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L’erreur chrétienne islamophobe

Sujet complexe et sensible, l’islamophobie signifie « l’hostilité envers l’islam, les musulmans » (Larousse), et renvoie vers « une peur, ou une vision altérée par des préjugés, de l’islam, des musulmans ».

Préambule

La prise de position qui suit ne conteste pas qu’il existe un problème de société, de politique, de culture et de religion, en relation avec l’islam. Les actes de violence, de terrorisme — qu’ils s’exercent à l’extérieur ou à l’intérieur de la communauté musulmane — sont tous condamnables, ainsi que toute forme d’antisémitisme. Le but de cet article est d’attirer l’attention sur une dérive dangereuse, constatée parmi les chrétiens, et qui peut nous entraîner — en toute bonne foi — dans un militantisme pseudo-spirituel aux relents nauséabonds.

Introduction

L’idée d’une menace de l’islam a été semée il y a moins de dix ans dans les médias, ce phénomène a été observé et détaillé dans un certain nombre d’ouvrages de sociologues. Il ne fait aucun doute que la montée de l’islam pose un certain nombre de questions mais les chrétiens devraient être porteurs d’une réponse spirituelle à ce sujet, en se gardant de toute forme d’islamophobie.

D’où vient l’islamophobie moderne ?

C’est un outil de propagande qui distille le dosage nécessaire à la manipulation de l’inconscient collectif : une mesure de vérité, une mesure de mensonge, une mesure de peur. C’est le principe de la séduction.

Lorsqu’on présente des objections pertinentes à son argumentaire, l’islamophobe oppose invariablement la mesure de vérité qu’il contient, mêlée à certaines exagérations. Des chiffres, des statistiques auxquelles on fait dire un peu ce qu’on veut, des réalités aussi, mais qui sont incomplètes. On montre ce qu’il faut, et on cache le reste. L’islamophobe conteste presque systématiquement les versions officielles, qui ne reflètent jamais, selon lui, la réalité de la situation. Et toute personne remettant en cause sa vision est bien sûr identifiée comme non objective, manipulée, voire manipulante. L’islamophobe « achète » tout ce qui corrobore sa thèse, et toutes les données anxiogènes que les médias véhiculent à ce propos.

Comment le chrétien peut-il garder son équilibre ?

Il faut dépasser la lecture émotionnelle et superficielle de la question, où le bruit devient une info, et où la peur acquiert le statut de réalité.  Il est nécessaire — indispensable — d’effectuer un minimum de recherches et de contrôle de l’information.

Que disent les Écritures ? Que dit l’eschatologie ? Les perspectives que semblent dessiner les circonstances actuelles peuvent-elles s’accorder avec la vision biblique ? Le conseil de Dieu doit être notre source, et la révélation de l’Esprit notre nuée. Alors peuvent s’ouvrir des horizons prophétiques réels, et la réalité peut apparaître.

Pour répondre à la question posée en titre de paragraphe, le chrétien est appelé à acheter de Dieu « un collyre pour oindre ses yeux », afin qu’il puisse voir. Ceux qui se contentent de s’alimenter à des sources islamophobes reçoivent le collyre du monde, celui qui est vendu par le prince de ce monde. L’entrée dans la vision de Dieu ne se fait pas toute seule, et elle n’est pas sans prix. Il faut donc prendre conscience qu’il faut abandonner le ministère prophétique du perroquet, qui ne fait que répéter sans comprendre, qui diffuse et propage dans le corps de Christ des toxines spirituelles dangereuses.

Quels sont les vrais défis du christianisme ?

L’islam est-il le défi du christianisme du XXIe siècle ? Est-ce scripturairement plausible ? Pouvons-nous fonder bibliquement et prophétiquement une telle assertion ?

La vraie question n’est-elle pas plutôt que l’islam est un défi pour nos sociétés occidentales post-modernes ? C’est-à-dire pour ce qu’il est convenu d’appeler aujourd’hui « la culture chrétienne » à savoir : les lambeaux du christianisme véritable ? La question qui se pose n’est-elle pas simplement celle de l’avenir de sa religion face à la montée de celle du voisin ? Les sociétés christianisées sont en recul, mais cela n’a rien à voir avec l’islam : nous sommes entrés dans le temps où « les hommes ont l’apparence de la piété, tout en ayant renié ce qui en faisait la force » (2 Tim 3.5). C’est la description d’une apostasie de société, qui accompagne celle du corps des croyants, de l’Église.

Le chrétien islamophobe argumente : Mais l’islam n’est-il pas dangereux ? N’a-t-il pas pour projet de conquérir le monde ?

Et toi, n’espères-tu pas que ta religion s’imposera dans le monde ? Et même que le monde s’en portera mieux ? Comme le musulman, tu penses que ta religion amènera la paix…

Les musulmans ne respectent pas vraiment les enseignements de leur livre saint ? De même bon nombre de chrétiens. Les musulmans réfléchissent à des stratégies d’islamisation de masse ? Comme les chrétiens. Les musulmans aspirent à établir une société musulmane ? Les chrétiens y travaillent depuis bien plus longtemps. Les musulmans comptent dans leurs rangs des hommes violents qui sont prêts à tuer pour la cause de leur religion ? Oui, c’est vrai … et les chrétiens ne sont pas en reste, malheureusement. Leur histoire est plus ancienne, c’est toute la différence. Mais il y a du sang, beaucoup de sang, sur les mains du christianisme, il ne faudrait pas l’oublier, avant de se (re)prendre pour les croisés de Dieu.

Une autre vision du monde

En adhérant aujourd’hui aux thèses qui remettent à l’ordre du jour une mentalité de « croisés de l’Occident » (en opposant les blocs religieux), les chrétiens, piégés par une considération émotionnelle du sujet, deviennent complices d’un dispositif dans lequel la haine occupe une place centrale. C’est un aveuglement. Pourquoi ?

– Parce que tout ce qui nous conduit à nourrir une vision de haine, fut-ce à l’égard de nos ennemis, est dans l’esprit de l’antichrist. De même, tout ce qui nous pousse à maudire l’autre trahit son origine impure. Car lorsque le chrétien qualifie la religion de son voisin de « nazislamisme », et traite le musulman de « peste brune », il l’insulte, il le maudit. Jésus enseigne : « Bénissez ! ne maudissez pas » (Rom 12.14 ; Mat 5.44).

– Parce que si l’islam connaît incontestablement une progression dans nos sociétés, c’est peut-être parce que Dieu a quelque chose à voir avec ce phénomène : « … si tu n’obéis point à la voix de l’Éternel ton Dieu, … il arrivera que toutes ces malédictions viendront sur toi, et t’atteindront … L’étranger qui est au milieu de toi, montera au-dessus de toi bien haut, et tu descendras bien bas » (Deut 28.15,37,43).

La véritable question chrétienne

La véritable question chrétienne n’est pas de chercher à identifier les menaces qui entourent « le camp des saints », mais encore et toujours … d’offrir nos corps (et nos pensées) en sacrifice vivant, car nous ne nous appartenons pas, puisque nous avons été rachetés (Rom 12.1-2 ; 1 Cor 6.19).

Aujourd’hui, toutes les « sentinelles » qui pensent faire œuvre utile en nous annonçant la catastrophe du siècle, la menace ultime, sont aussi toxiques que celles qui sont revenues de Canaan en faisant fondre le cœur du peuple, et en détruisant la foi en Dieu (Deut 1.28). Parce que l’enjeu tourne toujours autour de la foi, vise toujours la foi : « Nous sommes comme des sauterelles, ils sont comme des géants », le problème n’était pas ce peuple de géants, mais ce peuple de nains de la foi. Tel est le message de l’islamophobe, comme un poisson dans son bocal : il voit le monde au travers d’une loupe grossissante.

Le problème du christianisme ne vient pas de l’extérieur, mais de l’intérieur. En effet, si le peuple de Dieu qui est sorti d’Égypte a péri dans le désert (la génération des hommes de guerre), ce n’est ni à cause des circonstances, ni à cause de leurs ennemis, mais c’est à cause de leur incrédulité face aux défis que leur lançait la Parole de Dieu.

De même, sachons nous souvenir que ce qui a mis un terme à la pratique du judaïsme traditionnel, et ce qui a détruit le temple, ce ne sont pas les Romains, mais ce sont les Juifs eux-mêmes. La Parole de Dieu du Deutéronome (ch. 28 et 29) les a rattrapés inexorablement. Et quand bien même un croyant averti de cette époque serait parvenu à comprendre, au moyen de la prophétie qui avait été donnée à Daniel, que Rome était une des Bêtes, en discernant sa date d’émergence et ses points faibles, cela n’aurait rien changé à l’issue. Car il n’y avait aucun appel à combattre contre la vague romaine, mais plutôt contre la vague de rébellion intérieure, contre le refus de reconnaître et d’honorer la souveraineté de Dieu. Pour nous aujourd’hui, nous devons entendre ce même message, afin d’accorder à Christ les droits qu’Il s’est acquis par le sang de la croix. Et ce message, cet appel de Dieu, parcourt les écrits prophétiques de presque toutes les époques.

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Prékel Jérôme
Fondateur en 1991 de la revue d’édification gratuite « le Sarment », puis du site du même nom depuis 2005. Auteur de brochures thématiques (Musique chrétienne, Théorie du Genre, Illuminatis, Islamophobie, Dominionisme). Il enseigne dans une église évangélique à Annecy, et dirige l’ONG chrétienne Morija, qui travaille en Afrique sub-saharienne.