Témoignage
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Mon bourreau, mon frère !

Nous sommes le 18 décembre 2002 à Ma Campagne (quartier de Kinshasa, capitale de la R.D. du Congo), prenant le petit déjeuner. Mon téléphone sonne…! C’est une voix familière, celle d’un jeune que j’avais accompagné spirituellement il y a plusieurs années… ! Il me demande où je suis pour me rencontrer. Une dizaine de minutes après, il est à la porte… Nous l’accueillons fraternellement.

Quelques minutes plus tard, une Jeep de militaires de la Garde Spéciale Présidentielle surgit dans la parcelle. Le sous-officier, à la tête de l’équipe, s’informe sur chacun d’entre nous… Deux personnes sont leur cible !

Me voilà enlevé, avec un frère, vers une direction inconnue des nôtres : un cachot secret au Palais Présidentiel dit « de Marbre ». C’est là que nous vivrons notre calvaire ! Durant trois jours, nous serons torturés et subirons un traitement inhumain. Mais, après ces trois jours, le Seigneur nous sortira — miraculeusement et par sa grâce — de la gueule du lion et de ses griffes ! Des cicatrices, des séquelles, des handicaps physiques et psychiques de ces atrocités nous accompagneront jusque dans notre tombe ! C’est là la réalité de l’école de Dieu ! Il nous faut sa grâce pour l’accepter ! Il nous a en effet offert la grâce, non seulement de croire mais aussi de souffrir… Tout ce qu’il fait comme travail en nous et pour nous, quelles que soient les circonstances, convergera toujours vers notre bien et sa gloire !

Je n’aurais pas choisi peut-être
Mon chemin tel que Dieu l’a fait,
Mais j’accepte sans un regret
La sainte volonté du Maître.

Il sait si bien ce qu’il me faut :
Sur son amour je me repose,
Le mystère de toutes choses
Me sera révélé là-haut !

Huit ans après, autour de la même table où j’avais été trahi (par mon propre téléphone !), une nouvelle étonnante, surprenante, m’est annoncée : « Un militaire, sous-officier, gardé à la prison centrale de Kinshasa (Makala) s’est repenti et a reconnu sa culpabilité dans ces événements de décembre 2002 ! »

J’ai éprouvé d’un côté de la joie parce qu’une âme avait été sauvée, mais de l’autre côté, de la perplexité parce que la nouvelle suscitait en moi un combat spirituel, une tentation ! Elle a fait jaillir de ma mémoire des tourments mêlés de sentiments de révolte ! Gloire au Seigneur, la consolation de sa parole et sa joie ont remporté la victoire sur ces bouleversantes réactions négatives ! Je l’ai béni et continue à le faire. Il reste, lui, le Seigneur ! Ses voies pour sauver des âmes et polir les siens sont insondables !

Pour en arriver là, le Seigneur s’est servi des cours bibliques par correspondance. Une équipe du Centre Biblique de Kinshasa se rend assidûment à la prison pour donner ces cours. Et c’est lors d’un entretien personnel à la fin du cours sur l’Évangile selon Luc que l’un de mes anciens bourreaux s’est s’ouvert et a confessé publiquement son forfait devant Dieu et les hommes ! Il a également demandé à un membre de l’équipe du Centre Biblique de me transmettre sa demande de pardon pour ses actes ignobles ! N’est-ce pas là un « gros poisson » (Jean 21.11) gagné au Seigneur ? Il est devenu mon frère, notre frère, en Christ !

Le jeudi 20 mai 2010, l’occasion s’est enfin offerte de le rencontrer dans le but de le réconforter dans sa nouvelle vie avec Christ, de lui assurer mon pardon et de présenter aux autres prisonniers et prisonnières un enseignement… Ils étaient une trentaine du côté des hommes et une vingtaine du côté des femmes.

À la fin de l’enseignement, mon ami a pris la parole, et très humblement a témoigné publiquement devant nous et les autres prisonniers, parmi lesquels des hauts gradés de l’armée :

« Je suis ici en prison depuis 5 ans… Je sais que les faits retenus à ma charge pour mon emprisonnement par les magistrats militaires et le ministère public sont une calomnie, car sincèrement je plaide non coupable. Mais la vraie cause de mon incarcération à Makala est ignorée de ces hommes de loi ! Dieu seul et moi la connaissons !

En effet, il y a de cela huit ans, j’ai été mêlé à une affaire d’enlèvement suivi de tortures infligées à des hommes de Dieu, prêts même à leur « supplice » alors qu’ils étaient innocents ! Pire encore, j’ai pris plaisir à les voir souffrir devant mes yeux ! Il faut faire remarquer que, malheureusement, quelques autres personnes importantes qui étaient impliquées dans cette sale besogne sont mortes !

Nous espérions tous, à l’issue de cette affaire, nous partager les biens auxquels prétendaient deux jeunes antagonistes alors que ces biens (avion, véhicules, parcelles…) étaient des biens communautaires : ceux de la Mission. Nous avions été induits en erreur.

Pour tous ces actes, je reconnais avoir offensé mon Dieu en mettant illégalement la main sur ses serviteurs ! C’est à cause de cela que je suis en prison. Je vous demande pardon ainsi qu’à vos familles ! »

À la fin de son témoignage, je me suis levé et l’ai embrassé ! Ses larmes ont mouillé ma veste, les miennes sa chemise ! Je l’ai assuré du pardon de Dieu et du mien conformément à sa parole (1 Jean 1.8-10 ; Éph 4.32). Nous avons terminé par un moment de prières et d’actions de grâce en le recommandant aux soins et à la grâce de Dieu avec tous les autres prisonniers ainsi que leurs gardiens ! Ensuite, quelques correspondants ont demandé des entretiens individuels pour soumettre leurs cas à la prière ; ce qui a été fait.

La préoccupation générale de ces prisonniers est la suite de leur encadrement spirituel. Ils demandent que le Centre Biblique ne les abandonne pas et continue de les aider à lire la parole de Dieu !

* * *

Priez pour les prisonniers (Héb 13.3) de Makala et ceux des autres prisons du monde qui vivent dans des conditions précaires, très déplorables et pour ceux qui les visitent en leur apportant la parole de Dieu. Car en plus de cette parole de Dieu pour le salut de leurs âmes, ils ont aussi besoin d’un peu de nourriture pour leur survie physique ! On ne peut retenir ses larmes en les voyant dans leur état ! Que le Seigneur suscite encore des personnes pour répondre à leurs besoins !

Semons, comme notre Seigneur, avec larmes, Nous moissonnerons avec chants de joie !

Portons la semence que nous répandons en pleurant, Nous reviendrons avec chants de joie, portant ses gerbes !

(Psaume 126.5-6)

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