Dossier: L'Apocalypse
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Le nouvel univers (Apocalypse 21.1-8)

J’ai lu l’histoire d’une dame âgée qui était sur le point de mourir. Elle était née de nouveau, et avait vécu dans la joie du Seigneur la plus grande partie de sa vie. Mais voilà que la fin approchait, et elle manifestait une grande frayeur. Elle ne voulait pas mourir. Du moins c’est ce qu’elle disait à son pasteur.

Lors d’une visite, ce dernier lui a demandé si elle savait qu’elle allait auprès du Christ, au paradis. Elle lui répondit par l’affirmative et se mit à pleurer… Surpris, le pasteur lui demanda comment elle se représentait le paradis. Elle décrivit une grande salle avec des bancs, où elle devrait chanter toute la journée ! Effectivement, sauf si l’on s’appelle Pavarotti, qui voudrait passer l’éternité ainsi ?

Sans s’en rendre compte, beaucoup de chrétiens ont été influencés par la philosophie platonicienne, où la vie matérielle est inférieure à la vie spirituelle : la matière est encombrante, négative ; la pensée est pure, positive. Plusieurs théologiens chrétiens s’en sont imprégnés, notamment Augustin, puis le catholique Thomas d’Aquin, et ont évoqué le paradis en des termes plutôt éthérés : « Le paradis lui non plus n’est pas un lieu corporel, mais spirituel.1 » Et les descriptions qu’il donne dépeignent un endroit de réflexion philosophique et théologique, où la vie se résume à un échange de nobles pensées.

Les gens réagissent différemment devant la notion de paradis :

– L’investigation : Certains s’appuient sur des livres tels que La vie après la vie (Raymond Moody) pour se faire une idée de ce qui s’y passera. Ces ouvrages sont totalement erronés dans leur interprétation des situations de mort imminente2.

– La confiance : Il suffirait de se dire que ce sera bien, puisque Dieu est bon. Ceux-là sont très prudents sur les textes qui l’annoncent.

– La méfiance : Comme on ne sait pas ce qui se passera, autant vivre pleinement aujourd’hui dans ce monde que l’on connaît.

La Bible nous demande de considérer les trésors du paradis. Dieu nous prépare une cité (Héb 11.16) ; Paul nous rappelle que « notre cité est dans les cieux ; de là nous attendons comme Sauveur le Seigneur Jésus-Christ » (Phil 3.20) et il nous invite à « chercher les choses d’en haut, où le Christ est assis à la droite de Dieu » et à « penser à ce qui est en haut, et non à ce qui est sur la terre » (Col 3.1-2).

Non seulement il nous faut nous imprégner de ce ciel, mais Jésus nous propose de considérer que notre fidélité et notre engagement sont une forme d’investissement dans le monde à venir : « Amassez des trésors dans le ciel, où ni les vers ni la rouille ne détruisent, et où les voleurs ne percent ni ne dérobent. » (Mat 6.20) Aucune de nos possessions terrestres ne subsistera dans le ciel — aucune voiture, aucune maison, etc. Il en sera très différemment de tout sacrifice que nous aurons fait sur terre pour Christ.

Le monde nouveau (21.1)

«Je vis un nouveau ciel et une nouvelle terre ; car le premier ciel et la première terre avaient disparu, et la mer n’était plus. »

Nous sommes là après le millénium, après la déconstruction complète de l’univers actuel, après la condamnation devant le grand trône blanc.

Jean voit un nouveau ciel et une nouvelle terre : c’est donc un nouvel environnement physique. Comment se le représenter ? Peu de passages de l’Écriture en parlent précisément. Y aura-t-il de nouveaux astres dans le ciel ? Il est dit plus loin que la ville n’aura pas besoin de l’éclat du soleil ni du reflet de la lune (21.23). Comment imaginer la nouvelle terre ? Il semble qu’il y aura des montagnes puisqu’il en existe une qui sera « haute et grande » (21.10)

Quand je m’imagine le paradis, je m’imagine donc un monde avec des milliers de paysages différents. Évidemment j’aurai la capacité de jouir de cette création, et cela, pour la gloire de Dieu. Le mot « paradis » veut dire « jardin ». Le paradis, c’est le jardin du début, de Genèse 1 et 2, parfaitement rétabli. D’ailleurs un arbre est mentionné dans ce paradis, l’arbre de vie (22.2), qui nous renvoie à celui de la Genèse. C’est bien l’explosion de la perfection du début que nous trouverons alors.

Cette nouvelle terre n’aura pas de mer. La mer est le symbole d’une force indomptable. Elle fait partie des sept fléaux qui n’existeront plus dans le monde à venir : s’y ajoutent la mort, le deuil, les cris, la douleur (21.4), la malédiction (22.3), et la nuit (21.25). Toutefois la suite du texte mentionne « le fleuve de l’eau de la vie », qui alimente notamment l’arbre de vie (22.1). Est-ce à dire qu’il y a des lacs, des fleuves ?

Le paradis est un monde. Un monde qui s’inspire du premier, qui se manifeste en partie pendant le millénium, et qui dépasse notre imagination dans l’éternité. Mais c’est un monde. Et nous avons raison de nous réjouir du monde présent comme du monde à venir. En appréciant les cadeaux de Dieu, l’homme honore Dieu. Nous avons raison de remercier Dieu pour un bon repas, pour un lever de soleil, pour l’affection d’un chien, etc. Nous avons raison aussi de reconnaître que si la vie nous prive de jouir de certains aspects de la création, par un handicap, par un manque de moyens, par des relations impossibles ou inaccessibles, le moment vient où nous vivrons dans un monde réel, tangible, concret, dans une jouissance et une félicité parfaites.

La capitale (21.2)

« Et je vis descendre du ciel, d’auprès de Dieu, la ville sainte, la nouvelle Jérusalem, prête comme une épouse qui s’est parée pour son époux. »

Lorsque Jean écrit ces lignes, Jérusalem est en ruine depuis 25 ans. C’est une ville que nul ne connaît. Mais une autre Jérusalem existe déjà quelque part : « Mais au contraire vous vous êtes approchés de la montagne de Sion et de la cité du Dieu vivant, la Jérusalem céleste, des myriades d’anges ; de la réunion et de l’assemblée des premiers–nés inscrits dans les cieux ; de Dieu, juge de tous ; des esprits des justes parvenus à la perfection. » (Héb 12.22-23) C’est comme si elle était en cours d’aménagement. Jésus a dit avant de partir : « Je vais vous préparer une place. Donc, si je m’en vais et vous prépare une place, je reviendrai et je vous prendrai avec moi, afin que là où je suis, vous y soyez aussi. » (Jean 14.2-3)

C’est une ville sainte, en ce que nul être pécheur n’y entrera : « Il n’y entrera rien de souillé, ni personne qui se livre à l’abomination et au mensonge, mais ceux-là seuls qui sont inscrits dans le livre de vie de l’Agneau. » (21.27)

Elle est « prête », littéralement, « arrangée » — un terme qui nous a donné le mot « cosmétique » — comme une épouse qui s’est parée pour son époux. L’image de la ville rejoint celle de l’épouse, l’ensemble de ceux et de celles que le Seigneur a sauvés. Ce sera la consommation éternelle entre Christ et son Église. C’est le moment que Paul prophétise en 1 Corinthiens 15.28 : « Et lorsque toutes choses seront soumises [au Christ], alors le Fils lui-même sera soumis à celui qui lui a soumis toutes choses, afin que Dieu soit tout en tous. »

Le Seigneur (21.3)

« J’entendis du trône une forte voix qui disait : Voici le tabernacle de Dieu avec les hommes ! Il habitera avec eux, ils seront son peuple, et Dieu lui–même sera avec eux. »

Le meilleur du nouvel univers est que Dieu sera avec nous — ou plutôt qu’enfin nous serons avec lui ! La voix vient du trône, comme pour indiquer l’autorité absolue de ce qui est annoncé. Avec cette déclaration, Dieu n’est plus transcendant, c’est-à-dire un Dieu distant, éloigné de sa création, visible seulement de derrière (Ex 33.23), ou dans la nuée et la colonne de feu (Ex 13.21-22), ou dans l’humble incarnation de Christ (Phil 2.5-8 ; Col 1.16).

En fait, c’est l’univers qui devient l’habitation de Dieu. Apocalypse 21.22 affirme d’ailleurs : « Je n’y vis pas de temple, car le Seigneur Dieu Tout-Puissant est son temple, ainsi que l’Agneau. » Il n’y a plus de distance à franchir : Dieu est là, son temple est lui-même, et ce nouvel univers est sa tente ! C’est un retour à l’intention de Dieu en Genèse d’être le Dieu des hommes et de demeurer au milieu d’eux. Le paradis accomplit l’inverse de Genèse 3.21-24 : nous avons accès à l’arbre de vie et à la présence de Dieu.

Je ne sais pas m’imaginer la proximité immédiate de Dieu : plus par la prière, pas au travers de notre imagination, mais en direct ! Nous suffira-t-il de tourner la tête pour voir le Christ dans sa gloire ?

Pour autant, Dieu reste infini, inconnaissable dans son essence. Allons-nous découvrir chaque jour un peu plus de sa personne ? En discutant avec Jésus, allons-nous grandir en amour pour lui chaque jour davantage ? En regardant son trône et sa personne, serons-nous saisis d’une admiration croissante ?

Dieu est souverainement satisfait et rassasié de bonheur en lui-même (1 Tim 1.11) et il veut nous introduire dans ce bonheur. Jésus a prié : « Père, je veux que là où je suis, ceux que tu m’as donnés soient aussi avec moi, afin qu’ils contemplent ma gloire, celle que tu m’as donnée, parce que tu m’as aimé avant la fondation du monde. » (Jean 17.24) Nous ne cesserons de nous rassasier du spectacle de sa gloire, complétée par la parfaite humilité et l’immense amour manifesté à la croix. Et cette gloire aura un effet immédiat : 1 Jean 3:2 « Lorsqu’il sera manifesté, nous serons semblables à lui, parce que nous le verrons tel qu’il est. » (1 Jean 3.2) L’état d’esprit du Seigneur sera une joie en nous : « L’Éternel, ton Dieu, est au milieu de toi un héros qui sauve ; il fera de toi sa plus grande joie ; il gardera le silence dans son amour pour toi ; il aura pour toi une triomphante allégresse. » (Soph 3.17) Vous vous représentez la scène ?

La consolation (21.4)

« Il essuiera toute larme de leurs yeux, la mort ne sera plus, et il n’y aura plus ni deuil, ni cri, ni douleur, car les premières choses ont disparu. »

L’expérience du passé, tellement empreinte de larmes et de douleurs, sera terminée. Et c’est Dieu lui-même qui passe le baume. Le geste est tendre et reflète sa bienveillance particulière. Ainsi s’achèvera ce que Jésus a commencé avec sa première venue, et particulièrement avec son calvaire : « Ce sont nos souffrances qu’il a portées, c’est de nos douleurs qu’il s’est chargé… » (És 53.4)

Il n’y aura aucun deuil, puisque que la première et la seconde mort ne feront plus partie des risques ou des réalités (cf. 1 Cor 15.54-57).

Nous serons à jamais dans un corps glorifié qui ne subira aucune altération, qui ne vieillira pas, qui ne connaîtra pas la douleur. Cela conduit tout naturellement à plusieurs questions :

– Quel âge aurons-nous, si nous ne vieillissons pas ? Ou à quoi ressemblera le nourrisson qui meurt, et qui se retrouve au paradis ? La Bible ne donne pas la réponse !

– Qu’implique l’absence de douleur sur notre activité ? Pas de marteau qui manque le clou ? Pas de randonnée dans des gorges et des précipices ? Là encore, nous n’avons que notre imagination. Une imagination qui sait que le Christ ressuscité passait au travers des murs sans passer par les portes, et que son rapport à la matière actuelle était très différent. Une imagination qui sait aussi que nos pensées glorifiées seront plus sages que maintenant, et peut-être parfaitement incapables d’un geste malencontreux ?

L’invitation (21.5-7)

« Celui qui était assis sur le trône dit : Voici, je fais toutes choses nouvelles. Et il dit : Écris, car ces paroles sont certaines et vraies. Il me dit : C’est fait ! Je suis l’Alpha et l’Oméga, le commencement et la fin. A celui qui a soif, je donnerai de la source de l’eau de la vie, gratuitement. Tel sera l’héritage du vainqueur ; je serai son Dieu, et il sera mon fils. »

Du trône futur, Dieu nous lance encore cette invitation. Il dit à Jean d’écrire, avec l’assurance que c’est le Saint Esprit qui signe ces propos. Ces paroles sont vraies, comme toutes les paroles de la Bible (2 Tim 3.16-17 ; 2 Pi 1.20-21 ; 1 Thes 2.13).

Dieu se présente dans son éternité, source et destinée, alpha et oméga3, commencement et fin.

L’invitation que Dieu nous lance du trône est positive, riche en bienveillance. Le thème de la soif est celui qui est le plus souvent souligné pour décrire celui qui cherche Dieu, qui cherche son salut (És 55.1-2 ; Jean 7.37) Voilà l’essence du christianisme : être rassasié d’une eau éternelle. Son prix ? Elle est gratuite ! On plutôt, elle a été achetée par quelqu’un d’autre, en sorte qu’on en bénéficie par pure grâce (Éph 2.8-9 ; Tite 3.5). Dieu nous invite à participer à son banquet, à sa fête, gratuitement. La seule nécessité est se repentir dans la foi. Seul Christ ouvre l’accès à cette promesse (Act 4.12). Mais cette gratuité du salut s’accompagne d’un avertissement solennel.

L’avertissement (21.8)

« Mais pour les lâches, les incrédules, les abominables, les meurtriers, les débauchés, les magiciens, les idolâtres et tous les menteurs, leur part sera dans l’étang brûlant de feu et de soufre : cela, c’est la seconde mort. »

Il n’y aura aucun pécheur dans le paradis — du moins aucun pécheur qui n’ait reçu la grâce du pardon du Christ. Et comment savoir si l’on a reçu la grâce du pardon ? Par la réalité de notre marche avec Jésus. Le salut n’est pas seulement le fait de « recevoir Christ » mais de « marcher en lui ». Un changement est nécessaire (voir 1 Cor 6.9-11 où Paul évoque une vie caractérisée par le péché des Corinthiens au passé). Un homme qui dit avoir accepté Christ et qui demeure dans ses péchés sans gêne, ni repentance, ni croissance, n’a pas vraiment l’assurance du salut de Christ. Dieu évoque cette réalité en dressant cette liste non exhaustive :

– les lâches, ou les peureux : ceux qui, par timidité ou peur de la persécution, ont rejeté Christ ;

– les incrédules : ceux qui n’acceptent pas la révélation de Dieu et demeurent incroyants ;

– les abominables : le mot a une connotation de souillure ;

– les meurtriers : ceux qui tuent — physiquement, par la langue… ;

– les débauchés : essentiellement en lien avec l’immoralité sexuelle sous toutes ses formes ;

– les magiciens : ceux qui s’adonnent à la magie, l’astrologie, la sorcellerie, les guérisseurs, etc. ;

– les idolâtres : ceux qui participent aux cultes païens ou à leurs festivités, ceux qui ont centré leur vie sur quelqu’un ou quelque chose d’autre que Dieu ;

– les menteurs : ceux qui trompent ou mentent…

Il y a deux erreurs à éviter par rapport à cette liste :

– Celle consistant à l’ignorer en disant : « Je suis chrétien, je pèche et ce n’est pas grave. » Ce n’est pas que nous devions être parfaits pour entrer au ciel. Mais la réalité de notre salut se mesure à notre marche. Cette marche reflète-t-elle le salut du Christ ? Non pas que la marche doive être parfaite, mais elle doit être caractérisée par une pratique de la repentance. Si ta vie est marquée par l’immoralité, l’incrédulité, le mensonge, sans repentance… Dieu t’invite à sérieusement reconsidérer ton assurance du salut.

– Celle consistant à croire que le salut s’obtient en respectant cette liste. Un indice nous montre que ce n’est pas possible : « tous les menteurs » iront en enfer. Je n’ai jamais rencontré quiconque qui n’ait jamais exprimé un mensonge, en tant qu’enfant ou en tant qu’adulte. Christ est mort pour des pécheurs ! C’est par la foi que nous sommes sauvés. Cette liste est là pour nous éveiller à la réalité du péché et à la solennité de la mort. Tout au long de ces deux derniers chapitres de la Bible, on retrouve ce mélange de félicité et de mise en garde. Attention, le lac de feu, l’enfer, l’étang de soufre, la seconde mort, ne sont pas à prendre à la légère.

 

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  1. Thomas d’Aquin, « Somme théologique », vol 1, question 102.
  2. Florent Varak, « La réincarnation », livre disponible en ligne sur « Un poisson dans le net » à http : //www.unpoissondansle.net/reincarn.
  3. Première et dernière lettre de l’alphabet grec. Le titre est déjà présent en 1.8 et répété en 22.13 par Jésus en personne, soulignant, s’il était nécessaire de l’affirmer, que Jésus est véritablement Dieu.
Dossier : L'Apocalypse
 
Varak Florent
Florent Varak est pasteur, auteur de nombreux livres. Il est aussi conférencier, et professeur d’homilétique à l’Institut biblique de Genève. Il est le directeur international du développement des Églises au sein de la mission Encompass liée aux églises Charis France. Il est marié avec Lori et ont trois enfants adultes ainsi que quatre petits-enfants.