Dossier: Élection et prédestination
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Dieu et le peuple qu’il a choisi -Romains 9

« Et l’Éternel lui dit : Deux nations sont dans ton ventre, et deux peuples se sépareront au sortir de tes entrailles ; un de ces peuples sera plus fort que l’autre, et le plus grand sera assujetti au plus petit. » (Gen 25.23)
La question qui se pose face à cette prophétie est celle-ci : Est-ce que Dieu annonçait simplement selon sa préconnaissance ce qui allait arriver ? Ou bien est-ce que cette prophétie était une promesse, un engagement de Dieu envers Jacob ? Les réponses à ces questions, c’est Paul qui va les donner dans l’épitre aux Romains.

1. À qui Paul s’adresse-t-il ?

Paul est identifié comme l’auteur de l’épître aux Romains (1.1 ; 16.22). Dans cette lettre, il s’adresse aux croyants de Rome (1.7). L’histoire et les preuves internes à la lettre indiquent que l’église de Rome était formée à la fois de croyants des nations et de Juifs (voir 2.17). Ainsi, les chapitres 2 à 4 comportent une argumentation pour montrer aux Juifs qu’ils sont aussi coupables que les païens et ont autant besoin de la grâce de Dieu manifestée en Jésus-Christ.

2. Paul aime les Juifs (v. 1-5)

Paul exprime d’abord son amour pour les Juifs et la tristesse qui est la sienne en pensant à ceux qui ont rejeté Jésus alors qu’ils sont pourtant ses frères, ses parents selon la chair et sont le peuple élu de Dieu pour recevoir l’adoption, les alliances, la loi et diverses promesses.
Plus loin, il précise même que l’une de ses motivations pour le ministère parmi les païens, c’est de rendre les Juifs jaloux afin de les amener à Christ (11.13-14). Il n’y a aucun doute : Paul aime les Juifs !

3. Qui sont les vrais croyants ? (v. 6-9)

Tous les descendants d’Abraham ne sont pas Israël. Dieu n’a jamais promis que tous les Juifs seraient les enfants de Dieu. Ainsi, plusieurs Juifs ont rejeté le Messie. Parmi les descendants d’Abraham, tous n’ont pas été choisis pour faire partie du peuple de Dieu. Isaac a été choisi et non Ismaël. Ce n’est donc pas notre sang qui va faire de nous des enfants de Dieu. D’ailleurs Paul l’avait déjà exprimé un peu plus tôt lorsqu’il avait dit : « Mais le Juif, c’est celui qui l’est intérieurement ; et la circoncision, c’est celle du cœur, selon l’esprit et non selon la lettre » (2.29).

4. De qui la prophétie parle-t-elle ? (v. 10-13)

Le verset 12 est une citation de Genèse 25.23 : le texte de Genèse compare deux peuples ou nations dont l’une surpassera l’autre. Le verset 13, lui, est une citation de Malachie 1.2 et le contexte parle également du sort réservé par Dieu aux descendants d’Ésaü. Ainsi, cette prophétie mentionnée dans les versets 12 et 13 au sujet de Jacob et Ésaü concerne les nations qui seront issues d’eux. Louis Segond traduit le mot grec « meizon » par « aîné ». En réalité il aurait fallu traduire par « le plus grand » (Darby), car il s’agit bien des peuples d’Ésaü et de Jacob comme cela est traduit en Genèse 25.
Au-delà des personnages de Jacob et d’Ésaü, il est question ici des nations qui sont issues d’eux. Ainsi, nous pouvons mieux comprendre qu’il ne s’agit pas du choix de Dieu pour le salut de Jacob et Ésaü, mais de son choix pour celui qui allait devenir le père de la nation d’Israël et qui introduira le Sauveur du monde.
Paul utilise cet exemple pour montrer que, déjà par le passé, Dieu n’avait choisi qu’une partie de la descendance d’Abraham pour en faire la nation d’Israël. Et de la même manière qu’il le fait aujourd’hui pour le salut, il a fait en sorte que son choix pour Jacob ne dépende pas des œuvres mais uniquement de sa grâce, afin que ni Jacob ni ses descendants ne puissent s’en glorifier. Ce n’est pas à nous de dire à Dieu qui il doit choisir. Ça n’a jamais été un droit que de faire partie du peuple de Dieu, mais au contraire, cela a toujours été une grâce selon le bon plaisir de sa volonté. Et il en est de même pour le salut aujourd’hui, ce n’est pas un droit que nous pouvons obtenir par nos œuvres, mais une grâce de Dieu pour celui qui croit.
Ce n’est pas parce qu’Ésaü n’a pas été choisi pour être le père de la nation d’Israël qu’il n’avait pas droit au salut. En effet dans l’Ancien Testament nous voyons plusieurs exemples de personnes ne faisant pas partie du peuple d’Israël mais que Dieu a tout de même greffées à la nation en raison de leur foi1.
Enfin, il faut bien interpréter le sens de « haïr »2 . « Le mot haïr perd une partie de son aspérité si nous nous souvenons qu’il constituait un antonyme de « aimer » et qu’il servait de comparatif. Dans Genèse 29.31, le texte dit littéralement que « L’Éternel vit que Léa était haïe », or, au verset précédent, il est dit simplement que « Jacob aimait Rachel plus que Léa ». Quand les Hébreux comparent une affection plus forte à une autre plus faible, ils appellent la première « amour » et la deuxième « haine ». Nous retrouvons cette particularité de la langue hébraïque dans Luc 14.26. Il est clair que dans ce passage Jésus ne veut pas nous demander de haïr ceux que la Parole de Dieu nous demande ailleurs d’aimer ou d’honorer .3 »

5. C’est Dieu qui choisit à qui il fait miséricorde (v. 14-18)

Plus tôt, Paul nous a dit que la Parole de Dieu n’est pas restée sans effet parce que tous les descendants d’Israël ne sont pas Israël, et que c’est Dieu seul qui peut décider qui a le droit d’obtenir le salut, de la même manière qu’il a choisi par le passé Jacob pour être père de la nation d’Israël. Dieu est libre de fixer les conditions du salut. Il a choisi de limiter les conditions à la foi pour que nous soyons toujours sauvés par grâce et non par nos œuvres, parce que la foi n’est pas une œuvre. En Romains 4.16, nous voyons bien que Paul dissocie la foi des œuvres : « C’est pourquoi les héritiers le sont par la foi, pour que ce soit par grâce, afin que la promesse soit assurée à toute la postérité, non seulement à celle qui est sous la loi, mais aussi à celle qui a la foi d’Abraham, notre père à tous ». La foi n’est pas une œuvre parce qu’elle ne donne pas gloire à l’homme : avoir la foi ne donne aucun mérite. Avoir la foi c’est placer sa confiance en Dieu que nous savons capable d’accomplir ce qu’il nous promet4 . La gloire revient donc à Dieu, nullement à nous ! Car nous, nous savons que nous sommes sauvés par grâce.
Dieu est en train de dire : j’ai le droit de choisir qui sera sauvé, j’ai le droit d’inclure des non-Juifs, et j’ai le droit de rejeter des Juifs. De la même manière j’ai le droit de choisir le critère que je veux pour offrir mon salut. Et le critère que j’ai choisi c’est la foi et : « Ainsi donc, cela ne dépend ni de celui qui veut, ni de celui qui court, mais de Dieu qui fait miséricorde » (9.16). Est-il juste que Dieu rejette des Juifs zélés pour la loi de Moïse et les traditions du peuple d’Israël et qu’il accepte ces gentils qui ont simplement cru au Christ après des générations d’idolâtrie ? Ne doit-il pas quelque chose à la nation juive pour tout son dur labeur ? Paul répond à cette question au verset 15 : « Je ferai miséricorde à qui je fais miséricorde et j’aurai compassion de qui j’ai compassion ».
Si Dieu peut choisir de faire miséricorde à qui il veut, il se donne aussi le droit d’endurcir qui il veut ! Mais cela ne veut pas dire qu’il n’y a pas de critères. Pour la miséricorde Dieu avait choisi la foi comme critère. Ainsi, Dieu aussi n’endurcit pas qui il veut au hasard : « Comme ils ne se sont pas souciés de connaître Dieu, Dieu les a livrés à leur sens réprouvé, pour commettre des choses indignes » (1.28). L’endurcissement est donc donné à ceux qui ont volontairement rejeté la connaissance de la vérité. D’ailleurs dans le récit de l’Exode, lors des cinq premières plaies, c’est le Pharaon lui-même qui a endurci son cœur avant que Dieu intervienne pour le livrer à ses sens réprouvés et endurcir lui-même son cœur.

6. La responsabilité des vases (v. 19-23)

Paul anticipe la contestation de certains qui pourraient dire : « Une fois que Dieu a endurci le cœur du Pharaon, pourquoi le blâme-t-il encore ? Car qui résiste à sa volonté ? » Paul répond : « Qui es-tu pour contester le jugement de Dieu ? Pour remettre en question ce qu’il veut faire ? Est-ce à toi de dire à Dieu comment il doit agir ? Dieu n’a-t-il pas le droit d’agir comme il veut avec sa création ? N’a-t-il pas le droit de punir ceux qui s’entêtent à faire le mal et à résister à Dieu ? »
Puis Paul utilise l’image du potier. Il fait référence au texte de Jérémie 18.6. Au verset 4, nous lisons : « Si le vase qu’il façonnait était raté, ce qui arrive parfois avec l’argile entre les mains du potier, il en refaisait un autre, comme il le jugeait bon » (BFC).
Dans ce verset, qu’est-ce qui ne réussit pas ? Est-ce le potier ? Où est-ce le vase ? L’argile ? Si vous remarquez bien, Jérémie ne dit pas : « le potier ne réussit pas son vase… ». Ici la faute est rejetée sur l’argile, sur le vase ! Pas sur Dieu ! Autrement dit : Dieu fait en fonction de nous. Le contexte de Jérémie 18, notamment les versets 7 à 11, exprime clairement que la nation d’Israël avait une décision à prendre. La désobéissance entraîne la discipline, alors que l’obéissance entraîne la bénédiction. Dieu souhaite faire de nous des beaux vases, mais parfois c’est nous qui ne le voulons pas. Alors, il fait de nous des vases de colère, destinés au jugement. Et quoi qu’il en soit, que nous soyons de l’argile rebelle ou docile, Dieu va nous utiliser pour sa gloire, comme il a utilisé le pharaon pour sa gloire (9.17). Dieu supporte les vases avec une grande patience… Comme avec le Pharaon à qui il a laissé beaucoup d’occasions de se soumettre avant d’endurcir lui-même son cœur. Avait-il eu l’occasion de changer de voie ? Bien sûr ! Au choix de Dieu s’ajoute donc la responsabilité de l’homme.
Parce que Dieu est juste, il doit exprimer sa colère envers ceux qui ont manifesté péché et rébellion face à lui. À noter que le verbe grec traduit par « formés » pour la perdition est à la voie moyenne. Le sujet du verbe indique ainsi que le sujet est partie prenante de l’action. La colère de Dieu se déversera donc sur les vases de colère, en conséquence de leur choix confirmé de se placer devant Dieu dans une telle position5. Le texte de 2 Timothée 2.20-21 indique la responsabilité de l’homme quant à son choix « Si donc quelqu’un se conserve pur, en s’abstenant de ces choses, il sera un vase d’honneur, sanctifié, utile à son maître, propre à toute bonne œuvre ».

7. La provenance des appelés (v. 24-29)

Dans cette section, Paul indique que les élus peuvent venir à la fois d’Israël et des nations. Quoiqu’ils ne viennent pas tous d’Israël, certains des nations, les élus seront appelés fils du Dieu vivant. D’un point de vue quantitatif, si les descendants de Jacob sont aussi nombreux que le sable de la mer, seule une petite quantité sera sauvée par la foi.8.

Conclusion (v. 30-33)

Les croyants issus des nations qui n’étaient pas partenaires de l’alliance que Dieu avait faite avec son peuple, ont obtenu la justice par leur foi en Jésus-Christ.
Bien entendu, toutes les nations ne se sont pas tournées vers Jésus-Christ pour recevoir par la foi le salut en Jésus-Christ.
Les Juifs qui cherchaient leur salut en accomplissant la loi ont été incapables de l’accomplir. Bien entendu, d’autres Juifs ont été sauvés à cause de leur foi, le chapitre 11 des Hébreux en donne toute une liste.
Alors, qu’est-ce qui a fait la différence? La foi. Les uns ont cherché leur salut par leurs propres œuvres, les autres l’ont reçu simplement par la foi, car ils ont été rendus justes par pure grâce. Que l’on soit Juif ou issu des nations, la foi fait toute la différence.
Aujourd’hui quiconque refuse d’accepter la justice de Dieu par la foi en Jésus-Christ sera un vase voué à la destruction. Mais « celui qui croit en lui (Jésus-Christ) ne sera pas confus ».

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  1. Rahab prostituée cananéenne (Héb 11.31) et Ruth la Moabite toutes deux greffées à la généalogie de Jésus (Mat 1.5)
  2. La Bible en français courant traduit « j’ai repoussé Ésaü », la Bible du Semeur « j’ai écarté Ésaü ».
  3. Alfred Kuen, Encyclopédie des difficultés bibliques
  4. Voir Rom 4.20-22
  5. Voir Election and predestination pp. 272-273 de Peter A. Kerr
Dossier : Élection et prédestination
 

Bauer Luc
Originaire de Mulhouse, Luc Bauer est actuellement impliqué comme ancien dans le Groupe Biblique de la Rive Sud à Longueil (Québec). Marié à Laura, père d’un petit garçon, il est titulaire d’un diplôme de l’Institut de Théologie pour la francophonie à Montréal.