Dossier: Le défi de l'Islam
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La trinité selon le Coran

À la suite du peuple juif, les chrétiens ont toujours confessé leur foi en un seul et unique Dieu. Mais ils ont ajouté que ce Dieu unique se révélait en trois personnes distinctes : Père, Fils et Saint-Esprit ! Ils ont désigné par le mot « trinité » cette vérité de foi, qu’ils n’ont cessé de méditer pour en avoir une intelligence précise. Saint Augustin, qui a vécu au Ve siècle et qui est considéré comme le représentant de la foi orthodoxe, écrivait : « Tous les interprètes de nos livres sacrés, tant de l’Ancien Testament que du Nouveau que j’ai lus, et qui ont écrit sur la Trinité, le Dieu unique et véritable, se sont accordés à prouver par l’enseignement des Écritures que le Père, le Fils et l’Esprit-Saint sont un en unité de nature, ou de substance, et parfaitement égaux entre eux. Ainsi ce ne sont pas trois dieux, mais un seul et même Dieu. »1

L’accusation de trithéisme

Mais l’on est surpris, lorsqu’on lit le Coran, rédigé au VIIe siècle, de découvrir une présentation de la trinité bien différente de ce qu’affirmaient les chrétiens. Il paraît alors évident que l’auteur du Coran n’avait qu’une idée très confuse de ce que les chrétiens croyaient. S’adressant à eux, Mahomet les interpelle : « Croyez donc en Allah et en ses messagers. Et ne dites pas : « Trois ». Cessez ! Ce sera meilleur pour vous. Allah n’est qu’un dieu unique » (Coran 4.171)2 Par l’emploi de ce « trois », l’auteur du Coran montre qu’il a compris de manière grossière la trinité comme un trithéisme. Voilà pourquoi, il finit le verset en appuyant sur l’unicité de Dieu. Cette erreur lui est venue du fait que les chrétiens parlent de trois personnes. Jamais aucun groupe de chrétiens n’a affirmé croire en trois dieux, mais tous ont confessé un seul Dieu en trois personnes.

Le même reproche se trouve dans la sourate La Table : « Ce sont certes des mécréants, ceux qui disent : « En vérité, Allah est le troisième de trois.» Alors qu’il n’y a de dieu qu’un Dieu unique ! » (Coran 5.73)L’auteur accuse donc les chrétiens de faire d’Allah un dieu parmi trois. Et toute reconnaissance d’un égal à Allah est une incrédulité et un acte impardonnable comme l’affirme ce verset : « Certes Allah ne pardonne pas qu’on lui donne quelque associé. À part cela, il pardonne à qui il veut. Mais quiconque donne à Allah quelque associé commet un énorme péché » (Coran 4.48). La trinité est interprétée alors comme un ajout à Allah de deux autres prétendus dieux.

La confusion sur la composition de la trinité

Si l’on interroge maintenant le Coran sur l’identité des trois dieux qui composent, selon les chrétiens, la trinité, voici sa réponse : Allah, Marie, Jésus ! L’auteur leur reproche en effet maintes fois de faire de Jésus et Marie deux divinités égales à Allah. Dans la sourate La Table, Dieu prend Jésus à témoin pour condamner cette grave erreur attribuée aux chrétiens : « Dieu dit : « Ô Jésus, fils de Marie ! Est-ce toi qui as dit aux hommes : Prenez, moi et ma mère, pour deux divinités en-dessous de Dieu ? » Jésus dit : « Gloire à toi ! Il ne m’appartient pas de déclarer ce que je n’ai pas le droit de dire. » (Coran 5.116) Jamais le Coran ne dit que les chrétiens croient en la trinité composée du Père, Fils et Saint-Esprit !

Cette confusion subsiste jusqu’à aujourd’hui, transmise par des commentateurs musulmans parmi les plus grands. Ignorants totalement de la foi chrétienne, et dédaignant ce que les chrétiens disent à propos de la trinité, ils ont constamment recours au Coran pour présenter cette doctrine chrétienne. À titre d’exemple, Ibn Kathir, l’un des plus grands commentateurs, qui a vécu au XIVe siècle, commente ainsi ce verset : « Il s’agit des chrétiens en général selon les dires d’un bon nombre des ulémas3, puis ils ont précisé que ceci concerne ceux qui déclarent qu’il existe trois hypostases: celle du Père, celle du Fils et celle du verbe […] Ce sont les Melchites, les Jacobins et les Nestoriens qui adoptent cette croyance. »  Ces quelques lignes, contenant nombre d’erreurs tant historiques que théologiques, révèlent une totale ignorance de l’enseignement des chrétiens.

L’erreur sur la divinité de Jésus

Le Coran va plus loin encore. En effet, entendant les chrétiens parler de Jésus comme le Fils de Dieu, l‘auteur en a déduit que les chrétiens prétendent qu’Allah a conçu avec Marie un enfant. Il n’a jamais réussi à percevoir le sens tout spirituel de cette expression. Le Coran avance plusieurs arguments pour réfuter la divinité de Jésus.

  1. Marie n’est qu’une créature

Pour lui, les chrétiens croient qu’Allah a eu des relations physiques avec Marie, engendrant d’elle Jésus. Et le Coran de corriger ce qu’il croit être la foi des chrétiens : « Le Messie, fils de Marie, n’était qu’un Messager. Des messagers sont passés avant lui. Et sa mère était une véridique. Et tous deux consommaient de la nourriture. Vois comme nous leur expliquons les preuves et puis vois comme ils se détournent » (Coran 5.75). L’auteur du Coran pensait que Marie était considérée comme une divinité par les chrétiens. C’est pour cette raison qu’il affirme qu’elle « consommait de la nourriture », car l’absorption des aliments implique l’humanité et donc est l’argument ultime pour rejeter la divinité de Marie.

  1. Dieu ne peut avoir de relation charnelle

Selon le Coran, Dieu ne peut pas avoir d’enfant, car son honneur serait atteint, puisque cet enfant ne peut être que le fruit d’une relation charnelle : « Il est trop glorieux pour avoir un enfant » (Coran 4.171). Et surtout, Dieu ne peut avoir d’enfant parce qu’il n’a pas de compagne : « Comment aurait-il [Allah] un enfant, quand il n’a pas de compagne ? C’est lui qui a tout créé, et il est omniscient. » (Coran 6.101) Ailleurs, il affirme : « Si nous avions voulu prendre une distraction, nous l’aurions prise de nous-mêmes, si vraiment nous avions voulu le faire » (Coran 21.17). Que signifie cette « distraction » ou ce « divertissement » ? Pour certains, ce mot signifie soit « la compagne », selon la langue du Yémen, soit des houris4  aux grands yeux. Pour d’autres interprètes, c’est l’enfant. Allah proteste contre les chrétiens qui lui attribuent une épouse et un enfant tout terrestres, en déclarant que s’il avait voulu un enfant ou une femme, ce n’est pas parmi les humains qu’il les aurait choisis, mais bien parmi les créatures célestes qui sont en sa présence. Si Allah avait voulu un enfant, il ne l’aurait pas conçu avec Marie, mais avec une femme de son monde. « Si Allah avait voulu s’attribuer un enfant, il aurait certes choisi ce qu’Il eût voulu parmi ce qu’Il crée » (Coran 39.4).

Les chrétiens, eux, affirment que Jésus est le Fils de Dieu éternellement préexistant dans le sein du Père ; il a pris sur lui la nature humaine, devenant pleinement un être humain. Mais le Coran les accuse plutôt de déclarer que Dieu a pris un enfant ou s’est donné un enfant en approchant Marie. « Les Juifs disent : “‘Uzayr est fils d’Allah” et les chrétiens disent : ”Le Christ est fils d’Allah”. Telle est leur parole provenant de leurs bouches. Ils imitent les dires des mécréants avant eux. Qu’Allah les anéantisse ! » (Coran 9.30) « Ils ont dit : “Allah s’est donné un fils !” Gloire à Lui ! Non ! mais c’est à lui qu’appartient ce qui est dans les cieux et la terre et c’est à lui que tous obéissent » (Coran 2.116). La violence de l’auteur vient de sa compréhension de l’expression chrétienne : « Jésus est le Fils de Dieu » dans un sens purement sexuel.

  1. Jésus est une créature d’Allah

Dans la sourate Myriam, qui raconte plusieurs épisodes concernant Marie et Jésus, la conclusion dénonce encore cette « erreur » prêtée aux chrétiens : « Tel est Issa [Jésus], fils de Marie : parole de vérité, dont ils doutent. Il ne convient pas à Allah de s’attribuer un fils. Gloire et Pureté à lui ! Quand il a décidé d’une chose, Il dit seulement : “Sois” et elle est » (Coran 19.35). Jésus ne peut être le Fils de Dieu car il est une création d’Allah. Il suffirait de lire les trois Cappadociens, qui ont vécu trois siècles avant la rédaction du Coran, pour trouver l’affirmation fondamentale formulée contre Arius : il n’y eut jamais un temps où Dieu n’était pas Père. La filiation n’a pas eu lieu au moment de la naissance de Jésus ; elle est en dehors du temps et de l’espace.

  1. Dieu n’a pas besoin de fils

Dieu ne peut avoir de fils donc pour la simple raison qu’il n’a pas de compagne, mais aussi parce qu’il est riche et donc au-dessus de ce besoin. « Ils disent : “Allah s’est donné un enfant.” Gloire à lui ! Il est le Riche par excellence. À lui appartient tout ce qui est aux cieux et sur la terre. » (Coran 10.68) L’enfant est considéré comme la plus grande des richesses. Mais Allah n’en a pas besoin, car il possède tout.

  1. Dieu n’est pas Jésus

Entendant les chrétiens affirmer que le Messie est Fils de Dieu et Dieu, l’auteur a conclu que, pour les chrétiens, Allah est le Messie Jésus. « Certes sont mécréants ceux qui disent : “Allah, c’est le Messie, fils de Marie.” » (Coran 5.17) Un peu plus loin, dans la même sourate, il ajoute : « Ce sont, certes, des mécréants ceux qui disent : “En vérité, Allah c’est le Messie, fils de Marie.” Alors que le Messie a dit : “Ô enfants d’Israël, adorez Allah, mon Seigneur et votre Seigneur.” » (Coran 5.72) Le Coran comprend donc que les chrétiens affirment que Dieu dans sa nature est un corps humain !

L’auteur ne voit pas la différence entre dire : « Allah c’est le Messie », et : « le Messie est Dieu ». La première affirmation réduit Dieu à l’humanité de Jésus et fait de la nature de Dieu une nature matérielle ; Dieu aurait alors réellement des mains, des jambes, des yeux… Or, les chrétiens affirment que Dieu est Esprit ! Par contre déclarer que « le Messie (Christ) est Dieu », c’est confesser l’incarnation : le Fils éternel de l’éternel Dieu s’est uni à la nature humaine en devenant homme parmi les hommes. Dieu ne s’est pas transformé en humain, mais il a pris sur lui la nature humaine tout en restant pleinement Dieu. Là où le Coran ne voit qu’un homme, les chrétiens voient celui en qui demeure la plénitude de la divinité corporellement (Col 2.9).

* * *

Le Coran reproche donc aux chrétiens plusieurs erreurs : trithéisme, trinité composée d’Allah, Marie et Jésus, adoption ou procréation d’un fils par relation sexuelle avec Marie…Il vient pour corriger les prétendues erreurs de ses prédécesseurs. Or le Coran imagine discuter avec les chrétiens, mais il leur attribue ou les accuse de croire des choses qu’ils n’ont jamais crues ou confessées… Bien sûr, les chrétiens ne se reconnaissent absolument pas dans ces accusations, pour la simple raison qu’ils n’ont jamais professé ce que l’auteur leur reproche5 !

D’ailleurs, comme pour prévenir ces accusations, des chrétiens avaient déjà écrit par avance leur défense dans de nombreux livres, avant même l’apparition de l’islam. Citons à titre d’exemple ce beau texte poétique de Grégoire de Nazianze, le théologien de la trinité, écrit vers 390 :

« Il y a un seul Dieu, sans principe, sans cause ; il n’est circonscrit par aucune chose qui a été, ou qui sera ; embrassant les siècles et infini ; de l’excellent et majestueux Fils Unique Père majestueux, n’ayant subi en engendrant le Fils, rien de ce qui se rapporte à la chair, puisqu’il est Esprit. Il y a un seul Dieu autre, mais non pas autre par la divinité, le Verbe de Dieu : de son Père il est le sceau vivant, le seul Fils de Celui qui est sans principe, de l’Unique l’Absolument-Unique, égal au Père…

Il y a un seul Esprit, Dieu issu du Dieu bon. Éloignez-vous, vous tous que l’Esprit n’a pas marqués de son sceau pour révéler sa divinité, mais dont le fond du cœur est méchant ou dont la langue est impure. »6

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  1. Saint Augustin, De la Trinité, Livre I, ch. IV, 7, texte établi par Raulx, L. Guérin & Cie, 1868.
  2. Les citations du Coran sont issues de la traduction réalisée sous la responsabilité du Roi Fahd, le Noble Coran et la traduction en langue française de ses sens, Complexe Roi Fahd pour la traduction du Noble Coran, sans date.
  3. Un uléma est un théologien de l’islam.
  4. Créatures féminines vivant au paradis, selon le Coran.
  5. Rappelons que de nombreuses hérésies se sont répandues dans les premiers siècles sur la doctrine de la trinité. Elles ont été condamnées par les conciles des IVe et Ve siècles. Mais l’auteur du Coran a pu être induit en erreur et attribuer aux chrétiens des vues sur la trinité et sur Jésus qui sont précisément celles que les chrétiens ont combattues et dénoncées.
  6. Grégoire de Nazianze, PoemataArcana, I, I, v. 25-37 (traduction personnelle). J’ai choisi un texte poétique comme défi au Coran qui se veut un beau poème !
Dossier : Le défi de l'Islam
 

Attar Jamel
Jamel Attar est pasteur dans l’église baptiste de Caen et professeur de lettres classiques. D’origine marocaine, il raconte dans son livre témoignage, "Je croyais en Issa, j’ai rencontré Jésus", comment il est passé de l’islam à une rencontre personnelle avec Jésus-Christ.