment expliquer la naissance d’un enfant handicapé ?

Les disciples posent la question à Jésus au sujet d’un mendiant aveugle : « Rabbi, qui a péché, cet homme ou ses parents, pour qu’il soit né aveugle ? » (9.2).

Les disciples ne parlent pas d’injustice, mais de responsabilité. Pour eux, le mal ne s’explique que par le péché, soit celui des parents, soit celui de l’aveugle qui aurait péché dans le sein maternel. Les rabbins faisaient référence à la lutte entre Jacob et Ésaü dans le sein de Rebecca (Gen 25.21-23) pour souligner que le caractère, les rivalités et le mal se manifestent déjà avant la naissance.
Jésus ne s’intéresse pas au passé pour expliquer l’infirmité, mais il regarde vers l’avenir : « Ce n’est pas que lui ou ses parents aient péché ; mais c’est afin que les œuvres de Dieu soient manifestées en lui » (9.3).

Le contexte du récit

Pour comprendre la question des disciples et la réponse de Jésus, il faut tenir compte du contexte. Au lendemain de la fête des Tabernacles, Jésus retourne au temple pour enseigner (8.2). Il dit : « Je suis la lumière du monde ; celui qui me suit ne marchera pas dans les ténèbres, mais il aura la lumière de la vie » (8.12). Face à l’opposition grandissante des Juifs de Jérusalem, Jésus se présente comme le juge qui dénonce le péché. En particulier, il affirme que les Juifs qui l’entourent ne sont pas, pour la plupart, de vrais descendants d’Abraham, puisqu’ils sont animés de désirs meurtriers. Ces hommes veulent le tuer. Ils ont donc pour ancêtre le diable et non pas Abraham (8.44). Ils sont menteurs comme leur père (Satan), alors que Jésus dit la vérité. À la fin du chapitre 8, lorsque Jésus affirme exister de toute éternité (« avant qu’Abraham fût, je suis », 8.58), les Juifs « prirent des pierres pour les jeter contre lui ; mais Jésus se cacha, et il sortit du temple » (8.59). Ironiquement, la lumière du monde doit se cacher ! Mais Jésus ne se cache pas longtemps, puisqu’au sortir du temple, il opère un prodige.

Jésus « voit » un aveugle

De manière surprenante, l’auteur de l’Évangile affirme au début du chapitre 9 que Jésus voit, en passant, un homme aveugle de naissance (9.1). On s’attendrait à ce que l’auteur dise que les disciples voient un aveugle de naissance puisqu’ils posent ensuite leur question, mais pourquoi indiquer que Jésus voit un aveugle ? Le regard de Jésus a dû attirer l’attention des disciples. C’est comme si Jésus cherchait quelqu’un et finit par le trouver. Son regard s’arrête sur la personne recherchée.
Ce mendiant aveugle-né intéresse Jésus, et c’est ce qui pousse les disciples à poser leur question. Jésus vient de parler des Juifs qui ont pour père le diable, et maintenant Jésus regarde un aveugle de naissance. Jésus voudrait-il poursuivre sa leçon sur le péché des hommes et sur le triste lien qui unit les individus à leurs ancêtres pécheurs ?
Jésus continue effectivement à se révéler puisqu’il affirme une seconde fois qu’il est « la lumière du monde » (9.5). Cependant, il ne va pas mettre en exergue le péché des hommes (en tout cas pas dans un premier temps), mais il va manifester sa grâce envers un malheureux. Il choisit un aveugle de naissance, car la guérison d’un tel homme illustre le mieux qu’il est « la lumière du monde » et le souverain créateur.

La salive, la boue et la piscine

Jésus « cracha à terre, et fit de la boue avec sa salive. Puis il appliqua cette boue sur les yeux de l’aveugle, et lui dit : Va, et lave-toi au réservoir de Siloé — nom qui signifie envoyé » (9.6-7a). Jésus utilise sa salive, où on pourrait voir un symbole de sa parole. Il crache sur la poussière de la terre pour faire de la boue qu’il applique ensuite comme une onction sur les yeux de l’aveugle. Jésus imite le Dieu Créateur qui a établi toute chose par sa parole et qui a tiré l’homme « de la poussière de la terre » (Gen 2.7). Jésus vient d’affirmer son éternité (« avant qu’Abraham fût, je suis ») et maintenant il agit comme le Dieu Créateur.
Le premier jour de la création, Dieu avait dit : « Que la lumière soit ! Et la lumière fut » (Gen 1.3), et maintenant, Jésus affirme « pendant que je suis dans le monde, je suis la lumière du monde » (9.5 ). Au commencement, la lumière que Dieu crée est « bonne » et Dieu sépare « la lumière d’avec les ténèbres » (Gen 1.4). À Jérusalem, Jésus donne la lumière à l’aveugle.
Jésus envoie l’aveugle à la piscine de « l’envoyé » (9.7), car il veut enseigner que celui qui l’écoute, lui, l’envoyé de Dieu, trouvera la vue. Cela est vrai sur le plan physique et sur le plan spirituel.

Qui est Jésus ?

Une fois guéri, l’aveugle revient sur ses pas et témoigne de sa guérison. Plusieurs personnes l’interrogent sur la manière dont la guérison s’est réalisée : « Comment tes yeux ont-ils été ouverts ? » (9.10 ; cf. 9.19, 26) La réponse est claire et succincte : « L’homme qu’on appelle Jésus a fait de la boue, a oint mes yeux, et m’a dit : Va au réservoir de Siloé, et lave-toi. J’y suis allé, je me suis lavé, et j’ai pu voir » (9.11). Dès cet instant, les échanges se focalisent sur la personne du guérisseur. « Où est cet homme ? » (9.12). Certains affirment que l’homme en question ne peut pas venir de Dieu, « car il n’observe pas le sabbat » (9.16), ce que d’autres contestent (« Comment un homme pécheur peut-il faire de tels miracles ? » 9.16) Pour l’aveugle, son bienfaiteur est « un prophète » (9.17).
La tension entre les Juifs et l’aveugle augmente d’un cran, quand les Juifs l’interrogent une seconde fois. Les Pharisiens veulent que l’aveugle critique Jésus — ce qu’il refuse de faire. Il les reprend sur leur attitude et conclut en disant : « Nous savons que Dieu n’exauce point les pécheurs ; mais, si quelqu’un l’honore et fait sa volonté, il l’exauce. Jamais, on n’a entendu dire que quelqu’un ait ouvert les yeux d’un aveugle-né. Si cet homme ne venait pas de Dieu, il ne pourrait rien faire » (9.31-33).
Les Juifs, incapables de répondre à l’argumentation de l’homme, ne peuvent que l’insulter et le chasser (9.34). Ainsi, après avoir chassé du temple « la lumière du monde » (Jésus), les Juifs chassent maintenant (de la ville ?) le témoin qui a retrouvé la vue.
Jésus rencontre alors l’aveugle une seconde fois, car il veut que l’homme ne voie pas simplement physiquement, mais aussi spirituellement. Jésus s’identifie comme étant le « Fils de Dieu », une parole aussitôt acceptée avec enthousiasme : « Et il [l’aveugle] dit : Je crois, Seigneur. Et il l’adora » (9.35-38).

Qui est aveugle ?

Le récit se termine sur le thème du début. Les disciples avaient évoqué un lien possible entre la cécité et le péché passé des parents ou de l’aveugle. Jésus souligne le lien entre la cécité spirituelle et le péché présent des protagonistes (9.39-41). Les Juifs ne sont pas seulement les descendants du diable, mais ils sont inexcusables, car ils viennent de rejeter le signe de grâce et de puissance que Jésus leur a donné. « Si vous étiez aveugles, vous n’auriez pas de péché. Mais maintenant vous dites : Nous voyons. C’est pour cela que votre péché subsiste » (9.41). En d’autres mots, si vous n’aviez pas vu mes prodiges, vous ne seriez pas (autant) coupables. Mais les Juifs s’entêtent dans leur incrédulité et restent prisonniers du péché dans lequel ils ont été engendrés.

Poser la bonne question sur le mal

Depuis la chute, le mal et la mort règnent dans le monde. Parfois un lien direct existe entre une maladie et le péché d’un individu (Act 5.1-12 ; 12.21-23 ; 1 Cor 11.28-30), mais ce n’est pas toujours le cas. Souvent les victimes d’un fléau ne sont pas plus coupables que ceux qui en ont échappé (Luc 13.1-5). Les questionnements sur le pourquoi d’un malheur restent souvent sans réponse. Et même quand les réponses existent, elles ne permettent pas de revenir en arrière. Les questions à poser face au malheur sont : comment puis-je m’en sortir ? et surtout qui peut m’aider à m’en sortir ?
Jésus est la réponse à toute notre misère. Il est l’envoyé du Père céleste pour éclairer les hommes et les restaurer physiquement et spirituellement, dans le présent et pour l’éternité. Telle est l’œuvre de Dieu : complète et définitive.

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Dossier : Épidémies et fléaux
 

Arnold Daniel
Daniel Arnold a été, pendant de longues années, professeur à l’Institut biblique Emmaüs. Membre du comité de rédaction de Promesses, il est un conférencier apprécié et l’auteur de nombreux livres, parmi lesquels des commentaires sur des livres bibliques.