La hesed : un mot riche de sens
Un terme très fréquent dans l’A.T., hesed en hébreu, est traduit par : bonté, bienveillance, grâce, miséricorde, etc. En voici une définition tirée du New international dictionary of Old Testament theology and exegesis [Nouveau dictionnaire international de théologie et d’exégèse de l’AT] dirigé par Willem VanGemeren (6e éd., USA : Zondervan, 1997), dans une traduction partielle et adaptée (cf. http://zondervan.com).
Le concept de fidélité, d’amour loyal, ou plus généralement de bonté, transcrite par l’hébreu hesed porte en soi un aspect relationnel très marqué, qui doit se retrouver dans toute traduction digne de ce nom. Le terme apparaît 246 fois dans l’A.T. dont plus de la moitié se trouvent dans les Psaumes.
Il est couramment utilisé pour définir les attitudes et les comportements des êtres humains entre eux, mais la plupart du temps (trois fois plus), il décrit la bonne disposition et les actions bienfaisantes de Dieu envers les croyants, Israël son peuple et l’humanité en général.
1. La hesed de Dieu contre-balance la colère de Dieu
Le texte biblique suggère parfois que la réaction de Dieu au péché de l’homme suit des directions opposées. Par moment, la hesed de Dieu tempère ou limite sa colère. Dieu dit : « Dans un instant de colère, je t’avais un moment dérobé ma face, mais avec un amour éternel (hesed) j’aurai compassion de toi. » (És 54.8) Michée interroge Dieu : « Quel Dieu est semblable à toi, qui pardonnes l’iniquité, qui oublies les péchés du reste de ton héritage ? Il ne garde pas sa colère à toujours, car il prend plaisir à la miséricorde (hesed). » (Mi 7.18) Quand l’auteur des Lamentations recherche la main bienveillante de Dieu dans le malheur, il la trouve dans l’assurance que l’amour de Dieu se prolongera au-delà de sa colère : « Car le Seigneur ne rejette pas à toujours. Mais, lorsqu’il afflige, il a compassion selon sa grande miséricorde (hesed). » (Lam 3.31-32) L’idée forte qui en ressort est la suivante : bien que la colère et l’amour soient deux réactions de Dieu tout aussi légitimes, l’amour survit à la colère. C’est là un point important de la théologie biblique. La colère de Dieu est la bonne attitude, l’attitude légitime, parfois même nécessaire, selon certains passages. Mais en dernier lieu, Dieu ne reste pas sur ce sentiment1. Cet honneur est réservé à son amour infaillible (hesed).
Pour une meilleure appréciation de la notion biblique de hesed, notez la réitération de versets qui mettent en contraste la durabilité de la colère de Dieu et la durabilité de sa hesed (cf. Ex 20.5-6 ; 34.6-7 ; Deut 5.9-10 ; 7.9-10). Une fois de plus, la colère divine et la hesed coulent de la même source et sont pareillement légitimées au travers de la description faite par les différents auteurs. Mais la hesed acquiert la prééminence parmi les deux en vertu de la supériorité de son abondance et sa permanence.
2. La hesed de Dieu triomphe de la décadence d’Israël
En Jérémie 31.3, Dieu fait comprendre que la décadence du moment ne peut pas empêcher une restauration future d’Israël, car « Je t’aime d’un amour éternel ; c’est pourquoi je te conserve ma bonté (hesed). »
Dans les Psaumes, à la fois Dieu et les adorateurs humains décrivent la hesed de Dieu comme éternelle. Cette affirmation est développée sous différentes formes (par ex. Ps 89.2 [3], 28 [29], 33 [34] ; 103.17 ; 117.2 ; 138.8).
3. La hesed de Dieu motive la prière de l’homme
La hesed divine est ce qui permet ou motive l’homme à prier ou à s’approcher de Dieu. Les pécheurs recherchent le pardon sur la base de la hesed de Dieu. Après que les douze espions eurent présenté leur rapport, Moïse intercéda en faveur du peuple car leur message n’avait pas été reçu avec enthousiasme. Il cite le Seigneur lui-même : « Maintenant, que la puissance du Seigneur se montre dans sa grandeur, comme tu l’as déclaré en disant : l’Éternel est lent à la colère et riche en bonté (hesed), il pardonne l’iniquité et la rébellion, mais il ne tient point le coupable pour innocent, […] selon la grandeur de ta miséricorde (hesed). » (Nom 14.17-19)
Certaines demandes de pardon renforcent l’idée que Dieu peut choisir de se souvenir soit du péché, soit de sa hesed, mais nullement des deux en même temps (Ps 25.7 ; 51.1 [3]).
4. La hesed de Dieu guide son peuple
La hesed divine occupe un rôle de premier plan dans la vie intérieure et communautaire du peuple de Dieu. D’une part, elle les guide vers Dieu (Ex 15.13) et caractérise la pédagogie divine (Ps 118.124 ; 143.8), et, d’autre part, elle est l’objet de leur espérance dans les moments de difficulté (Ps 13.5 [6] ; 17.7 ; 26.1-3 ; 33.18, 22 ; 36.7 [8] ; 147.11).
5. La hesed de Dieu fonde son royaume éternel
La hesed divine caractérise le règne de Dieu et établit son roi. L’auteur du psaume 89.14 [15] déclare au sujet du Seigneur : « La justice et l’équité sont la base de ton trône. La bonté (hesed) et la fidélité sont devant ta face. » L’A.T. a beaucoup à dire au sujet du lien entre la hesed et la royauté.
Un accent particulier est mis sur la hesed que Dieu attribue à David. Contrairement à la tentative ratée de la dynastie précédente, le nouveau roi se voit promettre une maison et un royaume éternels, car fondés sur la promesse que Dieu ne dépouillera jamais David de sa hesed (2 Sam 7.15-16). Plus tard, David chante l’accomplissement de cette promesse, non seulement envers lui mais aussi envers ses successeurs (2 Sam 22.51). Salomon va plus loin (1 Rois 3.6; 2 Chr 1.8). Puis leurs descendants insistent sur la nécessité du renouvellement de la promesse, et lui font quand même confiance alors même qu’aucun descendant de David n’en bénéficie concrètement (2 Chr 6.42; Ps 89.49 [50]; És 16.5; 55.3).
Même en l’absence de ce thème davidique, la hesed fait office de règle établie (cf. Pr 20.28). La référence à David est cependant quasi présente (cf. Ps 18.50 [51]; 21.7 [8]; 89.24 [25], etc.). On a beaucoup commenté les deux textes qui parlent des « grâces accordées à David » ou des « faveurs envers David » (2 Chr 6.42; És 55.3). Même si le texte original permet de penser à la ferveur de David envers Dieu, il est plus probable qu’il s’agisse de l’amour de Dieu envers David (Williamson). L’assurance qui se dégage d’Ésaïe 55. 3 signifierait donc ceci : non seulement l’engagement de Dieu envers David ne s’est pas effondré malgré la chute de la dynastie, mais il s’applique désormais à un cercle de bénéficiaires potentiels bien plus large, à ceux qui répondent à l’invitation lancée dans les versets précédents.
1 NDLR:Cela n’empêche pas Dieu de juger le coupable lorseque celui-ci ne s’en remet pas à sa clémence (voit point 3).